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ladytelephagy
9 février 2012

The childhood in the plastic bubble

TheChildhoodinthePlasticBubble

Je suis née au début des années 80. C'était une époque pendant laquelle même les parents psychorigides (et je disposais de deux particulièrement intéressants specimens que je pouvais observer à loisir) ne donnaient pas dans la surprotection.

On laissait les enfants se faire quelques bleus, au propre comme au figuré, sans craindre les dommages irréversibles. Parfois peut-être à tort. Souvent parce que, soyons francs, un enfant est plus résistant qu'on ne veut bien le dire, et que surtout, la résistance, ça se construit. Inutile de le faire vivre dans une bulle de plastique en espérant préserver son innocence et ses genoux jusqu'au moment où il sera un adulte fort et vaillant : dans les faits, les années 80 pensaient plutôt qu'on devenait un adulte fort et vaillant parce qu'on avait profité de l'enfance pour s'amuser, se tester et se construire.

On n'hésitait pas à disputer les gamins qui ne bossaient pas en classe, plutôt que de reprocher les notes aux enseignants ; on fumait près des enfants sans trop se formaliser ; on n'enfermait pas les gamins à double-tour par peur du Croque-Mitaine ; les enfants roulaient en vélo sans casque, sans genouillères, sans coudières ; ils s'aventuraient bien au-delà du champs de vision de leur maman qui leur donnait un couvre-feu en espérant qu'ils le respectent, ce qu'ils ne faisaient pas, et plutôt que d'avertir la police au bout de douze secondes, ils se faisaient méchamment remonter les bretelles au retour ; on se prenait une petite morniffle quand on dépassait les bornes sans que les parents ne tournent compulsivement les pages de leur Dolto de peur d'avoir traumatisé Junior à vie ; on regardait la télévision avec les adultes et il n'était pas rare de tomber sur deux paires de Coco Girls légèrement polissonnes ; des films et des livres sont sortis pendant cette période, destinés pour tout ou partie aux enfants, et ils n'étaient pas forcément très gais (je me souviens avoir été voir L'Ours avec le centre aéré, avoir découvert Brisby et le Secret de Nimh puis quelques années plus tard, L'incroyable voyage avec mes parents et ma petite soeur, etc...), et de toute façon, les adultes ne cherchaient pas à tout prix à nous faire regarder des choses "de notre âge".
C'était une époque pendant laquelle tout n'était pas parfait, loin de là... et on avait tout loisir de le découvrir par nous-mêmes.

Dans un tel contexte, je secoue régulièrement la tête, navrée, quand je lis certaines réactions du type "momma bear" (par exemple sur le tragiquement excellent STFU Parents) parce qu'un enfant a eu le malheur de n'avoir pas reçu mille traitements de faveur par jour.

Mais plus encore, cela me frappe particulièrement dans le domaine des films, séries et livres. Qu'on essaye de faire en sorte que les enfants parviennent jusqu'à l'âge adulte sans la moindre cicatrice à exposer comme un trophée de guerre, ou expérience un peu stressante (du genre se perdre dans Toys'R'Us à dix jours de Noël), admettons, passe encore.

Mais la surprotection culturelle me rend folle ; c'est tout simplement antithétique.

Certes, j'ai conscience qu'il ne faille pas prendre mon cas pour une généralité. Plutôt pour une extrêmité, à vrai dire : mes parents ont été ceux qui m'ont donné à lire Bijou de la Maison Douce, Les enfants jetés, ou Chien perdu (et on s'étonne que j'aie pendant longtemps attendu qu'ils me fassent une révélation sur mes origines !), mon père a insisté pour que je regarde La Strada et Elephant Man à 10 ou 12 ans, et mes premières séries ont été L'Enfer du Devoir, La Belle et la Bête, et quelques autres joyeusetés du genre de V. Il n'a jamais été question de me faire croire que le monde est idyllique.
Je les en remercie (c'est rare).

A l'inverse, aujourd'hui, je lis que les parents ne veulent pas montrer certaines scènes de films Disney à leur progéniture.
Ou qu'on veut très officiellement recommander aux parents de ne pas montrer Les Incroyables Pouvoirs d'Alex à des moins de 15 ans.
Le domaine d'extension de l'absurde.

Les enfants devraient pouvoir regarder des choses un peu difficiles, ou les lire (en fait les lire dans un premier temps, quand leur imaginaire limite la casse). Oubliez ce que je viens de dire, je corrige : les enfants devraient regarder des choses un peu difficiles. Tout simplement.

Parce que les enfants n'aiment pas les menteurs. Parce que les enfants ne vivent pas au pays des Bisounours (ils vont à l'école avec leurs congénères, après tout). Parce que les enfants ne sont pas épargnés par la vie, si ce n'est aujourd'hui, peut-être l'an prochain.
Et parce que la fiction leur apprend à se préparer, toutes proportions gardées, à certaines éventualités difficiles, à se fabriquer une carapace en toute sécurité. Aujourd'hui à regarder Mufasa mourir, demain capable de parler de la mort avec les parents, après-demain ou le jour d'après aux funérailles de papy, immanquablement.
Gloire à la fiction pour nous apprendre que si Maman chérie et Papa terrible savent veiller sur Bijou, tout ne sera pas forcément aussi facile. Gloire aussi à la fiction pour nous parler d'Izzy et Gus même si on ne verra jamais San Francisco, et nous ouvrir une fenêtre sur les vies qu'on ne mènera jamais, moins protégées que la nôtre (ou parfois un peu plus, merci 7 à la Maison).
Si tu as 12 ans et que tu n'as jamais lu Le Petit Prince, tu as raté ta vie !

Je pourrais dire tout cela avec amertume. Je n'ai jamais caché ne pas avoir rigolé pendant mon enfance, après tout.
Je pourrais décider que me faire lire Les enfants jetés a ajouté à la "torture" plutôt que participé à ma construction mentale. Je pourrais ironiser et dire, ouais, pas étonnant que j'aie lu ces livres quand j'étais enfant, que j'aie vu ces films et ces séries, c'est cohérent avec l'éducation un rien sadique qu'on m'a donnée.
Et pourtant, culturellement, j'ai reçu une éducation du feu de Dieu (en-dehors de la musique ; je n'ai eu droit à aucune culture musicale), et j'en suis fière. Je n'ai pas été protégée. J'ai été envoyée au feu. J'ai pleuré, et j'ai eu le coeur qui se serre, et j'ai même trouvé dans ces fictions une créature de cauchemar sur laquelle transférer toutes mes angoisses invisibles. Certaines histoires m'ont tenue éveillée, parce que je me suis posé des questions, parce que je me suis inquiétée, parce que quelque chose, parfois, s'est cassé. Tant mieux.

Aujourd'hui je recherche le grand frisson, la cassure, l'angoisse, à ma façon. Ce serait mentir que de prétendre que je ne considère pas que le meilleur épisode de notre Ozmarathon à ce jour est celui qui est le plus terrible de tous. Tout le monde ne cherche pas ça dans ses fictions, ou disons, pas à un tel degré, et il y a, évidemment, une part de mon attirance pour ces fictions qui découle directement des découvertes parfois un peu dures que j'ai faites à un jeune âge.
Mais ai-je été endommagée par ces fictions un peu difficiles ? Ou m'ont-elles donné les ressources nécessaires pour survivre à ce qui m'a réellement endommagée ?

La question est complexe et je ne prétends pas avoir la réponse absolue, certainement pas moi. Mais je n'ai pas l'impression, cependant, que cette façon de censurer tout ce qui peut heurter un enfant, soit non plus une réponse...

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25 novembre 2011

Rire ensemble

Ce blog a été le témoin de nombreuses évolutions téléphagiques pour moi : la façon dont je me suis mise à suivre plus méthodiquement les séries de rentrée ; la façon dont je me suis autorisée, l'expression n'est pas exagérée, à ne pas me cantoner aux séries américaines ; les défis que je me suis lancés plus ou moins officiellement, enfin, comme regarder plus d'intégrales, me priver volontairement de cagoulage ou m'essayer aux longs-métrages.
Il en est peut-être un, moins conscient, qui n'a pas encore été vraiment mentionné, mais dont vous pouvez trouver la trace facilement en remontant les archives de ladytelephagy : ma tentative de m'ouvrir à la comédie.

Ce n'était pas du tout acquis. Pendant très longtemps je n'ai juré que par les séries dramatiques, et les comédies qui me plaisaient en plus étaient en général douées pour jouer sur les tons (Rude Awakening en est un bon exemple). Les comédies en single camera m'ont toujours plu un tantinet plus que les sitcoms traditionnels, bien que je ne les boude pas (ma fidélité envers Fran Drescher est à ce titre parlante). Mais c'était toujours avec l'idée sous-jacente qu'une comédie était un passe-temps, un divertissement au sens péjoratif du terme, quelque chose qui, enfin, soyons sérieux, n'est pas une fin téléphagique en soi. C'était un peu contradictoire en un sens avec le fait que parmi mes séries préférées, quand je suis vraiment contrainte à n'en choisir qu'une trentaine pour faire une sélection, je mentionne presque systématiquement Une Nounou d'Enfer ; mais c'était avec, toujours, la sensation pas forcément explicitée de faire un distingo entre une série qui compte pour des raisons affectives, et une série qui compte, tout court.

En cela je crois que j'ai bien progressé ces dernières années. Parmi les intégrales que je me suis envoyées, il y avait énormément de comédies, en général datées d'il y a quelques années ou quelques décennies. Derrière la joie de m'esclaffer devant des plaisanteries plus ou moins fines, il y avait aussi ce sentiment de découverte, l'envie de décortiquer un genre qui, même à fortes doses, m'est toujours un peu étranger.

Du coup, je me suis posé, aussi, énormément de questions sur l'humour, ses ressorts, ses mécanismes, ses rouages ; parmi ces questions : l'humour est-il intemporel ? Peut-on encore rire lorsqu'on nous a trop répété qu'une série est drôle ? Peut-on rire de quelque chose qu'on ne trouvait pas drôle avant ? Peut-on rire de ce qu'on ne trouve plus drôle ? La triste réalité gâche-t-elle le plaisir de rire ? Doit-on toujours rire devant une série comique ?
Sur ce blog, il est probable, en tous cas c'est ce qu'il me semble à vue de nez, que je me sois posée plus de questions sur le genre de la comédie que sur celui du drame. Le drame me semble évident. Le drame est naturel. Le drame se conçoit facilement. La comédie est pleine d'interrogations pour moi, c'est un territoire qui, même au bout de plusieurs centaines d'épisodes, m'est toujours inconnu. Je sais rire mais je ne comprends pas d'où cela vient. Douter, me poser des questions ou pleurer ne fait pas autant débat ; il semble qu'il soit plus facile pour toutes les facettes du drame de remonter à la source. Comme beaucoup de choses en téléphagie, plus que nous ne voulons l'admettre, ce que nous aimons et ce que nous regardons prend racine dans notre histoire personnelle. Et ma fascination grandissante pour les comédies est le reflet de cela, de l'évolution personnelle que j'ai connu pendant ces quelques années et de la façon dont ça s'est traduit dans mes expériences télévisuelles.

KakiaVstretilVashuMamu
Kak ia Vstretil Vashu Mamu

Aujourd'hui se rejoignent deux de mes évolutions, les séries "étrangères" et la comédie, alors que je suis tombée sur un remake allemand d'une comédie britannique (on aura l'occasion d'en reparler). Mon allemand n'étant pas si rouillé que je le pensais, en tous cas pas à l'oral (saloperies de déclinaisons), j'ai retrouvé peu ou prou tout ce qui rendait le pilote d'origine drôle, ou à peu près.
Et alors qu'on passe notre temps, notamment dans le cas des séries asiatiques, à souligner combien certaines choses ne passent pas bien d'un pays à l'autre, je suis frappée de voir que la version allemande (si l'on met de côté le fait que les rires sont enregistrés et les acteurs un peu flasques) est aussi drôle que la version originale.
Comment se fait-il que l'humour parvienne à passer d'un pays à l'autre, souvent d'un continent à l'autre, aussi, sans problème ?

Pourquoi la plupart des séries américaines adaptées à l'étranger sont-elles des comédies ?
Certes il y a aussi la question du budget. Ce n'est pas une donnée innocente, naturellement. Le savoir-faire est moins aléatoire, aussi, sans doute : réaliser une série qui copie Oz, The Practice ou Pushing Daisies n'est pas à la portée du premier venu, quand un sitcom, avec ses règles techniques claires et son contexte théatral, est un objectif plus facile à atteindre.

Mais concernant les scénarios eux-mêmes ? Comment se fait-il que pas une ligne ne soit changée, parfois ?
On est d'accord que le succès de ces remakes, et on en parlait à propos de Las Chicas de Oro, est aléatoire : parfois ça cartonne, parfois pas du tout (ces dernières années, c'est plutôt pas du tout d'après ce que je vois ; l'échec du Cheers espagnol en est le dernier exemple en date). Mais les producteurs locaux ont en tous cas dû penser à un moment que tout ça se traduirait facilement dans le pays d'arrivée, qu'il n'était pas nécessaire d'apporter des retouches.

On dit qu'on peut rire de tout, mais pas avec tout le monde. Il semblerait quand même un peu que si, car vu le nombre de comédies américaines qui sont adaptées un peu partout, alors que les dramas sont quand même repris avec plus de méfiance (ou alors avec des transformations, comme Grey's Anatomy qui est devenue la telenovela colombienne A Corazón Abierto), les séries américaines font rire toute la planète ou quasiment.
Finalement, si l'action de rire est universelle, peut-être que son déclencheur l'est tout autant ?

30 septembre 2011

A thank you note

On a tous vu passer, en particulier si on est sur Twitter, des articles s'inquiétant plus ou moins (selon les auteurs et leurs convictions) du nombre de scénaristes de sexe féminin, de séries avec un personnage central de sexe féminin, et dans ce cas s'agit-il de personnages de sexe féminin forts, etc., dans les séries. Je vais être honnête avec vous : je ne les ai pas lus. Volontairement. J'en ai lu un il y a quelques mois, années peut-être, qui en gros tirait la sonnette d'alarme parce que, attention, il n'y a presque plus que des hommes qui écrivent, et quand des femmes écrivent c'est uniquement pour des séries de gonzesses et/ou pour ados, et je me souviens en essence m'être surprise à secouer la tête vigoureusement, en me disant qu'il n'y avait pire sexiste que certains féministes enragés.
Comme si être UNE scénariste faisait écrire différemment de si on est UN scénariste. Personnellement, 90% des histoires que j'écris s'intéressent avant tout à des personnages masculins ou à des ensemble shows mixtes. C'est une question de choix personnel et certainement pas de sexe que d'écrire sur quelque chose en particulier. Après, moi j'écris pour le plaisir et pas parce qu'on me paye pour le faire, et forcément c'est à prendre dans cette limite, c'est sûr ; peut-être que la réalité des choses c'est qu'on embauche plus facilement une femme pour écrire pour un show de la gamme de Desperate Housewives même si elle rêverait d'écrire un truc genre Oz. Mais dans ce cas le problème vient des exécutifs, pas des scénaristes, et je doute que leur opinion change grâce à un article de Jezebel ou autre.

C'est comme cette règle de Bechdel, ça me fait hurler tant c'est ridicule. Comme si pour se faire valider en tant qu'être indépendant, une femme devait faire abstraction des hommes. Ca ne représente jamais qu'environ 50% des êtres humains qu'elle rencontre dans sa vie, hein. Sans compter que si une femme parle avec une autre femme, elle ne sortira pour autant pas des stéréotypes liés à son genre, au contraire : plus une femme parle avec une autre femme, plus on est sûrs que, si elle ne parle pas d'hommes, elle parle d'enfants ou de fringues. Dans les fictions, ça n'est pas très différent.

Bref, on peut difficilement dire que je sois une féministe engagée. J'ai juste mes moments, quand certaines choses me chatouillent ou m'émeuvent. Parfois parce que je suis une femme. Parfois juste parce que je suis.

Et en cette rentrée, quelque chose m'a émue. La semaine dernière, déjà, j'évoquais dans le pilote de The Playboy Club une potentielle galerie de portraits de femmes, et de femmes dans les années 60, ce qui a forcément un sens particulier. Et pourtant, The Playboy Club est une série créée par un homme, Chad Hodge. Quant à PanAm, elle a été créée par un homme, Jack Orman. Pourtant, cela faisait bien longtemps qu'aucune série n'avait si joliment parlé de femmes, et en voici deux pour nous raconter l'histoire de jeunes femmes qui, en cherchant simplement à faire ce qui leur plait et leur convient dans un univers où ce qu'on attend d'elle est très limité, vont faire progresser toutes les femmes.

C'est en particulier devant PanAm (qui, comme je l'expliquais dans ma review du pilote, est plus explicite à ce sujet) que tout d'un coup j'ai eu cette révélation que, si des femmes comme Kate ou Laura n'avaient pas existé, je ne serais pas en train de regarder ce pilote dans mon nouvel appartement, pour lequel j'ai signé seule, pour lequel je prends des décisions seule, pour lequel j'ai fait une partie du déménagement seule, pour lequel je paye seule, moi, une célibataire de 30 ans. Il y a eu cet instant où j'ai vu les filles partir dans leur décapotable et où j'ai regardé autour de moi, en me disant subitement que parce que des femmes comme ça ont pris le risque de tout mettre derrière elles pour faire ce qui les rend heureuses, je n'ai pas à me poser la question de si moi, je peux le faire.
Devant des scènes comme celles-là, je regrette presque de ne pas être féministe tant j'ai l'impression d'avoir le vent dans le dos, d'être fière, d'être redevable. Je ne regrette pas de ne pas me passionner pour le débat Madame/Mademoiselle (en même temps on parle de quelqu'un qui n'a eu aucun problème à dire spontanément qu'elle avait 30 ans... depuis qu'elle en a 26 ou 27, et alors qu'elle en a actuellement 29, mais qui n'a aussi aucune envie de se marier, et qui entend donc indifféremment des deux tout le temps et se contrefous de savoir quel âge on lui donne, quel statut marital on lui donne, etc.), mais je regrette presque de ne pas me sentir plus solidaire de certaines de mes semblables qui ont toujours envie de changer quelque chose.

FreeLikeaGirl

Pour revenir aux séries, je crois que c'est aussi quelque chose qui me plait que de me dire que je ne vais pas y chercher, jamais, une conviction politique ou sociale, avec la quelconque envie d'y voir se réfléter mes propres convictions politiques ou sociales. Je sais ce que je pense de la peine de mort, par exemple, et si je regarde une série pro- ou anti-, ce sera parce que j'espère un sujet porteur de thèmes intéressants et de bon drama, pas pour valider ma propre perception des choses (sur ce thème, mon épisode préféré est celui de L'Esprit de l'Amérique, dans The Practice, qui bien que finissant sur une hésitation, propose des points de vue suffisamment différents). Mais je suis contente quand une série, qu'elle soit pro- ou anti-, me permet d'être émue sur un sujet à propos duquel je ne me posais plus tellement de questions ; le féminisme en est un. Je mène ma vie sans militer, et soudain je réalise que certains combats me touchent personnellement, parce que j'en profite aujourd'hui avec un délice dont vous n'avez pas fini de m'entendre me vanter vu la lune de miel que je vis avec mon nouvel appart.

Alors je voulais consacrer ce post du vendredi à ça, à remercier les femmes qui ont fait les efforts qui à moi, semblent aujourd'hui couler de sources. Et surtout, parce que c'est un blog téléphagique, à remercier les hommes qui ont créé des séries qui me rafraîchissent un peu la mémoire. Chad, Jack, merci. Dans quelques semaines j'aurai peut-être un coup de coeur pour une série qui n'aura rien à voir, American Horror Story, ou Grimm, ou Runaway, ou une série à laquelle je ne m'attends même pas, et je me sentirais moins proche de tout cela, sans doute. Mais ce que j'ai ressenti en cette rentrée, je vous le dois quand même un peu. Merci pour The Playboy Club et PanAm.

D'ailleurs puisqu'on en parle, et pas uniquement pour la raison évoquée dans ce post : quand est-ce qu'on a la suite de PanAm ? Une semaine, ça commence à être long. Et je crois bien que je suis sous le charme...

16 août 2011

Dream job

Retour au boulot après un weekend de trois jours, et alors que mon patron rentre de vacances. Adieu au pendu, au baccalauréat et à tout ce qui a occupé la 1e quinzaine d'août, pendant laquelle il n'y avait rien à faire. Fin de la rigolade. Les affaires reprennent.
Et pourtant je n'y suis pas allée à reculons, ni les épaules basses. En-dehors du fait que je dois me lever un peu tôt à mon goût, ça ne me dérange pas du tout.

Je me demande comment ça se fait.
Parce qu'on ne peut pas dire que les séries donnent beaucoup envie de bosser.

DreamJob
Déjà parce qu'on ne voit pas souvent les personnages travailler, en vrai. Dans les séries américaines, quasiment pas du tout. Dans les séries nippones, juste de quoi montrer une certaine image d'Epinal (ressemblant furieusement à un clip dans de nombreux cas).

Il y a l'école Roseanne ou Working Class. Des séries qui montrent à peu près régulièrement des personnages en train de bosser, mais pas vraiment de façon motivante. Ces personnages-là n'aiment pas leur travail, ils sont bloqués dedans pour payer leurs factures, et c'est tout. Motivation : zéro. Evidemment ya pas d'excitation intellectuelle folle à servir des sandwiches ou assembler des bouts de plastique à la chaîne, mais bon, les personnages ne sont pas obligés de se plaindre de leur boulot à longueur de temps non plus. Je sais bien que Roseanne est un cas particulier, et que la série repose sur ça pour soutenir son propos autant que Mariés, Deux Enfants, mais dans ce cas précis, admettons-le, le personnage principal n'aime pas le travail TOUT COURT. Quel que soit le boulot, ça ne va que si Roseanne peut ne rien faire (et dans ce cas-là elle se plaint que le patron est un emmerdeur, ou les clients, ou les collègues...). Mais ça fait quand même pas mal de mécontents si on ajoute les George de Dead Like Me et tous les jeunes travaillant à un moment ou un autre de la série dans un fast food quelconque (Buffy, this one's for you).

Ce n'est pas mieux dans l'immense majorité des séries comiques ou dramatiques. Quand un personnage a une profession, il n'y pose pas les pieds. Si, au début d'un épisode jusqu'à ce qu'on l'appelle et que l'intrigue commence, à la Parenthood, ou quand il y a une petite intrigue à tirer de ses relations de travail, genre Monica dans Friends. On ne le verra jamais aller au boulot et y passer du temps juste parce que ça fait partie de sa vie (8 à 10h par jour seulement, en plus). On part probablement du principe que ça va ennuyer le spectateur. Je trouve au contraire que ce serait, une fois de temps en temps (je ne dis pas dans TOUTES les séries), une bonne façon d'explorer le personnage, son caractère, son background même. Mais c'est comme si on cherchait des personnages auxquels s'identifier le plus possible, sauf sur le boulot. On ne veut pas entendre parler de travail. Les personnages gagnent leur vie par l'opération du Saint Esprit. C'est comme si une cigogne venait leur apporter leur chèque à la fin du mois.

Pour finir, il y a les séries se basant sur un univers professionnel, et là, difficile d'échapper à l'univers du travail ! Mais quand on y regarde de plus près, ces séries-là ne parlent pas souvent du monde du travail lui-même.
Déjà il faut retirer toutes les séries policières, qui parlent en général seulement des enquêtes elles-mêmes, et pas de l'ambiance de travail, des rapports avec la hiérarchie ou tout simplement de l'accomplissement qu'on ressent ou non (à l'exception de la franchise Law & Order, et encore, à des degrés divers selon la série). Ces angles sont le plus souvent cantonnés à 2mn dans un épisode trois ou quatre fois par saison, et après on n'en parle plus. Dans Les Experts, c'est ce qu'on décide de considérer du character development, faut de mieux dans 99% des épisodes (et puis soudainement arrivent les sweeps ou la fin de l'année, et là on s'inquiète un peu et dans ce cas le character development s'intéresse à la vie pseudo-personnelle d'un personnage ou deux).
Les séries médicales ou judiciaires ont souvent ce même problème, en particulier sur le long terme ; la première et éventuellement la deuxième saison parlent du degré de fatigue des personnages, de leur engagement dans le travail, de l'impact des cas rencontrés sur leur moral, et puis au bout d'un moment, bon, on repart sur les histoires persos, ça va bien maintenant. Et puis admettons-le, combien d'entre nous vont devenir chirurgien ou avocat ? Tout ça, c'est par soucis de dramatisation, mais pas du tout parce que le milieu va soudainement nous sembler familier. C'est une espèce d'exotisme de proximité : les personnages vont travailler, mais ils ne font pas un travail dans lequel la majorité de la population va se reconnaître.
Restent donc les séries qui sont bien obligées de passer du temps au travail. Et on doit reconnaître que ce sont le plus souvent des comédies qui s'en chargent le mieux, genre évidemment The Office, Outsourced ou Better Off Ted, ce qui n'est pas fait pour donner vraiment envie de bosser.

Je sais que je suis épouvantablement réac, je le sais, mais au nom du ciel, mais quelle série faut-il regarder pour apprendre à aimer le travail ? Pour apprécier ses collègues ? Pour montre ce que c'est vraiment que de démarrer ? Je n'en vois aucune.
L'autre jour sur Twitter, l'une des personnes que je suis, apparemment assez jeune et venant de commencer dans un nouveau boulot, disait sa déception d'avoir fait une bourde pour son premier jour. Je trouverais ça cool que, de la même façon que des séries accompagnent les ados pendant leurs vie au collège ou au lycée, et même à la fac, dans des situations diverses (en cours, en famille, entre amis, au sport...), il y en ait une que cette personne puisse regarder pour se dire "nan mais, des bourdes, on en fait tous en début de carrière, ça ira mieux avec le temps". Et pas forcément en mettant en jeu la vie d'un patient ou en envoyant un innocent en prison.
Des séries pour apprendre à explorer des choses variées, il y en a plein. Il y a des séries qui parviennent à me donner envie de vivre différemment, de vivre une histoire d'amour, de vivre des aventures, de vivre ailleurs... pour donner une idée sensible du monde du travail, je suis désolée, yen a pas.

Quand tu es personnage de série, ton boulot, soit tu le détestes parce qu'il est minable, soit tu t'y adonnes corps et âme parce qu'il fait partie des "nobles" professions qui dirigent la société. C'est comme si tous les spectateurs étaient des mères juives qui veulent que leur personnage favori soit médecin, ou avocat (parce que POTUS, c'était déjà pris), sinon c'est la misère.

Quand j'étais ado, je regardais Friends en me disant qu'avoir 30 ans, c'était avoir des dates et se retrouver entre copains. Je ne me disais pas qu'avoir 30 ans, ça pouvait être analyste financier (ou peu importe la profession qu'exerçait Chandler, d'ailleurs le flou autour de sa profession en dit long). En fait, je fais mentalement le tour des séries que je regardais, que mes camarades regardaient, que ma soeur regardait... pas moyen de trouver une seule série qui essaye de donner envie d'aimer le boulot. Ce ne devrait pourtant pas être une fatalité.

Alors je sais bien. Une série n'a pas forcément pour rôle d'être pédagogique, et je suis la première à le dire. Mais sans aller jusque là, pouvoir se reconnaître dans le monde du travail, ça peut être l'objet d'une série dramatique sans aller jusqu'au prêchi-prêcha. Et d'ailleurs à l'origine, les séries policières avaient pour vocation de donner une bonne image des flics aux spectateurs, et ça a bien marché. Pourquoi on ne ferait pas la même chose avec des séries sur le monde du travail au lieu de toujours caricaturer ce que c'est que de bosser dans un milieu qu'on n'aime pas ?
D'ailleurs ça me donne l'impression que la plupart des séries s'adressent aux adolescents tant qu'ils vont en cours (collège, lycée, fac), puis ensuite, propose des personnages dans le monde du travail, comme s'ils y étaient entrés le plus naturellement du monde. Il n'y a rien entre les deux ?

Et puis, allez, je me doute... Les séries vont quand même pas prêcher contre leur paroisse ! Les gens qui aiment bosser, je suppose qu'ils ne sont pas censés aimer les séries, ils n'en regardent pas ; normal, ils sont au boulot ! Non ? C'est pas la logique ? On dirait que ça l'est, en tous cas. La symbolique derrière tout ça me laisse perplexe.
Je devine bien que les gens ne regardent pas forcément des séries pour qu'on leur rappelle leur quotidien pas marrant. Mais ça dépend des séries, parce qu'il y a aussi des gens capables de regarder Oz pendant plusieurs saisons, comme quoi les choses pas marrantes, quand c'est bien fait, ça peut être captivant. Je refuse de croire que tous les gens qui regardent des séries le font uniquement pour se vider la tête, ou alors il faut m'expliquer le succès de plein de séries. Parfois on veut du glamour, parfois on veut se sentir concernés. C'est le cas pour plein de thèmes : la famille, l'amour, l'amitié, l'argent...

Mais jamais je ne me sens concernée professionnellement dans une série. Jamais je ne me dis que ça me concerne et que ça reflète quelque chose de vrai (quitte à ensuite le détourner à des fins dramatiques). Parce que je fais partie de ces gens qui aiment bosser, qui apprécient (la majorité) de leurs collègues et même leur boss, et que les séries ne veulent pas parler de ça, des gens qui aiment bosser non pas parce qu'ils font un métier incroyablement utiles à la société (médecin, avocat, flic, reaper...), mais parce qu'ils ont l'impression de s'accomplir eux-mêmes. C'est gratifiant de gagner sa vie (quand on le peut), et c'est gratifiant de savoir qu'on fait quelque chose d'utile ou à peu près.
Où est la série qui me rappelle ce que c'est que de commencer dans un métier ? D'apprendre progressivement les codes implicites de la vie au travail ? De gagner son premier salaire ? De vivre en communauté dans un bureau, un service ou une entreprise où les gens s'entendent bien ? Je trouverais ça vraiment cool qu'une série me rappelle que bosser, ce n'est pas juste un boulet que je dois trainer pour payer mon loyer, mais aussi une façon d'être quelqu'un, d'exister. Je ne fais pas le métier le plus passionnant de la Terre. Je ne fais même pas le métier que j'aurais voulu. Je ne suis certainement pas considérée comme un pilier de la Nation quand je le fais. Mais ça fait quand même du bien de se sentir utile, et d'être payée à quelque chose que je sais bien faire. Pourquoi aucune série ne m'encourage jamais à ressentir ça ? Pourquoi le boulot, c'est soit le bagne si c'est un "vrai" métier, soit un sacerdoce si c'est un métier "utile" à la communauté ? Il devrait y avoir quelque chose au milieu.
Quel genre de message les séries envoient-elles sur le travail ?

Je regardais Julie Taylor commencer à penser à son avenir. Ca fait une saison, un peu plus, que je vois la plupart des personnages de Friday Night Lights envisager leur avenir. Mais aucun de ces personnages n'a envie de travailler dans quoi que ce soit, ils n'ont aucune envie, aucun objectif. Je ne suis pas très étonnée qu'ensuite ils pètent un câble pour avoir livré la pizza de trop et qu'ils prennent le large. Je ne suis pas très étonnée qu'ils plaquent l'université au bout de deux cours. Moi aussi j'aurais envie de tout plaquer si j'avais l'impression que ma vie ne rimait à rien. Est-ce que dans la série, personne ne va leur expliquer qu'il y a un travail qui pourrait leur plaire ? Une alternative aux dead-end jobs, et un but derrière les heures passées le cul vissé sur les bancs de la fac ? Ils ne résoudront pas forcément d'enquête complexe, ne feront pas nécessairement un triple pontage coronarien dans le couloir des urgences avec un stylo-bille, et ne remettront pas forcément la Constitution en question devant une haute Cour. Mais il y a quand même quelque chose d'autre entre ça et faire des petits boulots sans intérêt, non ?

C'est la réac en moi qui dit ça, et je le sais bien. Mais je me dis que s'il existait une, juste une série comme ça, qui donne envie de mener sa vie professionnelle au mieux, de comprendre ce qu'on peut tirer d'un boulot au niveau personnel et humain, et pas juste financier pour subventionner les cafés au Central Perk... je sais pas, on pourrait peut-être aussi en sauver quelques uns de l'autre côté de l'écran. Vous savez ? Côté canapé.

26 juillet 2011

Le fruit n'est pas tombé loin de l'arbre

Vous avez remarqué à quel point les séries du passé sont forcément taxées d'être GENTILLES ? (ô insulte suprême dans un monde de téléphages cyniques attendant toujours plus de noirceur et de sérieux de leurs fictions)
C'est à la suite d'une discussion avec plusieurs d'entre vous sur Twitter que j'y ai repensé. Non que ce soit forcément dit avec mépris par mes interlocuteurs. Mais force est de constater que cela permet de se défausser systématiquement de ces séries, au prétexte qu'elles sont les reliques de temps immémoriaux (en années-internet) pendant lesquels il était courant qu'une série ait un regard positif sur le monde, les relations ou encore, simplement, la narration. Le happy end nous écoeure tous aujourd'hui, me dis-je parfois dans un excès de pessimisme (prouvant par là que je n'ai pas tort).

Pourtant, quand je ne m'escrime pas à vous faire regarder The Yard (clin d'oeil, clin d'oeil) ou, pire, des séries même pas anglophones, il me plaît d'essayer de défendre l'indéfendable : des séries datant d'il y a plusieurs décennies. Une tâche dont je ne suis, certes, pas la plus éminente ambassadrice, mais on fait ce qu'on peut avec ce qu'on a et, ma foi, j'ai l'amour de Three's company et Maude chevillé au corps, c'est déjà pas si mal. Pis plus près de nous, je me repasse encore des dialogues des Craquantes ou Roseanne, et je suis toute aussi ravie.
D'accord, ce sont plus souvent des comédies. C'est aussi parce que, entre vous et moi, c'est quand même plus agréable à regardé que la plupart des comédies d'aujourd'hui.

Mais les décennies passées n'ont pas été que rires et bouffonnades. Et c'est ça qui est intéressant, bien qu'un peu triste. C'est qu'on ne se rappelle que des séries drôles, et souvent familiales, et que ça permet de prendre un petit air condescendant en disant "ah, mais ça, c'étaient des séries comme on en faisait avant, c'était GENTIL, quoi". Vlan dans les dents.

Il ne vous aura pas échappé (ou si c'est le cas, prenez un air assuré et allez lire ce post discrètement quand j'aurai le dos tourné) que je ne mange pas de ce pain-là. Je revendique haut et fort mon attachement aux séries de jadis, peut-être moins fort qu'aux séries nippones ou australiennes, certes, mais quand même, et j'ai toujours une liste de séries à tester à l'occasion (tenez, la prochaine, c'est Voyage to the Bottom of the Sea, quand j'aurai du temps, et si je m'en tiens à mon planning... ah ah ah, je me fais rire toute seule dites donc).

La conversation du jour tournait autour de la classification de La Croisière s'amuse : selon SeriesLive, il s'agissait d'un soap. Mais comment la classer ? Comme un drame ? Certainement pas. Une comédie ? C'état un peu dérangeant quand même. Bon résultat, non seulement j'ai rien changé à la fiche, mais j'ai joué ma timorée sur la fiche de Das Traumschiff qui était la raison pour laquelle je consultais celle de La Croisière s'amuse.
Au cours de la conversation sur ce thème, donc, l'exemple de L'Île Fantastique est venu sur le tapis. Le soucis c'est que, si effectivement les séries sont comparables dans leur formule (notamment le fait que plusieurs histoires se croisent, permettant à plusieurs scénariste de travailler dans un même épisode), sur le ton elles n'avaient pas grand'chose en commun. Lorsque j'ai regardé le premier épisode de L'Île Fantastique voilà quelques semaines, l'histoire n'avait pas grand'chose en commun avec un épisode de La Croisière s'amuse, ou disons, en partie seulement. Car si d'un côté, on y trouvait deux jeunes femmes souhaitant vivre l'existence de la jet set (et qui du coup, c'est fatal, rencontraient chacune un homme qui permettait de se poser des questions sur la classe sociale de façon assez explicite, donc avec quand même dans l'idée de réfléchir et pas juste raconter une romance), l'autre partie était consacrée à un fantasme bien particulier : un magicien qui voulait accomplir "l'évasion ultime" se retrouvait envoyé dans une prison dont on ne réchappe pas. Envoyé ainsi dans le passé (et pas juste dans une illusion du passé, comme on pourrait s'y attendre, donc avec une forte composante fantastique qu'on a aussi tendance à oublier), il se trouvait réellement prisonnier, et il pouvait réellement mourir. A lui de voir si le défi en valait la peine... La leçon, loin d'être bienveillante, est alors réellement cruelle, et pas juste une gentille petite fable moralisatrice. Le personnage est réellement mis en danger, et même si on ne se fait pas de soucis pour lui, on a une vraie teneur dramatique, et pas juste une petite cabriole scénaristique. A côté, même les gars de Mission: Impossible étaient plus prudents sur les conséquences de leurs petites mises en scène. Et eux, ils travaillent pour le gouvernement.

RosyMemories_FantasyIsland
Outre cet exemple frais dans ma mémoire, on va exceptionnellement faire l'effort de se rappeler de mon plaidoyer pour réhabiliter (un peu) les Ahem! du Bonheur, qui, même si ses méthodes étaient, je vous l'accorde, celles d'une production peu raffinée en général, et pas téléphagiquement exigeante en particulier, avait tout de même quelques qualités dramatiques qu'on a eu vite fait d'oublier, quand on ne les a pas tout simplement ignorées.

Parce que c'est si facile de faire des généralités. C'est si facile d'avoir une mémoire partielle. C'est si facile de mettre des séries dans des cases.

Et je n'adresse pas ce reproche à qui que ce soit en particulier. Je suis consciente d'être moi-même, encore, parfois, d'un certain snobisme, alors que pourtant, en toute humilité, on ne peut pas dire que je ne fasse pas d'efforts pour regarder des séries contre lesquelles j'avais un fort préjugé il y a quelques années à peine encore. Genre Awkward., par exemple. Ou tout simplement, comme une série non-américaine. Parce que les habitués de ce blog le savent, il y a encore quatre ans, à l'ouverture de ce blog, j'étais du genre à considérer que hors la fiction US, point de salut, bien que regardant déjà des séries nippones. On a tous le droit de grandir, hein, je ne fais pas exception.

Mais enfin voilà, je trouve que ça en dit long sur nous en tant que communauté de téléphages, de voir que systématiquement, on a tendance à amoindrir l'impact dramatique des séries d'antan. J'ai regardé Roseanne il y a encore pas si longtemps avec la conviction qu'on avait changé d'époque et que celle-ci s'inscrivait dans la sienne ; alors évidemment, loin de moi l'idée de prétendre qu'on fait aujourd'hui les séries de la même façon qu'hier, et inversement.

Pourtant, de la même façon que, quand on parle de séries estivales en se disant que c'est le genre de série sans importance qu'on regarde et qu'on oublie aussi vite, on met soigneusement de côté le fait que Mad Men a, au départ, débuté comme une série estivale, eh bien de la même façon, on pense aux séries des décennies passées comme si elles avaient toutes uniquement proposé des Madame est Servie, et qu'il n'y avait pas eu de Prisonnier, pour ne citer que le meilleur des contre-exemples.
L'équipe du SeriesLive Show a d'ailleurs fait l'expérience d'une excellente bonne surprise quand, au début de notre première saison, nous avons découvert le pilote de Hawaii, Police d'Etat, et que la réalisation comme l'histoire allaient plus loin que le stéréotype qu'il nous en était resté.

Peut-être qu'on devrait regarder de "vieilles" séries plus souvent.
Ca nous rappellerait que les séries d'aujourd'hui que nous tenons en si haute estime... ont de qui tenir.

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17 juillet 2011

Total ellipse of the heart (Part. 2)

En période de décompression téléphagique, c'est la même chose qu'après une relation amoureuse intense : il y a toujours un effet "rebound". Dans le cas (le mien) qui nous préoccupe (beaucoup), mon ex serait donc Roseanne, et mon rebound guy... Noah's Arc. Question 5
Ne me demandez pas, je ne sais pas d'où ça me vient. J'avais déterré les cagoules suite à mes posts sur Single Ladies (ça devient effrayant le nombre d'occurrences de ce tag sur ce blog...) et avais revu le pilote, dans le cadre d'un mini-cycle de séries blacks. Je persiste à penser que c'est une sous-culture américaine qui gagne à être approfondie, et je persiste à dire que j'ai pls de mal avec les comédies que les dramédies. Je cherche toujours mon pilote de Soul Food, d'ailleurs.
Bref.

NoahsArc
Donc voilà, j'ai passé le weekend (outre les deux excellentissimes épisodes de The Yard qui sont sortis après le pilote, outre le pilote de Crownies, outre le revisionnage de plusieurs scènes-clé de Game of Thrones, outre le pilote que je comptais vous proposer ce soir pis finalement ce sera la semaine prochaine, outre le pilote de Exes & Ohs, outre, outre, outre) devant Noah's Arc, et je dois dire que, quand on n'attend rien d'une série, celle-ci n'est pas si dégueulasse que ça. Étrangement on s'attache à certains personnages avec le temps (principalement Noah, qui en fait, malgré ses drôles de lèvres supersoniques, finit par être mignon comme un chaton ; un chaton avec de drôles de lèvres supersoniques, mais quand même), les intrigues sont indigentes mais maintenant que je regarde Single Ladies j'ai plus le droit de me plaindre de ce côté un peu Harlequin. Les mecs sont pas beaux, tout en muscles et dans des fringues pas possibles, donc je peux même pas dire que c'est parce que je me rince l'oeil. Non, c'est vraiment une pure série de transition.
Pourtant, une ou deux fois, j'ai versé une vague larmouchette (rapport au fait que Noah a des moues de chaton... avec de drôles de lèvres supersoniques, mais quand même), et il faut quand même reconnaître que la façon qu'a la série de traiter du HIV est plutôt courageuse (c'est pas le final de Corky mais ça se regarde, quoi).
C'est fou comme, quand on baisse un peu ses standards, on peut apprécier vaguement une série qu'on avait sévèrement flinguée il y a quelques années.

Mais c'est pas vraiment de Noah's Arc dont je voulais parler, mais de ce qui s'est passé au début de l'avant-dernier épisode de la saison 2. Du coup si jamais vous comptiez regarder la série, on sait pas ça peut arriver, genre si vous êtes en manque de Roseanne, je préconise de sauter ce paragraphe. Dans l'épisode précédent, Noah s'est fait attaquer dans une station-service, et méchamment abîmer because juste parce qu'il est gay (là encore, pas forcément le sujet que je pensais voir exploré en détail par une série dont le ton est de la gamme de Sex & the City), la scène clôturant l'épisode nous montrant Noah évanoui par terre. Et donc, l'épisode suivant, qui est l'avant-dernier épisode de la série, reprend... eh bien, à l'hôpital. Fin des spoilers mais restez sur vos gardes parce que je vais me servir de cette exemple dans ma démonstration.

Je vais reprendre ma diatribe anti-ellipse, parce que vraiment les ellipses m'énervent. Mais ici, ce n'est pas parce que je pense que l'ellipse rend la scène ridicule, ni lui confère un côté cliché. C'est parce que, dans notre cas, l'ellipse vient de gâcher un beau moment de téléphagie.

Est-ce que dramatiquement, ce n'était pas plus intéressant de se demander comment la suite se passait pour Noah ? Le mec est à terre, comment va-t-il s'en sortir ? Il appelle de l'aide ? Quelqu'un vient à son secours ? Combien de temps est-il resté comme ça (bon ça n'a pas besoin d'être en temps réel non plus, évidemment) ?

Même en ayant passé mon weekend avec Noah, Wade, Ricky et les autres, je me rends bien compte que le drame qui fait frémir, ce n'est pas vraiment la priorité de la série. On parle d'une dramédie avant tout. Mais si une dramédie veut explorer une intrigue sombre comme celle-ci, j'attends qu'elle le fasse avec un minimum de dramatisation.

Mais quand j'y réfléchis, combien j'ai vu de séries nous faire le coup de plonger le personnage dans une terrible situation, et après pouf, il est entouré par ses proches, à l'hôpital, ou à la maison, ou qu'importe, et on aborde directement la phase où le personnage va essayer de dépasser cette expérience traumatique. Moi je veux bien mais on ne m'a même pas vraiment montré à quel point elle était traumatique. Parce que le vrai traumatisme, on ne m'ôtera pas de l'idée qu'il n'a pas eu lieu pendant, mais bien après, quand l'adrénaline et les tentatives pour échapper au pire sont derrière. Pas pendant l'agression ou l'accident. Mais les secondes qui suivent, quand la douleur débarque et qu'on comprend ce qu'il vient de se passer. Et qu'il faut maintenant se tirer de là. Là on a un personnage qui agonise par terre, je voudrais savoir ce qui se passe dans sa tête ! Comment il fait pour se retrouver dans un endroit où il est en sécurité ?

Donc je n'aime toujours pas les ellipses (certaines sont nécessaires évidemment, mais je n'en démordrai pas, beaucoup n'ont pas autant d'intérêt que les scénaristes le croient), et cette fois j'ai une nouvelle raison de m'en plaindre.

Bon, sur ce je vous laisse, le dernier épisode m'attend. J'ai pas encore décidé si j'allais cagouler le film. J'espère que dans tous les cas, le Dieu de la Téléphagie me pardonnera ce weekend de péchés contre le bon goût téléphagique, et me guidera vers une série un peu plus solide rapidement. Je voulais me refaire le pilote de Friday Night Lights depuis plusieurs mois, c'est peut-être justement le moment ? Sinon évidemment j'ai plein d'autres trucs sur ma liste, comme finir l'intégrale de Gilmore Girls, m'envoyer enfin celle de Jack & Bobby, et tout et tout, mais vous savez ce que c'est, dans ces cas-là, on n'a envie de rien.

30 juin 2011

Jetlag

Finalement, et même si je ne renie absolument pas mes raisons pourries de regarder Single Ladies, je crois que le côté "ça brille et c'est joli" n'est pas la seule chose qui m'attire dans cette série.

Le problème, c'est que, à l'instar de l'épisode de Roseanne que je regardais l'autre jour, on n'a pas souvent cette discussion avec soi-même où on essaye de reconnaître qu'on a, dans le fond, un peu, des préjugés. Et moi, lady, qui regarde des séries d'à peu près tous les pays pourvu de mettre la main dessus, je suis une raciste.
Parce que dans le fond, j'ai longtemps évité les séries avec, de, et pour les Afro-américains.

SingleLadies-1
Ce n'est qu'à moitié vrai, bien-sûr. J'avais regardé le pilote de Soul Food voilà bien longtemps (et même fait la fiche), j'avais vu de nombreuses comédies d'UPN et consorts... mais voilà, je les avais regardées et aussitôt mises de côté.
Sauf que c'était avant. Avant que je n'accepte de faire tomber les frontières ; quand j'ai admis que les fictions autres qu'Américaines pouvaient être dignes de mon attention (et ce alors que j'en regardais depuis des années, mais il faut voir le temps que ça m'a pris de l'accepter), et que j'ai ouvert ce petit truc dans ma tête qui faisait obstacle à la découverte franche et sans retenue de fictions "différentes". Ainsi, je me défaussais systématiquement des séries afro-américaines parce qu'elles ne répondaient pas aux critères mainstream de la série qu'il est honorable et gratifiant de regarder.

Et pourtant, quand je repense aujourd'hui au pilote de Soul Food, je me dis que je retenterais bien le coup. Parce que j'ai fait le chemin qui me permet d'accepter un peu mieux les séries différentes.

Aujourd'hui, notamment après des expériences comme House of Payne, Are we there yet ou Let's stay together, je sais que j'ai toujours du mal avec les comédies Afro-américaines ; elles me font, au mieux, sourire, jamais rire. Il y a peut-être un mécanisme d'identification qui est sous-jacent en comédie et qui est peut-être moins actif avec les séries dramatiques, je ne sais pas.

Mais devant Single Ladies, et c'est quelque chose que j'avais, finalement, perçu un peu avec Let's stay together, on sent qu'on a affaire à une sous-culture américaine, un truc qui n'est pas aussi mainstream que le reste, et il faut se l'avouer, ça demande une certaine plasticité téléphagique, une petite gymnastique, que je n'avais pas il y a encore deux ans, mettons, et que j'ai progressivement acquise.

Ce n'est pas qu'une question de normes télévisuelles dans l'écriture, le jeu, la mise en scène ou encore la musique. Evidemment, il y a des différences, mais je suis convaincue qu'on les dépasse assez facilement quand elles s'appliquent à des fictions "classiques". Mais ajoutez-y des particularités culturelles, et tout de suite, il y a un obstacle que tout le monde n'est pas prêt à franchir, et que je m'aperçois n'avoir franchi que récemment.
Les relations hommes/femmes sont différentes. Le rapport à la sexualité, mais aussi à la famille, est différent. Pas du tout au tout, et c'est là le piège. Mais juste assez pour qu'on manque légèrement de repère. Et c'est aussi ce qui explique qu'il ait pu être plus facile de regarder une série japonaise qu'une série afro-américaine pour moi, pendant si longtemps, c'est qu'au moins on sait qu'il est normal d'être dépaysé et décontenancé par les différences quand il s'agit du Japon, tandis que, quand il s'agit d'Atlanta, ça tombe moins sous le sens. Encore cette fameuse erreur assez française qui consiste à considérer les USA comme un seul pays et non un patchwork d'identités, comme si regarder une série américaine signifiait qu'on tombait toujours dans la même culture ; regarder Les Ahem! du Bonheur et Oz devrait pourtant nous apprendre quelques leçons, mais non, pas nécessairement.

SingleLadies-2
Donc voilà, je crois que ce qui m'intéresse aussi, dans Single Ladies, ce sont les propos qui me semblent sexistes mais qui sont considérés comme parfaitement acceptables par les personnages, les dialogues qui me semblent incongrus (par exemple Val demandant à son rendez-vous eurasien s'il est déjà sorti avec des femmes de couleur) et qui trouvent un sens dans le fond, toutes ces choses que je ne voyais que comme des défauts et que je vois comme des particularités à présent.

Ca ne rend pas Single Ladies meilleur. Du tout. Certains dialogues sont toujours authentiquement absurdes, ridicules, sirupeux et tout et tout. Il y a toujours une forte propension à nous faire du Zane's Sex Chronicles sans le sexe. Il y a toujours trop de clinquant et de belles robes.

Mais je crois aussi que j'accuse mieux le choc culturel, et c'est ce qui me rend curieuse vis-à-vis de la série.
Et du coup hier j'ai tenté All of Us, pour vérifier ma théorie : ouais, j'ai encore du mal avec les comédies. Par contre, de moins en moins avec le jeu des acteurs, étrangement. Donc si quelqu'un a un BON drama à destination du public afro-américain à me recommander, j'irais bien explorer un peu la question.

Une fois de plus, regardant des séries de la planète entière m'a appris à regarder les séries américaines différemment. Le nombre de richesses que mes voyages téléphagiques m'apportent, c'est fou.
Et pourtant, en écrivant cet article, je me demande si ce n'est pas maintenant que je tiens des propos racistes. Le voyage n'est jamais vraiment fini.

Et pour ceux qui manquent cruellement de culture : la fiche Single Ladies de SeriesLive.

26 octobre 2010

Un bluff historique

C'est malheureusement toujours un peu comme ça : le buzz augmente sur une série, j'en entends beaucoup de bien lorsqu'elle sort, les reviews positives se bousculent, et, dans la crainte d'être déçue, je reporte le visionnage du pilote aux calendes grecques. Résultat des courses : quand je m'y mets, je suis déjà archi-convaincue que ça ne va pas être si bien que ça, rapport au fait que tout le monde répète depuis plusieurs semaines que c'est bien.
Chais pas si vous suivez l'truc...
Voilà donc la raison pour laquelle je dis et je redis : arrêtez avec votre promo, votre bouche-à-oreilles, vos posts et tweets dithyrambiques, arrêtez, ça ne marche pas si bien que vous le pensez. Pas avec moi en tous cas. En fait, vous obtenez même l'effet inverse de celui recherché. Vraiment, arrêtez.

Donc quand j'ai fini par me lancer Boardwalk Empire, j'en étais une fois de plus là, consciente que tout le monde trouvait que c'était énorme, et splendide, et incroyable, et Dieu sait quoi d'autre, et consciente aussi que lire tout ça, et entendre parler de la série depuis des mois comme une espèce de bruit de fond, comme un acouphène téléphagique, ça n'allait pas vraiment m'aider à être dans de bonnes dispositions, sachant ma vision forcément influencée par tout ça. Certains jours je voudrais juste être coupée du monde pour découvrir de nouvelles séries.

Mais ceci n'est pas un post sur Boardwalk Empire. Pas vraiment. Il viendra plus tard... s'il vient d'ailleurs. Non, je voudrais ici pointer du doigt ce que je pense être la raison de tout ce fol enthousiasme devant la série et son univers qu'on me présente depuis des lustres comme incroyablement superbe, ou superbement incroyable c'est au choix. Loin d'être doté d'une réalisation originale, Boardwalk Empire a surtout une énorme avantage, et c'est celui-ci :

BluffHistorique

Désormais, le monde téléphagique est changé. Désormais, si une série se pique d'aller se dérouler dans le passé, avec des chapeaux et des belles robes, des femmes bien maquillées et surtout, ah surtout, n'oublions pas les vieilles voitures et les cigarettes, ça y est, elle est marquée du sceau de la réussite.
C'est l'héritage Mad Men.

Ce n'est pas vraiment que nous sommes nostalgiques d'une époque révolue. Pas vraiment. Voulons-nous vraiment d'une société machiste ? Quelques irréductibles zemmouriens, sans doute, mais guère plus. Ce n'est pas de la nostalgie. C'est juste que nous ressentons un grand confort à retourner dans des époques révolues qui s'offriraient à nous dans un luxe de détails parfaitement maîtrisés, des grands évènements historiques à la moindre coupe de cheveux. Nous voulons nous replonger dans une époque qui nous semble, certes, glamour sous un certain angle, grâce au soin infini porté par les stylistes à l'apparence de chaque protagoniste savamment looké, parce qu'elle nous semble rassurante. L'époque est clairement définie par des codes qui lui donnent ses limites, et actuellement, notre époque nous semble tellement floue et insaisissable que nous avons terriblement besoin de connaître les limites du monde.
Le reste n'est que folklore. Nous voulons simplement un monde facile à aborder, et dans lequel nous retrouverions tous les signaux qui nous disent que ce monde est tel qu'il est, sans grande nuance, sans zone grise. Nous voulons nos séries en noir et blanc.

Quand j'étais adolescente, je me suis prise de passion pour la Prohibition. Appelez-ça un transfert si vous voulez. Soudain c'était le monde le plus séduisant possible dans lequel trainer mes rêveries et mon imagination, et je vous fais grâce de toutes les histoires que j'ai alors inventées de façon plus ou moins abouties sur cet univers qui me permettait, oh ironie, d'échapper à ma propre Prohibition.
Mais il y a eu Mad Men. Et il y a maintenant Boardwalk Empire. Et désormais j'ai l'impression que si une série est capable de donner l'impression d'être exacte historiquement (et peu importe qu'elle ne le soit pas), alors elle trouvera son public, elle trouvera le moyen de combler les spectateurs en leur donnant les clés d'un monde ni trop lointain ni trop proche qui les accueillera une heure par semaine.

Faites une série historique, fendez-vous de tous les détails possibles et imaginables pour lui donner un air authentique (réalité historique ou décorateurs et stylistes de génie, vous avez le choix des armes), et vous obtiendrez la promo, le bouche-à-oreilles, les posts et tweets dithyrambiques.

Je suis, définitivement, irrémédiablement, fâchée avec la fiction historique à cet égard. Je n'arrive tout simplement pas à apprécier une série historique simplement parce qu'elle est historique, il me faut bien plus. Peut-être parce que j'aime regarder ce qui se passe dans la zone grise. C'est plus... grisant.

14 septembre 2010

Dressée pour charmer

Bon, non, sérieusement. Parce que quand je fais de l'humour, apparemment le message passe mal.
Il y a une chose qui me chiffonne sincèrement dans Nikita, et c'est en repassant l'épisode en accéléré que j'ai compris pourquoi. Le problème ce n'est pas son sujet, son genre, rien de tout ça : je ne m'attends pas à aimer une série d'action. Elles ne sont pas faites pour moi, et je ne suis pas un public pour elles, c'est une affaire réglée.

Par contre j'ai un problème entre son contenu et sa cible supposée. Pour moi, la CW est la chaîne des adolescentes, voire des préadolescentes quand le monde va mal. C'est indubitable, et toutes les séries de sa programmation auxquelles je pense me semblent le confirmer (vous me dites si j'en oublie une qui fasse exception). Et le truc c'est que Nikita justement n'est pas exactement une série pour la cible traditionnelle des adolescentes.

La scène qui a fait tilt, c'est celle-ci (que j'ai sous-titrée pour que tout le monde puisse suivre, et qui est spoiler-free, d'où la coupure un peu sèche sur la fin) :

BelleNikita

On a ici une adolescente qui a sincèrement eu autre chose à penser ces derniers temps que la perspective de se peinturlurer le visage. Et on décide d'en faire une bimbo qui va utiliser ses charmes pour accomplir ses futures missions. C'est le but avoué : tu vas apprendre que tu es belle, et tu vas t'en servir.

Et en fait ce qui me chiffonne, c'est pas exactement que ce soit le propos de la série, ça fait d'ailleurs partie de la panoplie d'espionnage et ALIAS, par exemple, n'a jamais hésité à jouer sur le physique de Sydney (et ses costumes) pour souligner la chose. Mais ALIAS n'était pas une série diffusée sur une chaîne quasiment réservée aux adolescentes. ALIAS était une série destinée à un public adulte. Essentiellement, en tous cas. Ça n'excluait pas que des ados puissent regarder mais ils n'étaient pas le coeur de cible. Qui plus est, l'agent Bristow était déjà largement rodée aux tours et détours de sa profession.

Ici on a une série sur une chaîne principalement à destination des adolescentes, avec une adolescente tenant l'un des deux rôles principaux, et à qui on va apprendre à utiliser le sexe comme une arme. Vous voyez mon soucis ?
On a une vraie problématique de sexualisation d'une tranche d'âge qui n'a peut-être pas besoin qu'on l'emmène sur un tel terrain, et qui, avec des Gossip Girl et des 90210, a déjà, à mon humble avis, déjà largement de quoi faire en la matière, déjà à l'excès.

Maintenant comprenez-moi bien : je suis une femme. J'aime qu'on me trouve sexy, et j'aime me sentir sexy (quand la situation s'y prête ; exemple : au boulot, je n'y tiens pas).
Mais je n'aurais pas aimé que, voilà 10 ou 15 ans de ça (bon d'accord, plutôt 15 que 10), une série ou qui que ce soit d'autre m'ait pris par la main pour me dire que je pouvais utiliser mon potentiel de séduction à mon avantage. J'aurais trouvé ça déplacé parce que, toute adolescente que j'étais, nécessairement à la fois intéressée et angoissée par la perspective que d'autres me regardent (idéalement la gent masculine, j'étais du genre sélective), je n'en étais pas forcément au même stade de développement en la matière que d'autres adolescentes de mon âge qui taillaient des pipes dans les couloirs sombres, ou que celles qui faisaient leurs devoirs de la semaine suivante pendant la pause, camouflée sous un épais pullover. Nous ne sommes pas du bétail. On s'éveille à ces choses différemment (et une composante de cette différence est d'ailleurs tout simplement biologique), à des rythmes variés, certaines plus vite que d'autres.
Encore aujourd'hui, l'une de mes amies est une adorable petite blondinette aux beaux yeux bleus, qui doit rentrer dans un parfait 36 (allez, 38 si elle a abusé du McDo), et pour autant elle n'utilise pas son sex-appeal, ça ne l'intéresse pas. A contrario je connais des jeunes femmes qui n'ont pas grand'chose pour elles, mais qui le développent à un tel point qu'on ne doute pas un instant qu'elles soient sexy. Pourquoi vouloir nous conditionner pour systématiquement faire le parallèle entre ce à quoi nous ressemblons et ce qu'on peut en tirer ?

Bien-sûr, de la même façon qu'Alex regarde la robe rouge dans cet extrait avec à la fois envie et méfiance, bien-sûr, une adolescente a envie de plaire ! Mais faut-il vraiment lui montrer comment, alors même qu'elle n'est pas forcément mûre pour en comprendre toutes les conséquences, ni nécessairement prête à toutes les assumer ? On peut aimer le regard de l'autre sans réaliser ce qui se passe dans sa tête. Je ne parle pas des prédateurs sexuels, mais des adolescents et des hommes tout simplement (qui, diront les mauvaises langues, sont par nature des prédateurs sexuels, mais pas de ça ici), qui ne vont pas forcément s'arrêter au teasing que les adolescentes affectionnent.

Ne nous le cachons pas : quand je vais à un rendez-vous, je ne mets pas un col roulé ; je mets un beau décolleté qui met en valeur mon 95C, on n'attrape pas des mouches avec du vinaigre. Mais je ne réfléchis pas en termes de "hm, j'ai un beau décolleté, comment je pourrais m'en servir pour obtenir ce que je veux dans la vie ?", et je trouve choquant qu'on le suggère à des adolescentes. Elles ne vous semblent déjà pas assez aguicheuses comme ça, les adolescentes, de nos jours ? J'en croise assez peu que je laisserais sortir dans la rue si elles étaient les miennes (et je me considère plutôt laxiste en la matière)...

Peut-on juste arrêter de vouloir expliquer aux gamines (désolée si certaines me lisent et se sentent offusquées par ce terme, appelez-moi vieille peau en échange, ce sera de bonne guerre) qu'elles peuvent être encore plus attirantes qu'elles ne le sont naturellement avec leur peau toute élastique ? (presque pas jalouse)
Est-ce qu'une série, fût-elle sur l'espionnage, ne peut pas aussi essayer de transmettre un message différent, genre c'est l'intelligence ou, à défaut, l'astuce, qui peut permettre d'obtenir ce qu'on veut ? Pourquoi toujours le sexe ? Elles sont pas assez sexualisées nos adolescentes ?

Voilà, c'était ça le fond du problème avec Nikita. La cible. L'adolescence, c'est un temps de construction de soi. Pas le moment idéal pour balancer des idées pareilles. En tant qu'adulte, je ne me sens pas mise en danger, mais je pense aux ados devant leur écran (je ne sais pas pourquoi, on analysera ça un autre jour).
Et je me dis que si elles regardent Gossip Girl, 90210, Hellcats et Nikita... ça fait beaucoup de modèles féminins qui utilisent leurs charmes dans la vie, et pas beaucoup qui utilisent leur tête.

3 septembre 2010

Géographie téléphagique

Devant ma propre insistance à ne plus regarder la télé (l'état affligeant de la rubrique Zappeur, Zappeur n'aies pas peur en atteste), j'ai décidé de sévir. Je ne vais certainement pas n'en faire qu'à ma tête, ah ça non, ou alors je devrai d'abord me passer sur le corps !

A l'échelle individuelle, ne plus regarder la télévision est un véritable problème. Au-delà du fait que cela signifie qu'actuellement j'échappe totalement à toutes les tentatives de TFHein ou Hem6 de me vendre du Coca, ce qui est à la limite plutôt leur problème, il s'avère que ne compter que sur la cagoulage pour vivre ma téléphagie me prive d'une grande partie des plaisirs de la téléphagie.
Si je parle à 99,9% de séries dans ces colonnes (à la notable exception de SNL, et en ce moment des Emmy Awards ; tiens à propos je me tâte pour vous en faire un post, de la cérémonie de cette année...), je suis et reste conquise par la télévision dans sa globalité, et c'est la raison pour laquelle je me considère téléphage et pas seulement sériephage. Certes, il y a, comment dire ? Une matière principale, les séries, mais j'ai aussi pris d'autres contenus télévisuels en option et si je n'en parle pas, je ne les apprécie pas moins.

Appréciait, en fait, vu que justement je ne regarde plus la télévision, et que par voie de conséquence, je ne m'amuse pas à aller cagouler un débat, un documentaire ou un journal télé (je n'ai même pas vérifié si c'était possible, et je rappelle à toutes les bonnes âmes qu'en ces colonnes, on ne connaît Youtube que sous la dénomination "le Mal"). Et là réside le problème, car du coup, ma consommation de ces programmes a changé. Elle n'est pas complètement éteinte, mais pas loin. La mutation principale, c'est que désormais, je ne cagoule des documentaires que s'ils m'intéressent et si je tombe dessus. Comprenez : sur un site anglophone (puisque c'est là que je me fournis en série au quotidien).
Du coup, je peux vous cagouler des talk shows, des émissions comiques, parfois des documentaires, etc... mais j'ai quand même largement fait une croix sur la plupart des programmes francophones. Eh oui.

Alors voilà, ça ne peut pas durer. Tentons de comprendre pourquoi ce changement est intervenu...
Je sais bien que d'ordinaire, la rubrique Série de valeurs est plutôt dédiée aux valeurs qui filtrent à travers les fictions qu'on regarde, mais pour une fois, je vais parler de la télévision en tant qu'objet, et non en tant que production "abstraite".

Salon

Car le changement date en fait de l'été 2009, quand, c'est tout bête, j'ai déplacé l'écran de l'ordinateur pour pouvoir bosser depuis le lit. Dans ces conditions, regarder la télé sur mon bel écran plat (l'ordi) au lieu de mon vieux tube cathodique (la télé) est devenu une évidence, et bien vite je n'ai même plus pris la peine d'allumer la télévision, située quelques centimètres au-dessus. La télé, débranchée pour je ne sais quelle raison, n'a jamais plus été utilisée, quand bien même la télévision sur la télé (fournie par Free) n'englobe pas, justement, TFHein et Hem6.

C'est donc bien un problème géographique qui se pose à travers cette désaffection.

Et ça montre bien à quel point l'emplacement de l'écran de télévision est primordial, même si on le savait déjà.
Car il est évident que la télévision, de par son emplacement, conditionne l'importance qu'on lui donne, tout en étant la conséquence de cette même attention qu'on veut bien lui prêter.

J'ai toujours été fascinée, par exemple, par les familles qui ont une télévision dans la salle à manger. Dans ma famille, ç'aurait été proprement impensable d'avoir un écran allumé pendant les repas. On avait bien trop de choses à se dire en gueulant pour laisser une télévision pénétrer dans notre espace sonore, pour commencer. Et puis surtout, c'était absolument indigne des "valeurs familiales" qui avaient cours chez nous, et qui stipulaient implicitement que la famille mérite un repas qui la rassemble et lui permette de passer un moment privilégié (fut-il intégralement utilisé aux fins de se hurler dessus, ou, pire, et heureusement plus rare, s'affronter à coups de silent treatment).
Mais il y avait bel et bien des familles (d'après mes renseignements, une majorité de notre ville de banlieue, en fait) où la télévision avait sa place à table comme n'importe quel autre membre de la famille. On se rendait d'ailleurs compte que selon les familles se répartissaient souvent en deux écoles : celles qui regardaient des émissions de divertissement et rompaient les rangs quand commençaient le journal (mangeant donc à 19h), et celles qui regardaient le journal télévisé ensemble (passant donc à table plutôt à 20h).

De la même façon, ma soeur et moi avons longtemps lutté afin d'obtenir le droit de détenir une télévision dans les chambres. C'est ma frangine rei qui a ouvert le bal avec une télé quasiment lilliputienne qui est arrivée en même temps que notre toute première console (un combat épique mais qui n'a pas sa place dans ces colonnes). Un ou deux ans plus tard, je récupérais un vieux poste des années 80 (je vous parle d'un temps que la génération télécommande ne peut pas connaître) tout juste bon à jouer avec une console 8bits.
Là encore, il y avait dans mon entourage une foule d'adolescents qui avaient la télé dans leur chambre, non seulement parce qu'ainsi ils pouvaient regarder ce qu'ils voulaient, mais bien souvent parce que les différentes générations de la maison avaient ainsi chacune la possibilité de regarder des programmes adaptés (ou moins adaptés pour ceux qui s'arrangeaient et rallumaient le dimanche soir...).

Ainsi la télévision a-t-elle besoin d'une situation géographique dans la maison pour exister en tant que média. Pour nous, les choses étaient toutes autres : pendant longtemps, l'unique poste était dans un meuble télé fermable à clé, tout au fond de la maison, dans un lieu où, en quelque sorte, il fallait faire une effort supplémentaire pour se rendre, le cœur de la maison état plutôt la combinaison cuisine/salle à manger. Le côté "aventuriers de l'arche perdue" de chaque expédition vers le meuble télé reflétait bien l'importance que mes parents lui avaient, plus ou moins volontairement, donnée.
J'ajoute que la crainte distillée depuis notre plus jeune âge qu'allumer la télé, c'était l'abimer, n'aidait en rien notre consommation.

Bref, la situation géographique actuelle de la télévision chez moi a, une fois de plus, joué un rôle déterminant dans ma consommation des programmes. Le problème, c'est maintenant de trouver un emplacement qui lui serait plus favorable, et qui reste logique quand on habite dans un studio configuré pour tenir dans 14m².
La télévision liée aux problèmes immobiliers ? Ce sera ptet l'objet d'un prochain post !

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