Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
ladytelephagy
les experts
13 avril 2012

Why not regarder Scandal

Whynotregarder-Scandal

Voici les 10 raisons de ne pas regarder Scandal :

1 - Parce que ça manque épouvantablement de second degré
2 - Parce que c'est un peu Les Experts en version spin doctors
3 - Parce que c'est dangereux si vous êtes épileptique
4 - Parce que le coup de la petite nouvelle qui arrive en terre inconnue n'a jamais été aussi mal exploité
5 - Parce que le speech de Pope pour expliquer sa procédure était pompeux au possible
6 - Parce que le Président, ah ouais, carrément ?!
7 - Parce que ça n'a pas d'âme
8 - Parce que Kerry Washington se la pète juste un peu trop
9 - Parce que regarder une série de Shonda Rhimes, c'est un peu abdiquer téléphagiquement
10 - Parce que le suicide n'est pas une solution
Libre à vous d'en ajouter, étant bien entendu qu'il n'y en a aucune à retirer.

Publicité
12 avril 2012

Plaisirs d'hiver

ErikWinter_DefinitiondeCool

Quatre jeudis s'approchant de la perfection téléphagique viennent de passer. Kommissarie Winter vient d'achever sa diffusion sur arte, et, je l'ai dit et je le répète, cette chaîne mérite à elle seule le montant de ma redevance en ce moment. Qu'il s'agisse de Borgen, ou d'East West 101 (mais on va forcément en reparler), de The Slap ou encore d'Äkta Människor, acquises par la chaîne en ce début d'année, arte est LA chaîne de la découverte téléphagique par excellence. Ce serait moi qui déciderais de ses achats que je ne choisirais pas autrement. Mon Dieu qu'on se régale. Nan mais je dis pas souvent du bien de la télévision française, alors il fallait que ma déclaration d'amour à cette chaîne soit claire nette et précise. Cette déclaration n'a rien de nouveau mais souffrez que je me répète, d'autant que la chaîne bosse vraiment dur pour nous surprendre tout en saissisant l'air du temps.

Avec Kommissarie Winter, qui clairement n'avait pas bénéficié du même plan de communication que Borgen (et qui, à l'approche des élections, n'avait pas vraiment d'argument d'actualité pour attirer du monde), arte n'a pas forcément emporté l'adhésion massive du public, mais pour le téléphage exigeant, ce que nous espérons être dans les parages, il y avait de quoi être comblé. C'était de la qualité, indéniablement.
Eh oui, une nouvelle fois, je m'apprête à jeter des fleurs à Kommissarie Winter, l'une des rares séries policières pour lesquelles j'en redemande (fait quasiment unique, en réalité), mais la série le mérite. En huit épisodes racontant seulement quatre enquêtes, on a eu l'occasion de méchamment prendre notre pied. Je m'apprête à vous expliquer pourquoi parce que je sens bien que vous n'étiez pas religieusement positionné devant votre écran le jeudi soir. Et je vous en veux presque pas pour ça.

Parce que Kommissarie Winter n'est pas facile d'accès. Quand, le mois dernier, la série s'est ouverte sur un enchaînement de séquences quasiment dénuées du moindre dialogue pendant plus de 5 minutes consécutives (c'est long en télévision), forcément, on sentait qu'on n'était pas dans Les Experts Göteborg. L'efficacité était hors de question depuis le départ : les silences, les plans contemplatifs appuyés, tout ça n'est pas vraiment la manifestation d'une série grand public. Mais même si cela peut paraitre un peu surprenant quand on est habitués à ce qui est devenu le cahier des charges de la plupart des séries policières populaires de ces dernières années, il est bon d'insister. De se laisser porter. D'accepter de monter avec Winter dans sa bagnole et de le suivre le long de ce pont qui est le début d'une grande aventure...

Tout l'art de la série, au travers de 4 enquêtes, sera de se montrer d'un esthétisme parfait sans jamais sacrifier son contenu. La série joue sur la lumière plus que la couleur, souligne des sens improbables comme le toucher, reste d'une immense modération en matière de musique (le thème principal de la série sert également d'insert song, et en dehors de celui-ci, toute utilisation perceptible de la musique a forcément du sens)... bref, on expérimente la série au plus près, au lieu de simplement lui donner l'apparence d'un produit bien pensé. L'idée motrice qui est à l'origine de ce délicat résultat, c'est la volonté de toujours tout voir avec les yeux d'Erik Winter (énorme travail sur les yeux de Magnus Krepper pour nous faire adopter son regard), et de nous inviter à ressentir également les choses avec lui : la musique qui va l'obséder, la pluie qui va le tremper, le relief d'un papier-peint qui va l'intriguer...
Cela donne un résultat à la fois d'une grande poésie, parfois même morbide au besoin, ainsi que quelque chose de très intime aussi bien dans le partage des émotions du héros que dans l'expérience qu'on fait de la série, mais aussi un outil formidable pour suivre l'enquête. D'ailleurs, quand des collègues de Winter prennent le relai d'une partie d'une affaire donnée (Fredrik dans le premier cycle, Lars dans l'avant-dernier), le principe sera réutilisé afin de personnifier au maximum le travail exécuté par les policiers (ou leur vie privée, le cas échéant).

La vie privée de Winter tient d'ailleurs un grand rôle dans la série. En à peine 4 enquête, ça a même de quoi surprendre. On entre dans son intimité avec l'impression que son monde (son épouse, leurs deux filles) devrait être un refuge, mais est aussi très vulnérable au "dehors". Il y a un véritable contraste, souligné par le fait qu'aucune scène en famille n'est totalement abandonnée à l'innocence ; je vous l'avais assez bien retranscrit lorsque je vous avais parlé du pilote. Et ça s'exprime ensuite de façon variée, mais avec toujours l'impression qu'il y a la famille d'une part, et la menace de l'autre.
En fait, en l'espace de 8 épisodes, Kommissarie Winter va même s'amuser à jouer de ce principe. On prend vite l'habitude de voir Winter lui-même lier sa vie personnelle et/ou son passé à son enquête (quitte à être proprement imbuvable chez lui ou mettre méchamment en danger sa santé mentale, comme lorsqu'il fait des efforts désespérés pour se rappeler d'une enquête sur laquelle il a travaillé lorsqu'il débutait sa carrière). Si bien qu'à un moment, excédé, le spectateur regarde la troisième enquête en se disant "nom d'un chien, mais c'est encore lié à Winter ?!" et pas du tout. Comment ces gens, en 4 enquêtes, ont réussi à créer des fausses pistes de ce genre, en exploitant les traits de son personnage pour nous conduire à tirer des conclusions hâtives, relève du génie.

ErikWinter_Nuit
Mais ce qui est encore plus impressionnant, c'est la subtilité que Kommissarie Winter déploie lorsqu'il s'agit du sujet-même de ses enquêtes. Ainsi, la première affaire soulèvera des questions relatives à l'immigration, la place de la femme, l'extrêmisme, la vie dans les quartiers défavorisés, etc... mais la série se contente juste d'attirer notre attention sur un sujet. Elle ne le traite pas. Elle n'en disserte pas. Pour se faire un avis, aucun personnage ne va commencer à porter de jugement sur ci ou sur ça ; Winter se contente de poursuivre son obsédante quête de l'explication (pas vraiment la vérité, d'ailleurs, juste l'explication qui lui permet de comprendre pourquoi le crime a eu lieu), ouvrant des portes pour le spectateur qui peut décider soit d'y jeter un oeil et d'y découvrir des tas de choses intéressantes, ou d'en faire l'abstraction pour se contenter de l'enquête. Pas de leçon de morale.
Quand un personnage a été violé, on ne parle pas de viol, on montre le crime (avec une retenue la plus digne possible sans sacrifier l'émotion). On ne cherche pas ensuite à appuyer en disant que le viol c'est mal. On espère que les spectateurs, s'ils n'en étaient pas arrivés à la conclusion eux-mêmes, ont au moins su lire dans les yeux de Winter tout le mal qu'il pensait de cette sordide affaire.
C'est certainement ce qu'il y a de plus reposant dans Kommissarie Winter : cette façon de nous donner l'impression de faire l'expérience des enquêtes sans jamais en expliciter les tenants et les aboutissants. Et c'est sans doute aussi ce qui explique que Kommissarie Winter ne deviendra jamais un succès d'audiences international. La série ne peut s'apprécier entre deux portes, et n'offre sans doute pas le même niveau de moralisation de la plupart des séries policières. Il faut savoir lire les silences. Tous les publics n'ont pas envie de cela, et ça se conçoit.

Quelques uns des décors de la série Quelques uns des décors de la série Quelques uns des décors de la série Quelques uns des décors de la série Quelques uns des décors de la série

Mais pour les spectateurs qui feront l'effort de se plonger sans peur dans les silences, et les plans montrant un Winter dubitatif tentant de mettre de l'ordre dans ses pensées, la récompense est sans égale. Kommissarie Winter est un véritable bijou, plein d'émotions, plein de pistes de réflexion, plein de simples merveilles dont on se régale entre deux scènes sans concession, parfois violentes, parfois stressantes, parfois très graphiques, parfois choquantes par leur pouvoir de suggestion.
Car la capacité de Kommissarie Winter à vous donner l'impression d'être Erik Winter est à double tranchant...

27 mars 2012

Délicieux anachronisme

BlackMarch

Comme le temps passe vite ! Figurez-vous un peu qu'au début du mois, Miss Fisher's Murder Mysteries était une série que je me mettais de côté pour avoir des pilotes à regarder pendant le Black March. De toute façon, ça ne servait à rien de se précipiter pour le regarder puisqu'aucun autre épisode n'allait être diffusé avant le début dudit Black March, alors, bon...
Et voilà qu'au final, je n'y ai pas touché depuis plus d'une vingtaine de jours ! Il était grand temps d'y remédier, ne serait-ce que pour décider du sort de la série dans mon "planning" d'avril. C'est que, héhé, dans quelques jours, on revient aux affaires ! Alors, Miss Fisher's Murder Mysteries, on garde, ou bien ?

Phryne

Laissez-moi couper court au suspense : OUI. Mais uniquement parce qu'on n'en attend pas non plus une révolution. Aussi badine que peut l'être son héroïne, Miss Fisher's Murder Mysteries est une série qui dégage le même parfum rétro qu'un vieux roman d'Agatha Christie paru chez les éditions du Masque : c'est un peu usé, certes, mais à ce stade de raffinement, on peut aussi bien appeler ça un classique.

La série ne fait preuve d'aucune sorte d'originalité et donnera même pendant le pilote d'authentiques envies de rouler des yeux en soupirant "eeet bien-sûr". Mais ce n'est pas grave ! Le charme de Phryne fait son effet, et rares sont les séries de nos jours à bien vouloir nous offrir ce genre de délicieuses investigations enlevées. Des générations de téléphages ont grandi avec les Arabesque et les Columbo, jusqu'à ce que débarquent Les Experts pour (paradoxalement) saloper le travail et lui ôter toute sympathie et bonne humeur, imposant à la place la froideur, la rigueur et la précision scientifique dans les enquêtes. Miss Fisher's Murder Mysteries ne mange pas de ce pain-là, et se regarde avec énormément d'amusement parce que, diable, déjà que le crime augmente à Melbourne, si en plus il faut le prendre au tragique !
Certes, Phryne Fisher bénéficie de l'aide d'un cerveau plus rationnel, en la personne de son amie, le Dr Mac, mais elle ne se base pas sur son travail pour avancer, c'est plutôt une complice au quotidien, qui lui file un coup de main très occasionnel dans le cadre de ses aventures. Par son entremise, l'épisode est paramétré pour répondre aux attentes des spectateurs devenues incontournables en termes de preuves scientifiques dûment examinées, tout comme le recours à de vrais policiers sera nécessaire à un moment, ou à des gros bras bien utiles quand il commence à y avoir un peu d'action. Le pilote concède donc, par petites touches, qu'il y a certaines choses dont on ne saurait plus se passer dans une série d'enquêtes. Mais la présence renversante d'Essie Davis illumine tant et si bien l'écran en permanence qu'on prête à peine attention à ces personnages qui ne sont que des accessoires de plus dans sa scintillante garde-robe.

Ainsi donc, oscillant nonchalamment entre les poncifs du genre et les impératifs télévisuels modernes, le déroulement de cette première enquête est très convenu et ne surprend guère. Ce n'est pas le but, pour tout dire, et en vérité on s'en accommode fort bien. Qu'il s'agisse d'assister aux manifestations du charme têtu de l'héroïne, ou de la voir s'inviter dans une enquête où, concrètement, personne ne lui a demandé son avis, eh bien on suit gentillement, sans protester, en riant soit de l'audace de Madame, soit des petites sceynettes hilarantes qui jalonnent l'épisode (j'ai notamment une affection toute particulière pour l'adorable petite bonne Dot), à l'instar de celle-ci, courte mais désopilante, qui peut cependant présenter un vague aspect spoilerisant :


Black March, tout ça, donc : streaming. Courage, c'est presque fini. Consolez-vous, ça fait partie de ma collection d'extraits sous-titrés.

Il ne faut pourtant pas en conclure hâtivement que Miss Fisher's Murder Mysteries se regarde comme une comédie policière. Un axe peu mis en avant, mais non moins marquant, nous promet un fil rouge plus tragique, en rapport avec la disparition de la soeur de Phryne voilà une décennie. Explicitée le moins souvent possible, cette intrigue est légèrement feuilletonnante visiblement, et, si l'on n'en attend pas grand'chose dans le pilote, elle peut donner une histoire bien troussée sur le long terme. Et surtout, elle apporte des notes plus sévères, voire tragiques, dans cet épisode par ailleurs aussi léger que des bulles de champagne.
Dans un autre registre, il faut quand même bien avouer que Phryne Fisher est une femme en avance sur son temps, et que les dialogues comme les situations soulignent occasionnellement ce fait. Il y a dans son comportement quelque chose de libéré et donc de libérateur, qui a le don de rappeler que certains acquis n'ont pas même un siècle. L'intrigue elle-même, sans vouloir vous en dévoiler les détours (et ce, bien que cela ait fait partie des passages les plus prévisibles), attestera que la condition féminine était il y a encore peu bien précaire...
Un propos subtilement féministe dans une série policière ? On aura tout vu.

A une époque où les séries policières se doivent d'être ci ou ça, et surtout pas autre chose, pour coller au maximum au cahier des charges en vigueur, Miss Fisher's Murder Mysteries propose ainsi une galerie d'anachronismes savoureux à bien des égards tout en faisant preuve, pardon pour le jeu de mot, de remarquables qualités d'adaptation. La série ne manquera, au long de sa course, sans doute pas de charme (cela ne fait en tous cas certainement pas défaut à son interprète principale), mais il ne faut pas en espérer plus que du divertissement de qualité.

Comme les bonbons à la violette de votre grand'mère, les enquêtes de Miss Phryne Fisher ne rassasient pas, mais ont ce petit goût de revenez-y.
Eh bien soit, revenons. Rendez-vous est donc pris pour le mois d'avril.

22 mars 2012

Winter is finally coming !

BlackMarch

Vous savez quel est le grand défaut de Kommissarie Winter, qu'arte diffuse à compter de ce soir sous le titre Les Enquêtes du Commissaire Winter ? De ne pas avoir de sortie en DVD avec des sous-titres anglais ou français à ce jour.
C'est le SEUL défaut.
Et il peut être aisément corrigé. [insérer ici un gros clin d'oeil appuyé en direction d'arte]

Je trouve infiniment dommage qu'arte ne fasse pas autant de bruit autour de Kommissarie Winter que de Borgen, alors que la série n'en est pas moins très méritante (mais Borgen, à quelques semaines des élections, forcément ça fait plus de buzz, normal).
Puisqu'il faut donc tout faire soi-même ici, je vais donc vous rappeler qu'il FAUT regarder Kommissarie Winter, série à laquelle j'ai déjà abondamment jeté des fleurs dans ces colonnes, ainsi que les tags au bas de cet article vous le rappelleront. Ce n'est pas une série policière comme les autres, et vous n'êtes pas sans savoir que venant de moi qui déteste la plupart des séries policières, c'est un vrai compliment.

A l'occasion de Scénaristes en Séries, voilà ce qui semble maintenant faire une éternité, j'avais eu la chance de découvrir le pilote de la série, et d'approcher Trygve Allister Diesen, réalisateur de "Vänaste land", première enquête en deux parties de notre cher commissaire. Cet homme, absolument charmant au demeurant, s'est avéré bien plus bavard au sujet de la série qu'Åke Edwardson, l'auteur des romans dont la série est tirée, et je me suis dit que je n'allais pas garder cette rencontre jalousement pour moi. Je vous propose donc aujourd'hui nos échanges. (vous l'aurez compris, contrairement à la dernière fois, cette interview n'a rien de fictif)
Je vous épargne le moment pénible pendant lequel il a tenté laborieusement de m'apprendre à prononcer son nom sans buter dessus, et passe directement aux questions relatives à la série. Croyez-moi, c'est pour votre bien.

TrygveAllisterDiesen

lady - Donc, vous êtes le réalisateur de Kommissarie Winter ?
Trygve Allister Diesen - Le réalisateur et "concept director", oui, j'ai réalisé les deux premiers épisodes, et établi d'identité de la série. Je n'ai pas écrit la série, mais en Scandinavie, on a ce qu'on appelle un "concept director" qui est là pour créer l'identité visuelle, et définir le ton de la série.

lady - Et c'est justement un ton très spécifique...
Trygve Allister Diesen - Oh, merci ! C'est ce que j'ai essayé de faire.

lady - Comment êtes-vous venu à ce projet ?
Trygve Allister Diesen - Sur un appel téléphonique. [rire] Non, je travaillais sur autre chose, et ils m'ont envoyé le livre d'Åke Edwardson. Ils avaient vu ma mini-série, qui s'appelle Torpedo...

lady - Quelque chose de complètement différent...
Trygve Allister Diesen - Oui, tout-à-fait ! C'était plus proche de The Shield, c'était beaucoup plus sombre, plus réaliste, plus brutal, et plus dur, avec un ton totalement différent, mais ils avaient vu Torpedo et m'ont dit qu'ils voulaient me rencontrer, que je lise le livre et que je voie si je pouvais en faire une série. Et j'ai aimé le livre. Et j'ai aimé les producteurs. Et l'acteur est monté à bord... et tout d'un coup on était en train de tourner. C'est comme ça que ça s'est passé. En tant que réalisateur, c'est vraiment un gros engagement, ça a pris près d'un an de faire ces deux épisodes, c'est le plus gros projet de ma vie ; du casting à la post-production, tout ça prend du temps, et ça demande beaucoup de patience. Je crois que John Huston disait que le métier de réalisateur, c'est trouver le meilleur script possible, embaucher les meilleurs acteurs possibles... et trouver la meilleure chaise possible. C'est vrai ! Une grande partie de ce métier consiste à trouver avec qui on veut travailler, puis de les inspirer pour qu'eux fassent de leur mieux, et ensuite de s'en attribuer tout le mérite.

lady - J'étais vraiment très touchée, hier lors de la projection. C'est probablement l'un des meilleurs épisodes qu'on ait pu voir ce weekend. Ce n'est pas une série d'enquêtes comme les autres... Est-ce la raison pour laquelle vous avez voulu travailler sur cette série ?
Trygve Allister Diesen - Absolument. Et c'est la raison pour laquelle nous avons passé tellement de temps sur le casting pour Erik, le personnage principal. Magnus Krepper a été approché à peu près en même temps que moi, je pense. Alors quand je suis arrivé, il s'agissait de savoir si nous voulions travailler ensemble, et j'ai trouvé très intéressant de travailler avec lui, il n'est pas un acteur comme les autres. Il est suffisamment courageux pour se montrer faible, il ne ressent pas le besoin de se montrer comme quelqu'un de fort tout le temps, comme un "macho". C'est aussi un "macho", un homme viril de temps en temps, mais il peut également montrer la peur, il peut également montrer le désespoir ; certains acteurs ne peuvent pas le montrer, ils veulent être le héros, et ça, ça rendait notre personnage plus réel et plus intéressant à regarder. Et plus attirant, aussi. C'était un niveau d'authenticité dont on avait besoin, parce qu'elle est également très contagieuse, parce que les autres acteurs ont adopté cela. Et en tant que réalisateur, on a besoin d'abord de pouvoir faire travailler les acteurs ; mais ensuite, d'être aussi inspirés par eux.

lady - C'est parce que vous avez énormément travaillé avec les silences, et les échanges de regards ?
Trygve Allister Diesen - Il y a tellement de séries qui se contentent de parler tout le temps, tout est verbalisé, tous les conflits sont explicités, le contexte et le subtext ont besoin d'être énoncés... Talk is cheap. C'est tellement facile de montrer les personnages en train de parler de quelque chose plutôt que de montrer ce quelque chose. Le dialogue est pour moi la façon la plus faible de raconter une histoire, mais je trouve tellement plus intéressant de montrer un sujet par des images. Cela dépend plus de la façon dont on perçoit les choses. Alors nous avons effectivement beaucoup travaillé sur les regards, comme j'avais aimé le faire avec d'autres acteurs par le passé. Le jeu consiste à prendre le script, prendre un stylo, et voir tous les mots qu'on peut enlever. Et c'est là qu'on voit toutes les choses qu'on peut exprimer différemment. Un bon cinématographe peut dire autant de choses, et évidemment je devais m'assurer que tout était dit et que je ne laissais rien de côté. Mais quand on réalise, on doit se demander ce qu'on peut montrer sans avoir à le dire. C'est plus intéressant, et plus engageant pour le spectateur aussi.

lady - Les regards qu'on sent, c'est aussi ceux de ce ghetto. Il y a des yeux en permanence...
Trygve Allister Diesen - Complètement, et c'était intéressant du point de vue d'Erik. Dans le livre, c'est un homme qui vient d'une bonne famille, il a des goûts coûteux, il aime des vins très chers et il conduit une Mercedes... Donc pour lui, pour ce personnage, entrer dans ce monde si différent où sa présence est déplacée, c'est être comme un poisson hors de l'eau. Il fallait donc le retranscrire même si ce n'est pas dit comme ça dans le livre. Et c'est ce que nous voulions montrer, la façon dont il détonne. C'est pour cela que tout le monde le regarde.

lady - En parlant plus tôt avec l'auteur [Åke Edwardson], il m'a dit qu'il avait voulu travailler sur deux choses : le silence, et SURTOUT PAS de constat social !
Trygve Allister Diesen - Sur le silence, je suis complètement d'accord. Si on peut avoir un bon silence, et qu'on a un bon acteur, il faut l'utiliser. C'est ce que j'ai fait plusieurs fois, notamment en ne montrant pas la personne qui dit quelque chose, mais plutôt la façon dont l'interlocuteur réagit à cette phrase, pour montrer plutôt ce que cela signifie pour quelqu'un d'autre que celui qui parle. La réaction primait sur l'action. On essaye de comprendre ce que les personnages pensent. Et pour Erik, les choses sont internes, la plus grande partie des dialogues a lieu dans sa tête. On ne montre pas ça en le montrant en train de parler sans arrêt, il faut trouver d'autres façons d'entrer là-dedans, avec des flash, ou bien ces moments quand il observe en réfléchissant, ou bien quand il écoute de la musique...

lady - Quelle est cette obsession pour la musique ?
Trygve Allister Diesen - Dans le livre, c'est un grand fan de jazz. On a pensé que c'était important pour cette enquête, alors on a repris cela. Dans la scène d'ouverture, on a cette musique, pendant ce meurtre atroce, et ça l'interpelle profondément. Ça, par contre, ce n'était pas dans le livre, mais ça nous permettait de reprendre le sentiment d'intensité et d'émotion. Même si ça vire à l'obsession. C'est parce qu'il veut comprendre ce qui s'est passé, et le public, lui, veut comprendre comment Erik réfléchit. Donc tout s'emboîte.

lady - Est-ce qu'il veut comprendre qui a tué, ou est-ce qu'il veut comprendre pourquoi ?
Trygve Allister Diesen - Il veut surtout comprendre pourquoi. Et ça, c'est ce que nous avons essayé de faire. C'est cette obsession qui est captivante pour le spectateur, même si elle est douloureuse. Si on veut juste s'asseoir et manger du popcorn, alors il faut regarder Les Experts. On n'a pas cherché à faire une histoire qui soit divertissante pour tout le monde ; si on veut plaire au plus petit dénominateur communn, alors on fait de la soupe. Avec Kommissarie Winter, on a voulu mettre le public au défi, et je pense que le public veut plus que le plus petit dénominateur commun, aussi.

lady - On entend beaucoup parler de séries policières scandinaves, notamment pendant cet évènement. Evidemment, il n'y a pas que des séries policières, mais pensez-vous que ce soit quelque chose de typique ?
Trygve Allister Diesen - Oui, du fait de notre longue tradition littéraire en la matière. Et puis, c'est un genre qui attire beaucoup de bons auteurs, alors les séries vont là où sont les bons auteurs. Mais une autre raison, c'est que les histoires criminelles voyagent mieux, au cinéma et à la télévision ; il y a un public pour ces histoires-là, qu'elles soient bonnes ou mauvaises. C'est comme l'horreur, il y aura toujours un public pour l'horreur. D'ailleurs peut-être que ça me plairait de faire une série comme True Blood. Ce serait peut-être amusant de faire quelque chose avec des zombies, je ne sais pas, des zombies qui font du snowboard...? Mais pour l'instant je travaille sur deux films, après on verra. On ne sait jamais à l'avance dans quels projets on va se lancer, mais je sais que je peux faire des choses très différentes, et m'attaquer à des genres différents. Par contre, la comédie c'est très difficile...

Imaginez : déjà que j'étais tombée amoureuse de la série, il a fallu que son réalisateur me susurre ce genre de choses à l'oreille... J'étais comblée.

Winterisfinallycoming
Donc voilà, vous savez que faire ce soir. Que je ne vous prenne pas à faire autre chose que regarder Kommissarie Winter !

18 mars 2012

[#Piemarathon] 1x08, taffy

BlackMarch
Le retour au Piehole se fait dans la joie et l'allégresse alors que l'un des (22) meilleurs épisodes de la série annonce l'arrivée de la fin de la première saison. Pour nous consoler, nous aurons droit à une structure inhabituelle pour cet épisode qui concluera sa première enquête avant même la fin de son premier tiers. Une façon originale pour Pushing Daisies de fournir sa dose contractuelle de procedural tout en s'intéressant aux mésaventures de nos personnages eux-mêmes.

Piemarathon_1x08_Title

Et pour ce nouvel épisode, nous découvrons le décor du rutilant magasin Bittersweets.
Oh, Bittersweets ! La boutique de mes rêves ! Oui enfin, juste après le Piehole, naturellement. L'endroit compte parmi les décors les plus magnifiques de la série, avec son mélange improbable de turquoise, d'orange, de noir et d'ors. De la devanture aux uniformes, en passant par les comptoires ou les étagères, Balsam's Bittersweets Taffy and Sweets Emporium est déjà une friandise avant même qu'on ait ouvert la bouche. Tenez, rien qu'à le prononcer ! Inutile évidemment de souligner combien la musique est un régal également, puisque je l'ai moi-même utilisée par le passé. Oui, les bonbons, c'est le carnaval qui passe en ville, de bout en bout.
Cela ne gâche rien que Molly Shannon soit de la partie, toute irritante qu'elle sache parfois être, elle apporte définitivement une grande énergie à l'épisode. Il n'est d'ailleurs pas très étonnant de constater que Ned est absolument dénué de tout esprit de compétition, mais heureusement, les Pieholettes en auront à remontrer à la vieille carne en matière de concurrence plus ou moins loyale, plus souvent moins que plus.

Tant qu'on en est à parler de style, faisons un instant une pause sur la garde-robe de notre fille morte. Si Chuck nous a charmés avec des looks variés, allant jusqu'à très ostensiblement se faire passer pour Audrey Hepburn dans l'épisode se déroulant dans l'univers des courses hippiques, cette fois elle a décidé de se réincarner en Janis Joplin. Ca surprend mais c'est toujours un régal.

Piemarathon_1x08

Bon alors, du côté du nerf de la guerre, il y a encore une fois de l'eau dans le gaz entre Ned et Chuck. Essentiellement parce que lui a d'atroces remords (rapport au fait qu'il a tué le père de sa bien-aimée, ce genre de détails) et que maintenant qu'ils sont officiellement ensemble, il panique encore plus. C'est quand même lui qui avait posé la question de la clarification de leur relation, hein ; toujours aussi doué ce Piemaker. Alors du coup, l'épisode nous montrera un Ned non seulement jaloux (lorsque le premier mort de l'épisode drague lourdement Chuck), mais aussi sec, distant, et franchement pas très charmant, pour le coup.
Et comme Emerson, on se régale de le voir se débattre de cette façon : c'est hilarant.

De son côté, Olive passe par une nouvelle phase dans ses sentiments vis-à-vis de Ned et Chuck : la jalousie. Elle va être aussi être d'une, hm, bonté défectueuse envers la fille morte plusieurs fois au cours de l'épisode. Olive peut être une véritable ode à l'agressivité passive, quand elle s'y met... Elle va aussi pleurer un bon gros coup, à la fois parce que Ned est en prison par sa faute (c'est difficile de ne pas être d'accord avec Emerson à ce sujet quand on regarde aussi le Ozmarathon en parallèle !), et à la fois parce qu'elle réalise que ça ne marchera jamais. Et c'est bien, c'est très bien, ça veut dire qu'elle avance ! Cela se voit avec le retour du vendeur de produits homéopathiques, Alfredo, avec qui elle discute toujours sans trop y penser, alors qu'il est complètement fou d'elle. Il lui fera la plus adorable des déclarations fusionnelles, mais pas au bon moment. Mauvais timing pour le pauvre Fredo qui repart sur les routes et qui va ravir le coeur d'Olive... en sa propre absence.

Olive et Chuck ne peuvent pourtant pas nier qu'elles forment toujours une équipe efficace en diable, même voire surtout lorsqu'il y a une bourde à faire. Et c'est justement ce qui va nous conduire au second mort de l'épisode, un second mystère fort sympathique qui, Ned étant en prison, va forcer Emerson à bosser un peu en solo, plutôt que prendre le Piemaker pour son dévoué assistant.
La deuxième enquête va nous fournir dees instants absolument hilarants (Les Experts n'ont rien à envier à notre petite Chuck et son procédé pour relever les empreintes) et des références savoureuses ; l'épisode montre alors vraiment un Pushing Daisies au top de sa forme en la matière. A la fin, j'étais quand même bien contente de Dilly Balsam plie bagage ; pour un épisode, c'était un plaisir de la voir exploser dans tous les sens, mais si elle avait dû devenir permanente, j'aurais vite fatigué.

On n'a pas trop de nouvelles du mystère qui avait bouclé l'épisode précédent, mais le cliffhanger de grande ampleur de cet épisode-ci est là pour nous préparer à un final captivant...

Publicité
2 mars 2012

Larmes de craie

BlackMarch

Cela faisait... pfioulala ! Tout ça ? Eh oui, un an, quasiment jour pour jour d'ailleurs, que je n'avais pas proposé de post Comme au cinéma. Mais Detachment étant le seul film que j'avais cagoulé récemment et pas encore vu, le mois de Black March semblait particulièrement propice à une découverte cinématographique, histoire de changer un peu. Alors allons-y.

C'est quoi le nom du film ? Detachment
C'est plutôt quel genre ? Agonisant
Qui on connaît là-dedans ? Derrière Adrian Brody, qu'on attend de voir un jour dans une série, et par "on" je veux dire moi (si possible sur le câble s'il vous plait merci), il y a un cast bien connu des téléphages, avec Christina Hendricks (Mad Men), Lucy Liu (Ally McBeal, Southland), James Caan (Las Vegas), Blythe Danner (Huff, Presidio Med), et même une ptit bout de William Petersen (Les Experts) et Bryan Cranston (Breaking Bad), essentiellement présents pour la beauté du geste.
Ça date de quand ? 2011
En résumé, de quoi ça parle ? D'un prof remplaçant qui arrive dans un nouveau lycée.

Henry Barthes, narrateur désabusé ou témoin blasé ? Le dernier coup de fil Directrice-caméléon Carnets de correspondance anonymes I go ahead and smile

En moins résumé, de quoi ça parle ? Henry Barthes est un enseignant en littérature qui doit faire un remplacement de quelques semaines à peine dans un lycée. Il est à un moment difficile de sa vie, ce que les joies du métier d'enseignant comme le hasard ne vont rien faire pour arranger.
Et ça finit comment ? Avec un happy end (et pour tout dire on n'y croyait plus).

Pourquoi c'est bien ? Parce que si même dans un film pourri (voir aussi : Splice), Adrian Brody est relativement bon, alors dans un bon film, vous pensez si on se régale ! Et puis surtout parce que le film évite de se percher du haut d'une boîte à savon pour prêcher la bonne parole, et essaye plutôt de nous plonger dans la réalité du métier d'enseignant en nous incitant à l'expérimenter de façon intime, en goûtant au dégoût montant de ses personnages, sans jamais totalement faire passer les étudiants pour des monstres, des étrangers ou des numéros. C'est donc un film profondément honnête ; il a un message, c'est évident, et il y a de la dramatisation, c'est sûr, mais il parvient, notamment parce qu'il joue également sur plein d'anecdotes et de petites chroniques (hélas) ordinaires, à ne pas tomber dans la caricature, ou très peu. Cela tient aussi beaucoup au fait que son personnage ne se prend pas pour Michelle Pfeiffer et ne se met pas en tête qu'il va sauver ses élèves. J'ai également beaucoup apprécié la réalisation, qui a un côté très observateur et neutre un instant, et plonge soudain dans des plans, voire même des effets de style, pour renforcer le côté subjectif de certaines scènes ; et en-dehors de ses tâches rouges comme autant de signaux d'alerte, la photographie reste aussi très sobre et froide. En somme, c'est un film qui parvient admirablement bien à mêler ses deux objectifs, à savoir raconter quelque chose de fictif, et le décrire de façon documentaire.
Pourquoi c'est pas bien ? Personnellement, l'intrigue de Barthes relative à sa famille, je m'en serais passée. Elle était bonne, en un sens, parce que bien écrite et bien menée, émouvante même, mais j'avais l'impression en voyant ces scènes que le script original avait forniqué avec n'importe quel autre scénario de film sur les douleurs de son personnage central, et que dans ces scènes-là, Detachment était leur bâtard. On s'en passerait bien. Ca ajoute de l'épaisseur au personnage bien-sûr, mais, limite, trop. L'histoire avec la jeune prostituée, oui. L'enfance, le suicide de la mère, le grand-père en fin de vie, pas trop, non.

Ah, les joies du cinéma ! Avoir 16 ans, auditionner pour un film se déroulant dans un lycée... et finir pute. C'est ça aussi, les joies du cinéma.
La réplique qui tue : "Some of us believe that we can make a difference. And then sometimes we wake up, and only realize we failed". Et ils reviennent échouer chaque matin. Mais au fait, c'est pas ça, la définition de la folie ?
La scène qui tue :
Il y avait pas mal de scènes de qualité dans ce film, dont j'aurais pu vous fournir l'extrait, avec des passages très pertinents, des analyses intéressantes du sentiment des professeurs, ou simplement des passages gorgés d'émotion (en particulier, une scène avec Lucy Liu m'a énormément touchée), mais finalement j'ai choisi celle-ci. Attention, elle correspond à un SPOILER, vous pourrez pas dire que j'ai pas prévenu. Mais un spoiler minime, je trouve.
La proviseur, Carol Dearden quitte son poste et quelqu'un d'autre va prendre sa place. Elle n'est pas spécialement aimée, ni par les élèves, ni par le corps enseignant qui en a vu défiler d'autres et qui ne croit pas plus en elle qu'en autre chose. Mais à l'heure du déjeuner, elle les a rassemblés dans l'auditorium pour un dernier speech, pendant que dehors, les élèves ont droit à une pause plus longue qu'à l'ordinaire. Alors ils sont là, ramassés dans cette salle mal éclairée, assis en silence, et ils attendent. Et j'ai trouvé ça incroyablement fort de les voir, comme réfugiés dans leur dernier bastion, ensemble, alors qu'on imagine le reste du bâtiment continuer de vrombir de l'activité de ses élèves, et ils sont là, bienveillants quand même, prêts à écouter sans trop y croire un discours supposément fort de cette femme à ses troupes, tel le général qui devrait leur parler d'avenir, ou leur rappeler les batailles menées côte à côte, et qui finit... bah, comme ça. C'est l'intégralité de la scène. Et c'est terrible.

Detachment___Extrait
Bon alors, Black March, machin, tout ça... donc exceptionnellement : Youtube.

Une note ? CagoulesCagoulesCagoules
Comme je n'ai toujours pas créé de demi-cagoule en complément (et, rendons-nous à l'évidence, ça ne se produira jamais depuis le temps que j'en parle), seulement trois cagoules sur cinq pour ce film (parce que sur l'échelle The Fall, il n'en méritait quand même pas quatre). Les quelques choses que j'ai à lui reprocher lui auront cruellement coûté, en dépit de ses grandes qualités.
Bilan : Je me rappelle avoir lu dans Tant qu'il y aura des élèves une réflexion qui en gros disait ceci : tout le monde s'autorise à disserter sur l'école, on se sent tous qualifiés pour en parler parce qu'on y a tous été. Et c'est vrai que les parents d'élèves, les élèves, les voisins, la boulangère, et évidemment les politiques, tout le monde parle de l'école, de l'éducation, du métier de profs, comme si on savait ce que tout cela signifiait. Tout le monde a une opinion.
Mais dans ce concert de doigts pointés et de yakafokons, de grandes réformes magistrales et de petites phrases, la voix qu'on entend de moins en moins, c'est peut-être celle des profs. Pas la voix dans le mégaphone les jours de manifestation (les médisants trouveront qu'entendre cette voix si souvent dans l'année, c'est déjà pas mal), mais la voix un peu éteinte de celui qui retourne faire son boulot tous les matins avec une boule au ventre. Detachment est cette voix-là.
Et ça se sent clairement, d'ailleurs, parce que le film, s'il a évidemment des aspects dramatiques évidents, flirte quand même énormément avec le documentaire, comme je l'ai dit.
Mais à la fin, le titre me pose problème. Détachement ? Pourtant, non, pas vraiment. Désenchantement, découragement, désoeuvrement : c'est certain. L'envie d'essayer de se détacher, peut-être, à la grande rigueur. Mais pas de détachement total. Ils n'y croient plus mais ils viennent encore, ils essayent encore ; certains jours plus que d'autres, certains jours en trainant plus la patte que d'autres, et probablement que ça ne va pas s'arranger avec le temps et les couloirs vides le soir des réunions parents/profs. Mais ce sont tous de braves petits soldats qui continuent de donner tout ce qu'ils ont, même s'ils ont de moins en moins à donner. Ils grognaient, mais ils enseignaient toujours.
Même le personnage de Brody, Barthes, qui semble tellement noyé dans ses propres douleurs et dans les questions qu'il essaye d'éviter de se poser sur ses origines, ne peut s'empêcher de prendre sous son aile une petite ado perdue, ou de consoler une autre qui a vraisemblablement besoin d'être écoutée. De se lancer dans un cours passionné, d'encourager le talent d'une jeune artiste. D'admirer le travail d'une collègue, de se lier à elle. De prendre sa sacoche et de tout recommencer dans un autre établissement dés la mission d'après.
Et non seulement les protagonistes ne sont pas dans le détachement, aucun, mais en plus il est impossible pour le spectateur non plus de ressentir un quelconque détachement. Tant mieux, c'est l'effet recherché. Si bien que le happy end (tout relatif, c'est vrai) du film parait déplacé vu le reste de son contenu. On a trop eu mal, on a trop été découragés, pour vraiment sourire totalement de bon coeur à la fin.

On ne vient pas pour qu'on nous dise que c'est bon, c'est réglé, quelqu'un a trouvé la solution. On vient pour réfléchir pendant une heure trente à ce qu'on sait de l'école, et vous savez quoi ? Bah on n'en savait pas grand'chose. Si, mais en fait, non. Une fois qu'on a ressenti ce désoeuvrement, difficile de revenir à la normale sans y réfléchir encore un peu. C'est en cela que Detachment n'est pas juste un film et que ses emprunts au genre documentaire (la réalisation, les apartés de Barthes...) lui donnent un côté si réaliste et nécessaire.
Mot-clé : nécessaire.

28 janvier 2012

Requiem pour Alcatraz

J'ai une vraie admiration pour JJ Abrams. Ce mec a un don. Ces séries sont creuses, mais elles fonctionnent. Il a tout compris au fonctionnement de l'univers, et de la télévision mainstream moderne en particulier. C'est un type qui n'invente rien, ne révolutionne rien, mais qui le fait extrêmement bien et avec un véritable flair lorsqu'il s'agit de harponner les spectateurs avec des artifices. C'est un magicien. Beaucoup de mecs dans son genre se contentent de faire de la petite série à la con jusqu'à la fin de leurs jours, mais s'ils sont dans son genre, il ne sont pas dans sa catégorie, il les bat tous. Il n'a pas de vision créative, il n'a pas un univers comme on peut le dire de types comme Kelley, Whedon ou Fuller, mais il a trouvé une formidable façon d'exercer sa transparence avec panache, et ça force l'admiration.
Je méprise la plupart des choses qu'il fait (quand il ne se contente pas simplement d'y associer son nom au début, et de filer ensuite vers de nouvelles aventures, genre Lost), mais j'ai l'honnêteté d'admettre que sur le principe, il a tout bon. C'est un vrai malin, à défaut d'être un extraordinaire créatif. Il a vraiment du nez. Il mérite son succès.

C'est ainsi que s'ouvre, enfin ! mon fameux post sur Alcatraz, mille fois esquissé, mille fois reporté, et mes compliments se bornent à l'oeuvre d'Abrams en général plutôt qu'à la série en particulier, c'est vous dire si je suis déjà au max.
En fait, les compliments, il n'y en a plus après l'image.

Alcatraz

Pouf voilà c'est fini.

Parce qu'il faut être honnête, Alcatraz, c'est une grosse merde. Et je n'emploie pas souvent le terme de "grosse merde", quand même, vous pouvez vérifier ça reste assez sporadique. Mais là, on est quand même en plein dedans.

N'étant pas une inconditionnelle de Lost, même pas vraiment parce que ça ne m'a pas plu, mais simplement parce que je marche essentiellement au coup de coeur et qu'au bout d'environ 7 épisodes, je ne ressentais plus rien pour Lost et ai fini par regarder la série une fois tous les 5 ans (faudrait que je m'y remettre, un jour où j'ai rien de mieux à faire...), les comparaisons évidentes n'ont pas sonné comme une forme de recyclage éhontée. Hormis le fait que tout recyclage pur et simple est éhonté par principe. Mais disons que ça ne me fait pas hurler au sacrilège. Limite, pourquoi pas ? Lost n'était pas une mauvaise série, pourquoi ne pas s'en inspirer en fin de compte ? Donc, c'est lourd, visible et omniprésent, mais pourquoi pas, il y a des tas de créateurs de séries qui réemploient des recettes qui ont fait leurs preuves, ça n'est pas nécessairement choquant.

Le soucis d'Alcatraz c'est qu'on peut partir du principe que soit ce qui est nouveau est totalement dépourvu d'âme et d'originalité, soit il n'y a rien de nouveau du tout, et entre nous, je ne sais pas ce qui est le plus condamnable.

Il faut savoir que mon jugement sur Alcatraz ne se fait pas à l'emporte-pièce. Comme je croyais que le pilote était double, j'ai regardé les 2 premiers épisodes d'une traite en début de semaine (quand je me suis rendue compte de la méprise, je me suis dit, allez, tentons toujours, tant qu'on y est, ça s'arrange peut-être), avant de même donner sa chance au troisième un ou deux jours plus tard, parce que je lisais des trucs positifs sur la série, notamment de la part de personnes dont je tiens d'ordinaire l'opinion en haute estime. Comme quoi.
C'est donc sur la base de non pas un malheureux pilote, mais bien de trois épisodes, que je vous dis sans détour : c'est une grosse merde.

On a droit à tout.
La totale des clichés des séries qui n'ont rien dans le ventre. La jolie blonde (alors c'est vrai, elle est jolie). Le gros nerd. Le vieux austère. La minorité bien visible (alors c'est vrai, elle aussi elle est jolie). Pour un peu ce serait le cast d'un procedural autopolycopié genre Les Experts. Il nous manque juste un jeune premier et on a la collection complète. Vraiment c'est saisissant.
Les mystères à la con, aussi. Sauf qu'à chaque fois on les voit venir à 10 kilomètres. Chaque fois qu'il y a un truc un peu étrange qui se passe, le spectateur a vingt fois le temps de comprendre ce qui se passe avant que les personnages n'agissent dans ce sens, ou que la "révélation" soit faite. Et c'est vrai dés la scène d'intro du pilote, jusqu'à la fin du 3e épisodes, c'est fabuleux de cohérence et de constance.
L'ambiance joue uniquement sur la technique du "on ne vous dit pas tout" et des musiques lourdingues. Là-dessus permettez-moi de vous dire que c'est quelqu'un de sourd d'une oreille qui vous parle, et que ce quelqu'un ne remarque pas les musiques de fond dans les séries, sauf si elles sont excellentes, ou si elles sont cruellement ignobles. C'est bien-sûr le second cas ici et pour que je m'en plaigne c'est vraiment que ce soit quelque chose, parce que je suis pas regardante. Déjà, comme on a déjà dû vous le dire, ce sont les musiques pseudo-mystérieuses de Lost, c'est l'intégrale du soundtrack je pense, il ne semble rien manquer, et ensuite, le volume des musiques est à 125%, quand le volume des dialogues est à 75% et ça, c'est une pratique qui me met en rage. Insupportable de bout en bout. Pas une scène pour sauver les autres. Dés qu'il se passe un truc le spectateur est supposé s'inquiéter et se poser des questions, je suppose, mais j'ai un message pour la prod d'Alcatraz : eh les mecs, si vous avez besoin de faire signe constamment à vos spectateurs de s'inquiéter avec une musique omniprésente, c'est qu'ils sont incapables de le faire sans ça. Et ça signifie tout simplement que votre scénario est en échec. Ya pas de quoi faire les malins.

Le pire de tout, cependant, c'est qu'Alcatraz est en fait, derrière son intrigue presque mystérieuse, à peu près fantastique et soi-disant conspirationniste, un vulgaire cop show. Et même en maquillant le crime autant que possible, c'est insupportable tellement c'est flagrant. Pendant 3 épisodes, on a eu un criminel de la semaine à coffrer (et les enquêteurs font tout pour que ça prenne bien 45mn). Comme vous le savez, ce côté procedural m'est insupportable. Peut-être qu'il y a quelques années, encore, bon, je dis pas... mais là non, je ne supporte plus les cop shows procéduraux. Je sais pas, peut-être qu'il y a quelque chose à inventer ou ressortir des cartons, genre un drama procédural, pour que je me réconcilie avec la formule, mais là, c'est vraiment la collision de deux systèmes que j'ai pris en profonde aversion.

Mais il faut reconnaître : Alcatraz est, comme tout ce que j'ai vu faire Abrams jusqu'à présent, un objet de popculture prêt à l'emploi, avec tout ce qu'il faut pour essayer de capter l'attention du grand public. Simplement c'est complètement creux.
Et je ne sais plus pardonner ce genre de choses.

Le pire de tout, c'est que je n'avais pas de préjugé négatif contre le principe d'Alcatraz. Presque le contraire. Je ressens une sympathie sincère envers l'histoirique de cette prison, et je me revois encore, petite fille, regarder un épisode des Rues de San Francisco utilisant ce contexte pour une enquête, et me dire que ça ferait un super sujet de... de je sais pas, j'étais encore petite et je ne pensais pas en termes de séries potentielles, mais ça m'attirait comme sujet. Ca animait mon imaginaire et je peux comprendre que ça puisse donner plein d'histoires. Et plus de deux décennies plus tard, voilà Alcatraz.
Pour vous dire la vérité, depuis le début de la semaine, j'essaye de retrouver le titre de cet épisodes des Rues de San Francisco pour tenter de le revoir... Tout n'aura donc pas été perdu, mais quand même, quel gâchis.

30 décembre 2011

Dodging the bullet

L'autre jour, je ne sais plus où je flânais précisément, mais il s'agissait en gros de la page IMDb d'une série qui n'avait finalement jamais été retenue. Dans les commentaires, quelqu'un posait LA question qui me hante depuis bien longtemps maintenant, à savoir : qu'advient-il du pilote de cette série une fois que le couperet est tombé, et un autre contributeur répondait... attention, les âmes sensibles vont avoir un choc : rien. L'épisode est détruit.
Faisons une pause pour que tout le monde reprenne possession de lui-même.
Moi-même ça m'a demandé quelques minutes, je ne vous le cache pas. J'ai été prise d'un vertige renversant en pensant à tous ces pilotes détruits, introuvables, à jamais disparus, inaccessibles. Du travail pour rien. Jamais de postérité. C'est d'une brutalité qui me donnerait quasiment envie de pleurer, et par quasiment je veux dire que c'est sûr et certain et que je ne refuse pas qu'on me passe un mouchoir, merci.

Dans ces colonnes, les pilotes de type "unsold" ont souvent eu droit à une jolie place, parce que, eh bien, j'aime les pilotes, j'aime les découvertes, et que je ressens un sentiment de perte même quand une série que je ne regardais qu'en dilettante est annulée au bout de 15 ans alors, bon, coeur brisé pour coeur brisé, autant tenter des séries qui n'auront jamais dépassé le stade du pilote. Ainsi, des séries ont été évoquées ici, et je vais les mentionner à nouveau pour que vous puissiez tirer partie des tags : Pretty Handsome, Faceless, Nikki & Nora, Babylon Fields, Prodigy... J'en oublie sans doute. Et j'aimerais pouvoir mettre The Miraculous Year dans cette liste (ah c'était ptet sur cette fiche IMDb que j'étais, tiens, puisqu'on en parle).
La plupart du temps, je regarde ces pilotes invendus parce que, bon, déjà c'est pas poli de refuser un pilote, vous connaissez ma ligne de conduite à ce sujet, ensuite parce que toute découverte est toujours bonne à prendre, qu'il y a toujours quelque chose d'intéressant à trouver dans un pilote et ce même (surtout ?) s'il n'y a pas eu suite, mais aussi parce qu'il faut quand même bien admettre que ça fait toujours plaisir de faire une belle prise, et les pilotes que nous ne sommes pas supposés voir, c'est un de ces trésors cachés qui font aussi du bien à l'ego du téléphage. Soyons honnêtes, hein, il y a une part de "moi je fais partie de la minorité qui a vu" qui fait plaisir ; je ne sais d'ailleurs pas pourquoi je me gâche ce plaisir en venant ensuite vous en faire des posts et vous inciter à regarder aussi, héhé...! Je ne suis sans doute pas assez élitiste à mon goût.

Enfin voilà, tout ça pour dire que le pilote de série non-commandée, c'est un plaisir sur lequel je ne crache pas, jamais. Aussi quelle n'était pas ma surprise de voir la "publicité" autour de 17th Precinct, y compris sur The Hollywood Reporter. La façon dont ce pilote a mystérieusement échappé à la destruction puis, encore plus mystérieusement, trouvé le chemin du streaming puis, mystérieusement toujours, été évoqué par des sites qui d'ordinaires sont suffisamment "sérieux" pour ne pas parler d'épisodes leakés à tous bouts de champs, ça m'a surprise. Je trouve ça intrigant. Comprenez que j'ai de sérieux soupçons quant à la finalité de cette étrange apparition sur internet, dans la joie et l'allégresse de tous, y compris ceux qui d'ordinaire font mine de ne pas avoir remarqué que des videos de ce genre se promènent sur internet. En un mot comme en cent, il me semble que, quelque part, quelqu'un vient de nous donner une opportunité. Petite, fragile, intangible, sans doute. Mais une opportunité. A nous d'être nombreux à nous en servir.

...Si toutefois cela en vaut la peine. On en vient donc à l'objet de mon post : que vaut le pilote de 17th Precinct ?

17thPrecinct
Si vous êtes un lecteur régulier de ce blog, vous n'ignorez pas que j'ai pris les séries poulardières en grippe il y a plusieurs saisons maintenant. Depuis Les Experts, on a eu le temps de faire trois fois le tour de la question à cloche-pied. Chaque année on a droit à une, deux, trois séries policières procédurales où le héros est un enquêteur-pas-comme-les-autres-qui-a-une-faculté-particulière-pour-résoudre-les-enquêtes, ce qui fait que finalement, ils deviennent tous des enquêteurs comme les autres. On a parfois des pitches plus originaux, ponctuellement, et même de temps à autres des séries policières non-procédurales genre Southland, mais l'impression d'overdose est bel et bien présente et je ne pardonne plus rien depuis environ 5 ans dans le domaine.
Qui plus est, même si j'ai énormément apprécié Battlestar Galactica (je devrais me faire un marathon, tiens, ça me permettrait d'enfin voir la fin), je n'ai pas de tendresse particulière envers ses acteurs. Je suis contente quand je les vois, mais je ne les suis pas absolument. Idem pour Ron D. Moore que je n'en suis pas à considérer comme un Dieu vivant. David E. Kelley, là, d'accord, mais Moore...

Ce qu'il y a de bien quand on ne part pas avec un a priori positif, c'est que ça laisse plein de place aux bonnes surprises.

Le pilote de 17th Precinct commence pourtant assez mollement. Un crime, du sang, l'impression d'avoir mis les pieds dans un procedural comme tant d'autres. Arrivent alors nos deux enquêteurs (James Callis et Jamie Bamber), et la série s'amuse alors avec ses effets spéciaux. Un sourcil levé, l'autre froncé, on attend sans trop savoir sur quel pied danser comment cette histoire de magie ne va pas complètement tout gâcher. Il faut quand même voir que les mecs peuvent reconstituer le déroulement du crime dés les premières minutes du pilote, donc ça laisse circonspect dans un premier temps. La chose n'est pas facile à gérer, mais elle est brillante en réalité. Car quand arrive l'équivalent du coroner dans le monde de 17th Precinct, et que Tricia Helfer se la joue mi-Charmed, mi-Pushing Daisies (croisement contre nature s'il en est, pourtant), on découvre que la richesse de l'univers de cette série va justement lui permettre de respirer vis-à-vis des codes du procedural, tout en profitant de la popularité du genre.
Par-dessus le marché, outre les trois transfuges de Battlestar Galactica, on va retrouver Eamonn Walker (Oz !) dans la peau d'un commissaire de police doté d'un don de vision, Stockard Channing (évidemment restée dans les mémoires téléphagiques pour A la Maison Blanche) dans le rôle d'une vétérante qui va devoir prendre en charge une jeune recrue particulièrement prometteuse incarnée par Matt Long (The Deep End)... Le casting est précieux, les idées excellentes se succèdent. Elles parviennent à mêler à la fois des éléments conventionnels de la série policière telle qu'on en a bouffé ces dernières années, tout en apportant définitivement d'excellents twists. Mais attendez, n'allons pas trop vite. Il va se passer plusieurs minutes pendant lesquelles le pilote va lentement établir chaque personnage, sans trop en dire toutefois. C'est un passage un peu lassant car on va vite comprendre que l'intérêt de la série ne réside que très partiellement dans ses personnages.

C'est une fois tous ces personnages introduits que la bascule s'opère véritablement. On entre alors dans ce monde étrange grâce à l'instauration simple, rapide, mais nette, d'une véritable mythologie, tout en donnant l'opportunité à "l'enquête du jour", ainsi qu'à "l'enquête secondaire" (toutes deux des classiques de la structure d'une série procédurale), de dévoiler les étrangetés de l'univers de 17th Precinct. Les deux affaires utilisent, sans être trop tape-à-l'oeil, les propriétés de ce monde où toute chose est régie par la magie.
On comprend que le fonctionnement de la vie de chacun, au quotidien, est différente, à Excelsior (c'est le nom de la ville, ç'aurait donné un bien meilleur titre de série d'ailleurs). Il y a quelque chose d'assez mystique, d'ailleurs, dans la façon dont la magie est perçue à la fois comme utile et sacrée ; c'est presque animiste et cela se ressent sans être trop explicité, avec énormément de subtilité. Petit-à-petit, on commence à prendre la mesure des rouages de cet univers où la magie est à la fois quelque chose en quoi l'on croit, et que l'on utilise. Et on comprend que les valeurs de cette société s'en trouvent modifiées (comme l'indique les verdicts des procès montrés ou mentionnés dans l'épisode). Ce n'est pas juste une façon de dire, "ah ouais, pour changer on va faire de la magie", il y a réellement une sorte d'éco-système qui se construit pendant ce pilote.

Quand on pensait avoir plutôt bien pris ses repères dans l'univers de 17th Precinct, c'est là qu'on est frappé par un ultime retournement de situation, fou, incroyable, puissant, et terriblement cohérent avec ce que nous dit le pilote depuis ses premières images, pourtant. La mythologie, lentement mise en place par le truchement du personnage d'Eamonn Walker, commence à prendre un sens différent, déjà. On regarde Matt Long avec des étoiles dans les yeux (et pas uniquement en raison de la couleur de ses pupilles) et on attend de grandes choses de Stockard Channing.

Soudain, là, à cet instant, le souffle coupé, on se rappelle que 17th Precinct est un pilote "unsold".
Je ne nierai pas qu'il y a une part de frustration à l'issue du visionnage de ce pilote. Mais il y a une part de satisfaction intense à l'idée d'avoir vu un pilote plus que solide. Pas génial, mais carrément bon, quand même.

On ne m'ôtera pas de l'idée, pas avant un bon moment en tous cas (le temps me donnera tort, ou raison, ou tort), que la sortie de ce pilote, à un moment où plein de monde peut le voir, sur des sites de streaming où il pourrait être retiré et où il ne l'est pas, repris par des sites d'information sur le milieu de l'audiovisuel sans la moindre protestation des ayant-droit, a une raison d'être.
Peut-être que 17th Precinct a encore une chance d'éviter la mise à mort. Peut-être que nous pouvons nous aussi exercer un petit tour de magie. Peut-être que cette fois, nous avons ce pouvoir. Juste peut-être.
Pour certains pilotes "unsold", l'effort n'en vaut pas la peine. L'espoir n'a pas lieu d'être entretenu. Mais j'ai aimé le pilote de 17th Precinct et je ne pense pas être la seule. Et si vous le regardez, il ya de grandes chances pour que vous l'aimiez. Pour que vous en parliez. Pour que vous twittiez quelque chose à l'intention de @nbc. Pour que... Qui peut dire ? Un monde où la magie existe... ça en fait, des possibilités.

Et pour ceux qui... Eh bah non. Du coup.

2 novembre 2011

L'effet Grimm

On ne dira jamais assez les dommages que peuvent faire les contes de fées sur l'inconscient de nos enfants. Tenez, regardez les histoires de princes charmants : les gamines en bouffent pendant leurs tendres années, se déguisent en princesses, croient à "ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants", et au final, confrontées à la réalité des relations amoureuses modernes, cherchent un idéal masculin qu'elles ne trouveront jamais. Ou, autre exemple, prenez ces petits garçons à qui on raconte des histoires de grand méchant loup, ils se replient sur eux-mêmes, vivent dans leur monde intérieur, et un beau jour ils grandissent et écrivent le scénario de Grimm.
On ne dira jamais assez les dommages que peuvent faire les contes de fées.

Non que Grimm soit une mauvaise série, non, foncièrement je n'ai rien à lui reprocher, le pilote ne m'a pas déplu. Mais il y a quand même de nombreux "mais".

Grimm

Mais... j'ai eu pendant tout le pilote l'impression d'assister à une version masculine de Lost Girl, sans les petites phrases "badass" à la con. Au juste je n'arrive pas à dire c'est un compliment ou non, mais il y a de fortes chances pour que non, quand même. Sans compter que Grimm donne une fois de plus dans la série policière qui fait semblant de ne pas être une série policière, mais pas trop parce que, hein, on veut que les gens regardent. On était prévenus, je suppose, de cette caractéristique de la série, mais ça ne la rend pas sympathique pour autant, principalement parce que c'est mal fait. En fait l'idée de s'intéresser à des criminels comme s'ils étaient, au propre autant qu'au figuré, des monstres, est intéressante, mais ça reste assez grossier dans la réalisation et ça n'apporte pas vraiment de réflexion nouvelle. Le surnaturel prend pas mal le dessus, fut-il mal réalisé.

Mais... si l'idée de conférer une ambiance particulière, à la fois colorée et macabre, à la série, part d'un bon sentiment, n'oublions pas que l'Enfer en est pavé et que ça peut vite donner une image saturée de couleurs, genre Les Experts dans les mauvais jours, limite Siqueur. Ca devient vite assez grossier, comme peut l'être l'utilisation des effets spéciaux pour dépeindre les monstres qui redeviennent humain, avec une qualité de SFX à laquelle on n'avait plus assisté depuis Charmed.

Mais... rarement un personnage central aura été aussi dénué de charisme. On s'est plaints de l'héroïne de The Playboy Club, mais franchement, il y a pire. La tête d'ahuri permanente du héros, son incapacité à comprendre rapidement ce qui se passe autour de lui alors que le spectateur a vite saisi la situation (mais le spectateur triche, il a déjà vu ladite situation des dizaines de fois), tout ça donne vite une impression pâteuse de héros qui est là parce qu'il fallait un héros, mais qu'on n'a pas su, ou pas voulu écrire. Mais enfin, s'il est le prince qui combat de dragons, que vous faut-il de plus après tout ? De la personnalité ? Pour quoi faire...

Mais... tout le monde a vu arriver à 10km le coup de la tante qui allait être incapable de parler pile quand le héros aurait le plus besoin d'aide. Tout le monde sentait bien que ce ne serait pas aussi simple que passer le flambeau d'une génération à une autre. Pourtant c'est ça qui serait original, que le héros ait le temps d'apprendre avec son aînée, plutôt que d'être plongé dans l'inconnu artificiellement (wow, maladie en phase terminale + coma, mais ils vont nous tuer des petits chatons aussi, ou...?).

Mais, mais, mais... Hm. En fait vous savez quoi ? Ptet que le pilote de Grimm ne m'a pas plu du tout.
Le grand talent de cet épisode, c'est d'avoir réussi à ne pas me déplaire de façon trop évidente.

Et pour ceux qui manquent cruellement de culture : la fiche Grimm de SeriesLive.

19 août 2011

[DL] Alphas

Pour être tout-à-fait sincère, je suis un peu à la bourre sur Alphas. Je n'ai pas eu un coup de coeur, c'est clair, mais d'un autre côté je n'ai pas eu envie d'arrêter non plus, ce que m'a confirmé le deuxième épisode qui, très axé sur la mythologie de la série, m'a résolument donné envie de laisser encore quelques épisodes à la série avant de me faire une opinion définitive à son sujet.
Le problème c'est que, avec tout le reste, et notamment l'intégrale de Friday Night Lights (j'ai fini la saison 4 ce soir donc à moins d'une autre envie monomaniaque, c'est bientôt réglé), je n'ai justement pas dépassé le stade du deuxième épisode. En téléphagie comme dans le reste, il y a des priorités.

Alphas
Note : lien valable 30 jours minimum. Je reuploaderai si le lien est mort, mais seulement si vous postez un commentaire pour me prévenir !

Il faut dire qu'entre deux idées sympathiques et/ou intéressantes, Alphas persiste à offrir un divertissement trop peu ambitieux, et le générique le montre assez bien. Quand on a vu ce que la série pouvait offrir en termes d'esthétique pour les "pouvoirs" de certains de ses personnages, à l'instar de mes deux favoris Gary et Rachel, on ne peut qu'être déçu par le rendu si peu imaginatif de ce générique qui se contente d'aposer des images de personnes plus ou moins douées et de truc-muches scientifiques qui n'excitent plus personne depuis que CBS montre 25 plans de coupe de cerveaux par semaine dans Les Experts Naypyidaw. Quant à la musique, plus passe-partout, ça s'est déjà vu, mais plutôt dans des comédies que dans des séries de SF ou fantastique où, d'ordinaire, on essaye de faire mieux que ça.

A l'image de la série, le générique est donc placé sous le sceau du "peut mieux faire". Mais mieux sera-t-il fait ? J'espère le découvrir bientôt, parce que sinon je ne vais pas me mettre la rate au court-bouillon. D'un retard à l'arrêt total d'un visionnage de série, il n'y a pas loin...

Et pour ceux qui manquent cruellement de culture : la fiche Alphas de SeriesLive.

Publicité
<< < 1 2 3 4 5 6 7 > >>
ladytelephagy
Publicité
Archives
Publicité