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ladytelephagy
15 janvier 2012

Mr. Dismissed

Il sera dit que ce dimanche sera canadien ! Mais cette fois, on va changer de registre et s'intéresser à une comédie, Mr.D, qui a débuté en début de semaine. Pour être honnête, la teneur du post va également changer de ton par rapport aux deux précédents.

MrD
"Mr. D", en fait Mr. Duncan, c'est un prof de sport qui a assuré plusieurs remplacements, mais qui n'a trouvé de post permanent qu'en tant que prof d'Histoire. Il intègre la Xavier Academy, un collège privé, dans un domaine où il est donc totalement incompétent. Il se retrouve également à coacher l'équipe junior de basket féminin, nous permettant de constater ses ravages aussi bien en salle de classe qu'en salle de gym.

Le problème, c'est que Mr. D est un pauvre con. Sérieux, ya pas d'autre mot. Il est arrogant, il se prend pour le copain des élèves, le mec super cool de la salle des profs, l'expert en sport, le beau gosse... il a tous les travers. Il est insupportable. Son comportement est systématiquement du style tête à claques.

Le pilote est donc entièrement dédié à un seul objectif: vous le faire détester. Pas une seule fois il ne se montrera touchant, comme peuvent l'être d'autres personnages écrits pour être détestables, non, le but est uniquement d'agacer le spectateur un peu plus à chaque nouvelle scène, dans l'espoir paradoxal qu'il n'éteigne pas sa télé avant la fin de l'épisode mais qu'il lui vienne quand même une grosse envie de meurtre.
Je vous avoue que c'est vraiment quelque chose qui échappe totalement à ma compréhension. On n'est pas tout-à-fait dans un système humiliant comme dans des séries du type The Comeback, dont j'ai déjà pu parler, mais la dynamique est quand même assez proche puisqu'il est absolument impossible d'apprécier le héros de quelque façon que ce soit, et qu'il n'offre aucune forme d'aspérité à laquelle on puisse s'attacher. Ca me rappelle un peu mes souvenirs brumeux du pilote de The Office, sauf que là on n'arrive à le trouver pathétique, au mieux, que dans les "bons" moment. La grosse différence étant qu'on n'est pas dans une logique de mockumentary ce qui a au moins le mérite d'être original.

Au final, Mr. D est surtout le portrait d'un pauvre gars qui va persister dans sa bêtise, avec en plus, assez peu d'occasions pour les personnages l'environnant de vraiment exprimer l'exaspération du spectateur. Les rôles secondaires pourraient en effet être intéressants (le surveillant psychorigide, la prof sérieuse qui a des vraies angoisses de prof, la secrétaire du collège qui flirte avec tout ce qui bouge...) mais n'ont pas l'opportunité de vraiment se développer, et ne réagissent que de façon assez brève à leur insupportable interlocuteur, sans lui river le clou ni vraiment le mettre face à ses défauts (ce qui, en l'occurrence, constituerait l'humiliation, quasi-absente de cette étrange comédie comme je l'ai dit). Une curieuse comédie, vraiment.

C'est vraiment le genre de série que je recommande à ceux qui aiment les séries susmentionnées. Sans quoi... sans quoi eh bien, vous êtes un peu comme moi, et ça va vous mettre mal à l'aise. Zetes prévenus.

Et pour ceux qui manquent cruellement de culture : pas de fiche. Pour changer.

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15 janvier 2012

Halte aux complexes

Canada, you're on fire !
Après Bomb Girls, et dans une moindre mesure Apparences et Arctic Air, la mid-season s'annonce très convaincante pour les Canadiens. Et si The CW vient d'acquérir les droits de la série The L.A. Complex, c'est parce que la chaîne américaine aimerait être capable de proposer des séries maison de cette trempe et qu'il n'y avait tout simplement pas de question à se poser.

Complex

The L.A. Complex a réussi à capturer tout ce que j'aime dans le mythe hollywoodien, sans aboutir à un résultat qui manque de sympathie ou de "réalisme", et surtout pas de chaleur humaine. Les héros de la série sont, certes, tous frappés du sceau du tout-le-monde-il-est gentil (le côté tout-le-monde-il-est-beau était sous-entendu par le sujet de départ), mais il ne s'agit pas de raconter des parcours qui vont nécessairement bien se dérouler, ou conduire à la gloire, ou rendre heureux. C'est comme ça que j'aime mes histoires sur le monde du show business.

Il y a quelques semaines, je vous parlais de ma déception en réalisant qu'il m'était impossible de trouver une série qui parle de la vie des danseurs comme le fait A Chorus Line. Il y a une danseuse dans The L.A. Complex, d'ailleurs. Mais sans se limiter à la danse, je retrouve dans la série retranscrit plutôt bien l'ambiance que je cherchais dans ce style de fictions ; la somme de travail, d'espoirs, de désillusions, d'échecs que cela représente que de chercher à percer dans cet univers, trop souvent dépeint, dans les séries adolescentes notamment, comme un milieu où comme par hasard on va venir vous chercher parce qu'on a découvert ce que vous valez (parfois alors que vous-même ne le saviez pas !).
Sans pour autant être une série déprimante, sombre et glauque, The L.A. Complex tire admirablement partie des éléments négatifs de la vie de ces jeunes (et moins jeunes). Il en résulte à la fois l'illusion du réalisme et l'impression d'une certaine fraîcheur, puisque l'idée n'est pas non plus de s'écarter trop d'un esprit de camaraderie (typique des séries destinées à cette tranche d'âge) entre les différents personnages.

Peut-être que, dans le fond, le rêve hollywoodien, ce ne sont pas les séries américaines qui peuvent en parler le mieux. Souvenez-vous de The Assistants (ou glissez un oeil dans les tags et prenez un air intelligent) : c'était un peu le même topo. Dans ces deux séries canadiennes, même si la forme varie beaucoup, l'idée reste la même de montrer un envers du décor à la fois sympathique, enjoué et coloré, et de tout de même rappeler ce que c'est que de s'escrimer à survivre dans ce milieu quand on vient de débarquer, plein d'espoirs prêts à se faire écraser.
C'est sans doute un peu sadique de ma part, mais c'est exactement ce que je cherche dans une fiction qui s'apprête à me parler d'un milieu supposément glamour comme peut l'être l'industrie du divertissement.

Oui, peut-être que ce sont ceux qui cherchent à percer à L.A. qui parlent le mieux de ce qu'on peut ressentir quand on est un outsider qui essaye d'entrer dans la boucle hollywoodienne. Après tout, la série est canadienne, et elle ne s'appelle pas The L.A. Complex pour rien.

Et pour ceux qui... eh non.

15 janvier 2012

Notre pas si belle famille

Ah, comme j'aimerais regarder plus de séries québécoises ! J'ai un peu de mal à suivre aussi bien les nouveautés canadiennes francophones que leur pendant anglophone, qui tendent à trouver bien plus d'échos sur internet (c'est peut-être aussi un problème de sources, me direz-vous ; c'est toujours un peu un problème de sources, non ?). J'ai été ravie par un grand nombre de séries québécoises que j'ai découvertes ces derniers temps, à l'instar d'Un Homme mortMirador, Malenfant ou Prozac (pas Trauma, mais on ne peut pas tout avoir) ; sincèrement, l'impression que j'en ai, c'est que les meilleures fictions francophones ne sont pas françaises, même si on sent quelque chose de similaire, peut-être dans les moyens financiers. Les séries québécoises sont, sans aucun doute possible, de la même famille que les séries françaises, et pourtant, elles réussissent là où si souvent les nôtres ont du mal.

Apparences

La preuve par l'exemple : la construction du pilote dans Apparences est assez classique dans son déroulement.
Mais ce qui est intéressant, c'est le choix de rendre non pas la disparition de l'une des héroïnes extraordinairement inquiétante, mais au contraire, de rendre étouffantes la plupart des scènes familiales, à la fois via l'esthétique sombre, froide et gris-bleutée des images, et par le fait que les personnages qui constituent cette famille ont tous l'air de cacher quelque chose. La disparition, si elle est au centre des dialogues, n'est en réalité qu'un prétexte à explorer cette famille en apparence si fonctionnelle, et pourtant, un peu boiteuse dans le fond, parce que ses membres ne sont pas si lisibles que ça.

Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit. Ils n'ont pas un terrrrrrible secret à cacher, en tous cas c'est pas l'impression qui ressort de l'épisode, mais par contre ils ont cette manie de s'envoyer des regards de côté, d'être constamment sur les dents les uns vis-à-vis des autres, même avant que les choses soient réellement inquiétantes. Ca construit vraiment vite l'ambiance.
On sait assez vite qu'une partie de ces comportements en apparence suspects sont dûs au fait que l'un des garçons de la famille est un toxicomane qui vit en désintox (on ne veut d'ailleurs pas trop le dire, mais il y est un peu enfermé contre sa volonté), et que du coup, c'est plus cette espèce de culpabilité familiale qui s'exprime en de nombreuses occasions. Mais ce n'est pas tout. Les protagonistes de la famille Bérubé ont tous un côté légèrement maussade qui attire l'attention.

Il apparait d'ailleurs assez clairement qu'en dehors du personnage principal qui a disparu et de sa soeur jumelle, les relations ne sont pas vraiment radieuses chez les Bérubé. Celui de leur deux frères qui n'est pas en désintox n'est pas vraiment charmant, son épouse semble un peu apeurée par lui, la mère cache un tempérament peu commode sous ses apparences de gentille grand'mère, etc... Tous s'inquiètent pour la gentille maîtresse d'école sans histoire qui s'est évaporée dans la nature, mais tous s'observent aussi avec une certaine méfiance. Le climat est incroyablement bien installé même si on a l'impression qu'il s'appuie sur trois fois rien, des regards, des gestes, des silences, un mot légèrement plus haut que l'autre. C'est assez édifiant.

Avec tout ça, l'épisode se déroule lentement, sans grand retournement de situation. Le pilote ne cherche pas à nous tenir en haleine avec des twists ou des mystères, et se concentre donc sur le drama en construisant surtout ses personnages avec minutie, leurs relations, leur angoisse grandissante. La fin de l'épisode, si elle surprend, n'est pourtant pas tant dirigée vers le mystère de la disparition d'un personnage, que vers sa personnalité, et cela a quelque chose de rafraîchissant par rapport aux thrillers classiques.

Apparences2

A ce stade, l'idée semble être plutôt de bâtir un huis clos, en fait. Les personnages ne sont pas, techniquement, enfermés ensemble, mais on élimine très vite les suspects extérieurs au cercle familial (même si au moins l'un d'entre eux est quand même pas très net) pour se concentrer sur la petite cellule qui fonctionne tant bien que mal, et où, même si tout le monde s'inquiète pour ce qui semble être une victime, on ressent un certain malaise quand ils sont ensemble. C'est un parti pris intéressant pour qui préfère les séries dramatiques aux thrillers souvent prévisibles.

Une vraie bonne surprise dont trop peu de monde va vous parler. Maintenant que c'est fait, je compte sur vous pour donner sa chance à cette série québécoise. Quant à moi, je serai au rendez-vous pour les épisodes suivants.

Et pour ceux qui manquent cruellement de culture : la fiche Apparences de SeriesLive.

14 janvier 2012

En un mot comme en cent

MindRape

Et pour ceux qui manquent cruellement de... pas de fiche sur SeriesLive, bien fait.

13 janvier 2012

Are you there, shitty sitcom? It's me, NBC

Cela vous paraitra probablement étrange de la part de quelqu'un qui aime lire des autobiographies, mais peu de choses m'énervent autant que les séries ostensiblement commandées pour s'intéresser au passé d'une personne célèbre. Je trouve que c'est un manque effroyable d'imagination, une technique de vache à l'ait insupportable. Everybody Hates Chris, par exemple, n'est pas drôle ET épouvantablement égocentrique. Are you there Chelsea? : même chose.

Vodka

On est d'accord qu'il y a des nuances, et/ou des exceptions. Et jamais vous ne me verrez reprocher à Rude Awakening ou Titus leurs vertus biographiques, ce sont même de véritables plus à mes yeux, amplement commentés dans ces colonnes. Mais derrière la démarche de ces derniers, il y a moins la volonté de mettre la personnalité en avant, qu'une réelle expérience (et une vision de l'humour toute personnelle). Are you there Chelsea? est au contraire totalement artificielle, aussi bien dans son sujet que dans sa façon de le traiter. On n'y décèle aucune personnalité, ce qui est un comble !

Ce genre de série m'évoque, au mieux, les 712 pitches de films et de séries qui, chaque année, se déroulent à Hollywood ou New York ; dans ces séries-là, systématiquement, le personnage principal est une scénariste qui ne parvient pas à vendre son projet et fait des petits boulots (The Minor Accomplishments of Jackie Woodman), le personnage central est un humoriste divorcé à la vie personnelle en déroute (Louie), le héros est un acteur sur le retour (The Paul Reiser Show), etc... Les mecs ne se fatiguent même pas à faire semblant de se trouver un contexte un peu original, une profession imaginaire, un itinéraire bis. Ils s'interprètent eux-mêmes, à un tel point qu'on se demande si ce ne serait pas plus simple de se lancer dans une émission de télé réalité... (quoique, Fat Actress et The Comeback dansaient sur la ligne de démarcation entre les deux).

Ces travers autobiographiques, Are you there Chelsea? en fait la démonstration sans que, toutefois, la célébrité qui en est à l'origine ne passe devant la caméra, ce qui permet de faire mine de prendre de la distance. Ce devrait donc être une plutôt bonne nouvelle.
Le problème que j'ai, et qui m'empêche de trouver que c'est une bonne idée, c'est que je trouve que de toutes les actrices de la création, Laura Prepon est probablement la moins drôle. Depuis That 70s Show, j'ai toujours l'impression qu'elle est incapable d'interpréter la moindre scène sans se tordre de rire, et très franchement, une actrice qui rit avant d'avoir prononcé la moindre blague drôle, ça me coupe tout, un vrai tue-l'amour. Mais plus tard, j'ai aussi découvert qu'elle ne m'apparait pas plus crédible dans des rôles plus sérieux, genre October Road. Elle n'est donc pas drôle, pas touchante, et dans une série sur une nana qui veut reprendre sa vie en main, l'un comme l'autre font gravement défaut.

Il est vrai que pour ne rien arranger, Are you there Chelsea? n'a pas vraiment hérité des meilleurs dialogues de la création. On est dans la veine de 2 Broke Girls, la passion pour les vannes débitées d'un air mutin par Kat Dennings en moins (ce qui est quand même le seul véritable à-peu-près-atout de ladite comédie), c'est sans âme.

Eh oui, sans âme. J'aimerais pouvoir retrouver ce sentiment que j'ai quand je revois des épisodes de Rude Awakening, où l'alcoolisme et la vie de débauche sont vus avec un humour véritable, personnel, et en même temps touchant quand l'occasion se présente. J'aimerais pouvoir dire qu'une autre série est capable de faire quelque chose de bien sur un thème similaire. J'aimerais pouvoir vous dire que, wow, c'est vraiment drôle et original ! Mais non, c'est du sitcom bête et méchant, sans aucune plus-value.

Nan mais alors ok, si on veut la jouer comme ça, à faire des autobiographies à la con parce qu'on n'ose pas faire des trucs plus originaux par frilosité, alors d'accord. Je vous annonce donc la sortie de ma biographie, Are you there, strawberry milkshake ? It's me, lady, prochainement dans toutes les bonnes librairies. Les droits d'adaptation sont à céder.

Quand à la prière au Dieu du sitcom pourri, on l'a vu avec How to be a Gentleman, Whitney et Work It, tous les networks le prient, en ce moment. Pour l'heure, je n'ai pas encore regardé Rob!, mais je vous avoue mon très relatif optimisme.

Et pour ceux qui manquent cruellement de culture : la fiche Are you there, Chelsea de SeriesLive.

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6 janvier 2012

Band of Sisters

Quand il s'agit de s'évader hors des USA, mais de rester dans le cadre de la fiction anglophone, nombreux sont les téléphages qui optent en premier lieu pour la Grande-Bretagne. Bien qu'y était venue tard (principalement pour cause d'allergie à l'accent), je ne saurais le leur reprocher car on y trouve d'excellentes séries. Pour ma part je vous ai souvent entretenus de séries australiennes. Je suis notamment bien consciente de vous devoir deux posts de The Slap, et j'ai même eu envie de me refaire une "intégrale" de Cloudstreet. A l'occasion, on a pu évoquer des séries néo-zélandaises également (hélas, j'ai toutes les peines du monde à cagouler le deuxième épisode de The Cult).
Un pays qui, par contre, semble condamné à être sous-représenté ici (et malheureusement quasiment partout ailleurs) est le Canada. Il faut dire que beaucoup de séries canadiennes destinées au grand public semblent recycler des recettes toutes faites, de Lost Girl à Combat Hospital, en passant par les policières King ou Endgame, très peu des séries récentes que j'ai testées ces derniers mois m'ont convaincue. Des séries plutôt de niche, comme Todd and the Book of Pure Evil, ou évidemment The Yard, un peu plus, par exemple. Mais globalement, je suis statistiquement peu charmée par les séries canadiennes.

Alors quand je découvre Bomb Girls, je suis doublement ravie. D'abord parce que c'est une bonne série, et ça fait toujours plaisir de découvrir une bonne série. Et ensuite parce que c'est une bonne série canadienne, et ça fait encore plus plaisir de découvrir une bonne série canadienne.

BombGirls

Bomb Girls s'intéresse donc à ces femmes qui, pendant la Seconde Guerre Mondiale, ont pris le chemin des usines, notamment d'armement, tandis que les hommes partaient, vous l'avez deviné, sur le front. Des femmes qui n'avaient jamais connu que la vie au foyer commençaient alors à travailler, à gagner leur propre argent, à porter des pantalons, à gérer leur vie amoureuse comme bon leur semblait... Eh oui, Bomb Girls est une vraie série sur la libération de la femme, rien à voir avec les mijaurées américaines du début de saison qui ont fait mine d'aborder le sujet pour ensuite s'en écarter.

D'ailleurs, la réplique-phare du pilote de PanAm pourrait tout aussi bien s'appliquer aux personnages féminins de Bomb Girls :

"They don't know that they're a new breed of women".

A la différence que même les hommes autour d'elles n'en ont pas conscience. En fait, les hommes dans Bomb Girls font bien sentir à nos héroïnes que tout cela ne durera que ce que vivent les bombes, et qu'ensuite, ce sera un retour à la normale, qu'elles reprendront leur place.
Rétrospectivement, ça pourrait faire sourire, puisque ce que ces femmes vont changer, plus jamais on ne pourra le leur retirer, mais quand on vient de se coltiner Work It, croyez-moi, ça arrache plutôt une moue de dédain, voir un geste de recul devant la violence verbale décomplexée de certains personnages. Et pourquoi, après tout, ces personnages masculins se cacheraient-ils d'avoir une opinion arrêtée de la place de la femme dans la société ? Ils n'ont rien connu d'autre.

La panoplie de personnages de Bomb Girls reste relativement classique : on a l'oie blanche, Kate, qui échappe aux maltraitances de son père, un prêcheur tyrannique, et a besoin de ce travail à l'usine pour maintenir son indépendannce ; il y a à l'inverse Gladys, fille d'un fabricant d'armes riche qui l'a fiancé à un jeune Américain tout aussi riche, et qui intègre l'usine à l'un des rares posts administratifs ; il y a Betty, la forte tête indépendante et bosseuse qui forme les nouvelles arrivantes ; et enfin, il y a Lorna, la matriarche qui veille sur les ouvrières tout en gagnant la croûte de sa maisonnée et en attendant le retour de ses deux fils au pays. Collègues, amies, soeurs, ou peut-être autre chose encore, ces femmes travaillent à la fois pour leur pays, pour ceux qui sont au loin, et pour elles-mêmes.

Les profils n'ont rien de follement original, et les intrigues sont relativement attendues vu le contexte, mais les protagonistes sont variées juste ce qu'il faut pour que l'expérience de chacune offre un regard différent sur les étapes importantes franchies par ces femmes. D'autant que, pour atténuer le stéréotype, les actrices les campent avec beaucoup de conviction qui les rendent instantanément sympathiques.
Il me parait difficile de nier qu'il n'y a rien d'extraordinairement novateur dans Bomb Girls. Mais peu de séries ont su, jusqu'à présent, ce pencher sur l'arrière, cette facette de la Seconde Guerre Mondiale qui a pourtant eu tout autant d'impact que ce qui se passait au front. Bomb Girls offre de très jolis portraits, des intrigues bien menées, une bonne dose d'émotion et une photographie de l'époque qui nous transporte immédiatement.

La réalisation, bien que parfois légèrement trop propre, parachève l'excellent travail. Bomb Girls est une série qui a l'ambition de faire du bon boulot, en s'en donnant les moyens, mais sans en faire trop. Son bon goût la sauve du pathos ou de la simple reconstitution pour lui permettre de systématiquement parvenir à son objectif : raconter avec beaucoup de justesse et un peu d'émotion comment des femmes ont pris leurs vies en main. Juste avant d'aller arracher les cojones de ces Messieurs, donc.

Et pour ceux qui manquent cruellement de culture : la fiche Bomb Girls de SeriesLive. Pour le moment un peu sommaire, je vous l'accorde.

6 janvier 2012

En l'espèce, menacée

Il m'a fallu dix bonnes minutes, à la fin du visionnage, pour arrêter de pleurer et commencer à rédiger mon post sur Work It.

WorkIt

Ainsi donc, c'est à ça qu'on en est rendus ? A une époque où de plus en plus de séries nous disent combien il est difficile de trouver un boulot actuellement (Hung, Jane by Design, ou, à présent, Work It), et d'ailleurs grand bien leur fasse, il faut que l'une d'entre elles se pique de prétendre que c'est plus facile pour des femmes ?
SERIEUX ?

Au début de la saison, la guerre des sexes a été déclarée avec les comédies Last Man Standing, Man Up!, et How to be a Gentleman, qui nous ont affirmé dans un appel à l'aide déchirant que les hommes étaient une espèce menacée. On ne regrette pas celles de ces séries qui ont disparu. Rendez-vous compte, les femmes sont tellement bien dans leur peau de nos jours qu'elles forcent les hommes à... euh... rien. Mais c'est très menaçant cette façon qu'elles ont de le faire !!! De... ne pas le faire. Enfin bon, vous m'avez comprise.

Maintenant, Work It nous sort un pitch dans lequel les seules alternatives au chômage, c'est soit récurrer les toilettes d'un fast food, soit se déguiser en femme pour bosser dans la vente ?! C'est comme si les trois premières séries avaient été la mise en garde : attention, messieurs, vous êtes en train de vous faire émasculer, si vous ne prenez pas garde vous allez devenir des femmes... LITTÉRALEMENT ! Et voilà, Work It tombe quelques mois plus tard comme pour murmurer : "on vous avait prévenus pourtant".

Oh non, je comprends très bien. Le travestissement à des fins comiques n'a rien de machiste, n'est-ce pas, cela fait des décennies qu'on l'emploie sans aucun problème et ça ne veut rien dire... en général dans les plus mauvaises comédies qui soient, mais qu'importe. Et puis c'est vrai d'ailleurs, Work It est, tout simplement, une mauvaise comédie, pas drôle, avec des gags fatigués, des acteurs sans panache, des dialogues creux. C'est ça l'essentiel de son crime, n'est-ce pas ? Et puis c'est pas sexiste, regardez, à la fin le mari réalise qu'il a pas traité sa femme comme il aurait dû, rho, si c'est pas mignon.
Eh bien non, désolée. Je n'arrive pas à regarder Work It comme je peux regarder 2 Broke Girls, en me disant que c'est simplement nul. Je trouve ça insultant, et pas juste pour mon intellect.

D'ailleurs Work It non plus ne cherche pas à faire mine de relativiser. Dans son explication des forces en puissance sur le marché du travail, la série est très claire dés son intro : les raisons pour lesquelles ses deux héros se transforment en femmes pour obtenir un boulot ne sont pas circonstancielles (et donc plus excusables de mon point de vue). C'est parce que l'univers [du travail] est dominé par les femmes, si bien que ce sont elles qui vont bientôt employer les hommes comme gigolos. D'ailleurs, le pouvoir de la sexualité féminine est si fort que c'est la raison pour laquelle la société d'adoption des héros n'embauche que des femmes : seuls leurs charmes sont capables de convaincre les médecins d'acheter les médicaments de l'entreprise ! Work It a explicitement décidé que this is a women's world et que les hommes étaient réellement en danger ; le propos est clair, et il est assumé.
Et il est surtout honteusement mensonger.

Ne me lancez pas sur le côté insultant qu'il y a à imaginer que pas une de ces 4 femmes n'a remarqué qu'il s'agissaient d'hommes, ou que l'épouse de l'un des héros n'a même pas percuté que ses fringues avaient curieusement gagné trois tailles (et que son mari s'était épilé les jambes). Je n'irai même pas sur ce terrain.

Jamais je ne me suis sentie aussi féministe que depuis que ces comédies ont débarqué en masse cette saison. Avant, je n'avais pas l'impression d'être susceptible à ce sujet, je n'avais pas l'impression d'être solidaire de qui que ce soit, je n'avais pas l'impression d'avoir quelque chose à défendre. Mais je découvre ces pilotes un à un, depuis quelques mois, on en est déjà à 4 quand même, et je trouve que c'en devient révoltant. A chaque pilote supplémentaire je me sens dépassée par l'impression que ces comédies ont une espèce de mission perverse ; que, même, leur absence d'humour réel leur sert de protection ("ne monte pas sur tes grands chevaux, ce n'est pas sexiste, c'est juste pas drôle !").
J'aimerais m'en défendre, me raisonner, me dire que ce ne sont que des séries de merde, mais je n'y arrive plus, il y en a trop d'un coup, et elles sont toutes tellement peu subtiles dans leur approche, que ça m'inquiète, que je le veuille ou non.

En regardant le pilote de Work It, j'ai aussi repensé à Three's company. Quand j'avais découvert le pilote de cette série des années 70, je m'étais fait la réflexion que c'était très intéressant : le personnage principal était supposé se faire passer pour gay afin d'avoir le droit d'emménager avec des filles, mais pourtant à aucun moment il n'endossait le stéréotype du gay. Et pourtant, quarante ans plus tard, quand un homme se déguise en femme, il faut absolument qu'il soit une "femme" aux dents phosphorescentes, en jupe et talons hauts, et qui parle de façon maniérée.
Et ça, ça m'aurait fait rire, en fait. Que l'un ou l'autre des mecs conduits à se travestir fasse mine d'être une femme au sens le plus stéréotypé du terme, et qu'il soit regardé comme un extra-terrestre par les autres. Qu'il fasse une blague sur la mécanique et que l'une de ses interlocutrices lui réponde. Qu'il déballe une salade rachitique à midi et que les autres aillent déjeuner à la pizzeria (parce qu'elles vont passer toute la journée à courir de cabinet médical en cabinet médical). Là j'aurais totalement admis le principe du travestissement à des fins comiques.

...Evidemment, je n'ai pas pleuré pour de vrai à la fin de Work It. Nous autres les filles ne nous mettons pas à pleurer à tous bouts de champs. Certaines d'entre nous s'y connaissent même un peu en mécanique. Mais sans perpétuer les clichés sexistes sur le femmes, de quoi pourrait-on bien rire, hein ?
On va finir par ne plus être capables de répondre à cette question.

Et pour ceux qui manquent cruellement de culture : la fiche Work It de SeriesLive.

5 janvier 2012

Pas mauvaise, juste dessinée comme ça

C'est forcément un peu sectaire, mais quand je lance une série clairement adressée à la tranche ado et/ou préado, je ne me dis pas que je vais regarder de la grande télévision. Si, la fois où, nostalgique, j'ai regardé le pilote de L'Odyssée imaginaire, ce genre de choses, et encore. Mais que ça vienne de Disney, teen nick, The CW ou ABC Family, mes attentes sont immédiatement revues à la baisse. C'est une question de survie.

Quand a commencé le pilote de Jane by Design, je n'avais donc pas en tête l'idée que je pouvais être bluffée.
Et ça ne s'est pas produit.

JanebyDesign
Mais je me rends compte que je suis bien cruelle. Jane by Design n'est pas une mauvaise série ; je la donnerais plus volontiers à regarder à un téléphage en herbe que la plupart des calamités Disney que j'ai pu tester.

Bien que l'héroïne soit irritante (pas par nature mais essentiellement à cause de son interprète, assez insupportable), on rentre facilement dans cette histoire de double vie mignonnette. Les personnages secondaires sont un peu caricaturaux, mais ils ont encore quelques chances d'être exploités de façon sympathique, à défaut d'être originale. On ne verse ni excessivement dans le pathos, ni dans la comédie grosses tatannes ; globalement, en-dehors du halo lumineux autour des acteurs (plus insolent dans certaines scènes que d'autres il est vrai), la série n'abime pas la rétine ; on y trouve évidemment des fringues en pagaille, mais c'est fait avec une certaine candeur (à l'instar de la scène où Jane essaye la garde-robe de sa patronne en découvrant le dressing hypra-fourni de celle-ci) et pas avec l'impression qu'on peut avoir dans d'autres séries qu'il s'agit de vendre une ligne de vêtements ou de lancer une mode (d'ailleurs une des robes d'India de Beaufort est déjà apparue dans une autre série, je me rappelle m'être fait la même remarque : c'est moche mais nécessaire quand on n'a pas de hanches ; si vous avez meilleure mémoire que moi, éduquez-moi, je parle de la grise à la fin).

Et puis surtout, derrière cette série, il y a une idée qui me plaît bien et que j'ai déjà évoquée : l'entrée dans le monde du travail. Et sous un angle positif.
Adieu les ados ou universitaires qui souffrent au fast food le plus proche, ici on a une jeune personne qui, certes, a également des raisons financières de se lancer dans ce métier, mais qui avant tout est fascinée par un univers professionnel, et qui l'aborde avec positivitude, même si évidemment il y aura des déconvenues (dés le pilote, à vrai dire), des imprévus et des moments pas marrants. On passe réellement par le genre de stades que je voudrais voir plus souvent dans des séries, c'est-à-dire une façon plus nuancée de montrer le travail quand on débarque : un endroit où on peut à la fois trouver des gens très sympas (l'assistante qui reçoit Jane et le gay-de-service sont sympatoches comme tout), et des supérieurs hiérarchiques plus ou moins sympathiques (la patronne de Jane, le design, etc...).
Evidemment que penser que le patron est systématiquement un con et/ou un emmerdeur a des vertus pour se vider la tête, mais ça n'a pas besoin d'être systématique comme ça l'est devenu dés qu'une série parle de boulot. Jane by Design est l'une des rares séries récentes à s'approprier le monde du travail sans a priori négatif ; c'est regrettable que ce soit une série adolescente qui le fasse, ça donne l'impression d'une démarche quasi-pédagogique, mais pour une fois que le travail n'est pas désigné comme le 10e cercle de l'Enfer, je vais quand même pas me plaindre.

Jane by Design n'est pas la révélation de l'année. Mais ça me semble infiniment plus regardable qu'une énième fiction où l'héroïne veut devenir chanteuse. Evidemment on parle toujours d'un univers relativement glamour, on n'en est pas encore au point où une héroïne de teen show voudra être infirmière ou championne de lutte, mais je trouve qu'il y a quelque chose d'à la fois honnête et rêveur dans son propos, au sens où les robes et les bijoux, les intrigues amoureuses et les identités secrètes, ne virent pas au miroir aux alouettes. Une part de rêve à paillettes, mais aussi une part de réalisme terre-à-terre, confèrent à la série une véritable sympathie. Même si on ne s'en souviendra probablement pas sitôt qu'elle sera annulée car elle se montre assez anecdotique dans ses intrigues pour le moment.

D'ailleurs pour toutes ces raisons, j'ai envie de dire à ceux qui n'ont pas détesté Jane by Design qu'ils sont prêts pour apprécier un dorama nippon sans prétention du style de Real Clothes, pour rester dans la même thématique. L'appel est lancé.

Et pour ceux qui manquent cruellement de culture : la fiche Jane by Design de SeriesLive.

30 décembre 2011

Dodging the bullet

L'autre jour, je ne sais plus où je flânais précisément, mais il s'agissait en gros de la page IMDb d'une série qui n'avait finalement jamais été retenue. Dans les commentaires, quelqu'un posait LA question qui me hante depuis bien longtemps maintenant, à savoir : qu'advient-il du pilote de cette série une fois que le couperet est tombé, et un autre contributeur répondait... attention, les âmes sensibles vont avoir un choc : rien. L'épisode est détruit.
Faisons une pause pour que tout le monde reprenne possession de lui-même.
Moi-même ça m'a demandé quelques minutes, je ne vous le cache pas. J'ai été prise d'un vertige renversant en pensant à tous ces pilotes détruits, introuvables, à jamais disparus, inaccessibles. Du travail pour rien. Jamais de postérité. C'est d'une brutalité qui me donnerait quasiment envie de pleurer, et par quasiment je veux dire que c'est sûr et certain et que je ne refuse pas qu'on me passe un mouchoir, merci.

Dans ces colonnes, les pilotes de type "unsold" ont souvent eu droit à une jolie place, parce que, eh bien, j'aime les pilotes, j'aime les découvertes, et que je ressens un sentiment de perte même quand une série que je ne regardais qu'en dilettante est annulée au bout de 15 ans alors, bon, coeur brisé pour coeur brisé, autant tenter des séries qui n'auront jamais dépassé le stade du pilote. Ainsi, des séries ont été évoquées ici, et je vais les mentionner à nouveau pour que vous puissiez tirer partie des tags : Pretty Handsome, Faceless, Nikki & Nora, Babylon Fields, Prodigy... J'en oublie sans doute. Et j'aimerais pouvoir mettre The Miraculous Year dans cette liste (ah c'était ptet sur cette fiche IMDb que j'étais, tiens, puisqu'on en parle).
La plupart du temps, je regarde ces pilotes invendus parce que, bon, déjà c'est pas poli de refuser un pilote, vous connaissez ma ligne de conduite à ce sujet, ensuite parce que toute découverte est toujours bonne à prendre, qu'il y a toujours quelque chose d'intéressant à trouver dans un pilote et ce même (surtout ?) s'il n'y a pas eu suite, mais aussi parce qu'il faut quand même bien admettre que ça fait toujours plaisir de faire une belle prise, et les pilotes que nous ne sommes pas supposés voir, c'est un de ces trésors cachés qui font aussi du bien à l'ego du téléphage. Soyons honnêtes, hein, il y a une part de "moi je fais partie de la minorité qui a vu" qui fait plaisir ; je ne sais d'ailleurs pas pourquoi je me gâche ce plaisir en venant ensuite vous en faire des posts et vous inciter à regarder aussi, héhé...! Je ne suis sans doute pas assez élitiste à mon goût.

Enfin voilà, tout ça pour dire que le pilote de série non-commandée, c'est un plaisir sur lequel je ne crache pas, jamais. Aussi quelle n'était pas ma surprise de voir la "publicité" autour de 17th Precinct, y compris sur The Hollywood Reporter. La façon dont ce pilote a mystérieusement échappé à la destruction puis, encore plus mystérieusement, trouvé le chemin du streaming puis, mystérieusement toujours, été évoqué par des sites qui d'ordinaires sont suffisamment "sérieux" pour ne pas parler d'épisodes leakés à tous bouts de champs, ça m'a surprise. Je trouve ça intrigant. Comprenez que j'ai de sérieux soupçons quant à la finalité de cette étrange apparition sur internet, dans la joie et l'allégresse de tous, y compris ceux qui d'ordinaire font mine de ne pas avoir remarqué que des videos de ce genre se promènent sur internet. En un mot comme en cent, il me semble que, quelque part, quelqu'un vient de nous donner une opportunité. Petite, fragile, intangible, sans doute. Mais une opportunité. A nous d'être nombreux à nous en servir.

...Si toutefois cela en vaut la peine. On en vient donc à l'objet de mon post : que vaut le pilote de 17th Precinct ?

17thPrecinct
Si vous êtes un lecteur régulier de ce blog, vous n'ignorez pas que j'ai pris les séries poulardières en grippe il y a plusieurs saisons maintenant. Depuis Les Experts, on a eu le temps de faire trois fois le tour de la question à cloche-pied. Chaque année on a droit à une, deux, trois séries policières procédurales où le héros est un enquêteur-pas-comme-les-autres-qui-a-une-faculté-particulière-pour-résoudre-les-enquêtes, ce qui fait que finalement, ils deviennent tous des enquêteurs comme les autres. On a parfois des pitches plus originaux, ponctuellement, et même de temps à autres des séries policières non-procédurales genre Southland, mais l'impression d'overdose est bel et bien présente et je ne pardonne plus rien depuis environ 5 ans dans le domaine.
Qui plus est, même si j'ai énormément apprécié Battlestar Galactica (je devrais me faire un marathon, tiens, ça me permettrait d'enfin voir la fin), je n'ai pas de tendresse particulière envers ses acteurs. Je suis contente quand je les vois, mais je ne les suis pas absolument. Idem pour Ron D. Moore que je n'en suis pas à considérer comme un Dieu vivant. David E. Kelley, là, d'accord, mais Moore...

Ce qu'il y a de bien quand on ne part pas avec un a priori positif, c'est que ça laisse plein de place aux bonnes surprises.

Le pilote de 17th Precinct commence pourtant assez mollement. Un crime, du sang, l'impression d'avoir mis les pieds dans un procedural comme tant d'autres. Arrivent alors nos deux enquêteurs (James Callis et Jamie Bamber), et la série s'amuse alors avec ses effets spéciaux. Un sourcil levé, l'autre froncé, on attend sans trop savoir sur quel pied danser comment cette histoire de magie ne va pas complètement tout gâcher. Il faut quand même voir que les mecs peuvent reconstituer le déroulement du crime dés les premières minutes du pilote, donc ça laisse circonspect dans un premier temps. La chose n'est pas facile à gérer, mais elle est brillante en réalité. Car quand arrive l'équivalent du coroner dans le monde de 17th Precinct, et que Tricia Helfer se la joue mi-Charmed, mi-Pushing Daisies (croisement contre nature s'il en est, pourtant), on découvre que la richesse de l'univers de cette série va justement lui permettre de respirer vis-à-vis des codes du procedural, tout en profitant de la popularité du genre.
Par-dessus le marché, outre les trois transfuges de Battlestar Galactica, on va retrouver Eamonn Walker (Oz !) dans la peau d'un commissaire de police doté d'un don de vision, Stockard Channing (évidemment restée dans les mémoires téléphagiques pour A la Maison Blanche) dans le rôle d'une vétérante qui va devoir prendre en charge une jeune recrue particulièrement prometteuse incarnée par Matt Long (The Deep End)... Le casting est précieux, les idées excellentes se succèdent. Elles parviennent à mêler à la fois des éléments conventionnels de la série policière telle qu'on en a bouffé ces dernières années, tout en apportant définitivement d'excellents twists. Mais attendez, n'allons pas trop vite. Il va se passer plusieurs minutes pendant lesquelles le pilote va lentement établir chaque personnage, sans trop en dire toutefois. C'est un passage un peu lassant car on va vite comprendre que l'intérêt de la série ne réside que très partiellement dans ses personnages.

C'est une fois tous ces personnages introduits que la bascule s'opère véritablement. On entre alors dans ce monde étrange grâce à l'instauration simple, rapide, mais nette, d'une véritable mythologie, tout en donnant l'opportunité à "l'enquête du jour", ainsi qu'à "l'enquête secondaire" (toutes deux des classiques de la structure d'une série procédurale), de dévoiler les étrangetés de l'univers de 17th Precinct. Les deux affaires utilisent, sans être trop tape-à-l'oeil, les propriétés de ce monde où toute chose est régie par la magie.
On comprend que le fonctionnement de la vie de chacun, au quotidien, est différente, à Excelsior (c'est le nom de la ville, ç'aurait donné un bien meilleur titre de série d'ailleurs). Il y a quelque chose d'assez mystique, d'ailleurs, dans la façon dont la magie est perçue à la fois comme utile et sacrée ; c'est presque animiste et cela se ressent sans être trop explicité, avec énormément de subtilité. Petit-à-petit, on commence à prendre la mesure des rouages de cet univers où la magie est à la fois quelque chose en quoi l'on croit, et que l'on utilise. Et on comprend que les valeurs de cette société s'en trouvent modifiées (comme l'indique les verdicts des procès montrés ou mentionnés dans l'épisode). Ce n'est pas juste une façon de dire, "ah ouais, pour changer on va faire de la magie", il y a réellement une sorte d'éco-système qui se construit pendant ce pilote.

Quand on pensait avoir plutôt bien pris ses repères dans l'univers de 17th Precinct, c'est là qu'on est frappé par un ultime retournement de situation, fou, incroyable, puissant, et terriblement cohérent avec ce que nous dit le pilote depuis ses premières images, pourtant. La mythologie, lentement mise en place par le truchement du personnage d'Eamonn Walker, commence à prendre un sens différent, déjà. On regarde Matt Long avec des étoiles dans les yeux (et pas uniquement en raison de la couleur de ses pupilles) et on attend de grandes choses de Stockard Channing.

Soudain, là, à cet instant, le souffle coupé, on se rappelle que 17th Precinct est un pilote "unsold".
Je ne nierai pas qu'il y a une part de frustration à l'issue du visionnage de ce pilote. Mais il y a une part de satisfaction intense à l'idée d'avoir vu un pilote plus que solide. Pas génial, mais carrément bon, quand même.

On ne m'ôtera pas de l'idée, pas avant un bon moment en tous cas (le temps me donnera tort, ou raison, ou tort), que la sortie de ce pilote, à un moment où plein de monde peut le voir, sur des sites de streaming où il pourrait être retiré et où il ne l'est pas, repris par des sites d'information sur le milieu de l'audiovisuel sans la moindre protestation des ayant-droit, a une raison d'être.
Peut-être que 17th Precinct a encore une chance d'éviter la mise à mort. Peut-être que nous pouvons nous aussi exercer un petit tour de magie. Peut-être que cette fois, nous avons ce pouvoir. Juste peut-être.
Pour certains pilotes "unsold", l'effort n'en vaut pas la peine. L'espoir n'a pas lieu d'être entretenu. Mais j'ai aimé le pilote de 17th Precinct et je ne pense pas être la seule. Et si vous le regardez, il ya de grandes chances pour que vous l'aimiez. Pour que vous en parliez. Pour que vous twittiez quelque chose à l'intention de @nbc. Pour que... Qui peut dire ? Un monde où la magie existe... ça en fait, des possibilités.

Et pour ceux qui... Eh bah non. Du coup.

23 décembre 2011

Home away from home

Eh bien voilà. The Café s'est conclue... sans vraie conclusion, d'ailleurs. D'une façon qui lui ressemblait bien, finalement. Difficile de vous dire combien cette séparation m'est difficile. Ces derniers mois, je me suis attachée à des séries assez variées, mais jamais à ce point ; en fait c'est un peu toujours le cas, mes découvertes téléphagiques sont souvent les unes aux antipodes des autres et c'est ce que je recherche d'ailleurs, mais je crois que The Café faisait vraiment figure d'ovni dans le paysage.

LeavingTheCafe
Imaginez un peu. Des accents imbitables. Une série sans histoire ni fil rouge. Seulement 6 épisodes. Et surtout, ce ton contemplatif, et cette ambiance si banale...

Mes lectures comme certains de mes contacts sur Twitter ont souligné les liens de parenté entre The Café et The Royle Family. Je vous avoue qu'après avoir vu le premier épisode de The Royle Family, j'ai quand même du mal à trouver le point commun. Nan, si, évidemment, il y en a, mais disons que ce n'est pas ce qui a fait que je me suis attachée à The Café. Il manquait dramatiquement au pilote de The Royle Family l'atmosphère de rêverie, l'atmosphère de convivialité... ce petit truc qui fait que je me suis tout de suite sentie au chaud avec The Café, que j'ai voulu m'y installer semaine après semaine et regarder moi aussi la vie des gens se dérouler tranquillement, presque l'air de rien.
C'était vraiment une expérience que je n'ai pas retrouvée avec The Royle Family. L'impression d'être à la fois hors du temps et dans la vraie vie, de partager réellement des joies et des peines, le quotidien, d'avoir rendez-vous avec une communauté accueillante, même si personne n'avait rien de spécial et qu'il ne leur arrivait rien de spécial. J'ignore ce que cela dit de moi, mais le rythme lent des épisodes, les dialogues à la fois tendres et anodins, les personnages anonymes et tellement proches...

Non, The Café n'est pas très excitante à première vue, elle n'a pas les fameux "enjeux" qui sont devenus si importants de nos jours aux yeux des spectateurs affamés de sensationnel, c'est juste le fil de la vie de quelques personnages qui se déroule sous nos yeux. Un endroit où on se sent dorlotté, où rien de mal ne peut arriver, où en fait rien n'arrive vraiment si on veut pousser un peu, où on peut juste mettre l'univers en pause et savourer le moment en bonne compagnie.
J'étais bien, à Weston-super-Mare. J'étais vraiment bien, vous savez. Je voudrais y rester. En fait, je vous avoue que j'ai même commencé à regarder comment je pourrais y aller vraiment...

Et pour ceux qui manquent cruellement de culture : la fiche The Café de SeriesLive.

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