Pretty Awesome !
Les qualificatifs me manquent pour faire l'éloge du pilote de Pretty Handsome, pilote au générique fabuleux qui plus est : Ryan Murphy à la barre, Joseph Fiennes et Carrie-Ann Moss devant la camera... Mais ça ne s'arrête pas là, croyez-moi, voilà une série qui a bien mieux que son affiche à offrir, et il ne faut pas deux minutes pour s'apercevoir qu'on tient là un des meilleurs pilotes du moment.
On aurait pu penser que regarder pendant plus d'une heure un personnage se questionner à propos de son identité sexuelle serait assez difficile à suivre pour le commun des mortels, et je craignais de souffrir du manque d'identification, vu qu'il s'agit d'un sujet très particulier. Mais pas du tout. Le brio de Pretty Handsome, c'est de mettre en parallèle de la crise identitaire de Bob celle de tous ses proches... et en particulier des autres hommes de la famille.
Là où la série est à la fois cruelle et truculente, c'est lorsqu'elle dénonce quelque chose qu'elle déploie en parallèle : Bob voudrait qu'on ne le regarde pas comme un homme, mais il ne parvient pas à trouver le courage de se montrer tel qu'il est. Il vit une blessure parce qu'il a l'impression de vivre caché. Mais par contre, il attend que ses fils soient parfaitement conformes à l'idée qu'il se fait d'eux et ne les voit pas non plus tels qu'ils sont. Ce qui ronge Bob s'apprête à ronger ses fils exactement de la même façon : être soi en cachette... quitte à vivre dangereusement.
Qui mettra Bob face à sa vraie contradiction ? Pas sa femme ni sa mère qui ne semblent rien voir. Ici, la seule femme qui a le beau rôle... c'est Bob.
Et qu'il est beau et puissant, Joseph Fiennes, lorsqu'il fixe son regard dans le miroir et tente d'y voir tantôt ce qu'on attend de lui, tantôt ce qu'il voudrait être ! Si Pretty Handsome avait été tourné au temps du cinéma muet, les scènes de Fiennes auraient eu l'exact même effet qu'ici. Qui a besoin de dialogues quand on a un excellent acteur ? Il porte le show sur ses épaules, et le fait à la perfection. En dépit de la multiplicité des scènes qui nous font entrer dans le monde torturé de Bob, on n'a pas un seul instant l'impression d'une redondance quelconque, chaque scène atteint sa cible. En plein coeur !
Plusieurs scènes sortent encore plus du lot : les entrevues de Bob avec le couple de transsexuels, d'une sincérité rare, les quelques interactions de Bob avec ses fils où subitement, notre homme se comporte avec un poil de machisme ce qui n'apporte que plus de nuances au personnage, et évidemment, le moment où chacun se révèle à lui-même, l'apogée de ce pilote... rha non, je ne veux surtout pas vous spoiler sur ce coup, c'est trop énorme. Sachez juste que si Pretty Handsome finit par se trouver une saison à mettre derrière ce pilote (et hélas je n'ai pas trouvé beaucoup de bonnes nouvelles allant en ce sens), il faudra vraiment être un putain de génie pour surpasser cet instant d'une frénésie, d'une intensité et d'une perversité déconcertantes.
Mon esprit malade sans cesse en quête de séries dérangeantes sans taper dans le provocateur (et Dieu sait que c'est exactement ce que la plupart d'entre nous attend très exactement de Ryan Murphy d'ordinaire... attendez-vous à revoir votre opinion sur lui à la hausse), où la dureté se trouve dans la forme tant que dans le fond, a vraiment été ébloui, et maintenant, il lui faut la suite. Fallait pas commencer, aussi...
Et pour ceux qui manquent cruellement de culture : la fiche Pretty Handsome de SeriesLive.