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ladytelephagy
28 juin 2011

Générosité

Après trois épisodes de Falling Skies, je suis réticente à poster au sujet de la série. Ce démarrage me laisse circonspecte (et apparemment pas que moi, si l'on en croit les audiences !) et je ne suis toujours pas certaine de savoir qu'en penser à ce stade. J'ai le sentiment à la fois qu'une sorte d'instinct me pousse à regarder cette série juste parce que je voudrais croire, vu ses thèmes, qu'elle finira par me plaire, et en même temps j'ai, ponctuellement, l'impression qu'elle possède un peu de potentiel.
Mais, comme dans tout post écrit après avoir visionné plusieurs épisodes, je vais probablement devoir donner quelques spoilers à ceux qui ne s'y sont pas encore mis en essayant de démêler tout ça.

KeepOnFalling
Le problème c'est que le potentiel, ce n'est pas assez, quand on a passé le cap de 3 épisodes, et plus encore en ce qui concerne la SF, l'anticipation, et toute cette sorte de choses. C'était le problème de Caprica : beaucoup de potentiel dévoilé d'un coup, mais il n'était pas développé. Ici, à un degré bien moindre, on a le même genre de cas de figure : Falling Skies pose des éléments intéressants.

Déjà, difficile de ne pas apprécier le fait que la série démarre alors que l'invasion a déjà eu lieu, au contraire des deux versions de V ; on est plus proches du cas Alien Nation, pour rester dans les séries, ou de District 9 si on explore du côté des films (et quel film !). C'est un pari plus risqué qu'il n'y parait car, d'une part, ça veut dire que le gros de l'action et du suspense est déjà derrière nous, ce qui pour une série comptant sur l'adrénaline est quand même assez couillu, et d'autre part, ça implique une complexification des enjeux qui pourrait perdre le spectateur, que ce soit par impatience ou parce que les allusions à demi-mot peuvent parfois donner l'impression de se faire ballader. Dans le cas de Falling Skies, ce n'est même pas comme si ce facteur avait une incidence sur la mythologie, puisque celle-ci repose essentiellement sur les intentions des Skitters (c'est le nom de nos délicats invités) et pas vraiment sur la façon dont ils ont débarqué sur notre planète (ils ne se sont pas infiltrés, ils n'ont pas essayé de faire copain-copain, etc.), donc la série aurait pu choisir de nous montrer ce genre de choses, quitte à opérer un fast forward ensuite, mais non. Donc je trouve ça relativement courageux, surtout que ça a été raconté par des dessins d'enfants, finalement assez abstraits, donc chapeau, il fallait oser le faire. Ca semble légèrement cliché mais dans le fond, ce n'était quand même pas la solution de facilité.

On est donc directement branchés sur la survie, et j'avoue que c'est quand même ce côté post-apocalyptique qui me séduit le plus (comme il aurait pu me séduire si The Walking Dead avait proposé moins de dents et plus de scénarios). C'est toujours quelque chose de captivant que de voir comment une société s'organise quand les organes qui garantissaient son fonctionnement ont cessé de huiler les rouages de la machine, et c'est pas pour rien que j'écris moi-même sur le sujet, c'est le genre de sujet qui exerce depuis toujours une grande fascination sur moi.
Mais c'est aussi de là que provient la première des déceptions. Car quand on a vu les premiers épisodes de Battlestar Galactica gérer l'écrasement de l'humanité (brillante idée du décompte des survivants, parfaitement gérée, angoisse palpable que la civilisation soit réduite à néant, etc.), il est difficile de ne pas faire de comparaisons. La population est dispersée, forcément, et donc l'enjeu ne peut être porté comme dans Battlestar Galactica, et je ne m'attendais pas à un clone de toute façon, mais j'estimais qu'il n'était pas exagéré d'espérer ressentir le désespoir des survivants. Jusqu'à présent je ne l'ai pas ressenti une fois, et je trouve ça grave.
Car si les fictions post-apocalyptiques me fascinent, c'est précisément parce qu'elle explorent le désespoir d'une humanité vacillante mais qui doit trouver la force de subsister, et si possible la tête haute, sans se replier dans la bestialité. Ici, on a une proportion de survivants qui donne à peu près ça : 15% combattants armés, 85% pseudo-zombies.

La vague de désespoir tant attendue pourrait bien venir d'un élément peu traité dans les deux premiers épisodes, et vaguement développé dans le 3e opus (mais de façon artificielle). Pourquoi les Skitters ont-ils réduit les enfants en esclavage ? Et, plus précisément, pourquoi ne pas en avoir fait autant avec les adultes ? On se doute que la technologie mise en place pour le faire n'est pas anodine, or c'est elle qui est explorée, ainsi que ses usages, dans le 3e épisode, là où de toute évidence on voudrait bien que les protagonistes se posent les bonnes questions. Evidemment, on peut imaginer que, dans un état de stress post-traumatique, et alors qu'ils sont préoccupés par des questions triviales comme, oh, trois fois rien, manger et dormir, et puis ne pas mourir si possible, les survivants ne soient pas exactement dans une situation où ils se demandent "ah tiens, mais comment se fait-ce ?" et cherchent plutôt à récupérer leurs enfants.
Mais c'est quand même une idée absolument fabuleuse ! En prenant les enfants en otage (plus ou moins explicitement selon les épisodes), Falling Skies s'attaque à la notion-même de survie à long terme de l'humanité, et dans ce cas on est dans le voisinnage de l'ambiance de Children of Men (autre traumatique merveille, d'ailleurs), porteuse de nombreux éléments dramatiques pertinents, si bien exploités. S'attaquer aux enfants des hommes, c'est certainement ce que l'envahisseur pouvait faire de pire ; c'est bien vu, il faut continuer. Falling Skies tient ici ses plus prometteuses pièces de puzzle.

Intéressante aussi, la petite nana, Maggie je crois (j'ai pas encore bien intégré tous les noms), qui s'est faite violer par le gang de Pope. Plutôt que de simplement mettre en place des éléments de discordance à l'intérieur de l'équipe de survivants (qu'on a pu voir dans Lost, en tous cas que j'ai vus dans le peu d'épisodes regardés) reposant sur les habituelles rivalités d'influence, qui va prendre les décisions ou pas notamment (ici, la question est réglée par l'importance de l'armée dans la lutte pour la survie, et l'absence pour le moment d'un leader "civil" à l'intérieur du groupe), on a ici des questions plus réalistes sur ce qui peut réellement se passer lorsque certaines garanties sociales (la peur du gendarme) tombent. On aurait vu des émeutes et des pillages si on avait vu l'invasion alien, on voit ici d'autres sortes de crimes. C'est plutôt bien joué aussi, et encore fois, en amatrice un peu perverse de déchéance humaine à des fins de dramatisation, j'ai trouvé ça bien vu et intéressant.

FreedomFighter
Le problème, c'est à peu près tout le reste.
Axes prévisibles (qui en voyant Tom et son copain Mike partir bras dessus bras dessous récupérer UN gamin, et un seul, alors que tous les deux ont un gosse qui manque à l'appel, n'a pas vu venir la suite de l'épisode, y compris sa pâle excuse de cliffhanger ?), dialogues à mourir d'ennui, pontifications interminables autour de ce qu'il faut faire, ne pas faire, ne plus faire, mais qui reste lettre morte, scènes trop sucrées pour être autorisées aux diabétiques sur le mignon enfant qui fait du skate, le mignon enfant qui dort dans une chambre d'enfant, le mignon enfant qui fait un bisou à son papa qui va aller dézinguer du Skitter... Oh, hé, ça va bien non ? Vous faites aucun effort, ou bien ?

Le personnage de Tom, incarné par le toujours aussi parfait Noah Wyle (un peu trop au vu du reste du cast, mais, eh, c'est le seul à avoir son nom sur l'affiche pour une bonne raison, hein ?), est le stéréotype du gars qu'on a placé là pour être un héros drapé dans son immaculée excellence, il est bon père, bon combattant, homme éduqué...

Et surtout, il souffre du syndrome du background artificiel exposé dés le pilote dont je vous avais dit qu'on recauserait. Parce que comme par hasard, le type, il n'est pas juste attaché à, vous savez, vivre. Non, il faut que forcément il ait trois fils, l'un dont il souhaite préserver l'innocence aussi longtemps que possible, l'un qui risque sa vie à ses côtés à chaque fois qu'il y aura un peu de baston (cf. 3e épisode), et un dernier, capturé par les Skitters.
Vous allez voir que si tout d'un coup, il se déclare un autre méchant, genre une 2e race extraterrestre (comme Invasion Planète Terre l'avait fait en ajoutant les Kimeras et les Jaridians aux Taelons, mettons), il va se trouver un 4e fils caché pour aussi donner une raison à Tom d'aller mettre son nez par là.
C'est vraiment un procédé épuisant, et la preuve du peu de cas que la série fait de ses personnages. Leur construction est superficielle et cause un tort immense à la série. Aucune série ne devrait d'ailleurs nous infliger ce genre de personnage ; c'était le tort de ce bon vieux Joe dans Flash Forward, c'est le problème de la plupart des séries où l'enquêteur a une raison de mener une quelconque enquête, c'est, en fait, une plaie d'ampleur épidémique : pour qu'un héros fasse quelque chose, il faut forcément qu'il ait un background qui l'y force. Le mec, jamais il va faire quelque chose parce que c'est la chose à faire, il le fait parce que les scénaristes ne lui donnent pas le choix. C'est vraiment navrant de voir qu'une série avec une mythologie pour le moment si peu développée ne soit pas capable de mieux. Mais d'un autre côté, si Tom avait simplement voulu libérer des enfants parce que ce sont des enfants-esclaves, et pas parce que son fils est parmi eux, la moitié de ses échanges avec son fils aîné seraient tombés à l'eau et les scénaristes n'ont visiblement pas envie d'utiliser ce gosse pour autre chose que la personnification des élans auxquels Tom résiste, bravement, parce que ce type est fondamentalement raisonnable.

On ne croit pas un seul instant que Tom soit jamais en danger, d'ailleurs, parce qu'il est tellement évident qu'il est le héros qu'on ne s'en fait pas pour lui. Le danger est forcément désincarné face à un homme capable d'abattre tout seul un Skitter et de le ramener à la base à mains nues ! Et du coup, ce qu'il fait, son invincibilité apprente, fait qu'on ne peut pas s'identifier, et qu'on ne peut s'impliquer émotionnellement. Lui-même semble ne connaitre que deux états : la concentration sérieuse, et la fatigue silencieuse. C'est un bon petit soldat, notre professeur. Et du coup, on est tellement sûr qu'il va s'en tirer qu'on se fiche un peu de ses états d'âme : c'est un cercle vicieux, et d'autant plus dangereux que, dans une série constellée de scènes d'action, on a besoin de vraie dramatisation de temps à autres, sous peine de perdre l'équilibre.

Il en ressort une impression de retenue. Comme si, malgré toute les bonnes idées, l'équipe derrière Falling Skies avait plein d'ambition, mais avait décidé de rendre la série grand public, se perdant dans mille poncifs pour essayer de masquer le fait qu'à terme, elle a quelque chose à offrir. Les éléments qui font les bons côtés d'une fiction post-apocalyptique se trouvent donc étouffés par l'envie de ne pas trop donner, pas tout de suite, de commencer par offrir des bases classiques, du tangible, en semant quelques ingrédients qui seront développés une fois le spectateur happé par l'action. Mais ça ne fonctionne pas comme ça, parce que cette avarice est palpable ; ça ne met pas du tout dans de bonnes dispositions, au contraire, de voir que le plus intéressant est zappé et que ne reste que le tronc commun de la plupart des fictions du genre. Pour le moment, Falling Skies est pingre : elle a les moyens, mais comme l'oncle Picsou, elle refuse de casquer.

C'est pourtant une question de générosité. Donnez-nous toujours plus, et nous pardonnerons toujours plus.

Et pour ceux qui manquent cruellement de culture : la fiche Falling Skies de SeriesLive.

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27 juin 2011

Le meilleur ennemi de l'homme

Il est naturel d'hésiter à regarder un remake ; c'est un dilemme qui survient souvent quand on a apprécié la série d'origine. Mais plus encore, quand on ne l'a pas aimée, l'hésitation est compréhensible.

Après quelques jours de profonde introspection téléphagique ("mais si je ne regarde pas un pilote qui passe à ma portée, ai-je encore le droit de me plaindre de tous les pilotes que je ne vois jamais ?!", oui je manquais de sommeil et j'étais assomée par la chaleur, passons), j'ai fini par me résoudre à regarder le pilote de Wilfred, la série américaine, après avoir ressassé mes souvenirs de Wilfred, la série australienne. Vous en vous souvenez peut-être, c'était avant que je ne poste quotidiennement ce weekend (vous inquiétez pas, moi aussi, ça m'a fait un choc).

WilfredUS-Languerapeuse

Le truc, c'est qu'à part leur pitch de départ (un homme voit le chien d'une jolie fille comme un égal avec qui il peut interagir comme s'il était humain), ces deux séries ne pourraient pas être plus différentes l'une de l'autre.

Sur l'aspect théorique, je n'ai pas encore décidé si c'était une bonne ou une mauvaise chose. Qu'un remake décide de s'écarter autant de l'original est rarement bien accepté, mais dans ce cas précis, c'est peut-être une bonne idée vu la bizarrerie un peu imperméable de la version australienne. L'appropriation n'est pourtant pas tellement culturelle, comme on peut s'y attendre pour Homeland/Hatufim et comme on l'a vu pour les deux versions de Shameless. C'est plus une question de ton, de personnages... et au final, de propos lui-même.

Là où le pilote du Wilfred australien jouait sur une ambiance d'angoisse, limite de thriller, ce qui était souligné par les nombreux fondus au noir, les effets sonores oppressants et les décors claustro (très peu d'extérieurs, et dans ce cas toujours très encadré par des palissades et des obstacles)... la version américaine, forcément californienne et ensoleillée, est pleine de grands espaces, de ciel dégagé, de couleurs, de verdure, et joue sur une bande son typique de dramédie.

Et puis, on s'aperçoit que l'histoire même a changé : le clébard australien débarquait alors que le héros se tapait déjà la fille, créant une atmosphère de jalousie progressivement explicitée, avec un véritable triangle ; le chien-chien américain se focalise sur notre héros alors que celui-ci n'est que le voisin de sa maîtresse, avec qui les interactions sont (pour le moment ?) limitées, recadrant la série sur le personnage masculin et ses névroses plutôt que sur le danger que représente le meilleur ennemi de l'homme.

Bien-sûr, dans les deux cas, le personnage de Wilfred n'est ni tout noir ni tout blanc, et on le doit à la prestation maîtrisée de Jason Gann qui (mais s'attendrait-on à autre chose de quelqu'un qui interprète cet étrange animal depuis des années ?) est absolument parfait, à la fois destabilisant et chaleureux, affectueux et hargneux, bref, parfait en chien. Mais l'emploi est radicalement différent car dans la version américaine, Ryan pense s'en faire un ami, et trouve en lui la force de s'affirmer, tandis qu'Adam sent tout de suite que Wilfred n'est pas son allié et sympathise avec lui, mais avec prudence.

WilfredUS-Oreillesdanslevent
C'est un parti pris intéressant, d'ailleurs, que Wilfred soit à ce point pour Ryan le moteur d'un changement personnel, comme si Wilfred était une sorte d'ange d'épaule, alors que pour Adam, la relation se fait plutôt d'égal à égal. C'est ce qui, au final, change tout. Il y a certes une part de personnalité là-dedans : Adam est un type normal, Ryan est complètement angoissé, et du coup la relation à Wilfred est différente ; mais c'est aussi toute la symbolique de Wilfred qui en est changée.
Au lieu de personnifier l'angoisse d'une relation nouvelle (dans la version australienne, et puisque Adam se tape déjà la maîtresse de Wilfred, celui-ci évoque les ex de Sarah dés le pilote, et notamment celui qui est mort dans un accident), ici le toutou est surtout là pour personnifier l'angoisse. C'est moins universel, mais le propos est bon tout de même, parce que rondement mené. Simplement, des personnages plongés dans les affres de la dépression, on en a déjà vu pas mal, et il faudra plus qu'un chien qui parle avec un accent australien (j'ai adoré le petit sursaut de Ryan après le mini-suspense, c'était facile, mais c'était bien joué) pour innover vraiment sur le terrain ; cependant je crois la série capable d'en faire quelque chose de bien, à terme.

En outre, dans le pilote, l'insistance sur les substances ingérées par les deux protagonistes aboutit à des conclusions différentes. Dans la version australienne, c'est l'une des rares choses sur lesquelles les deux personnages s'entendent immédiatement. Dans la version américaine, le doute planne pendant un long moment quant à savoir si l'ingestion de médicaments est la cause d'hallucination ; tenter d'expliquer, même temporairement et pour se contredire ensuite, l'existence-même de Wilfred, est d'ailleurs un peu dommageable a priori, même si dans le faits, le résultat rend plutôt bien en fin de compte.

Enfin, l'ajout de personnages secondaires (la soeur du héros, le voisin motard) me laisse pour le moment circonspecte. Il est vrai que je n'ai vu que le pilote de la série originale, et que j'ignore si ces personnages sont intégrés ensuite, de près ou de loin, à l'intrigue. Mais j'ai trouvé la soeur hystérique et le voisin caricatural, et je vois mal leur apport à la série.
Cependant, les deux Wilfred sont à ce point différentes l'une de l'autre, que je ne peux pas dire que ce soit foncièrement une mauvaise chose.

Je me suis posé la question de savoir si j'étais trop formatée pour apprécier la série australienne. Le fait que j'ai apprécié le remake US accentue cette question, car il s'avère que, en dépit de quelques défauts, elle est plus agréable à suivre.
Mais idéalement, j'aurais apprécié un juste milieu entre la bizarrerie extrême de Wilfred Australie, et le côté un peu lisse et attendu de Wilfred US.

Et pour ceux qui manquent cruellement de culture : la fiche Wilfred (US) de SeriesLive. Faudra que je la mette à jour, cette fiche, tiens.

27 juin 2011

Two beautiful minds

Immeuble interminables de verre et de chrome, bureaux immaculés, couloirs constellés de lampes... L'univers des avocats de prestige, vous le connaissez, je le connais ; on l'a tous déjà arpenté, posé nos pieds sur la moquette fine omniprésente, passé la main sur les surfaces planes qui semblent y règner en maîtres, poussé ses portes transparentes et toujours impeccablement propres. Téléphagiquement en tous cas.
Quand une série se pique d'aller s'y installer, on a déjà nos repères. Cette esplanade avec son vendeur de hots dogs. Cet ascenseur au ballet imperturbable. Tout y est.

Bien-sûr, régulièrement, il vient une série du genre The Defenders pour nous rappeler que le monde des avocats n'est pas toujours glamour, et c'est parfait : il en faut. Mais concrètement, les bureaux des avocats, ils en jettent, et on en est ravis.
Parce qu'il faut que le décor soit luxueux et moderne pour s'accorder avec le raffinement intellectuel de ses occupants.
En théorie du moins, puisqu'on s'attend à ce qu'ils soient intelligents théoriquement, mais nuls humainement.

Suits

Suits nous offre précisément cette plongée dans l'élite téléphagique : le monde juridique. Un monde où la répartie fait systématiquement mouche, et où l'éclat des répliques n'a d'égal que celui des stylos hors de prix. C'est dans le cahier des charges : dans un legal drama, les personnages sont d'une intelligence aiguisée, et leur boulot, c'est de le prouver épisode après épisode. Une série légale où les personnages sont dénués d'intelligence, c'est bien simple, ça n'existe pas. C'est pourquoi les séries légales seront toujours supérieures aux séries policières.

Ainsi sont les deux personnages centraux de la série, Mike et Harvey, parfaitement conscients d'être plus intelligents que la moyenne, et l'enjeu est précisément celui-là : vivre en étant intelligent. Pour Mike, le défi est de réaliser son potentiel après avoir tout gâché une fois. Pour Harvey, la problématique est simplement de profiter de tous les avantages sans jamais en connaître les inconvénients (et dans le pilote, il donne l'impression d'y réussir plutôt bien). Ces deux-là vont se trouver et, parce qu'ils sont intelligents, réaliser rapidement qu'il serait bête de se séparer maintenant.

D'autant qu'à eux deux, ces brillants cerveaux sont capables de plutôt bien mener leurs affaires... si ce n'était leur goût un peu vicieux pour l'échec (dans le cas de Mike) et pour la vantardise (dans le cas de Harvey).
De fait, leur pire ennemi, c'est eux.

Bien-sûr, Suits ne transcende pas le genre et ne propose pas de série légale révolutionnant la face de la télévision. C'est plutôt une invitation à se mettre à l'aise avec des personnages intelligents qui ne vont pas louper une occasion de nous le prouver : on l'a dit, c'est leur job. Les enjeux viennent essentiellement de ce que le comportement de nos deux cerveaux afûtés provoque chez ceux qui sont juste un peu moins gâtés intellectuellement, et notamment la jalousie de Louis Litt (celui qui voulait être calife à la place du calife, porté par un Rick Hoffman aussi succulent qu'à l'ordinaire dans son rôle de méchant raffiné mais obstiné), fermement décidé à avoir la peau de Harvey quoi qu'il en coûte : pas de surprise de ce côté-là non plus.

Mais le gentil Mike et le pédant Harvey nous font un tel numéro de duettistes qu'on se fiche bien d'avoir déjà vu ce tandem mal assorti mais dynamique une fois ou deux par le passé (...peut-être sur la même chaîne), et qu'on a juste envie d'assister à leurs échanges, simplement parce que c'est là que se joue le nerf de la guerre, le coeur du show, l'âme de la série : dans les discussions à cent à l'heure de deux personnages qui sont très intelligents, qui apprécient cela l'un chez l'autre, mais qui aimenraient juste prouver une fois pour toutes qu'ils le sont quand même juste un peu plus.

Ajoutez à cela des intrigues légales avec moults revirement de situation (toujours bien amenés, c'est l'essentiel dans ce type de fictions), une gent féminine prête à asticoter ces hommes un peu trop sûrs d'eux et à se pavaner dans des tenues à la fois professionnelles et sexy, et vous obtenez une série prête à personnifier ce que le grand public peut aimer dans les legal dramas.
N'ayons pas honte de le dire : le grand public aura raison.

D'ailleurs ce sont des séries comme ça, bien conçues mais pas élitistes, intelligentes mais pas stratosphériques, que M6 devrait tenter de diffuser le jeudi soir en prime avant de se lancer dans les grosses pointures du genre de The Good Wife.

Et pour ceux qui manquent cruellement de culture : la fiche Suits de SeriesLive. Toute chaude sortie du four.

26 juin 2011

L'été meurtrier

Il ne fait pas bon être diffusée en été : toute série qui démarre à l'arrivée des beaux jours se voit systématiquement accusée d'être forcément d'une exigence inférieure. Si elle débutait à l'automne, on parlerait de ses qualités et ses défauts, mais puisqu'elle débute en été, alors ce facteur est forcément plus pris en compte que n'importe quel autre. Séries estivales, telle est votre malédiction : une série lancée en été est forcément soupçonnée de l'être parce qu'elle est indigne d'un lancement automnal (et très confortablement on oublie alors de préciser que Mad Men a été lancée par un bel été) ; au Japon, il n'y a pas de saison meilleure qu'une autre par définition, une série est commandée pour ce qu'elle est et pas pour sa date de diffusion ; en Amérique du Nord, si.

Ainsi donc, Combat Hospital démarre avec ce genre de boulet que seuls quelques Emmys font oublier. Si la série n'est pas excellente, elle sera forcément tout juste bonne à être diffusée l'été, il n'y a pas de place pour la demi-mesure.

CombatHospital
Les noms sont immédiatement lancés, avec une certaine nonchalance, souvent feinte, qui consiste à avoir l'air d'être experts. Dans le cas de Combat Hospital, ces noms sont forcément M*A*S*H et China Beach. Je vais être honnête avec vous : même si en général j'aime beaucoup (pas toujours, certes) les séries de guerre, je n'ai jamais voulu tenter M*A*S*H, peut-être à cause de sa réputation, certainement parce que l'angle de l'humour me semble incongru. Quant au pilote de China Beach, je m'y suis frottée quelque part pendant le 2e semestre 2010 et je n'arrive pas à me souvenir avec précision de la totalité, il ne m'en est resté que deux ou trois scènes, même pas forcément épatantes. Telle est mon expertise en comparaison, de pilote à pilote, dans le cas qui nous préoccupe. Je ne sais pas si je suis passée à côté de quelque chose de fondamental avec M*A*S*H, mais China Beach ne m'a, vous le voyez, laissé aucune impression impérissable. Alors je n'attendais pas de miracle de la part de Combat Hospital.

Il ne me semble pas non plus que l'héritage d'Urgences ait été balayé d'un revers de la main. D'autres séries médicales ont bien plus méprisé l'apport de cette série au genre, parmi lesquelles Trauma, Three Rivers ou Miami Medical, bien plus insultantes envers le spectateur que Combat Hospital.

Le rythme est bon, ni trop agité ni trop saccadé, les personnages attirent notre attention (pas tellement l'héroïne, le Dr Gordon, mais les Dr Treng et Marks) sans en rajouter des tartines dans le background sirupeux souvent à l'ordre du jour (le syndrome du background artificiel exposé dés le pilote sera exploré dans un prochain post, d'ailleurs), et pour finir quelques intéressantes problématiques sont effleurées, propres à l'environnement de la série.
Qu'attendre de plus de ce pilote ?

Exactement. Au juste j'aimerais vraiment qu'on me dise ce qu'il y a à attendre de plus de la part du pilote d'une série médicale. Je n'ai à vrai dire jamais vu une série médicale démarrer autrement (à moins de considérer Dr House comme autre chose qu'une série d'enquêtes médicales, et encore) qu'en présentant les particularités du contexte choisi, l'équipe de soignants et des cas médicaux. Le pilote d'Urgences n'a rien fait d'autre.

Mais Combat Hospital a démarré en été. Je soupçonne que ce soit, en fait, la seule raison pour laquelle je n'ai pas lu une seule critique positive à ce jour à son sujet.

Et pour ceux qui manquent cruellement de culture : la fiche Combat Hospital de SeriesLive.

25 juin 2011

Presque

Tant de pilotes à évoquer, et si peu de temps pour le faire... Alors tragiquement, je me dis que je vais commencer par ceux sur lesquels j'ai le moins de compliments à formuler, et j'en arrive au point où je vous parle de Single Ladies plutôt que de Love Bites. Oui, tragique, le terme n'est pas exagéré.
Du coup, me voilà aujourd'hui à vous parler du pilote d'Almost Heroes, alors que ça fait presque un mois qu'il a été diffusé. On s'en sort pas.

AlmostHeroes
Et je n'ai même pas que du bien à en dire...
C'est que, avec son univers de geeks et de losers, Almost Heroes semble arriver après la bataille. Les amateurs de comics et de science-fiction, on a l'impression d'en avoir fait le tour à présent. Bien-sûr, il y a de bonnes idées (la scène entièrement jouée par des figurines en est une), mais l'épisode a toutes les peines du monde à ne pas donner l'impression de courir après une pseudo-mode qui appartient déjà au passé.

Ca manque terriblement d'originalité, pour une série qui débarque après tout le monde. On aurait voulu un regard original sur la question (que la série australienne Outland, si elle finit par être diffusée, pourra peut-être nous procurer, d'ailleurs), un angle, quelque chose, mais on en est toujours au même stade, celui où le geek n'est pas méchant, mais un peu idiot, il n'a jamais su grandir mais il est attendrissant, etc... Mais on l'a vue cent fois cette histoire ! D'accord, peut-être pas cent fois. Mais une bonne douzaine ! En tous cas c'est l'impression qu'on a et, si Almost Heroes voulait bien se donner la peine, on pourrait avoir un peu de fraîcheur dans l'éternel thème du geek-loser qui n'a rien fait de sa vie mais que le spectateur observe tout de même avec bienveillance.

Il y aurait aussi du mal à dire des personnages secondaires : le méchant patron du magasin de sport (parce que le sport, c'est pour les méchants, évidemment), la jolie gérante un peu "out of his league" dont bien-sûr le héros va gentillement s'enticher, la petite grosse qui voudrait impressionner le garçon de ses rêves mais qui continuera d'être la bonne copine, etc... Sérieusement ? On va vraiment avoir droit à la totale ?

Et puis, vient le moment où je me mets, mais alors vraiment, en colère. Comme vous le savez peut-être, je suis en pleine intégrale de Roseanne en ce moment (saison 6), et les histoires d'argent, j'en vois défiler pas mal depuis que je me suis mise sur la série. Et ça me tue de voir qu'une comédie comme Almost Heroes est incapable de gérer ces questions qu'elle a pourtant soulevées elle-même : il manque 8000 dollars ? Pas de problème, on n'a qu'à, faut qu'on, il suffit de, et pouf ! 8000 dollars réglés en bonne et due forme avant la fin de l'épisode ! Comment est-on supposés s'intéresser aux déboires des personnages quand les scénaristes eux-mêmes les traitent par-dessus la jambe ? C'est honteux.

Au final, de comédie correcte et presque divertissante sur le début, on passe rapidement à une grosse impression de foutage de gueule. Almost Heroes se donne du mal pour ne pas en foutre une rame.
C'est la définition de loser, je crois.

Et pour ceux qui manquent cruellement de culture : la fiche Almost Heroes de SeriesLive.

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17 juin 2011

Frantically fan

1993 était une grande année. Téléphagiquement, pour moi, en tous cas. Mais je ne l'ai pas immédiatement su, parce que, bien que je ne connaisse pas la date exacte à laquelle j'ai découvert la série, je suis à peu près sûre de n'avoir pas découvert Une Nounou d'Enfer cette année-là.
N'empêche qu'il s'est passé quelque chose en 1993 qui a changé ma téléphagie, à sa façon.
Parce que c'est aussi avec cette comédie que mon regard sur les séries a changé, et que c'est probablement l'une des premières dont j'aurais pu me dire fan, si à l'époque j'avais utilisé le mot, et déjà que maintenant...

Voilà donc pas loin de 20 ans  et, depuis, Fran et moi sommes inséparables.
De Fran Drescher, j'admire l'envie si puissante de rire et faire rire, après tout ce qui s'est passé : le viol, le cancer, le divorce. Et chaque fois, cette énergie bouillonnante de rebondir et de rire. Alors je ris avec Fran, parce qu'elle-même en est capable et que ça ouvre en moi une sorte de verrou, celui qui, d'ordinaire fermé, trouverait que les gags sont ci ou que l'interprétation est ça, et qui cède face à elle pour simplement profiter de la bouffée d'optimisme combattif qui se dégage de ses sitcoms.
J'aime ses moues, sa voix, son rire (du jour où j'ai découvert Fran en VO, mes facultés d'auditions n'ont plus jamais été les mêmes, et je ne regrette rien), j'aime aussi que ses personnages s'appellent toujours Fran et réagissent tous de la même façon, pour la bonne raison qu'ils évoluent tous dans des contextes qu'elle tire de sa propre expérience et qu'elle y va franchement, sans s'en cacher. Il y a quelque chose d'honnête et sincère dans cette démarche qui est la sienne, comme si elle avançait à visage découvert pour dire : "ouais, tout-à-fait, je ne suis pas une créative à la base et j'ai pas été chercher tout ça très loin, et alors ? J'ai quand même envie de vous faire rire avec ce que je connais".

Oui, il y a des pitches originaux et des synopsis de comédies révolutionnaires, mais un projet de série ça peut aussi être ça : quand on n'a pas de message à faire passer ni de média à révolutionner, qu'on a juste envie de divertir les gens et que pour ça on donne tout ce qu'on a, sans se cacher, sans en rajouter, à prendre ou à laisser. Moi ça me donne envie de prendre, pareille sincère générosité.

CancerSchmancer
Fran lance donc des séries où elle est Fran, toujours, inconditionnellement, tout le temps, et je l'aime aussi pour ça, pour la volonté qu'elle a de simplement venir me faire rire en se foutant du reste, et surtout de ceux qui veulent faire croire que le rire c'est FORCEMENT autre chose qu'avoir de l'énergie à revendre et la volonté de divertir. Ca peut, mais ce n'est pas obligatoire.
Elle se rendra ridicule s'il le faut, elle se répètera s'il le faut, elle utilisera toutes les anecdotes qu'elle a vécues s'il le faut, mais elle viendra à nous nue et sans artifices... spirituellement en tous cas, parce que Fran sans maquillage à la truelle, cheveux en contreplaqué et garde-robe pléthorique, ça n'est pas vraiment Fran.

Et c'est aussi pour ça qu'elle ne connaitra plus jamais le succès qu'elle a rencontré avec Une Nounou d'Enfer, parce qu'en-dehors des fidèles qui, comme moi, lui conservent toute leur entière et indivisible affection, et n'attendent que de la retrouver, les gens en général ont tendance à attendre de la nouveauté. C'est la seule chose qu'elle ne leur donnera pas.
C'est pas le plan, c'est pas comme ça qu'elle fonctionne. Elle n'est pas une créatrice de série qui cherche un pitch ou un personnage qui vous happera ; c'est une personne qui vient et qui sait que ce qu'elle a à offrir, c'est elle et rien qu'elle, et que ça, ça ne change pas, alors comment les projets successifs le pourraient-ils ?

HappilyReunited
Alors oui, j'ai regardé Happily Divorced. Et je sais bien, c'est exactement tout ce que Fran faisait déjà il y a presque 20 ans. Pour une raison simple et évidente, que tout le monde connait : le mari qui découvre qu'il est gay, c'est son histoire comme l'étaient, avec Living with Fran, les expérimentations de cougar, ou avec Une Nounou d'Enfer, une radiographie du passage à l'âge adulte quand on essaye de prendre du recul sur notre éducation.
Non bien-sûr, ça ne s'est pas passé exactement comme ça, à chaque fois, mais Fran sait prendre ces étapes fondatrices de sa vie et en rire, c'est sa thérapie par le rire si on veut, en tous cas elle nous propose rien d'autre que ce que d'autres font sur des planches, les séries de Fran Drescher sont simplement des one woman shows télévisés et adaptés pour plaire au plus grand nombre (les mauvaises langues diront : le plus petit dénominateur commun, mais il n'y a pas de honte à faire un divertissement populaire, quand c'est fait avec sincérité). C'est aussi à ça qu'on la reconnaît.

Le pilote de Happily Divorced est un peu cliché par moments, le couple des parents est clairement sous-employé, les choses vont un peu vite pour mettre en place la situation sans trainer, mais ce n'est qu'un pilote et celui d'Une Nounou d'Enfer n'était pas parfaitement abouti non plus. Mais l'humour de Fran est intact et tout est là. Rien n'a changé, comme se plairait probablement à le penser le chirurgien qui s'est attaqué à ses pommettes.
Ce sont tout bonnement des retrouvailles. J'ai ri, et applaudi, et peut-être eu l'oeil vaguement humide, parce que je savais pourquoi je revenais, et c'est exactement ce qu'on m'a servi. On ne peut pas en dire autant de tous les comebacks télévisés, soit dit en passant.

FranWhite

Je vous avoue cependant que, si cette trilogie de comédies "à la Fran" m'enchante, parce que je suis tout sauf objective et ne le serai jamais pour quelqu'un qui a bercé près de 20 années de ma téléphagie et m'a accompagnée plus que quiconque ne peut l'imaginer... parfois, j'aimerais que quelqu'un dise à Fran de s'asseoir, lâcher du leste, laisser le contrôle à quelqu'un, et simplement se laisser embarquer dans une dramédie ou un drame, des genres où elle a beaucoup à donner mais où elle s'est peu risquée, car elle refuse de se mettre en danger.
C'est justement parce que j'aime Fran de tout mon coeur que je vais à la fois regarder Happily Divorced et espérer que la trilogie lui suffira pour passer à autre chose. Et accepter de ne pas rire. Juste une fois. Parce qu'elle le mérite. Et parce que tout le monde n'est pas fan et ne tolèrera pas ça indéfiniment.

C'est beau de vouloir rire de tout ce qui se passe dans ta vie avec nous, Fran, mais promis, si les défenses tombent, on t'aimera toujours. Moi, en tous cas, je serai là.

Et pour ceux qui manquent cruellement de culture : la fiche Happily Divorced de SeriesLive.
Bien-sûr, le vendredi. Evidemment que j'allais poster sur Fran le jour sacré de ce blog par excellence.

10 juin 2011

Il suffit de trouver la combine

A première vue, j'ai eu comme l'impression que mon post sur le pilote de Franklin & Bash allait présenter de curieuse similitudes avec celui que j'avais pu écrire sur The Defenders voilà quelques mois.

Tiens, pendant que j'y pense, d'ailleurs... Comment se fait-il que j'aie arrêté de regarder cette série ? Je n'ai pas fini la saison, et quand elle a été annulée ça faisait même un bout de temps que je n'avais pas vu un épisode... curieux, ça. Ah, oui, ça me revient : quand je me suis lancé dans mon défi The Téléphsage Experiment, la semaine sans cagoulage avait fait passer à la trappe certaines séries, sans autre raison que "loin des yeux, loin du coeur". The Defenders avait ainsi bêtement sombré dans l'oubli.
C'est con, en fait. Je n'avais pas de grief insurmontable envers cette série. Je m'y remettrai peut-être, en fin de compte, si j'ai le temps. Et puis de toute façon, maintenant qu'elle est annulée, ça ne m'engage pas beaucoup.

Ah oui, pardon. Franklin & Bash. Des avocats, donc forcément des petits gars que j'ai plaisir à regarder. Quoique, ça n'avait pas trop marché pour Raising the Bar, comme quoi un acteur sympa et un genre qu'on apprécie, ça ne fait pas tout.

FranklinBash

De toute évidence, l'intérêt de Franklin & Bash réside dans les entourloupes, les effets de manche et les coups bas qui seront utilisés pour gagner... à la condition de ne pas s'apesantir sur le côté justicier vu dans le pilote. Cette phrase condense en fait mon ressenti vis-à-vis de ce pilote. Car si j'aime ce côté bidouilleur que les personnages principaux nous dévoilent rapidement, si j'aime voir des avocats tremper dans la magouille pour remporter une affaire, c'est parce que l'immoralité me semble trop peu développée dans la plupart des legal dramas. Là où The Practice montrait des avocats qui luttent pour rester le plus possible en accord avec leur conscience, là où Ally McBeal nous rappelait que les avocats ne sont pas de marbre et que leurs sentiments les rendent faillibles, là où les Law & Order insistent sur les questionnements sur la société qui font partie de ce métier... assez rares sont, au final, les séries qui admettent qu'un avocat peut aussi être, tout simplement, être vénal et/ou pourri.
Comme pour les séries policières, beaucoup de legal dramas donnent l'impression d'être dans une démarche de réhabilitation plus qu'autre chose (et c'est pour ça que je me demande ce que peut bien avoir fait El Equipo de travers pour s'attirer pareil courroux).

Alors si je dois assister au spectacle déplorable (bien que hautement divertissant) de deux avocats ayant coupé tous les ponts avec la moralité, j'aime autant que ce soit sans réserve !

Dans Franklin & Bash, j'ai donc beaucoup apprécié les artifices déployés pour gagner les procès, les personnages d'ados attardés, les seconds rôles caricaturaux, même. Mais j'espère que la série va se garder d'un excès d'optimisme en faisant de ses héros de gentils MacGyver des tribunaux qui veulent tout de même vaincre les injustices. Il me semble y voir une contradiction, dont il faut se débarrasser au plus tôt.
Pas de coup de coeur, donc, mais l'envie tout de même de voir quels subterfuges nos deux héros vont trouver au prochain épisode. Je vous préviens, j'attends qu'on me surprenne, j'attends qu'on me fasse rire, j'attends des revirements de situations de folie. Voilà, en fait, tout ce que Franklin & Bash devra faire pour ne pas finir comme Fairly Legal, une série qui aurait pu progresser et offrir quelque chose de nouveau, mais qui s'est reposée sur son pitch de départ. Allez les gars, vous pouvez le faire. Vous trouverez bien une astuce.

Et pour ceux qui manquent cruellement de culture : la fiche Franklin & Bash de SeriesLive.

8 juin 2011

Put a ring on it

Il y a plein de pilotes dont je voudrais vous parler, mais il y a aussi plein de choses que je voudrais faire, parmi lesquelles manger, boire, et last but certainly not least, dormir. Aussi je commence par le post qui me demandera le moins de réflexion, partant du principe que si le visionnage lui-même n'a pas été trop exigeant, ya pas de raison que la rédaction soit différente. Pour le reste, on verra vendredi et/ou ce weekend.

Car oui, je vais vous parler de Single Ladies, la série que tout le monde attend... euh, non. Mais bon, si on s'arrêtait à ça sur ce blog, ça se saurait.

SingleLadies
Single Ladies, c'est tout ce qu'une série pour les femmes doit avoir : des femmes superbes, une ville au rythme trépidant, des vêtements et des bijoux dans tous les sens, du champagne et des cocktails, des appartements décorés avec goût, de la musique en permanence, et des histoires de cul. Les gonzesses raffolent de cette recette ; jurisprudence Sex & the City.

Alors qu'est-ce qui fait que Single Ladies n'arrivera jamais à la cheville de son auguste aînée ? Le soin apporté à la production. A chaque étape de la production. Les acteurs sont en grande partie incapables (et quand ils sont décents, à l'image de DB Woodside, les autres défauts de la série viennent quand même gâcher le boulot), et la pire est certainement Stacey Dash qui joue comme une Sarah Jessica Parker sous produits dopants, ce qui vous donne une idée du désastre. Côté style, c'est too much en permanence, les décors sont rococos au possible (un adjectif qu'on pensait ne plus avoir à utiliser depuis des décennies et qui apparait comme le seul capable de décrire la profusion de dorures), les scènes de fesses sont systématiquement des coïtus interruptus qui s'expliquent par le fait qu'aucune scène ne dure plus de 2mn, et même au niveau de l'alcool, le jeu consiste à compter le nombre de fois où les filles boivent la même coupe de champagne dans des décors différents (l'accessoiriste avait trouvé des SUPERS coupes design, mais yavait le budget que pour en acheter 4 pour toute la série).
Et ça c'est même pas le pire. Le pire, ce sont les scénarios.

En 1h22 de pilote, et là yaura du spoiler pour ceux qui voudraient quand même regarder, le personnage principal a le temps de se faire plaquer par son mec depuis 5 ans qui veut pas l'épouser, coucher avec le premier venu, tomber enceinte, ne pas savoir qui est le père, ne plus être enceinte ("ah ah ah les 5 tests de grossesse étaient erronnés, quel hasard quand même !". Vé. Ri. Di. Que.), et je vous parle que de l'héroïne. Les scènes étant courtes (mais le pilote long, mais long !), il n'y a pas de place pour la subtilité, et les retournements de situation semblent toujours tomber du cul d'une poule, genre les scénaristes ont joué l'histoire aux dés.

En fait non, je retire ce que j'ai dit. Le pire, ce sont les dialogues.
Parce que, si dans tout ça, les dialogues avaient été décents, on aurait presque pu pardonner le reste ; ça arrive à une foule d'autres séries d'ailleurs. Mais là c'est pas sérieux, comme affaire. Les dialogues sont artificiellement plaqués pour meubler les scènes et les faire avancer le plus vite possible, et vidés de toute substance (et récités par une bande de nuls), ça en devient risible tellement c'est exagéré. On se croirait dans une parodie par moments. Dans d'autres, ça relève du soap. Et puis une fois de temps en temps, avec la musique pourrie dans le fond, ça fait même film érotique de M6.

Ah oui, ça me fait penser que je me suis trompée. Le pire, c'est la musique.
On en a plein la tête en permanence, des morceaux plaqués violemment dans une scène et systématiquement au même niveau sonore que les conversations, une espèce de R'n'B/soupe issu des pires albums des années 90 qu'on espérait un peu voir disparaitre, ou au moins dont on pouvait se dire qu'on n'aurait pu à l'entendre même si quelques inconscients se livraient encore à leur écoute. Mais comme Single Ladies est une série de blacks (la preuve, ça se passe à Atlanta), il faut les filles avec des bonnes grosses cuisses (seule Dash fait figure de crevette), des mecs musclés de partout sauf du cerveau, et bien-sûr dur R'n'B parce que TOUS LES BLACKS aiment le R'n'B, c'est bien connu.

Et pourtant, dans cet océan honteux de mauvaise, très mauvaise télévision, il s'avère que j'ai pris un certain plaisir à regarder Single Ladies, et que j'en ai été la première surprise. En fait au départ, j'étais résolue à m'arrêter à peu près au milieu (1h22 de pilote, quand même, faut tenir), et puis au fil des heures, j'ai eu envie de continuer, pas parce que je voulais absolument savoir si l'une allait réussir à mettre la main sur son Mr Big ou si l'autre allait survivre à sa terrible rupture, mais surtout parce qu'en fait, pour la première fois pour moi qui ai tendance à ne pas aimer cette expression ni ce qu'elle désigne, j'ai trouvé un très plaisant guilty pleasure.
Ya aucune prise de risque téléphagique. Ya aucun intérêt téléphagique, en fait. C'est mal écrit, mal joué, mal réalisé (faut faire quelque chose avec ces lumières, hein, d'un plan à l'autre l'éclairage change !). Mais on s'en fout parce que ya des robes de folie, des femmes superbes, de très belles coupes de champagne et des mecs qui semblent sortir d'un catalogue. Et Stacey Dash peut remuer dans tout les sens son petit visage trop maquillé, et déclamer ses lignes avec l'air convaincue de la nana qui se rappelle plus trop si on est mardi ou mercredi, au final ça n'a pas d'importance parce que c'est juste "joli". Ou en tous cas quelque chose qui s'en approche.

Ca remue, ça brille, et très franchement, avec mon nouveau boulot, je suis trop fatiguée pour avoir la force de regarder des séries de la trempe de Game of Thrones plus d'une fois par semaine, alors c'est parfait, ça m'occupe. Je suis pas encore sûre de continuer Single Ladies, mais étrangement, la perspective ne me rebute pas.

Et pour ceux qui manquent cruellement de culture : la fiche Single Ladies de SeriesLive.

20 mai 2011

One little, two little, three little Indians

C'est pas pour être désagréable, mais si vous vous souvenez, fin janvier, c'était pas la joie dans le coin. J'étais un peu désabusée et du coup ma motivation avait largement pris du plomb dans l'aile. Pourquoi je brasse ce genre de souvenirs en ce radieux mois de mai où tout va bien dans le meilleur des mondes (du moins pour autant que ce blog soit concerné) ? Parce que j'ai essayé de me souvenir pourquoi diable je n'avais regardé que le pilote de Blackstone, lorsque le générique est soudain apparu dans ma playlist mercredi après-midi.

Un revisionnage du pilote plus tard, et maintenant que j'ai l'énergie de quatre téléphages, me revoilà à vous parler de Blackstone, avec un peu de retard, certes, mais vaut mieux tard... etc. Bon, du coup ça fera une review plus courte que si je ne l'avais écrite à l'époque, mais au moins elle est là, et j'espère qu'elle suffira à éveiller votre intérêt pour cette série atypique.

Blackstone
Blackstone ne s'embarrasse pas de subtilité : le politicien corrompu, il est corrompu, point barre. On le voit discuter avec ses autres comparses et rire de ses magouilles, sans que la série ne perde de temps à nuancer ses actes ou à chercher à le rendre vicieux. En fait, la démonstration n'en est que plus terrifiante, puisque cela implique que le chef ne s'en cache pas plus que le scénario ne le fait. Il verse des pots-de-vin, il se sert au passage, et il ne semble même pas ressentir de honte à le faire, alors pourquoi dissimuler ses actions ? Il a même le toupet de venir à des funérailles expliquer que si on faisait comme il a dit, ça ne serait pas arrivé. Tout ça pendant que la défunte est flanquée entre quelques planches de contreplaqué parce que ce même chef avait dit qu'il n'y avait pas de budget pour autre chose.
Oui, Blackstone fonce dans le tas, et il n'y a pas de place pour la nuance, l'explication, la relativisation. Certes ça implique qu'au stade du pilote, les personnages sont assez unidimensionnels, mais c'est tout simplement parce que le sujet de Blackstone, c'est plus la politique de la réserve que ceux qui y vivent.

C'est à une vraie série sur la politique locale qu'on assiste ici (mon Dieu, mais comme je m'en veux d'avoir été aussi négligente, elle aurait été parfaite dans The SeriesLive Show !), et sans chercher à se perdre dans des méandres électorialistes : quelles sont les conséquences de telle décision ? Ou de telle absence de décision ?
Et le constat est cinglant : non seulement la politique politicienne et les magouilles se font pointer du doigt, mais la permissivité des habitants eux-mêmes est soulignée dans une cinglante tirade sur l'aveuglement et, surtout, le silence. En réalité, les Indiens laissent faire parce que, comme si bien résumé dans une autre réplique déroutante : "pour autant que les choses aillent mal, il y a aussi une véritable peur de perdre tout ça", tout ça étant la possibilité de rester oisif à boire devant la télé en touchant les allocs. Vlan.

C'est là qu'indubitablement se pose la question de savoir pourquoi regarder une série qui parle de problèmes aussi ciblés.
Oh, vraiment ? Des politiques qui ne font rien, qui se servent dans les caisses, qui ont de belles paroles qui ne réparent pas les tragédies, c'est typique d'une réserve indienne ? L'alcoolisme, la drogue, le désoeuvrement, l'inceste... vraiment, c'est typiquement indien ?
Il faut dépasser ce moment où on ne se sent pas concerné (et je pense qu'il vient forcément un instant, même s'il peut ne durer qu'une seconde, où tout cela semble réellement lointain au spectateur francophone), et admettre que même si c'est de façon différente de nos préoccupations quotidiennes, Blackstone parle de quelque chose qui nous touche aussi chez nous, dans le fond.

Parmi les choses qui m'ont marquée pendant ce revisionnage du pilote, j'ajouterai pour finir qu'il y avait la scène d'ouverture. Un vieil Indien se fait filmer par un autre, plus jeune, qui tente de saisir avec sa caméra la réalité de la culture indienne ; le vieillard raconte une histoire. Et pour conclure, l'ancêtre a ces mots : "Je sais que tu essayes de faire quelque chose de bien avec ces videos. Mais la culture n'est pas simplement ce dont nous avons parlé... les jours anciens... les rites anciens... toutes ces choses qui font qui nous sommes. C'est aussi ce qui se passe aujourd'hui. Si tu regardes autour de toi, la culture s'affiche tous les jours. Violence familiale, alcoolisme, abus de drogue, inceste, suicide, corruption... c'est notre culture maintenant".
Pas d'apitoiement. Pas d'excuse. Pas de cadeau.
Juste un baquet d'eau en plein visage, parce qu'il faut se réveiller.

Je sais que j'étais pas dans mon état normal en janvier, mais j'arrive pas à croire que j'ai préféré espacer le rythme de mes publications plutôt que de vous parler de Blackstone, puis d'avoir osé oublier cette série. L'erreur est réparée, cependant. Aussi vous n'avez plus d'excuse, maintenant.

Et pour ceux qui manquent cruellement de culture : la fiche Blackstone de SeriesLive.
Rho, quand je pense que le pilote a été diffusé le jour de mon anniversaire, je devrais avoir honte.

22 avril 2011

Dans mes petits papiers

Il y a parfois une forme de malhonnêteté qui s'instaure quand on rédige des news sur une série, et que par ailleurs, on a vu ladite série. C'est mon dilemme du moment alors qu'à peu près chaque jour, il sort une nouvelle info sur Paper Giants: The Birth of Cleo (que par pitié pour mes tags, je vais me contenter d'appeler Paper Giants à partir de là). Je suis bien obligée de rapporter que la critique est dithyrambique, mais il me faut avouer que je ne suis pas totalement d'accord.
Car si la mini-série d'ABC1 est très solide, elle n'est pas non plus à tomber par terre.

PaperGiants_1
Alors, bon, commençons pas le plus désagréable : j'en profite pour expliquer tout de suite que, plus important encore, si Asher Keddie, qui y tient le rôle principal d'Ita Buttrose, n'est pas non plus mauvaise, elle est franchement loin de m'avoir tiré le moindre juron d'admiration, alors que les critiques australiens semblent surkiffer sa prestation. Vraiment, ya pas de quoi. C'est typiquement le genre de cas où on confond la qualité de la série avec la qualité de l'actrice, j'ai l'impression (un cas moins rare qu'il n'y parait).
Complètement focalisée sur la partie "portrait" qui lui incombait (en même temps, pas facile d'interpréter quelqu'un avec qui on n'a même pas 30 ans d'écart et qu'on a rencontré), travaillant visiblement énormément sur le zozotement, les tics faciaux et autres marques de fabrique qui donnent du réalisme au personnage, Asher met complètement de côté... vous allez voir c'est tout bête... l'interprétation. On la sent tellement concentrée qu'on ne ressent aucune émotion. Ita est fatiguée ? Ouais, bon, c'est pas grave. Ita a des problèmes de couple parce qu'elle consacre trop de temps à Cleo ? Ouais, bon, elle va survivre. Le visage impassible, l'actrice se contente de prendre son front impeccablement lisse dans ses mains, ou de garder le regard fixe, et on est censés comprendre qu'Ita est au bord de la crise de nerfs mais que c'est une battante et qu'elle va surmonter l'adversité. Désolée, c'est un peu court. Je veux bien qu'Ita ne pleure pas, ne se laisse jamais abattre et continue de bosser quoi qu'il arrive, mais pas sans une petite émotion, quand même.
Voilà, considérez que j'ai commencé par le plus négatif, mais c'est vraiment douloureux pour moi de tomber sur les reviews qui chantent les louanges de Keddie quand celle-ci offre un travail franchement rigide (mais j'ai si peu regardé Offspring que ça se trouve, elle est tout le temps comme ça), et d'autant plus dommageable qu'elle occupe 90% du temps d'antenne de la série, quand même.

Ok, j'arrête.
Parce qu'en définitive c'est le SEUL défaut de Paper Giants.

PaperGiants_2
J'ai d'ailleurs trouvé la prestation de Rob Carlton, qui interprète Kerry Packer, bien plus impressionnante. Dans le genre intériorisé aussi, mais incroyablement réussi, au point que quand le scénario explicite, vers la fin du second épisode, la relation de Packer à son père, on trouve presque que c'est trop tant Carlton avait tout su exprimer sans rien dire. Car le personnage de Kerry Packer est de ces grands muets qui agissent plus qu'ils ne parlent. Et d'ailleurs, quand il s'exprime, Packer ne parle pas, il hurle. C'est un peu le chaud et le froid avec lui, et on sent bien que ce n'est pas tout à fait de la colère, mais qu'il y a un problème de maîtrise, et que les employés de sa publication en font les frais, sans pour autant le détester, juste le craindre. Personnage à la fois antipathique en apparence, et profondément attendrissant quand on prend le temps de l'observer au calme, Kerry Packer est une force vive de la mini-série, et certainement celui qui a le plus fait pour Cleo (j'irai jusqu'à dire qu'Ita a sans doute moins donné pour ce magazine que lui).

Car l'histoire du magazine Cleo est de ces épopées comme on n'en fait plus, dans un monde où aujourd'hui, derrière le produit, il y a de moins en moins de convictions. Ita Buttrose se voit confier par Franck Packer (père de Kerry, et à la tête d'un puissant groupe de presse australien, ACP, pour Australian Consolidated Press) un projet pourtant simple : installer la franchise Cosmopolitan en Australie. Malheureusement, l'accord tombe rapidement, Cosmopolitan décidant qu'il n'y a pas besoin d'ACP pour cela, et ainsi nait Cleo, portée par Buttrose et Packer fils, qui tentent d'innover en matière de presse féminine tout en prenant Cosmopolitan de vitesse, ceci contre les incessantes barrière qu'érige Packer père, un esprit conservateur tant en presse que pour la place de la femme. Ita Buttrose et Kerry Packer vont donc porter Cleo à bout de bras pour réussir à en faire le magazine qu'ils veulent vraiment, soulignant combien le combat pour l'indépendance de Cleo est similaire à celui des femmes.

Car c'est inévitablement de féminisme dont il est question ici. Entre le magazine pour femmes qui chercher à exister par lui-même, sa rédactrice en chef Ita qui tente de résoudre l'équation travail/famille, et les problématiques abordées par le magazine lui-même, on est en plein dedans. A cela vient s'ajouter le parcours de Leslie, la secrétaire d'Ita, une jeune femme venue des quartiers populaires qui va lentement se prendre en main et se révéler à elle-même, pour assumer ses envies, ses choix et ses décisions. Tant de parcours mis en parallèle en 3h ne pouvaient passer inaperçus.

Pour aborder les sujets de société, Paper Giants emploie des procédés assez classiques, mais réussis, en piochant dans les archives tant du magazine que de la télévision. Couvrant 3 années, la mini-série parvient à parler pourtant des couvertures de Cleo, des publicités à la télévision, de sortir des extraits des journaux télévisés sur les évènements politiques et même d'effleurer la guerre du Vietnam.

Hein ? Vietnam ? En Australie ? Eh oui, comme vous dites, ça fait un peu bizarre, tant la guerre du Vietnam est assimilée dans nos esprits à l'histoire américaine. En réalité elle a préoccupé les Australiens aussi (déjà pour des raisons de proximité géographique).
Et c'est un peu là le véritable défi pour le spectateur français (ici une spectatrice). Devant Malenfant, je m'étais aperçue que j'étais peu au fait de l'histoire québécoise ; en comparaison, ce n'était rien. Car Paper Giants s'inscrit tellement dans l'histoire australienne qu'on prend vraiment la mesure de notre ignorance en matière d'histoire étrangère. Vous vous rappelez quand, au collège et au lycée, vous aviez l'impression de devoir apprendre des trucs sur tous les pays de la planète ? Ce n'était qu'une impression. On ne sait rien, on ne nous apprend rien, j'en ai la conviction aujourd'hui après avoir ressenti une telle absence de référence devant les allusions au contexte politique et social de l'époque. Pas la moindre idée de ce qui a bien pu se passer en Australie pendant cette décennie. C'était vraiment un choc parce qu'on est tellement imbibés d'histoire américaine qu'on n'imagine pas un instant être autant dans le flou lorsqu'il s'agit d'un pays anglophone ; comparativement j'aurais trouvé plus normal d'être perdue devant une série mexicaine sur la même époque. Et ce faisant, elle décida de vérifier s'il existait une série mexicaine sur la même époque.

Ce n'est que l'une des nombreuses dimensions qui font vraiment réfléchir devant Paper Giants. Une série qui n'est pas faite pour les femmes, mais qui devrait, assurément, motiver chez ces dernières quelques interrogations de plus que chez les spectateurs masculins, cependant. J'ai par ailleurs été rassurée de voir que, contrairement à ce qu'annonçaient certains sites parlant de la mini-série avant sa diffusion, l'aspect "mode" a été à peine effleuré, au lieu de constituer un aspect lourdingue. Pour autant, les tenues d'Asher Keddie sont superbes et elle est impeccablement maquillée et coiffée, avec un soucis du détail qui fait honneur à son styliste. Mais c'est sans surcharge, et sans jamais prendre le pas sur l'intrigue, ni diminuer les efforts de celle-ci pour être sérieuse.

PaperGiants_3
Dans l'ensemble, Paper Giants est une excellente production, à défaut d'être vertigineusement parfaite. Et c'est un engouement sincère que j'ai ressenti en début de semaine, bien qu'un peu tiédi, vous l'aurez compris, par la prestation de Keddie. Menée tambour battant, cette chronique multidimensionnelle est captivante, et personnellement je comprends tout-à-fait qu'on en veuille plus. Ce n'est pas assez long, j'aurais aimé suivre plus longtemps Ita ou Kerry (surtout Kerry, à vrai dire), et si on en croit les dernières news, Nine et ABC1 sont toutes les deux sur le coup, donc c'est à surveiller dans un an environ. Le projet de Nine se basant plus sur la carrière de Kerry Packer, j'espère qu'ils garderont Rob Carlton, mais dans tous les cas, l'épopée est intéressante.
Mais pour en revenir à Paper Giants (ne mettons pas la charrue avant les boeufs), cette mini-série devrait à bien des égards susciter l'intérêt des téléphages curieux. Allez quoi, ce sont seulement trois petites heures de découvertes que je vous encourage à faire. Pour une série historique, en plus. Je suis sûre que quelques uns parmi vous gagneraient à s'y pencher, tels que je vous connais.
Sauf ceux qui commentent pas parce qu'eux, je peux rien leur recommander, je sais pas ce qu'ils aiment. Exprimez-vous, les gens.

Et pour ceux qui manquent cruellement de culture : la fiche Paper Giants: The Birth of Cleo de SeriesLive.

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