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ladytelephagy
1 avril 2012

Nonchalance

Ce que Mad Men nous a appris (voilà, la comparaison est lâchée, comme ça c'est fait), c'est qu'il fût un temps où boire, fumer, et arpenter des pièces parfaitement décorées était un véritable mode de vie. Loin de l'état perpétuel d'excitation voire de stress dans lequel nous vivons à présent, le calme, c'était supra chic. On ne déballait pas ses névroses, comme ça, à tout le monde et n'importe qui, et moins encore à son entourage. Non, on s'en grillait une petite et on vidait son verre cul-sec, on affichait un air faussement blasé, et c'était déjà oublié. Tout ça dans un costard ou une robe sublimissime, par-dessus le marché.
C'était ça, avoir la classe. Pas étonnant que dans notre monde survolté, nous ayons tellement envie que la télévision nous rappelle cette magnifique époque d'intériorisation cruelle mais pleine à l'allure impeccable. Magic City a complètement retenu la leçon.

MagicCity

En définitive, que raconte le pilote de Magic City ? Que le patron d'un grand hôtel de Miami tente par tous les moyens d'éviter une grève qui, à quelques heures du début de l'année 1959, pourrait bien lui coûter son affaire. Et pour être tout-à-fait honnête, cette partie-là du pilote dure, toutes scènes comprises, environ quinze minutes.

Que se passe-t-il le reste du temps ? Eh bien, Jeffrey Dean Morgan déambule dans sa suite, dans son hôtel, dans une villa, à la plage ; le cigare au bec et le regard placide en permanence. De temps en temps, sa voix de basse murmure quelque platitude, voire même une menace monocorde, mais son travail s'arrête bien là. Steven Strait se contente quant à lui de passer de scène en scène à la fois en roulant des mécaniques et en brûlant de désir pour une mystérieuse inconnue, habitée par Jessica Marais dont on a à peine le temps de vérifier ce qu'elle a fait de son accent australien tant elle parle peu et s'exhibe beaucoup. Quelques autres femmes jalonnent l'épisode, ce sont toujours des créatures convoitables mais dépourvues d'épaisseur, y compris celle qu'incarne Olga Kurylenko, qui pour être sublime et sympathique dans un même mouvement n'en est pas moins creuse.

C'est à peu près tout. Et pourtant ça marche.

Pilote basé sur l'ambiance, Magic City ne repose pas sur l'efficacité de ses histoires, de ses dialogues ou de sa réalisation. La sobriété prime en tout.

Et en fin de compte, cette nonchalance est tellement contagieuse qu'on n'a pas envie de se plaindre, mais plutôt d'envoyer deux olives faire quelques brasses dans un martini glacé, et d'attendre que les minutes s'égrènent. Tant que la compagnie est bonne et que la musique est sensationelle, que peut-on vouloir de plus, n'est-ce pas ?

Eh bien, le problème c'est qu'à l'issue des 55 minutes que dure le pilote, la question se pose quand même. L'inconvénient c'est que, voyez-vous, si cette recette prend sur moi pendant un pilote, c'est tout-à-fait autre chose sur le long terme. L'expérience Mad Men l'a prouvé : passé le moment du coup de coeur pour l'ambiance, quand commence à se profiler la perspective de se mettre chaque semaine au rendez-vous, eh bien les priorités basculent et j'oublie la série ; il me faut alors des trésors de volonté pour me remettre devant.
L'ambiance c'est bien, mais ça n'est pas assez addictif, et les histoires doivent sembler solides, le fil conducteur doit s'étirer vers l'horizon, les personnages doivent donner l'impression qu'ils ont quelque chose à dire ; or justement, sur le long terme, Magic City n'est capable d'aucune promesse. Et c'est la raison pour laquelle, malgré tout le bien que j'ai pensé de ce voluptueux pilote, je crains de ne pas être capable d'avoir le réflexe, chaque semaine, de me rappeler qu'un nouvel épisode m'attend, tout simplement parce que je n'attends rien d'un nouvel épisode.

Une carte postale n'est pas faite pour s'étirer sur dix épisodes. Et en nous envoyant avec un tel flegme ses bons baisers de 1958, ce pilote de Magic City ne donne pas envie de continuer la promenade en 1959. Pas en l'état. C'est tragique, mais c'est comme ça. Mais, si j'ai bien appris ma leçon, alors sitôt que j'aurai vidé mon verre, je m'y serai déjà faite.

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1 avril 2012

In good faith

GCB

Imaginez un monde où on retrouve des accents du Sud de l'Amérique, de la musique country et une actrice de Pushing Daisies. Ca fait beaucoup d'arguments en faveur de GCB !
Pour autant, il ne faut pas croire que j'étais d'emblée acquise à la série. Le thème soapesque proche de Desperate Housewives, avec toutes ces femmes riches, belles sous condition d'avoir le bon éclairage, et ayant bien trop de temps libre pour rester honnêtes bien longtemps, avait tout pour me repousser. J'ai d'ailleurs lâché Desperate Housewives assez vite, parce que je trouvais ça stérile et que j'étais proprement incapable de m'intéresser longtemps aux retournements de situation factices. Sans parler des personnages légèrement hystériques.

Après tout, on trouve des accents du Sud en bien d'autres endroits y compris dans des séries (mon préféré est et reste celui de Reba, le plus prononcé que j'aie jamais entendu à la télévision), j'ai de la musique country à ma disposition sans m'infliger une mauvaise fiction, et quant à l'actrice de Pushing Daisies eh bien, comme le prouve mon Piemarathon, je peux la retrouver dans Pushing Daisies quand je veux.
Ok GCB, il va donc falloir faire mieux que ça.

Hélas les choses se sont bien mal engagées lorsque Leslie Bibb a commencé à... je ne sais pas trop ce qu'elle faisait, mais je n'oserais pas appeler ça jouer la comédie. Donc juste pour être sûre, euh, petite vérification : confirmez-moi un truc, elle est actrice, pas vrai ? Elle était mauvaise comme ça, dans Urgences ? Dans Popular ? Chais pas, c'est la doubleuse qui lui sauvait la mise ou bien ? En tous cas ça pose question.
Et c'est d'autant plus embarrassant qu'elle est supposée être l'héroïne de la série et qu'elle occupe l'écran une grande, très grande partie du temps. Vraiment j'en étais gênée pour elle.

GCBiches

Heureusement, pour compenser la vacuité de la prestation de Bibb, elle a face à elle des gens qui font tout le charme de la série. C'est par cette panoplie de personnages d'importance variable, mais toujours savoureux, que GCB remplit son contrat de divertissement qui fonctionne plutôt que de punition collective.
Évidemment, Kristin Chenoweth est en grande forme. Elle l'est toujours plus ou moins mais la place qu'on lui laisse pour s'épanouir est variable (dans Glee par exemple, elle pouvait chanter mais pas vraiment donner le meilleur d'elle-même dans d'autres domaines). Ici elle est en TRES grande forme, et elle est, en réalité, la force motrice de ce pilote. Carlene me rappelle un peu Dallas, dans Suburgatory, mais en version peste patentée... et pourtant diablement attachante, parce que même insupportable, la Cheno est une crème, c'est dans son ADN.

Le mérite ne lui en revient pas exclusivement, pourtant. Très vite, la venimeuse Cricket, l'embarrassante Sharon (interprétée par dont j'admire déjà l'accent depuis Rodney ; ce qui admettons-le est certainement la seule chose à admirer dans cette comédie pathétique) et Heather la fausse-peste, vont prouver qu'elle sont plus que des faire-valoir pour Carlene, et vont apporter chacune des scènes très sympathiques à ce pilote, même si elles sont moins en verve. Mais au-delà de ça, même les petits rôles fonctionnent pour le moment très bien : Blake le mari qui mène une double-vie, Ripp, celui qui forme un fantastique tandem avec Carlene, ou encore, dans une moindre mesure certes, la mère d'Amanda (j'avoue que je m'attendais à ce qu'elle soit plus haute en couleur, mais ce n'est que le pilote).
On a la vraie sensation de découvrir toute une société, un microcosme gangrené par les apparences, et c'était nécessaire ; il faut vraiment que ça continue comme ça. Comme Suburgatory a essayé d'en décortiquer les mécanismes, il est d'ailleurs très futé de la part de GCB de ne pas trop chercher à expliciter de côté-là des choses et de nous laisser l'observer sans appuyer dessus ; la réalisation et les stylistes se chargent de ce boulot sans que le scénario ne s'apesantisse sur la démonstration de force, et c'est bien joué, cela évite l'impression de déjà vu.

D'ailleurs, plutôt que de parler uniquement de riches oisifs comme peuvent le faire Desperate Housewives et Suburgatory, GCB a l'excellente idée, bien qu'évidemment elle lui ait causé pas mal de tort aux États-Unis (c'est d'ailleurs surprenant d'apprendre que la Pologne, pays chrétien s'il en est, fait par exemple partie des premiers pays à en avoir acheté les droits ; la série y est diffusée depuis la mi-mars !), d'orienter sa critique vers la contradiction entre les valeurs chrétiennes et leur non-application par les horribles pestes de la clique de Carlene.
Le sujet est abordé au travers de tout un champs lexical très efficace, et de nombreuses références bibliques utilisées avec malice parsèment l'épisode. Je n'ai pas eu l'impression que c'était très offensant, mais c'est vrai que d'une part, je suis athée, et que d'autre part, le simple fait de montrer des teignes en indiquant clairement quelle est leur religion peut, je le comprends, défriser ceux qui voudraient renvoyer une image immaculée de leur communauté. Ce ne sera pas pour cette fois, mais je crois que les égratignures sont suffisamment superficielles pour que cela ne porte pas préjudice à la série sur le long terme, on se rend vite compte que c'est fait en toute bonne foi, sans méchanceté, mais quand même pour souligner une certaine hypocrisie qui existe, il faut l'admettre. Et puis, le personnage le plus explicite quant à cette thématique, Carlene, est interprété par une Chenoweth que je crois foncièrement incapable de blasphème. A l'instar de Suburgatory qui veut rire sans cruauté, je pense que GCB a su trouver le ton qu'il fallait pour servir son propos sans tomber dans la caricature agressive.

GCBack

Plusieurs scènes de cet épisode inaugural sont plutôt sympathiques, surtout à mesure qu'Amanda commence à se rebiffer (du coup sur la fin, même si son jeu n'est pas franchement génial, au moins elle a de la répartie), ce qui laisse augurer du meilleur pour la suite.
Là où GCB pèche encore un peu, c'est sur ses dialogues, qui manquent encore un peu de mordant sur la longueur, se concentrant sur quelques passages-clés (en général en présence de Kristin Chenoweth mais pas uniquement). Il faudra vraiment que la série accentue la causticité de ses répliques, et pousse son concept le plus loin possible. Il s'agit de mettre tout en oeuvre pour montrer des personnages aussi malveillants que possible : c'est sa planche de salut. Sans cela, la série aura l'air de faire dans la provoc en toc.

Car vous l'aurez compris, je me suis quand même bien amusée devant le pilote de GCB, avec, en bonus, des accents géniaux (pour une native de Chicago, Marisol Nichols se débrouille d'ailleurs plutôt bien !), de la musique country en pagaille, et une actrice de Pushing Daisies.
C'est bizarre, parce que c'est pas du tout mon anniversaire.

27 mars 2012

Délicieux anachronisme

BlackMarch

Comme le temps passe vite ! Figurez-vous un peu qu'au début du mois, Miss Fisher's Murder Mysteries était une série que je me mettais de côté pour avoir des pilotes à regarder pendant le Black March. De toute façon, ça ne servait à rien de se précipiter pour le regarder puisqu'aucun autre épisode n'allait être diffusé avant le début dudit Black March, alors, bon...
Et voilà qu'au final, je n'y ai pas touché depuis plus d'une vingtaine de jours ! Il était grand temps d'y remédier, ne serait-ce que pour décider du sort de la série dans mon "planning" d'avril. C'est que, héhé, dans quelques jours, on revient aux affaires ! Alors, Miss Fisher's Murder Mysteries, on garde, ou bien ?

Phryne

Laissez-moi couper court au suspense : OUI. Mais uniquement parce qu'on n'en attend pas non plus une révolution. Aussi badine que peut l'être son héroïne, Miss Fisher's Murder Mysteries est une série qui dégage le même parfum rétro qu'un vieux roman d'Agatha Christie paru chez les éditions du Masque : c'est un peu usé, certes, mais à ce stade de raffinement, on peut aussi bien appeler ça un classique.

La série ne fait preuve d'aucune sorte d'originalité et donnera même pendant le pilote d'authentiques envies de rouler des yeux en soupirant "eeet bien-sûr". Mais ce n'est pas grave ! Le charme de Phryne fait son effet, et rares sont les séries de nos jours à bien vouloir nous offrir ce genre de délicieuses investigations enlevées. Des générations de téléphages ont grandi avec les Arabesque et les Columbo, jusqu'à ce que débarquent Les Experts pour (paradoxalement) saloper le travail et lui ôter toute sympathie et bonne humeur, imposant à la place la froideur, la rigueur et la précision scientifique dans les enquêtes. Miss Fisher's Murder Mysteries ne mange pas de ce pain-là, et se regarde avec énormément d'amusement parce que, diable, déjà que le crime augmente à Melbourne, si en plus il faut le prendre au tragique !
Certes, Phryne Fisher bénéficie de l'aide d'un cerveau plus rationnel, en la personne de son amie, le Dr Mac, mais elle ne se base pas sur son travail pour avancer, c'est plutôt une complice au quotidien, qui lui file un coup de main très occasionnel dans le cadre de ses aventures. Par son entremise, l'épisode est paramétré pour répondre aux attentes des spectateurs devenues incontournables en termes de preuves scientifiques dûment examinées, tout comme le recours à de vrais policiers sera nécessaire à un moment, ou à des gros bras bien utiles quand il commence à y avoir un peu d'action. Le pilote concède donc, par petites touches, qu'il y a certaines choses dont on ne saurait plus se passer dans une série d'enquêtes. Mais la présence renversante d'Essie Davis illumine tant et si bien l'écran en permanence qu'on prête à peine attention à ces personnages qui ne sont que des accessoires de plus dans sa scintillante garde-robe.

Ainsi donc, oscillant nonchalamment entre les poncifs du genre et les impératifs télévisuels modernes, le déroulement de cette première enquête est très convenu et ne surprend guère. Ce n'est pas le but, pour tout dire, et en vérité on s'en accommode fort bien. Qu'il s'agisse d'assister aux manifestations du charme têtu de l'héroïne, ou de la voir s'inviter dans une enquête où, concrètement, personne ne lui a demandé son avis, eh bien on suit gentillement, sans protester, en riant soit de l'audace de Madame, soit des petites sceynettes hilarantes qui jalonnent l'épisode (j'ai notamment une affection toute particulière pour l'adorable petite bonne Dot), à l'instar de celle-ci, courte mais désopilante, qui peut cependant présenter un vague aspect spoilerisant :


Black March, tout ça, donc : streaming. Courage, c'est presque fini. Consolez-vous, ça fait partie de ma collection d'extraits sous-titrés.

Il ne faut pourtant pas en conclure hâtivement que Miss Fisher's Murder Mysteries se regarde comme une comédie policière. Un axe peu mis en avant, mais non moins marquant, nous promet un fil rouge plus tragique, en rapport avec la disparition de la soeur de Phryne voilà une décennie. Explicitée le moins souvent possible, cette intrigue est légèrement feuilletonnante visiblement, et, si l'on n'en attend pas grand'chose dans le pilote, elle peut donner une histoire bien troussée sur le long terme. Et surtout, elle apporte des notes plus sévères, voire tragiques, dans cet épisode par ailleurs aussi léger que des bulles de champagne.
Dans un autre registre, il faut quand même bien avouer que Phryne Fisher est une femme en avance sur son temps, et que les dialogues comme les situations soulignent occasionnellement ce fait. Il y a dans son comportement quelque chose de libéré et donc de libérateur, qui a le don de rappeler que certains acquis n'ont pas même un siècle. L'intrigue elle-même, sans vouloir vous en dévoiler les détours (et ce, bien que cela ait fait partie des passages les plus prévisibles), attestera que la condition féminine était il y a encore peu bien précaire...
Un propos subtilement féministe dans une série policière ? On aura tout vu.

A une époque où les séries policières se doivent d'être ci ou ça, et surtout pas autre chose, pour coller au maximum au cahier des charges en vigueur, Miss Fisher's Murder Mysteries propose ainsi une galerie d'anachronismes savoureux à bien des égards tout en faisant preuve, pardon pour le jeu de mot, de remarquables qualités d'adaptation. La série ne manquera, au long de sa course, sans doute pas de charme (cela ne fait en tous cas certainement pas défaut à son interprète principale), mais il ne faut pas en espérer plus que du divertissement de qualité.

Comme les bonbons à la violette de votre grand'mère, les enquêtes de Miss Phryne Fisher ne rassasient pas, mais ont ce petit goût de revenez-y.
Eh bien soit, revenons. Rendez-vous est donc pris pour le mois d'avril.

11 mars 2012

Grand écart

BlackMarch

Le weekend dernier, on a pu causer un peu de l'un des parents pauvres de la télévision internationale, au moins du point de vue de son accessibilité en France : la Russie. Dans le même esprit, j'avais envie de vous parler aujourd'hui d'un des pays qui attise ma curiosité en dépit du fait d'être assez difficile d'accès à l'heure actuelle. Ce pays, c'est la Turquie.
Allez hop, un peu de pédagogie au préable.

Comparée à d'autres pays, la télévision turque est relativement jeune, et ce qui lui arrive aujourd'hui est donc d'autant plus impressionnant. Songez que la première chaîne du pays est née en 1968 (c'était TRT, une chaîne publique), et que la première chaîne privée date de 1989 ! Et malgré cette genèse tardive, la fiction turque est en plein boom depuis une dizaine d'années environ, et ça ne va certainement pas en se calmant vu le succès de ces fictions à l'étranger.
La première série turque à avoir été vendue hors de son pays natal s'appelait Deli Yürek, une série mêlant de l'action, du drame et même un peu de politique, et se déroulant dans un contexte mafieux ; elle a duré 4 saisons de 1998 à 2001 et a même donné naissance à un film "spin-off". C'est grâce à son succès que la fiction turque a attiré l'attention de toujours plus de pays étrangers.

Depuis 2001, environ 80 séries turques se sont vendues dans plus de 40 pays du monde, certaines collectant, certes, plus de miles que d'autres. En 2011, ce business a rapporté 60 millions de dollars, à raison d'un prix allant jusqu'à 15 000 dollars par épisode. C'est dire si ça va BIEN.

On savait depuis quelques années que les soaps turcs fonctionnaient très bien, notamment dans les pays de langue arabe, avec la success story de Gümüş (alias Noor dans sa version arabe). Ce soap a fait un tabac de la Croatie à l'Arabie saoudite, alors que pourtant, la série y montre des choses pas franchement acceptées dans les pays de culture musulmane, comme boire du vin ou avoir des relations sexuelles avant le mariage ; l'un des personnages a même eu recours à un avortement. Malgré cela, 85 millions de personnes dans le monde ont vu ce soap !

Aujourd'hui, les séries hebdomadaires sont également très en forme. Outre le fait que ce sont ces séries qui aujourd'hui capitalisent les meilleures audiences sur leur chaîne d'origine, ce sont aussi celles qui se vendent le mieux (il y a un rapport de cause à conséquence, vous l'aurez compris).
Ce qui est une bonne nouvelle, c'est qu'elles peuvent rivaliser avec les productions occidentales en termes de qualité de production ou de budget (au niveau format c'est plus compliqué, les séries turques ont souvent des épisodes de 90mn qui font régulièrement l'objet de redécoupages en 2x45mn une fois à l'étranger ; notons qu'en France ça ne poserait pas forcément problème, cela dit). Alors forcément ça attire l'oeil ! Evidemment, qui dit plus de ventes à l'étranger implique aussi un cercle vertueux sur le territoire national, puisque ça fait sans cesse plus d'argent qu'on peut investir dans la production suivante.
Et plus il y a de pays différents culturellement pour acheter des séries turques, plus celles-ci tentent de rendre leur contenu plus accessible à des publics étrangers divers ; à l'heure actuelle, les séries turques sont définitivement ancrées dans la culture de leur pays, elles sont également regardables dans des pays de culture musulmane, mais elles sont aussi faciles d'accès pour plein de pays comme la Grèce et les Balkans (on estime par exemple qu'un spectateur sur deux en Bulgarie regarde une série turque), et ça c'est un immense point fort pour nous, spectateurs occidentaux, lorsqu'on les aborde ! Ca veut dire qu'on ne va pas se retrouver devant un trop grand fossé culturel, parce que les productions turques prennent cela en compte.

On a déjà pu parler d'Ezel, par exemple ; à l'époque de Séries du Monde, j'ai ainsi eu l'occasion de vous dire qu'elle s'était vendue un peu partout dans les pays voisins de la Turquie (je me souviens notamment d'une news portant sur un petit soucis en Grèce), et que sa diffusion hors des frontières turques avait eu l'opportunité de s'intensifier encore lors du dernier Ramadan. Depuis, la série a même été diffusée sur K+, une chaîne du groupe Canal+ au Vietnam, et des remakes ont été mis en branle dans plusieurs pays dont, apparemment, la Belgique. Des négociations seraient en cours pour une diffusion aux Etats-Unis, et même dans des pays d'Afrique noire, ce qui est assez inédit.
Mais surtout, il me faut évidemment re-mentionner Muhtesem Yüzyil. La série historique qui est un véritable carton aussi bien dans son pays d'origine qu'à l'étranger (45 pays acquéreurs à elle seule à ce jour) ; j'avais d'ailleurs pu vous dire à quel point ce succès n'était pas injustifié l'an dernier, lorsque j'ai évoqué le pilote. Muhtesem Yüzyil est actuellement le fer de lance de la fiction turque : dans son pays, l'Ottomania est vrai un phénomène (même si la série a apporté sa dose de controverses), et à l'international elle fait systématiquement un carton. Et quand les pays ne l'achètent pas, ce sont les internautes qui en font un phénomène : ainsi en Bulgarie, je lisais le mois dernier que des fansubbers proposant des sous-titres le lendemain de sa diffusion en Turquie ont réussi à créer un buzz immense autour de la série, et maintenant les chaînes bulgares s'entretuent pour en acquérir les droits. Une jolie histoire à la Äkta Människor (moins les chaînes qui s'entretuent, quoi). Un succès que Bir Zamanlar Osmanli: Kiyam, qui débute lundi, va tenter de reproduire, d'ailleurs.
On parle de séries venues d'un pays où, jusqu'à il y a 15 ans environ, c'était majoritairement la telenovela sud-américaine qui dominait les grilles en matière de fiction, quand même... Joli parcours que celui de la télévision turque, je le disais.

Cycliquement j'essaye moi-même de me pencher sur quelques séries turques. C'est à la fois facile, puisqu'avec les bons outils, on découvre très facilement des endroits où s'en mettre plein le disque dur, et compliqué car les sous-titres ne sont pas légion. Fort heureusement, si on reste sur Muhtesem Yüzyil comme exemple, le streaming peut ponctuellement se révéler intéressant, à condition d'aimer le streaming (comme vous le savez, ce n'est pas mon cas) et d'accepter d'avoir très peu de choix.

L'une des séries sur lesquelles je gardais un oeil, en ce début d'année, était Uçurum, diffusée par la chaîne privée ATV. Si Uçurum avait attiré mon attention (elle figurait dans le Pilot Watch), c'était sur deux critères : d'une part, un pitch attirant (et accessible à une pauvre Occidentale telle que moi, comme SON, lancée le mois précédent), et d'autre part, une foison de photos de promo alléchantes, comme celle-ci.
Il faut d'ailleurs préciser que de ce côté-là, les Turcs sont très très bons. Ils soignent leurs photos de promo (chose que ne font pas, par exemple, les Russes, on l'a dit la semaine dernière, mais même les Japonais, qui pourtant devraient être rôdés vu le nombre de séries qu'ils produisent chaque année...), et maîtrisent parfaitement la grammaire de la promotion qu'on peut connaître chez les séries de network américaines par exemple, avec ce qu'il faut de trailers notamment.

Ucurum

Uçurum, qui d'après une sélection de traducteurs automatiques et dictionnaires peut signifier aussi bien "précipice", "abysse", que "écart", est une série au contexte très urbain qui repose sur le principe suivant : dans une grande ville, la vie peut basculer à tout moment. C'est le cas d'Eva, une Moldave qui vient à Istambul dans l'espoir de pouvoir travailler dans la mégalopole turque. Elle est suivie par sa petite soeur, Felicia. Toutes les deux tombent alors dans un réseau de prostitution mené par un certain Yaman ; Eva échappe à ce triste sort de justesse, et trouve refuge dans un taxi. Hélas, sa soeur Felicia ne s'en sort pas aussi bien... C'est ainsi qu'Eva rencontre Adem, un homme qui vient d'accomplir son service militaire et qui commence à travailler comme chauffeur de taxi, travaillant uniquement de nuit. En venant en aide à Eva, vite traquée par le gang de Yaman, la vie d'Adem va ainsi elle aussi basculer.

L'épisode commence dans la confusion la plus totale : une jeune femme à la main ensanglantée reprend péniblement son calme auprès d'un homme agonisant dont on comprend qu'elle vient de le poignarder, et s'enfuit aussi vite que possible, réussissant à trouver refuge dans un taxi dont le conducteur va devoir prendre une décision très vite.

Comment en est-on arrivé là ? Allez hop, flashback, cette fois au ralenti (ce qui offre un incroyable et efficace contraste avec le chaos de la scène d'introduction), alors que, trois mois plus tôt, ces trois protagonistes mènent leur vie sans se soucier de rien, comme en marche vers leur destin. C'est une idée qui n'a l'air de rien mais qui fonctionne très bien. Ainsi, la jeune femme s'apprête à fêter l'obtention de son diplôme de médecin, le chauffeur de taxi (pas encore pourvu de barbe) est un militaire en passe d'être décoré, et l'homme poignardé, encore en relatif état d'intégrité physique, est en réalité un mafieux dans ce qui ressemble déjà à un mauvais jour. On va donc lentement revenir sur la façon dont les évènements se sont mis en place, et c'est l'occasion de pénétrer le réseau de prostitution, que Yaman dirige avec l'aide d'une femme, et sous les ordres d'une sorte de parrain.
L'effet de compte à rebours avant ce moment crucial qui a ouvert l'épisode va être rappelé plusieurs fois au cours de l'épisode par le biais non pas d'un bête compteur, de cliffhangers ou d'autres outils auxquels on pourrait s'attendre pour nous rappeler qu'il y a un gros truc qui nous attend, mais avec l'aide d'un split screen montrant à intervalles réguliers la progression des personnages dans leurs univers respectifs, et pour le moment distincts.

Si Eva est une bien jolie créature et qu'on s'intéresse forcément un peu à son histoire (surtout quand, comme moi, on a déjà regardé Matrioshka ou Blue Natali), celle-ci n'a pas grand'chose d'original. Quant au salopard de Yaman, on n'a pas tellement envie de le plaindre dans ses tracas (car il en a).
C'est Adem qui s'avère être un personnage particulièrement touchant. Pendant son service militaire, son meilleur ami s'est pris une balle (ouais, le service militaire turc, c'est pas la JAPD, hein, on est pas là pour déconner) ; Adem s'est d'abord porté à son secours mais lorsqu'ils ont failli être repérés par l'ennemi, son ami a fait une crise de panique, et en voulant le faire taire, Adem l'a étouffé... Depuis, il est littéralement suivi par son fantôme, qui apparait même à l'arrière de son taxi. C'est de toute évidence une torture pour notre héros que de vivre avec son lourd secret, et il sera à deux doigts de se suicider pendant l'épisode. Cela nous offrira d'ailleurs une scène assez émouvante.

Certaines séquences de ce pilote, par ailleurs relativement conventionnel pendant sa première heure (souvenez-vous : épisodes de 90mn), sont extrêmement impressionnantes de par leur forme très aboutie. Ainsi, pour montrer que le temps a passé après une scène se déroulant dans le dortoir des prostituées prises au piège par le réseau de Yaman, on a une séquence particulièrement élégante. De même, quand Adem conduit des personnes très différentes dans la nuit d'Istambul, difficile de ne pas être touché par la succession de portaits et de situations qui se succèdent à l'arrière de son véhicule.

Mais surtout le pilote d'Uçurum accomplit quelque chose qu'il n'est pas exagéré d'appeler une PUTAIN DE PROUESSE en nous surprenant totalement à la fin de l'épisode ; par contre si vous voulez finir ce paragraphe vous allez être spoilé : on reprend la fameuse scène qui l'avait ouverte, mais en version longue, et on a cette fois des séquences supplémentaires qui ajoutent encore à la gravité de la situation. Au lieu d'avoir simplement Eva qui poignarde Yaman et se rue dans le taxi d'Adem en sortant de l'hôtel où elle était retenue, on a droit à une pénible séquence pendant laquelle Yaman tente de violer Eva, où celle-ci le poignarde dans l'oeil (chose qu'on ne savait pas), où elle cherche de l'aide dans les couloirs, tombe sur une chambre où sa soeur est sur le point d'être violée, est contrainte de l'abandonner là quand l'un des violeurs pointe une arme sur elle, sort dans la rue, et fait irruption dans le taxi d'Adem alors que celui-ci caresse de nouveau l'idée du suicide ; en parallèle, Yaman s'effondre dans le couloir de l'hôtel, le visage en sang et sous les cris d'horreur de la femme qui gère le réseau de prostitution avec lui. Et du coup, alors qu'on pensait ne revenir à cette scène que pour l'adrénaline, on se retrouve avec une dramatisation incroyablement plus forte qu'attendu. On croyait connaître la scène depuis le début de l'épisode, et pour tout vous dire y revenir semblait un peu cliché ; en fin de compte, on se retrouve avec quelque chose qui lance réellement le côté dramatique de la série. C'est un vrai bon moment de télévision qu'on n'avait pas vu venir du tout. Et d'ailleurs l'épisode va s'arrêter là, au lieu d'employer cette décharge d'adrénaline pour nous montrer comment l'équipe de Yaman va se lancer à la poursuite d'Eva, par exemple (ce à quoi on aurait pu s'attendre).

Alors, dans ce paragraphe, il n'y aura plus de spoilers. Mais il y aura de l'amertume : celle de ne pas pouvoir regarder autant de séries turques que je le voudrais, parce que je les regarde toujours en VOSTM. Je serais prête à poursuivre Uçurum, dans le cas contraire. Et c'est une preuve supplémentaire, après Muhtesem Yüzyil que je n'avais pas détestée (et pourtant, moi, les séries en costume...), que la fiction turque a de bonnes choses à nous apporter. Pour le moment, pas facile-facile d'y accéder mais, bon, on sait pas, si des fansubbers bulgares y arrivent, je vois pas pourquoi il seraient les seuls... Un jour peut-être, qui sait ?

3 mars 2012

We are the 80s

BlackMarch

C'est bien souvent pour des raisons assez fallacieuses (genre : pas de vraie source d'information sur le long terme) qu'on ne vous parle pas beaucoup de télévision russe. C'est un tort que je m'en vais aujourd'hui réparer, et profitez-en bien, on ne sait pas quand sera la prochaine fois.

Pour que des news nous parviennent au sujet de la fiction russe, il faut qu'il se soit VRAIMENT passé quelque chose. Des séries russes, il y en a, pourtant, comme vous le prouvera rapidement un clic dans les tags de ce post, se référant à Kak ia Vstretil Vashu Mamu, Interny, Maia Prekrasnaia Niania, Shkola... ou plus anciennement Vyzyvaem Ogon na Sebya. Je vous l'accorde au vu du nombre de tags que je peux vous suggérer, je ne parle pas de télévision russe souvent non plus. C'est un tort. Faudra que je tente un post sur le pilote de Tcherkizona un jour, tiens.
Le problème c'est donc que pour le moment, c'est pas facile-facile de mettre le grappin sur des infos les concernant, ces séries, même si elles existent, preuve en est faite. La Russie est un peu comme les pays arabes avec ses fictions : pas très motivée quand il s'agit de sortir de son cercle linguistique. Et entre nous soit dit, puisqu'on est en petit comité, le matériel promotionnel des séries russes est souvent très moche et pas très attractif (il parait que dans la plupart des pays occidentaux, le jaune est considéré comme une couleur cheap, eh bien en Russie apparemment non, à commencer par la chaîne STS). Et je le prouve.

Vosmidesiatye
Aujourd'hui on donc va parler de Vosmidesiatye (soit, donc, Восьмидесятые si vous savez déchiffrer le Russe ou que vous voulez vous y mettre, un titre de série à la fois ; eh, faut bien commencer quelque part), une dramédie qui, comme son nom l'indique, se déroule dans les années 80. Si je vous le dis.

Et si j'ai entendu parler de Vosmidesiatye, lancée le 30 janvier dernier sur STS (qui a diffusé ses 12 épisodes d'une demi-heure en quotidienne, à 19h30), c'est parce qu'elle a fait des audiences assez spectaculaires en prime time où elle a atteint des scores record le soir du pilote, du genre 23% de parts de marché en général, et 20% sur la cible ô combien privilégiée des 14-44 ans. La série a permis à STS de prendre la pôle position dans cette case horaire aussi bien sur la région de Moscou qu'au niveau national, et c'est apparemment un exploit parce que mes sources soulignent toutes ce fait (pour ce que j'y connais en audiences russes, hein, je vais pas m'amuser à contester...). Avec Dnievnik Doctora Zaitsevoi, une comédie romantique en milieu médical, la série a ainsi permis à STS d'améliorer sensiblement ses audiences de ce début d'année, notamment sur la tranche des 16-54 où la chaîne est passée 2e (il semblerait que la chaîne occupait la 4e place sur la même période en 2011).

Bon tout ça c'est bien gentil mais ça ne nous dit pas grand'chose de l'intérêt de Vosmidesiatye, à plus forte raison parce que Dnievnik Doctora Zaitsevoi se ramasse des remarques lapidaires sur l'une des rares sources anglophones que j'ai trouvée à son sujet, et que, de toute façon, c'est bien connu, les audiences ça ne nous dit rien sur la qualité intrinsèque d'une série. J'ai donc pris sur moi de cagouler le pilote de Vosmidesiatye, que je me suis ensuite mis sous le coude en attendant le Black March, et, eh bien, on est en mars.

Sur fond de bande-son très typique des années 80, limite stéréotypée, Vosmidesiatye suit Vania Smirnoff, un jeune étudiant qui, en 1986, quitte le foyer de ses très modestes parents, et commence à prendre son indépendance en s'installant dans le dortoir de son université. Outre le temps qu'il passe avec son copain Sergei et son nouveau camarade de chambre Boris, il y découvre aussi l'amour, ou du moins essaye, avec la très jolie (ce sur quoi je suis assez d'accord) Inga, une jeune femme un rien prétentieuse, mais pas méchante, venue d'un milieu aisé et qui a connu la vie à l'Ouest.
Evidemment ses sentiments ne sont pas partagés, sinon ce serait trop facile. Cela devrait se compliquer, à en croire le site officiel de la série, quand une dénommée Katia va débarquer dans la série, mais dans le pilote, pas de Katia en vue.
A la différence socio-culturelle, il faut ajouter que Vania est l'un de ces personnages qui cumulent maladresse et poisse. Dans le pilote, cela s'illustre par exemple alors que la fac entière se retrouve pour célébrer l'installation dans les dortoirs de l'université, et que notre Vania se retrouve coincé dans un ascenseur avec la gardienne de l'immeuble (aisément) quincagénaire, pendant que ce dragueur de Sergei approche Inga. On est pas dans la comédie grossière à laquelle on pourrait s'attendre dans pareille situation caricaturale, mais on ne peut pas dire que les troubles de Vania soient hilarants ou touchants non plus. Cela dit, la conclusion de la scène mettant en parallèle Vania tentant de sortir de l'ascenseur avec l'aide de la gardienne, et Sergei approchant Inga m'a fait sourire un instant.

Peut-être qu'en réalité, l'intérêt de Vosmidesiatye tient dans le fait que la famille Smirnoff ne se résume pas à Vania. On passe ainsi du temps avec ses parents, qui, tout en essayant de prendre leurs distances avec leur fils aîné qui le leur réclame de façon un peu violente (limite crise d'adolescence en retard), continuent leur petite vie avec leur plus jeune fils Misha, âgé d'environ 5 ou 6 ans. Ca n'a rien d'épatant en soi, entre le dîner avec Kolia (l'oncle de Vania) ou les aventures pour déménager les affaires de l'étudiant, mais ils sont assez touchants quand même, ces deux-là, et surtout, ils ont un côté ordinaire qui permet de se mettre plus facilement dans la peau d'un Russe des années 80.

Difficile de nier dans tout ça que Vosmidesiatye vaut principalement pour son côté nostalgique plutôt que par ses intrigues ; mais sa nostalgie, la série la tire de quelque chose de relativement réaliste, et c'est une plutôt bonne nouvelle. Le plus grand mérite de la dramédie est probablement d'essayer d'associer son propos un peu simpliste et idéalisé sur les années 80, auquel on s'attendait forcément un peu, avec une envie de ne pas non plus en rajouter dans les stéréotypes tels qu'une série américaine se plairait sans doute à les montrer, à grand renfort de couleurs flashys, ou de tenues et de coiffures impossibles. Il faut dire qu'évidemment, la situation des deux pays à ce moment-là n'est pas la même, mais enfin, idéalisme nostalgique pour idéalisme nostalgique, ça aurait quand même pu être pire.
Le choix de montrer des personnages en général pas très riches permet ainsi de rappeler des détails qui, à coup sûr, feront sourire les Russes qui, comme Sergei, ont eux aussi utilisé de l'eau sucrée pour remplacer le gel pour les cheveux, par exemple.

En cela Vosmidesiatye accomplit quand même bien sa mission de voyage dans le temps, et ça se sent au niveau de la photographie.

Pas facile d'avoir un peu d'intimité à la maison On est d'accord, donc : Inga est mignonne Sergei, charmant copain au demeurant, mais ptet un peu trop justement Vue de l'ascenseur Papa et Maman Smirnoff

Alors au final, Vosmidesiatye n'est pas une immense réussite qui va vous convaincre que la télévision russe regorge de merveilles (pourtant il y en a, forcément il y en a !), mais c'est quand même une petite série honnête, un divertissement familial pas abrutissant même s'il ne promet rien, au vu de son pilote, de révolutionnaire.
Suffisamment sympatique en tous cas pour faire des audiences extraordinaires, après tout, et finalement peut-être que, si ça ne nous dit rien sur les qualités d'une série en termes de narration, d'interprétation ou de production, ça signifie quand même un peu quelque chose.

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25 février 2012

Dans les choux

Pramface

Quand de jeunes Britanniques pas vraiment responsables se mettent à faire des bébés, je pense immédiatement à Threesome. Ce qui n'est pas forcément une bonne chose : difficile de se mesurer à l'un de mes coups de coeur de 2011.
Pramface n'emprunte pas vraiment le ton amusé, amusant et tendre de ladite comédie. Il faut dire que ses personnages sont plus jeunes, ses protagonistes viennent de milieu dont la différence est plus exacerbée (et en cela, la série rappelle plutôt 18 to Life), mais ce qu'elle décrit me fait plutôt penser à un épisode de Skins qui aurait "mal" tourné qu'à une série que j'aurais déjà pu apprécier.

On a donc deux adolescents qui, les examens de fin d'année étant enfin passés, qui se rencontrent à une soirée bien arrosée, et qui finissent au lit ensemble. La demoiselle ne manque pas de tomber enceinte, évidemment.

Je dis évidemment parce qu'entre le titre de la série et l'enchaînement prévisible des évènements, sans même parler des promos ou des résumés, on sait bien ce qui va se passer. Sauf que ça prend 25 minutes avant de se concrétiser. Le terme "épisode d'exposition" n'est donc pas vain, surtout qu'on a ici une série au format 30 minutes...

On enchaîne donc les clichés en attendant que ça se passe : relations avec les parents, copains un peu lourds ou un peu snobs, selon les cas, et toute cette sorte de chose. Non seulement l'intrigue est prévisible, mais la plupart des personnages et des situations le sont aussi (je pense notamment à la meilleure amie du héros, qui évidemment en pince pour lui mais n'en dira rien, qui va être aux première loges pendant la séquence-clé de cet épisode), ce qui n'aide pas. Et pour finir, le ton n'est pas très original non plus, la réalisation reste scolaire, les acteurs marchent sagement dans les clous.

Du coup c'est difficile de se captiver pour ce qu'il adviendra de ce couple-malgré-lui quand le reste est déjà vu, à mes yeux en tous cas, cent fois dans des séries adolescentes.
J'ai regardé Pramface avec la tenace impression que je n'étais pas dans la cible. C'est un problème récurrent quand je regarde des séries adolescentes, d'ailleurs parfois je le regrette, mais les faits sont là : ça m'empêche d'apprécier bien des séries. C'était le cas pour Pramface. Mais je n'ai pas l'impression que ce soit le seul facteur qui ait joué en sa défaveur.

Peut-être qu'avec un peu de temps, notamment une fois que la grossesse est en route, les choses peuvent se décanter, mais j'ai assez peu d'espoir...

24 février 2012

Clown triste

Alors que le mois de janvier était placé sous le signe de la mid-season canadienne, forte en nouveautés, février aura été un mois dédié à l'Australie qui, à l'issue de ses vacances estivales (alors, jaloux ?) faisait sa rentrée, les mesures d'audience reprenant à ce moment-là.
Certes, The Straits n'est pas forcément du genre à déclencher des émeutes parmi les téléphages exigeants, Outland ne plaira pas à tout le monde même s'il y a un net mieux à mesure que la série progresse, et on va reparler dans un post très prochain du très attendu Miss Fisher’s Murder Mysteries qui a débuté ce soir, sans compter que l'atypique Danger 5 débarque bientôt, mais en attendant, souffrez que je vous parle d'une série qui a démarré mercredi soir et qui compte déjà parmi les perles de 2012.
Je vous le dis, en ce début d'année, mon petit coeur ne survivra pas à toutes ces merveilles téléphagiques, on est gâtés pourris.

Si vous êtes un peu comme moi, vous avez développé une certaine méfiance vis-à-vis des comédies australiennes : l'humour de Bogan Pride, Housos et autres Angry Boys a en effet de quoi laisser, au mieux, circonspect, quand ce n'est pas l'étrange Wilfred ou Lowdown qui conduisent à s'interroger sur ce que "comédie" signifie aux antipodes (est-ce que par hasard ce serait un synonyme de "fumette" ?). Il y a du bon, c'est certain, mais il y a aussi quand même pas mal de choses qui rappellent qu'il y a un petit décalage horaire. Et encore, j'ose même pas tenter Swift and Shift Couriers, sans quoi je ne croirais plus en rien.

Woodley
Mais c'est sans a priori que je me suis lancée dans Woodley et j'en suis fort aise. C'est une véritable friandise, inspirée par les vieux films muets (et un peu Mr. Bean, si, la référence est obligée). Woodley n'est pas une série d'humour muet. Mais ça se joue à peu de choses. Ses personnages parlent peu, surtout le rôle-titre, mais ils parlent tous quand même. C'est sans doute ce qui lui permet à la fois de se parer d'un charme délicieusement désuet, et de ne pas paraître ridicule et datée.

Ce premier épisode, qui joue timidement son rôle introductif afin de ne pas nous laisser penser qu'on a affaire à une simple série à sketches, nous présente donc le personnage de Woodley, un petit bonhomme qui a la trentaine, mais qui a gardé sa maladresse et son innocence d'enfant. Le problème c'est que Woodley a une petite fille, Ollie, dont il est supposé être responsable... du moins, quand il en a la garde, puisque sa femme a fini par ne plus supporter d'être la seule adulte à la maison, et l'a quitté.
Woodley est regardable par toute la famille, à condition que grands comme petits soient avertis qu'il n'y sera pas question que de plaisanteries. Par moments, Woodley est profondément triste, et son personnage ne s'en cache pas, ou presque : seulement en secouant le lait (regardez, vous comprendrez) ; on le verra même prêt à se jeter du haut d'un pont dans une scène à la fois jolie et mélancolique, mais à vrai dire, beaucoup de choses dans Woodley sont jolies et mélancoliques à la fois.

Reposant essentiellement sur Frank Woodley, son acteur principal, son créateur, son scénariste et son producteur, la série s'appuie aussi sur un sens de la mise en scène évoquant avec plus ou moins d'insistance le début du XXe siècle : musique à l'accordéon et à l'orgue de barbarie, looks rétros, couleurs à la fois vieillottes et pétillantes, plaisir des décors et des détails fleurant bon une certaine nostalgie.
Si Woodley était une série française, on se plaindrait d'améliepoulinisme stéréotypé, mais comme Woodley est une série australienne, on ne moufte pas et on se régale, c'est injuste mais c'est comme ça.

Le studio rétro de Papa Woodley C'est drôle... ...mais c'est triste Une jolie rencontre Woodley au secours d'un canard

Petit bijou plein de rire et de larmes, d'une tendresse à toute épreuve y compris dans ses moments les plus douloureux, parfaitement délicieux même quand certaines blagues se voient un peu venir, parce que le personnage est adorable et attachant au possible, Woodley est une curiosité pleine de charme.
Le genre de série qu'on aurait un peu envie de regarder tous les soirs, plutôt qu'une fois par semaine, à vrai dire.

23 février 2012

Le dormeur doit se réveiller

Awake-Promo

Pas facile de parler d'Awake. Sur le papier, je devrais être ravie (uh oh) mais en pratique, les choses ne sont pas aussi simples.
Le concept d'Awake relève du fantastique mais prend ancrage dans une trame dramatique. C'est ce qui devrait me rendre extatique, puisque, si j'aime le mélange des genres, un mélange avec le drame a toujours ma préférence. D'ailleurs c'est la raison pour laquelle j'étais tombée si éperdument sous le charme de Touch au terme de son pilote, le mois dernier.

Etant donné mon coup de coeur pour Touch et les réactions lues sur Twitter, je m'attendais un peu à être frappée par la foudre devant Awake également, d'autant que c'est l'un des rares projets que j'avais repérés en amont de son lancement, alors qu'elle n'était qu'à l'état de projet, et vu le peu de place que je fais aux projets dans ma mémoire (à dessein), c'était significatif.

Et pourtant, loin d'être la claque attendue, Awake me laisse un peu de marbre. Le concept de la double-vie est si bien expliqué et rendu dés le début de l'épisode que j'ai même trouvé le pilote exagérément long. Je m'attendais à ce que cet effet de bascule entre la réalité et la réalité, ou le rêve et le rêve, mène à un revirement de situation à la fin du pilote mais la série ne mange pas de ce pain-là qui relève, c'est vrai, plus souvent des productions qui cherchent trop à en faire que des productions sincères. Mais sincèrement, je m'attendais à ce que l'épisode se conclue sur une troisième réalité dans laquelle ce serait Britten qui serait dans le coma, sa femme et son fils étant bien vivants et le regardant se débattre avec son inconscient. Quelque chose de "too much", au pire, mais quelque chose tout de même. Ou même une simple révélation partielle, même pas forcément un gros coup.
Là vraiment, la démonstration semblait si bien faite dés les premières minutes, et si lourdement appuyée ensuite, que l'épisode m'a fait l'effet de finir totalement à plat. Du coup, difficile d'imaginer passer plusieurs épisodes dans cette dynamique si l'ennui guettait dés le pilote.

Ce qui n'aide certainement pas, c'est l'angle policier. C'était assez prévisible : ce côté-là n'allait pas me ravir. Ca n'a pas manqué, même si je trouve les deux partenaires de Michael plutôt bons (mais qui ne prendrait pas un pied monstrueux à retrouver Steve Harris sur son écran ?). Peut-être que j'aurais voulu que les deux enquêtes ne se répondent pas de cette façon : au lieu de se compléter, j'aurais sans doute préféré qu'elles soient plus semblables. Ca aurait accentué le trouble de Michael, je pense, et probablement le nôtre aussi.

En revanche j'aime énormément la confrontation par patient interposé des deux psys et c'est certainement, à vrai dire, ce qui m'intéresse le plus sur le long terme. J'aime qu'ils soient si différents et que pourtant ils aient tendance à avoir un message similaire. Si ça ne tenait qu'à moi (et malgré l'incongruité que représente le fait que Michael semble aller en thérapie CHAQUE JOUR QUE DIEU FAIT), la série se déroulerait uniquement dans ce double huis clos.

Il manquait un peu de panache à ce premier épisode où pourtant tout n'était pas à jeter. Un peu d'originalité, paradoxalement, parce que le pilote m'a semblé un peu scolaire dans sa façon d'exposer la situation sans lancer vraiment d'enjeu : est-ce si grave si Michael Britten continue d'osciller entre ses deux mondes jusqu'à la fin des temps ? Personnellement j'ai eu du mal à voir où était le problème.
Il faudra probablement un à deux épisodes de plus pour que je me fasse une opinion définitive sur la série, mais pour le moment, je ne suis pas aussi enthousiaste qu'anticipé, puisque devant cet entrée en matière, je me suis presque... endormie. Une ironie que j'ai bien failli ne pas mentionner tant le cliché fait de la peine : s'endormir devant Awake, un comble.

17 février 2012

Real good news

RealGoodNews

Il y a deux raisons pour lequelles je poste souvent tard le soir. D'une part... bah, je réfléchis mieux la nuit. Bon. D'autre part, et surtout, j'évite de parler trop souvent de la même série. Je sais que j'ai tendance à la monomaniaquerie ou, dans le meilleur des cas, à des obsessions ciblées mais multiples. Je peux regarder hebdomadairement Suburgatory et The Good Wife, par exemple, mais si je suis sous le charme d'autres séries, genre Äkta Människor, 30° i Februari ou Smash, c'est de celles-là dont j'aurai envie de parler tous les jours.
Pas au sens où je vais avoir envie de faire des reviews de chaque épisode mais parce que, eh bien, avec mon enthousiasme débordant et le fait que je pense énormément à ces séries même quand il n'y a plus d'inédit à se mettre sous la dent, je pourrais en faire des tartines.

A une époque je n'y prêtais pas attention, mais j'essaye désormais de me surveiller parce que sinon, ça peut être agaçant pour vous, enfin j'imagine. Et vu qu'il y a déjà le Ozmarathon pour me faire revenir encore et encore sur une même série dans ces colonnes, ce n'est probablement pas la peine d'en rajouter.

Et pourtant.
Pourtant en apprenant aujourd'hui qu'Äkta Människor a été achetée par arte en vue d'une diffusion en 2013, j'avoue que j'ai un peu de mal à vous parler d'autre chose.

arte est véritablement ma chaîne préférée de tout l'univers en ce moment. J'espère de tout mon coeur que 30° i Februari est également sur sa liste de courses, comme l'a été Lilyhammer, qu'elle a achetée. Sans compter qu'apparemment, la deuxième saison de Borgen devrait aussi être diffusée avant la fin de l'année 2012, ce que je trouve à la fois impressionnant et étrange.

Tandis que mon cerveau ne cesse de tourner et retourner l'idée qu'Äkta Människor va être diffusée en France dans moins d'un an, comme on tourne et on retourne un berlingot sucré sous la langue, j'ai envie de vous dire à quel point cette série continue de m'enchanter, épisode après épisode. Combien je trouve incroyable qu'elle n'hésite pas à épaissir sa galerie de personnages même en cours de route, en invoquant de nouveaux visages qui deviennent réguliers sans jamais être des prétextes. Combien je trouve sa façon de nous faire réfléchir très subtile, et toujours liée à l'émotion, et pas juste une prêche intellectualiste sur un sujet ou un autre. Combien je suis impressionnée par les pistes qu'elle explore à ce stade, qui peuvent conduire à quelque chose de très violent, de très avancé dans la science-fiction, et dont les causes sont incroyablement bien explorées pour que rien ne soit jamais gratuit. Combien les différents axes, voués, on l'imagine, à s'effleurer, mais pas nécessairement à se croiser (à l'instar de Therese qui fait appel à Leo), sont à la fois indépendants et forment un tout incroyablement cohérent.

Je suis profondément impressionnée par cette série, son univers, ses personnage, son ton, sa photographie. Tout est parfaitement ourlé, et même quand certaines choses posent question ou semblent légèrement maladroites (comme par exemple le fait que Hans ait complètement oublié ses hésitations relatives aux possibilités d'Anita dans le domaine sexuel), la richesse de l'épisode est si dense qu'on n'y regarde pas à deux fois parce qu'il y a tant à louer que ce n'est rien du tout.

Et je suis tellement contente de savoir que des spectateurs découvriront ces séries au-delà de notre cercle grandissant de téléphages curieux. C'est incroyable de la part d'arte de faire cette effort alors qu'Äkta Människor n'est pas un immense succès d'audiences dans son pays d'origine. C'est l'un de ces cas formidables où la qualité d'une série a primé sur les autres considérations. Et cette qualité est indéniable.

Je voudrais, un peu tout les jours, vous dire le respect, l'admiration et la gourmandise que m'inspirent Äkta Människor. Heureusement pour vous, je me retiens en général. Pas aujourd'hui.
Äkta Människor, c'est de la bombe !!! Bientôt littéralement...

12 février 2012

Rita rocks

Evidemment, la VOSTM ça ne marche pas pour tout. Outre les comédies, il faut évidemment préciser que les séries très bavardes tendent à être difficiles à comprendre sans sous-titres. Du coup forcément, les reviews sont à l'avenant. Mais en ce moment, j'ai envie de parler de Scandinavie, alors...
Et puis qui sait ? A l'instar d'Äkta Människor qui semble réussir à faire le buzz après mon insistance à en parler (et à supplier un peu partout pour trouver quelqu'un volontaire pour les sous-titres), peut-être que la review de Rita donnera envie à quelqu'un de sous-titrer cette dramédie danoise ? Il n'est pas interdit de rêver.

Rita

Alors attention. Quand une dramédie met en scène une quarantenaire, on a vite fait de penser à l'esprit Showtime, qui en a fait un genre à part entière, et qui du coup peut donner des boutons à d'aucuns (j'ai ici une pensée pour Florian). La bonne et à la fois mauvaise nouvelle, c'est que Rita est une série bien trop gentille pour Showtime.

Ca se sent énormément dans la réalisation ou même l'accompagnement musical (le thème principal présente d'ailleurs une frappante ressemblance avec celui de Lykke, pour ceux qui avaient eu le temps d'y jeter un oeil ; au fait, si vous voulez des reuploads de génériques, il faut le dire), il y a chez Rita quelque chose d'un peu... Joséphine, ange gardien (il est vrai, c'est une impression en partie due au fait que le collège où la série se déroule est incroyablement propre et parfait, pour un peu on aurait l'impression d'être dans les années 80). C'est fait pour être relativement familial, l'héroïne est sympathique et aura toujours raison, vous voyez le genre.
Mais si Rita était vraiment la version danoise de Joséphine, ange gardien, je ne serais pas là à vous en parler, j'aurais laissé le sujet mourir comme je l'ai fait pour le pénible Il Tredicesimo Apostolo, dont je n'ai même pas réussi à achever le pilote et ce n'était pas la faute de la barrière de la langue... et puis c'est tout.
Non, heureusement, Rita est quand même moins niais, mais on n'est clairement pas dans une série du genre à me donner des coups de coeur.

La scène d'introduction est d'ailleurs plutôt sympathique, et elle donne le ton : on y trouve notre prof en train de fumer dans les toilettes, tranquillement, et qui attend d'avoir fini sa clope tout en lisant les graffitis sur le mur des chiottes du collège. Au moment de partir, il y en a un qui retient son attention : "Rita s'envoie l'enspecteur". Sans ciller, elle sort un feutre de son sac et corrige en "Rita s'envoie l'inspecteur", puis sort. Voilà, tout est dit.

Rita est ce genre de personnage sympa et cool, un tantinet badass par rapport au milieu dans lequel elle évolue ce qui lui confère tout de suite une aura particulière, qui est à la fois détachée et très impliquée dans son métier. On sent qu'elle a ses marques au collège, elle connait tout le monde, elle ne s'inquiète de rien, en un mot, elle gère. Et il y a presque du A la Maison Blanche dans toutes ces scènes qui la montrent en train de marcher jusqu'à sa classe d'un air presque blasé, mais pas du tout antipathique.
Lorsque la nouvelle prof débarque et suit Rita dans les couloirs avec un air un peu perdu et en même temps très enthousiaste, on a la sensation d'assister à un remake de l'arrivée de la nouvelle infirmière dans le pilote de Nurse Jackie ; mais tout en ayant la même structure (la nouvelle est grosse et naïve, Rita/Jackie n'a pas tellement envie de se la coltiner...), cette scène propose infiniment moins d'agressivité dans le cas de Rita.
Le personnage n'offrira qu'assez peu de variations à partir de ces premières impressions.

C'est sympa de la voir tenir sa classe. Il n'y a vraiment qu'une seule scène de ce genre, mais elle suffit, car Rita impose d'emblée son style : décontraction, humour, ton amical avec les élèves, encouragements... mais un peu d'autorité lorsqu'il le faut. Ce n'est pas quelqu'un qui cherche à tout crin à être anbti-conformiste, mais elle a clairement un côté un peu "out of the box". Tout est dans l'équilibre.
La première des choses qui m'a sincèrement plu, c'est que Rita, tout en était cool, ne cherche pas à sympathiser avec les élèves ni à régler leurs problèmes. Elle intervient dans sa classe pour aider Kaspar, un élève en difficulté lors d'une interro orale (et qui n'avait visiblement pas fait son travail lui-même), rabat le caquet de Rosa, sa première de la classe un peu trop chiante ; puis une fois sortie de là, elle mène sa vie (ce qui inclut de flirter avec Rasmus, le fameux inspecteur de l'école).

C'est une idée d'ailleurs bien sympathique que de l'installer dans une maison qui est litéralement de l'autre côté de la cloture au fond de la cour. C'est pas grand'chose mais ça participe de l'ambiance générale et ça crée un liant entre sa vie familiale et sa vie professionnelle. On va en effet, contraire toute attente, passer énormément de temps dans la maison de Rita, avec ses 3 enfants. C'était un soulagement d'apprendre qu'elle en avait, d'ailleurs, ça nous évite le côté "célibataire désespérée". Ricco, Molly et Jeppe sont des jeunes adultes et des adolescents, ce qui permet à Rita de continuer à parler sur son ton décontracté, plutôt que de jouer la maman poule et/ou surmenée auprès de jeunes enfants. La dynamique entre les enfants est également bien trouvée, ils existent en-dehors des scènes de Rita, ce qui tendrait presque à faire mentir le titre et à transformer la série en ensemble show.
Une bonne partie de l'épisode, donc, se déroule lors d'un barbecue avec ses trois enfants, la fiancée du plus grand et les parents de celle-ci, où on comprend dans une séquence un peu lourde que Rita a eu une histoire avec le père de la future mariée. En intrigue secondaire, on a la fille, qui après une rupture revient vivre à la maison, et le plus jeune des fils qui est à deux doigts de concrétiser avec sa petite amie et qui tente du mieux qu'il peut de ne pas admettre qu'il est gay pour le jeune voisin.
Ce n'est pas absolument palpitant mais ça permet à Rita de se mettre ponctuellement en retrait afin de ne pas devenir insupportable pour le spectateur, tout en entretenant avec ses enfants une relation sympathique et détendue.

Quand on avait l'impression que Rita serait une série sympathique mais trop gentillette, on a droit à une petite scène de cul entre Rasmus et elle. Rien de très choquant, rien de révolutionnaire, ça se finit de façon marrante, mais finalement c'en est presque incongru vu le reste de l'épisode qui est très regardable par tout le monde.

Le passage le plus désagréable de l'épisode est en réalité quand, le lendemain, les parents de exigent un rendez-vous avec Rita et Rasmus parce que Rita ne s'occupe pas assez de Rosa. C'est là que Rita va faire sa Joséphine : alors que Rasmus espère qu'elle va faire ses excuses aux parents, elle leur renvoie le comportement de Rosa comme une patate chaude et finit par les quitter victorieuse, avant d'aller passer un peu de temps avec Rosa elle-même et essayer de la décoincer (mais la petite scène dans les chiottes était pas mal). D'accord, Rosa est une ado un peu chiante qui croit tout savoir et qui fait preuve d'arrogance, mais bon... c'est vraiment le moment irritant où l'héroïne n'a pas tort, juste parce qu'elle est l'héroïne et que les scénaristes sont de son côté.
La fin de l'épisode sera quant à elle un peu brusque et caricaturale, du genre "l'épisode est fini, donc toute la petite famille rit ensemble", ce qui ne nous laisse pas sur la meilleure des impressions.

Reste que Rita a un côté très sympathique, du moment qu'on ne s'attend pas à du Borgen ou du Forbrydelsen, ce qui est le gros danger en ce moment. C'est je crois un risque que vont courir ceux qui vont commencer à s'intéresser aux séries scandinaves du fait de leur enthousiasme pour l'une d'entre elles : ne pas admettre la variété de tons qu'a toujours la fiction d'un pays donné ; rien ne me traumatise plus que voir les britanniques chercher à acheter série policière scandinave après série policière scandinave comme si le drame, la dramédie ou la comédie étaient inexistants.
Clairement, la série n'a rien de révolutionnaire. La bonne nouvelle c'est que ça ne détonnerait pas tellement sur une chaîne française...

J'ajoute que ce post a été rédigé avec l'aide du site de TV2, qui a la gentillesse de nous offrir ce qui est un classique pour les séries asiatiques, et qui m'a drôlement aidée dans le cas de Rita : un organigramme des personnages. C'est cool parce que j'avais pas retenu les noms des personnages DU TOUT. Donc merci TV2.

Rita_Relationships

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