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ladytelephagy
6 juillet 2012

Hey girl, whatcha doing ?

Alors, expliquez-moi : ça marche comment, l'exorcisme ? Est-ce que je peux faire quelque chose pour ne plus être possédée par ce satané générique ? Par exemple, si je dédie un post entier à sa première saison, New Girl arrêtera-t-elle de me poursuivre, du lever au coucher ?
En tous cas, ça vaut le coup d'essayer.

Voici donc mon bilan de la première saison de New Girl, profitez-en, je ne suis pas certaine de faire des bilans pour beaucoup de comédies cette saison. Sauf si vous m'en demandez d'autres en commentaires, car je suis très sensible aux requêtes dans ce domaine ; à vous de voir.

WhosThatGirl

On aura rarement vu une héroïne principale aussi insupportable que celle que l'on voit en Zooey Deschanel (et pourtant on a quelques échantillons déjà pas piqués des hannetons dans le panorama télévisuel américain ; mais attendez, Next Caller arrive à la rentrée, là, en matière de comédien pas drôle, on devrait avoir de la compétition, de la vraie !), regroupant à la fois les pires clichés, souvent sexistes qui plus est, et les gesticulations les plus improbables pour faire croire qu'on a affaire à une originale, quand il semble assez évident qu'on est en réalité en présence avec une créature à la limite du handicap mental. On dit qu'il vaut mieux faire envie que pitié, eh bien je préférerais presque envier Jess que de la voir faire systématiquement pitié comme ici.
Dans New Girl, en dépit du titre de la série, de son héroïne omniprésente (y compris auditivement), et des frivolités de son insssuportable générique, les véritables héros sont les garçons, dont je pourrais prétendre avoir retenu les noms, mais je n'en ai en réalité mémorisé que deux et que donc, dans un souci d'équité, à partir de maintenant, je vais appeler Riri, Fifi et Loulou. Débrouillez-vous pour suivre.

Riri, Fifi et Loulou vivent donc dans un immense loft plus improbable qu'un appartement de Friends, avec quelque chose comme 712m² au sol et une salle de bains probablement héritée d'un quelconque club de sport qui devait loger dans le bâtiment précédemment.
En fait, bon, déjà les ennuis commencent puisqu'à ce moment-là, c'est un cousin de Loulou qui habite avec Riri et Fifi dans le pilote, à la suite de quoi il est débarqué sous un prétexte presque plausible, afin que Loulou puisse prendre sa place tandis que le cousin réintègre Happy Endings. Ça y est, c'est déjà compliqué ! C'était pourtant pas le but.
Enfin bon, donc là-dessus débarque Jess, seule fille dans un univers viril où on se gratte les couilles de concert devant des matches, et quelle fille en effet !

Jess est une espèce de femme-enfant (mais avec des besoins d'adulte) totalement inadaptée à la société ; au moment du pilote, je pensais qu'elle était supposée être un peu geek et pas très féminine, le prétexte initialement invoqué étant qu'elle sort d'une longue relation de 6 ans (SIX ANS !) et qu'elle ne sait plus draguer. Mais entendons-nous bien, ce n'est pas du tout ça : elle est féminine ; aussi féminine que peut l'être, mettons, Charlotte aux Fraises. C'est-à-dire qu'elle est girly, mais que personne de sain d'esprit n'aurait envie de l'accueillir dans son lit.
Comme je le disais plus haut, son personnage de manic pixie dream girl croisée hipster (un tourne-disques, vraiment ?!) est totalement inopérant dés qu'il s'agit d'être drôle, ce qui est un comble. Qu'il s'agisse de l'attitude, des obsessions musicales ou autres, ou de ses accessoires de l'impossible (crochet, bâton de parole, etc.), tout tombe à plat ; le pire est probablement cette façon de parler qui s'apparente au niveau de langage d'une enfant de 5 ans et qui ne m'a pas arraché le moindre rictus, pas même mâtiné de haine. Il n'y a pas eu la moindre ligne de dialogue en sa faveur, non plus.

Dans tout ça c'est donc aux garçons de nous sauver la mise. Et en l'occurrence, la mission est remplie avec brio.
Un brin trop stéréotypés au départ, ils vont bien vite s'enrichir tant sur le plan des gags (avec quelques running gags savoureux pour Fifi, notamment) que sur celui de l'émotion. En fait de voir leur vie éclairé par ce petit bout de femme-enfant, Riri, Fifi et Loulou ont hérité d'une colocataire irritante, et se mettent à régulièrement organiser la résistance, lui faisant front autant que possible, sans pour autant la brusquer parce qu'on n'est pas des bêtes.
Le revirement est très agréable. Là où chaque fois, Zooey Deschanel se ramène dans une scène, la frimousse enfarinée, dans l'espoir d'avoir l'air pétillante, elle se fait péter les genoux (ou l'équivalent sitcom, la salve de vannes désabusée). A défaut d'être drôle dans le sens espéré, la scène devient donc jubilatoire. Ça m'a d'ailleurs rappelé la dynamique autour de Whitney, où chaque fois que l'héroïne du même déboule avec ses névroses à deux dollars, elle se fait durement rabrouer par son compagnon, qui l'aime malgré ce qu'elle est. C'est exactement le cas ici, puisque Riri, Fifi et Loulou se sont attachés à Jess, mais la préfèrent muette et immobile. Cela nous fait donc un point commun.

NewGirl-Loft

Même si la raison pour laquelle il se sont liés à leur nouvelle colocataire nous échappe totalement, difficile pourtant de nier que Riri, Fifi et Loulou l'ont totalement intégrée dans leur bande, ainsi que la belle Cece dont je pensais au départ qu'elle aurait un rôle bien plus anecdotique, et qui promet quelques unes des plus belles surprises en matière de character development.
Et c'est ainsi que New Girl accomplit en réalité sa plus grande réussite. Il y a les gags qui marchent (merci Fifi, donc), les gags qui ne marchent pas (tout ce qui touche directement à Jess), mais surtout, il y a l'impression de faire rapidement partie d'un petit clan, d'un véritable groupe, vivant, mouvant, dont les limites se redéfinissent régulièrement mais donc l'attachement reste immuable et tangible quoi qu'il arrive. Dans une comédie avec une bande de "copains", il est rare que cet ingrédient soit si bien retranscrit, et vous êtes probablement en train de penser à 712 exemples, là, tout de suite, de sitcoms qui vous affirmaient avec culot que leurs personnages étaient amis et où c'était tellement tenu pour acquis que ça ne se ressentait en réalité jamais. Eh bien, je vais oser la comparaison suprême : depuis Friends, je n'avais pas ressenti cette impression de voir une véritable petite bande de véritables amis, comme j'ai pu la sentir dans New Girl. Les relations entre les cinq personnages sont parfaitement écrites, leurs liens sont palpables, et cela sans jamais verser dans le sirupeux ou dans le graveleux. Ce sont des copains tout-à-fait authentiques, qui se vannent, qui s'engueulent (j'ai absolument adoré le choc de cultures entre Riri et Fifi, illustré dans une escalade épique), qui s'amusent ensemble, qui ne passent pas forcément leur temps à se raconter leurs vies mais qui font mieux : ils la partagent au quotidien. Le plus appréciable, c'est que les garçons se connaissent sur le bout des doigts, et ça, c'est la force vive de la série.
Alors au final, le registre dans lequel New Girl brille le plus, c'est celui de l'émotion. L'épisode de Noël, ou celui pendant lequel, sur la fin de la saison, Riri se découvre une grosseur suspecte, comptent parmi quelques unes des plus belles séquences de la saison.
Pas de la saison de New Girl. De la saison 2011-2012.
Hasard ou coïncidence, ce sont souvent des scènes qui mettent le moins Zooey Deschanel en avant qui réussissent le mieux à nous toucher ; je dis ça comme ça. Ce qui aurait dû être un bête vehicle devient un ensemble show où, moins on la voit, et moins on l'entend, plus la scène est réussie.

Ce n'était peut-être pas l'intention de départ, mais ce qui compte, c'est le résultat !

NewGirl-IllbehomeforXMas

Ne vous enthousiasmez pas trop vite. Je n'ai hélas pas complètement fini ma liste des défauts de la première saison, même si vous savez à présent que ce bilan aura été plus positif qu'espéré.

Il est entendu que, quasiment dés le départ, le but des scénaristes était de dangereusement shipper le couple Jess/Riri, sachant que Loulou était disqualifié d'avance parce que black, et Fifi était un métrosexuel totalement impensable pour elle, mais qu'évidemment, il fallait à tout prix inclure une histoire de ce type, car aucune série avec une héroïne célibataire dans un milieu masculin ne peut s'en priver.
C'est la loi.

New Girl
avait donc intuitivement semé les ingrédients nécessaires très tôt dans la saison, si ce n'est dés le pilote. Cela étant fait, il s'est agi ensuite de jouer à vont-ils-ne-vont-ils-pas régulièrement, notamment en incorporant des éléments perturbateurs, incarnés dans le cas présent par des histoires amoureuses de passage, vouées dés le départ à échouer. Pour Riri, ce sera notamment une avocate, ainsi que son ex avec laquelle il a une longue tradition de relation on/off, tandis que Jess va aller se perdre dans les bras d'un collègue enseignant, puis d'un riche quinquagénaire.
La principale caractéristique de ces personnages est qu'ils forment systématiquement avec nos protagonistes l'exact opposé de ce que serait un couple Jess/Riri : par exemple, l'avocate est un peu rigide, et quand elle laisse tomber le masque, s'avère être un petit peu violente et obsédée par le boulot ; ou le prof est un pleurnicheur pas sexy du tout qui est un peu trop semblable à Jess pour que ça ne fonctionne.

Il y a des passages pendant lesquels on se dit "tiens, Riri est encore en train de se taper des étudiantes de fac, il ne devrait pas utiliser toute cette belle énergie à se rapprocher de Jess, plutôt ?", à un point tel qu'on se demande presque si on n'est pas devenu plus royaliste que le roi (pourtant, Dieu sait que moi, shipper, c'est vraiment pas dans mon ADN). Quand ça devient du sérieux avec l'avocate, on se cale les fesses au fond de son fauteuil en attendant que ça foire, parce que ça ne peut que foirer, c'est l'évidence-même ; tout va bien, la relation est plutôt saine et bien écrite, mais de quoi se moque-t-on, ça ne durera pas. Et puis la rupture intervient et, ah, je me disais bien aussi : nous y revoilà. On va faire ça plusieurs fois pendant la saison, prétexte pour nos deux tourtereaux qui s'ignorent de voir que non seulement ça ne colle pas pour eux, mais qu'en plus ça aurait tendance à rendre l'autre jaloux.
Les jeux vont donc durer assez longtemps à ce rythme d'un pas en avant, deux voire trois pas en arrière. Mais chaque pas en avant confirme qu'on ne s'était pas fait d'idée, et que les scénaristes ont bel et bien l'intention de mettre ces deux-là à la colle.

NewGirl_JessNick

Alors, forcément, quand arrive le moment du final de la saison, on a un peu l'impression qu'on se moque de nous.
Le final avait absolument mis tout en place pour que les choses avancent, ne serait-ce qu'un peu. Qu'au moins une prise de conscience vague se fasse d'un côté ou de l'autre. Quitte à ne pas concrétiser avant une autre saison, les temps sont durs, il faut se garder une poire pour la soif pour négocier le prochain renouvellement. Juste une petite miette. Histoire de nous accrocher un peu.
Mais rien du tout.
D'ailleurs, pire encore, sans même parler du cache-cache amoureux, tout est fait pour que la saison se finisse de façon à ce qu'il n'y ait absolument aucun progrès entre le début de la saison 1 et le début de la saison 2. En gros, en-dehors du pilote, et encore (histoire de savoir pourquoi Jess emménage avec Riri, Fifi et Loulou, et qui est Cece), les spectateurs de la prochaine saison n'auront besoin d'avoir vu aucun épisode de la première, et surtout pas le final qui s'apparente à une ode au statu quo. Ce qui est de mon point de vue d'autant plus désagréable qu'avec l'ambiance d'amitié sincère si soigneusement mise en place, on aurait pu s'attendre à ce qu'on nous titille un peu la fibre émotionnelle pour nous faire revenir.

Donc, pour moi qui déteste autant les histoires de romances, les vont-ils-ne-vont-ils-pas, et toute cette sorte de choses, c'est très agaçant.
Bien-sûr, bien-sûr, je le comprends bien : faire intervenir un couple au sein du loft fragiliserait l'équilibre au sein de la colocation (Cece, parce qu'elle vit à l'extérieur, a droit à un laisser-passer, mais ça ne fonctionne que par son statut d'électron libre), et ferait courir un risque à la série, celui de faire passer Fifi et Loulou au second plan, alors que Fifi est vital du point de vue de l'humour et Loulou est la nécessaire voix de la raison.
Mais en même temps j'ai envie de dire que quand on lance un axe pour sa série, surtout si tôt, on est supposé être préparé à assumer derrière ; j'espère que les têtes pensantes derrière New Girl ont un plan pour l'après, mais surtout, j'espère que l'après, c'est pas dans trois ou quatre saison saisons.

...Ah oui, parce que je vous ai pas dit.
En fait, du coup, je vais sans doute probablement peut-être si ça tombe regarder la saison 2. Vu que j'ai regardé le début de 2 Broke Girls cette année, et que j'ai en général un sitcom par an que je regarde distraitement, je me dis que finalement, je pourrais faire pire que New Girl dans mon planning comédie...

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4 juillet 2012

Not a joke

Il est peu de circonstances dans lesquelles j'apprécie de partager un visionnage d'inédit avec de la compagnie (par contre, revoir quelque chose que j'ai déjà vu, pas de problème). Votre voisin de canapé a toujours tendance, quel qu'il soit, à faire toute sortes de choses horripilantes, comme grignoter, parler, voire même, dans les moments les plus critiques, respirer, ce qui convenons-en est du plus haut agaçant, et anti-immersif au possible.
Mais en compagnie d'amis téléphages, sur Twitter, l'expérience s'avère au contraire délicieuse : les réactions, envoyées par écrit, sont parfaitement silencieuses, et si une scène devient particulièrement captivante et requiert votre indivisible attention, il suffit de mettre la video en plein écran pour être totalement à l'aise, et le tour est joué.
C'est ce système qui, précisément, a fait du visionnage de la première saison de Smash à la fois un moment de communion collective vécue dans la bonne humeur, et en même temps, une expérience propice à une découverte au calme, comme je les aime.
Bonus non-négligeable, tweeter en temps réel et réagir aux tweets des autres permet aussi bien de prendre un recul salvateur en cours de route que d'entretenir l'enthousiasme à l'issue d'un épisode.
Aurais-je aimé Smash sans l'effet de groupe ? Il est permis de se poser la question, et la réponse est : oui. Mais probablement pas au même degré, tant l'excitation renvoyée par notre petit groupe a permis à plusieurs reprises d'entretenir la motivation même pendant les quelques faiblesses de cette première saison, afin de pleinement profiter de ses qualités.

Pour toutes ces raisons, je tiens à remercier le #SmashEnsemble pour les soirées passées devant Smash. Ex aequo avec l'équipe du Ozmarathon, ces initiatives donnent tout leur sens aux possibilités de la social TV (et ce, sans s'encombrer d'impératifs horaires imposés par une chaîne, ce qui à mes yeux est un immense plus).

Alors que ce soir, les spectateurs de TFHein peuvent découvrir les débuts de la série, permettez-moi donc de chaleureusement remercier ceux avec lequels j'ai découvert la première saison de Smash, et avec lesquels j'ai hâte de découvrir la deuxième, et qui ont permis de faire de ces quelques mois une expérience téléphagiques à part, et inoubliables.
And now, on with the show.
Par contre évidemment, attention, quelques spoilers se baladent après l'image ; en matière de bilan de saison c'est un peu inévitable.

Smash-5678

La première saison de Smash nous permet donc d'assister à la façon dont une comédie musicale retraçant la vie de Marilyn Monroe voit le jour. Le sujet est, d'emblée, traité avec sérieux : il ne s'agit pas pour les créateurs de la comédie musicale de se ruer sur cette idée parce qu'elle semble juteuse, mais avant tout parce que le personnage les fascine.
Ces créateurs sont Julia et Tom, deux amis qui ont une longue histoire de collaboration derrière eux, et qui à la base, sont supposés faire une pause dans leur travail commun, le temps que Julia et son mari adoptent un enfant. Mais quand le nouvel assistant de Tom, Ellis, leur soumet l'idée, tout de suite, le cortège de mythes et de fantasmes autour de la blonde créature pique leur créativité, et les voilà lancés dans le projet.

Les premiers épisodes, s'ils mettent en place la quasi-totalité des personnages de la saison, vont ainsi faire la part belle au duo. Tom, le compositeur, et Julia, l'auteur, forment en effet un duo qui connait le métier, et qui donc sait très bien quel est le processus qui les attend avant que le spectacle n'aboutisse, et qui en même temps, de part cette histoire commune, permet de conserver énormément de fraîcheur. Ainsi en position de force pendant une bonne partie du processus de décision autour de la comédie musicale, Tom et Julia vont s'imposer comme des personnages fondamentaux de Smash, alors que bien souvent les scénaristes de la série font de leur mieux pour attirer notre attention ailleurs...

Smash-JustEmailedIttomyMother

Et notamment sur les deux chanteuses en lice pour le rôle principal de la comédie musicale, Karen et Ivy. Au lieu, comme pour le tandem précédent, de nous offrir une dynamique basée sur l'entente entre les personnages (et où l'on finit par les préférer ensemble que séparément), ici l'idée est de les mettre en concurrence au maximum, et se diviser les spectateurs en team Karen ou team Ivy, ce qui pendant la majeure partie de la saison va être totalement justifié (et donne d'ailleurs du piment aux échanges de tweets ; d'après mon expérience, les deux "teams" ont d'ailleurs pris la concurrence avec plus de bonne humeur que de véritable mauvais esprit, échappant au clivage trop profond qu'on peut avoir dans certaines fictions opposant deux personnages et donc deux catégories de spectateurs, et ici, Smash a toujours su fédérer ceux-ci autour de la série même quand ils n'étaient pas d'accord sur la chanteuse à retenir, ce qui me semble être un témoignage de son sens de l'équilibre).
Karen et Ivy sont naturellement le jour et la nuit. Ca a tendance à jouer à l'extrême en défaveur de l'une ou de l'autre, selon vos préférences. Ainsi, Karen est la provinciale typique, fraîchement débarquée à NYC et qui n'a jamais vraiment eu de travail à Broadway ; naïve, innocente, et limite parfois sainte-nitouche, elle a un gentil petit-ami avec qui elle vit dans un coquet appartement où tout va bien dans le meilleur des mondes. A l'inverse, Ivy est une chanteuse et danseuse qui depuis 10 ans use son fond de culotte sur les chaises des salles d'attente de casting, et qui n'a jamais eu son moment de gloire (si tant est qu'une telle chose soit amenée à se produire, ce qui n'est évidemment pas garanti) ; seule dans la grande ville, elle vit dans un petit studio d'où elle appelle sa mère qui a un don bien à elle pour la rabaisser sans s'en apercevoir. Pas étonnant que dans cette compétition où elle a probablement le plus à gagner, Ivy passe parfois pour une arriviste ; mais dans toute industrie du spectacle, cela semblerait plutôt être une qualité, si le spectateur n'était pas conditionné depuis toujours pour préférer les jeunes premières virginales.

La saison va énormément jouer sur cette opposition. A la clé, il y a le personnage de Marilyn, un rôle qui à n'en pas douter façonnera leur carrière, et l'enjeu est forcément immense.
Le premier problème de la série est peut-être justement de se focaliser autant sur cette compétition, toute significative qu'elle puisse être. Intéressante dans les premiers temps, elle prend une tournure un poil répétitive ; il y a des moments pendant lesquels on a envie de trancher et d'en finir, même si les façons de trancher sont potentiellement multiples (soit Karen a le rôle, soit Ivy a le rôle, soit elles ont toutes les deux le rôle et incarnent chacune une période de la vie de Marilyn différente...). Pire encore, une autre concurrente est introduite ensuite : la production décide de plutôt engager une star, Rebecca, pour ce rôle. Est-elle à la hauteur ? On se pose les mêmes questions, à nouveau, qu'au début de la compétition entre Karen et Ivy. L'une d'entre elles va d'ailleurs lui servir de doublure, dans ce cas laquelle ? On ne s'en sort pas. Et tout ça pour en arriver au stade où finalement, attention ultime spoiler, Rebecca va quitter la production, et le rôle de Monroe va revenir à l'une de nos deux chanteuses, et il faut à nouveau décider laquelle. Mais argh, quoi !
Cette façon de systématiquement tout ramener à la lutte pour l'obtention du rôle de Marilyn a tendance à court-circuiter la majeure partie du processus créatif autour de la comédie musicale. J'ai pris un pied insensé à voir comment Julia et Tom concevaient leur spectacle (de façon non-linéaire, ils conçoivent d'abord les numéros et décident ensuite de l'histoire ; parfois des numéros se rajoutent et semblent composer un patchwork de chansons étrange sans fil rouge, c'est impressionnant parce qu'on se doute qu'au final, puisqu'il s'agit d'un biopic, tout prendra du sens), j'ai aimé certains détails, sur les répétitions, la conception de la mise en scène ou des décors. Mais au final, on a l'impression que ces parties-là sont plus faciles que d'embaucher le personnage central. Difficile de nier l'importance de cette décision de casting, naturellement, mais peut-être que cela simplifie à l'excès les problématiques d'une production aussi complexe et colossale quand même.

Smash-ChooseMe

Il faut pourtant admettre que, même quand cette tendance à se focaliser sur l'opposition Karen/Ivy a tendance à se faire longuette, elle n'est jamais mauvaise. C'est presque un miracle, et d'autres séries s'y seraient cassé les dents à n'en pas douter.
Le mérite en revient principalement à l'excellente écriture des personnages de la série, et leur toute aussi formidable interprétation. Smash bénéficie d'un cast pléthorique, et pourtant chaque personnage se montre sympathique et agréable (à deux exceptions près, Ellis et le fils de Julia, mais sur la quantité de personnages, c'est presque négligeable). Tom, Julia, Karen, Ivy, mais aussi Eileen leur productrice, Derek le metteur en scène, les stars potentielles du show, les danseurs du chorus (dont j'aurais bien aimé voir le recrutement, mais c'est une déformation), les amis des uns, les conjoints des autres, les guests de passage et le cousin de la boulangère, on aime tout le monde. Impossible de faire autrement. C'en est même fascinant parce que les personnages intégrés à la série pour jouer les "méchants", les insupportables, dans le genre de Derek par exemple, finissent toujours par se montrer profondément attachant.
C'est un luxe incroyable de voir tous ces personnages s'attirer votre affection. Certains parce qu'ils sont profondément humains, à l'instar de Julia qu'il est impossible de détester (même quand elle trompe son mari), et d'autres parce qu'ils sont incroyablement complexes, telle Eileen qui, derrière sa poigne de fer, cache une femme qui ne se cherche pas d'excuse mais qui ne cache pas non plus systématiquement ses fragilités. Et le plus appréciables est probablement que les personnages féminins autant que les personnages masculins sont tous denses de la même façon, tous très riches.

A certains moments, c'est ce qui fait la différence entre une série bêtement soapesque, et parfois Smash court un peu ce risque en se focalisant, outre la compétition entre ses deux héroïnes, sur les histoires personnelles des uns et des autres à l'excès, se mettant parfois en terrain gleessant, et une excellente série dramatique pleine de coeur, un peu comme ce que peut offrir une série comme Parenthood, mettons ; l'ornière est savamment évitée, bien que frôlée de justesse à plusieurs reprise, parce que Smash possède parfaitement ses personnages et refuse d'en faire des prétextes ou des caricatures.
Et c'est sans doute le deuxième problème de Smash. Alors que les textes des chansons de la comédie musicale sont un trésor de finesse et de références intelligentes et bien tournées, parfois, les intrigues sont un peu simplistes. On se prend à rêver que les scénaristes de Smash aient la plume de Julia, le talent pour capturer de nombreuses informations enrichissantes sur les personnages sans pour autant y passer des heures, le sens de la formule qui permette d'éviter des situations un peu cliché, et le coeur nécessaire pour ne pas les juger quand il est parfois un peu trop évident qu'on veut nous faire penser quelque chose de négatif d'un personnage qui s'est "mal comporté". Que le livret de la comédie musicale (qui n'est pas encore Bombshell) soit infiniment plus abouti que le scénario de la série me laisse penser que ce n'est pas la même personne qui s'en est chargé, ou bien que c'est le plus incroyable travail de character development que j'ai jamais vu (en l'occurrence en faveur uniquement de Julia).

Smash-BrokenMirror

Alors évidemment, difficile de parler de Smash sans parler de ses numéros musicaux, qu'ils soient liés à la création de Bombshell ou non.

Ce sera d'ailleurs mon troisième et dernier reproche : un peu trop souvent, Smash décrète que, pour remplir ses obligations de série musicale, elle va sortir du contexte de la comédie musicale dont elle est supposée suivre la formation, et nous sort de son chapeau des chansons non-inédites (bon, encore...) dans un contexte n'ayant rien à voir. En dépit de l'excellence de ces numéros, et certains sont absolument inoubliables à l'instar de Cheers (Drink to that) par exemple, leur arrivée totalement impromptue dans les épisodes leur donne plus les apparences d'un prétexte, quand il faudrait leur conférer une aura bien différente pour leur rendre la gloire qu'ils méritent.
Le cas le plus WTF de la saison sera probablement le numéro bollywoodien, parfaitement mené, doté d'une ambiance généreuse, mettant en scène des personnages de la série peu habitués à être dans une séquence chantée à l'ordinaire, mais dans une séquence sans queue ni tête, n'apportant rien ni à la scène qui la précède, ni à aucune de celles qui suit. C'est vraiment dommage car le numéro est réussi, mais impossible de s'ôter de la tête l'impression très désagréable que les scénaristes l'ont un peu balancée là sans trop se creuser. Encore une fois, la writers' room de Smash aurait bien besoin d'une Julia.

Reste qu'au fur et à mesure de la saison, Smash révèle des chansons inédites de toute beauté.
Bombshell s'annonce, c'est certain, comme un immense spectacle, au point de faire regretter au spectateur de ne pas pouvoir y assister, la série nous présentant les numéros dans le désordre, parfois dans le cadre de répétitions, parfois avec une mise en scène aboutie, et mon plus grand souhait à ce jour concernant la production de Smash est qu'on nous fournisse, à un moment, une version intégrale de Bombshell, tant tout y est alléchant. Un DVD complémentaire ne serait pas du luxe et j'espère vraiment que les têtes pensantes chez NBC ne laisseront pas passer cette extraordinaire opportunité (la captation est malheureusement loin d'être systématique à Broadway...).
Quel que soit leur degré de raffinement au moment de nous les dévoiler, ces numéros sont toujours géniaux, donc. Qu'il s'agisse de la tendresse du duo entre Marilyn et Joe DiMaggio ("Mr. & Mrs Smith"), de la charismatique transformation de Norma Jean en Marilyn ("20th Century Fox Mambo"), de l'hilarant moment de légèreté ("Don't say yes until I'm finished"), de la puissance d'un solo de DiMaggio ("On Lexington and 52nd Street"), de l'emblématique thème d'ouverture de Bombshell ("Let me be your star") ou du grandiose final ("Don't forget me"), Smash réussit son coup à chaque fois.

Capable de mettre en scène de façon sublime comme drôle l'histoire de son héroïne, la comédie musicale sur Marilyn Monroe regorge de détails passionnants. Quiconque lit ne serait-ce que la biographie de la belle blonde sur Wikipedia découvrira dans les paroles de la plupart de ces numéros une foule de références, montrant bien que chez Smash, on n'a pas pris l'histoire de Marilyn comme un simple prétexte, mais bien qu'on possède le sujet jusqu'au bout des ongles.

Mais outre les lyrics des chansons, et leur effet imparable pour retourner dans les années 50, au coeur de l'existence de Monroe, les numéros de Smash ont aussi énormément de mérite parce qu'ils tirent parfaitement partie des talents en présence, et en premier lieu Megan Hilty, impressionnante à chaque seconde, et Katharine McPhee, qui prouve qu'on peut venir de la télé réalité et avoir de l'avenir. Ensemble ou séparément, elles sont impeccables, et trouvent le moyen d'apporter un angle différent sur l'histoire racontée, mais jamais moindre que la voisine. Si version DVD il y a, idéalement, elle propose une version Karen et une version Ivy pour la version intégrale de Bombshell... musicalement, il est trop difficile de choisir entre les deux. Je crois d'ailleurs que les spectateurs divisés entre la team Karen et la team Ivy tomberont d'accord sur le fait que toutes les deux ont un grand talent, et que ce n'est pas à ce niveau que se passe la compétition.

Smash-AngeDechu

Au terme de ses 15 premiers épisodes, Smash a, c'est certain, quelques défauts (trois d'après mon compteur) mais une foule de qualités, allant de la sincérité de ses personnages à son talent pour capturer les réalités de l'univers de Broadway (rendant incroyablement bien l'univers si particulier de la fameuse avenue), en passant par un don incroyable pour créer une oeuvre musicale dans l'oeuvre musicale dont les qualités n'ont rien d'imaginaire.
Dotée, qui plus est, d'un cast irréprochable (personne n'a ici volé sa place, et il n'y a pas le moindre flagrant délit de belle gueule incapable), avec des interprétations parfaites comme celles d'Anjelica Huston, Debra Messing ou encore Megan Hilty, la série a peut-être une marge de progression devant elle, mais elle a tous les éléments pour offrir un résultat déjà bien solide en cette première saison.

Corriger les quelques errances de cette première quinzaine d'épisodes peut la conduire à rien moins que l'excellence, j'en suis convaincue.
Alors, je serai au rendez-vous l'an prochain pour la deuxième saison avec le plus grand des plaisirs. #SmashEnsemble, j'espère.

29 juin 2012

Thérapie par le rire

Ce post aurait aussi pu s'intituler : pourquoi j'ai comme l'impression que je vais regarder Anger Management cet été, et comment je le vis presque bien.

AngerManagement

Parfois il y a des pilotes qu'on regarde en étant plutôt certain du sort qu'on réservera à la série... même en étant totalement ouverte en les commençant.
Dans le cas d'un procedural par exemple, je ne vais que très, très rarement me risquer à aller au-delà du pilote, car même s'il est bon, je sais que la formule va vite m'écoeurer. Et les rares fois où le pilote est effectivement bon et où je me dis que je vais faire une exception et quand même continuer, eh bien ça ne loupe pas, deux à trois épisodes plus tard, je décroche. Le procedural, j'en ai trop soupé. Même un bon n'est plus capable de me tenir très longtemps. J'ai plus la patience.

Anger Management n'a donc jamais été sur mon planning de l'été, si tant est que j'aie un planning, et j'ai regardé le pilote par curiosité plus qu'autre chose, histoire de jauger la bête. Et puis finalement, eh bah, on dirait bien que je suis partie pour regarder un peu...

Et pourtant je me fiche de Charlie Sheen comme de ma première télécommande. Autant son père est un demi-dieu, autant lui, franchement, il m'indiffère énormément. L'affaire qui a entouré son éviction de Two and a Half Men, par exemple, ne m'a pas émue, ni fait rire (même pas de façon moqueuse). D'un autre côté je n'ai jamais dépassé le pilote de cette série-là non plus, et tout bien réfléchi, je n'ai même jamais trouvé la force de regarder le pilote en entier.
En fait à mes yeux, le gros argument de la série, c'était Brett Butler. Allons, mais si, vous la connaissez Brett Butler, ne serait-ce que parce que ça fait des années que je vous parle d'Une Maman Formidable. D'ailleurs, qu'elle ait rejoint la série avait quelque chose d'éminemment symbolique puisqu'elle-même a une réputation de terreur des plateaux. Mais en même temps, comment en vouloir à cette femme si drôle ? Moi j'ai jamais pu. Et j'embrasserais le sol foulé par ses pieds si j'habitais pas si loin (mais c'est parce que je lis son autobiographie en moyenne une fois par an, peut-être). Bref, je pensais que Brett Butler serait MA raison de regarder ce pilote jusqu'au bout, ce qui dans ma tête était déjà une belle performance.

Car n'oublions pas qu'Anger Management est la tentative de FX de s'offrir un sitcom à moindre frais pour la plus longue période possible : à l'instar des séries de Tyler Perry comme House of Payne, Meet the Browns et For Better or Worse, l'idée est de prendre la température avec 10 premiers épisodes avant d'en commander après plusieurs dizaines. Qualitativement, on a déjà discuté des implications fâcheuses de ce genre de procédé (du genre à faire passer les comédies de TV Land pour des chefs d'oeuvre d'humour), et savoir qu'en plus un mec aussi peu captivant à mes yeux que Charlie Sheen allait être au centre de la série n'était pas spécialement fait pour me motiver. Qui veut se cogner pas loin de 100 épisodes avec ce type ? Heu, bon, les 13 millions de spectateurs qui étaient devant la centième de Two and a Half Men, il faut croire... mais vous voyez ce que je veux dire.

Et pourtant, Anger Management n'est pas SI mauvais. Pas tant que ça. Le démarrage du pilote est insoutenable de banalité, ça c'est vrai. Et c'est vrai aussi que les seconds rôles du groupe de parole dont le personnage de Charlie Sheen (qui, comme par hasard, s'appelle lui aussi Charlie) est le psy ne sont pas du tout intéressants. Fort heureusement, contrairement à ce que cette première partie de l'épisode va vous faire croire, la série ne s'intéresse pas du tout à eux !
Ils font quasiment de la figuration, et c'est d'ailleurs très bien comme ça, surtout quand, après la situation professionnelle du héros, le pilote se préoccupe de montrer sa situation personnelle. Là non plus ce n'est pas captivant, mais on s'occupe, notamment grâce à une apparition relativement réussie de Brian Austin Green qui fait très bien le gros connard.
C'est en fait que notre thérapeute, qui rappelons-le est spécialisé dans la gestion de la colère, pique lui-même une colère, que les choses s'excitent un peu. Déjà parce que cela met en lumière une relation avec son ex-femme qui n'est pas mal du tout (d'ailleurs c'est l'un deux personnages qui a les meilleures répliques dans cet épisode). Ensuite parce que la réaction en chaîne est intéressante à observer. Enfin parce qu'elle conduit à une très bonne scène de fin.

Car il est temps pour moi de faire mon coming out : j'ai ri devant la scène finale du pilote d'Anger Management. On me l'aurait dit 20 minutes plus tôt (et même 10 minutes plus tôt), je n'y aurais pas cru. Mais j'aime énormément le renversement qui a lieu pendant cette scène, qui doit beaucoup au scénario bien-sûr, pas si prévisible que je l'aurais pensé, et surtout à la présence de Selma Blair, qui fait vraiment des étincelles.

En plus, d'une façon générale, le pilote d'Anger Management n'est vraiment pas un épisode claustro : en montrant aussi bien la thérapie de groupe que Charlie organise à son domicile, que la chambre de sa fille, sa cuisine, la maison de son ex-femme, le bar, le groupe de thérapie en prison, et le cabinet de sa propre thérapeute, cet épisode prouve qu'il a de nombreux centres d'intérêt. C'est tellement souvent dans une série que les choses se passent toujours dans le même living, avec une ou deux scène dans une autre pièce ou au boulot si on a de la chance... ça fait un bien fou de voyager autant pendant ce pilote et de se dire que la série ne va pas sans arrêt tourner autour de la même structure. Il y a plein de choses à faire, le personnage a vraiment l'air d'évoluer dans un vrai monde, et pas juste d'être limité par la superficie du studio, vraiment ça fait du bien. Je regarde bien volontiers Happily Divorced, par exemple, mais franchement, c'est très fermé comme série de ce point de vue (quand une scène se passe dans la serre où Fran conduit son activité de fleuriste, une fois tous les cinq épisodes en moyenne, on a l'impression de voir du pays !).
Ca parait ridicule mais de voir tous ces contextes dans lesquels Charlie évolue, ça m'a donné une sorte d'espoir, ça m'a paru prometteur pour plein d'intrigues différentes. Pardon mais, tant qu'à signer pour 100 épisodes, autant être sûr qu'on sera à l'aise.

Enfin j'en sais rien. Je dis ça mais peut-être que le soulagement de ne pas avoir eu à subir un pilote totalement insupportable (juste très inégal) me pousse à penser que je vais suivre la série, et en fait je décrocherai peut-être au bout de deux ou trois épisodes. On verra. Mais si je devais choisir entre Anger Management et Whitney... non, bon j'avoue, c'est de la triche, trop facile.
En tous cas, ce premier épisode n'a pas été le total désastre annoncé, et pour une comédie dont je ne trouve pas l'acteur principal drôle ni sympathique, on pourrait presque parler de performance.

27 juin 2012

Coup de blues

Ma prochaine grande aventure d'après ma grande aventure la fiction française (que j'essaye de vivre en ce moment...), ce sera les webséries. Il y en a des tonnes. Je n'y prête jamais attention.
Il faut dire que là encore, comme pour la fiction hors-USA, pour se tenir au courant, il faut fournir un effort soutenu vu que les webséries bénéficient rarement des canaux d'informations "habituels" (en ce qui me concerne, Deadline, Variety et autres Entertainment Weekly sont mes canaux d'informations habituels, et rien à faire, ils ne traitent que ce qui passe à la télévision, la websérie relevant plutôt de l'exception). Ca va nécessairement changer : avec des sites comme Netflix ou Hulu qui s'apprêtent à avoir des fictions originales, qui plus est avec des acteurs tout-à-fait connus, il va bien falloir commencer à s'y mettre à un moment où à un autre. La websérie, ce n'est plus l'apanage des fictions bricolées dans des garages depuis longtemps, surtout en Amérique du Nord où plusieurs séries sont nées sur le web avant d'arriver sur le petit écran (genre Sanctuary ou évidemment Web Therapy), et où les studios commencent à investir.
Mais pour l'instant l'information reste assez difficile d'accès quand même, alors voilà, je ne me suis pas encore lancée. Mais quand ça va se passer ça va se passer, croyez-moi.

Bon, en attendant, je suis pas non plus complètement ignare, j'ai regardé quelques webséries par le passé et je vous ai d'ailleurs déjà parlé de The Guild, Goodnight Burbank ou encore Riese, mais bon, je suis pas encore très très au point sur la plupart des autres. A part ça, j'ai dans l'idée qu'un jour j'achèterai le DVD de Prom Queen, et j'ai le pilote de Gemini Division qui roupille sur un quoi de disque dur, et je vous entiendrai de tout cela quand je m'y mettrai... oh, j'en oublie forcément (tiens, je pense au pilote de The Confession, par exemple, bien failli l'oublier), mais en gros j'ai pas encore trop fouiné dans les webséries américaines. Du côté des produits de notre internet français, bah, sortie du Visiteur du Futur, euh... voilà.

Alors pour que je fasse l'effort de mettre le nez dans les affaires de Blue, vous vous rendez bien compte qu'il fallait un miracle. Eh bien le petit nom de ce miracle, c'est Stiles. Julia Stiles.
Il y a des acteurs qu'on aime bien, qu'on ne cherche pas à voir dans tout et n'importe quoi mais qu'on a quand même à la bonne, eh bien dans mon cas, Julia Stiles en fait partie. Julia Stiles, ça fait depuis... la mini-série The 60s que je ne l'avais pas vue (à l'époque M6 l'avait diffusée comme un téléfilm sous le nom American Sixties, ça ne nous rajeunit pas ; faudrait que je tente de la cagouler, tiens, par curiosité). Je ne pense pas avoir vu cette actrice dans autre chose, surtout étant donné que je n'ai regardé que la première saison de Dexter, mais quand j'ai su qu'elle était dans une websérie, ben j'y ai vu une bonne occasion de renouer avec elle.
Et d'ailleurs elle a pris un petit coup de vieux, quand même, la Julia. Alors que moi pas du tout je suis toujours fraîche comme la rosée depuis le 20e siècle, je ne vois pas de quoi vous parlez.

Blue

De quoi parle Blue ? D'une prostituée qui a un fils, et qui aurait bien voulu que ces deux parties de sa vie ne se rencontrent pas, mais voilà, pas de bol, on ne fait pas toujours ce qu'on veut dans la vie.

Ce qui a été le plus frappant avec le pilote (pour le moment j'en suis au pilote), c'est qu'on travaille sur un format d'environ 8 minutes, mais que comme il s'agit d'une série dramatique, il faut jouer avec la phase d'introduction tout en tenant compte du rythme de l'épisode. Une shortcom n'a pas le même défi : la comédie permet d'utiliser directement des gags pour présenter les personnages et le contexte, et la caricature n'est pas un problème puisque c'est souvent sur des stéréotypes que repose le rire. Pour une série dramatique, la durée de l'épisode pose donc des contraintes bien différentes.
Mais plus encore, on est ici dans le cas d'une websérie. Et la question est : peut-on tomber sur une websérie par hasard ? Pas vraiment. Zapper et tomber sur un épisode à la télé, oui ; arriver sur la page d'une websérie, c'est en général loin de devoir quoi que ce soit au hasard, et quand bien même, le réflexe est bien souvent d'abord de lire un résumé avant de lancer l'épisode. Du coup, le challenge change : il ne s'agit pas de présenter le contexte pour le rendre compréhensible, il s'agit de savoir le tourner pour l'introduire sans avoir l'air de l'expliquer, histoire de ne pas faire de doublon.

Alors le pilote de Blue décide à la fois de tout de suite rentrer dans le vif du sujet, et de faire les choses progressivement. L'épisode nous montre donc Blue déjà au travail avec un client, tous les deux étant très à l'aise : on est déjà dans l'action, au propre comme au figuré. Mais quand le téléphone de la demoiselle se met à sonner, les interrompant plusieurs fois, Blue a des petites phrases qui mettent clairement les choses dans leur contexte (le troisième appel lui faisant même accepter un rabais à son client à cause du dérangement). Et finalement, tout en installant les choses très rapidement, l'épisode prend le temps de lentement ajouter des informations pour élargir notre compréhension des choses, tout en tenant pour acquis qu'on les connait dans les premières secondes.
Mieux encore, les coups de fil en question étant ceux du fils de Blue (qui ne s'en sort pas avec un exercice de maths), la trame de la série a été lancée très tôt, les problématiques de fond ont tout de suite été ancrées dans le déroulement des choses, mais sans nous précipiter. Et c'est du coup très fin. Il faut de toute évidence faire un sacré travail d'équilibrisme pour parvenir à installer une série avec finesse en 8 minutes, et Blue y parvient.

Car tout d'un coup, dans le feu de l'action, Blue découvre que son client est une sorte de copain d'enfance, Cooper, qu'elle connaissait déjà quand elle vivait dans sa ville natale voilà des années, et qui la reconnait elle aussi. Toutes affaires cessantes, elle s'apprête donc à partir pour éviter l'humiliation, quand le téléphone sonne une fois de plus : c'est à nouveau le fiston et ses maths. Cooper décide alors d'intervenir dans la conversation téléphonique, et, se faisant passer pour un simple ami de Blue, se propose... d'aider le fils à faire ses maths. Et de conclure sur ces mots : "yeah, we'll be right here".

Par ce petit acte tout simple, dont on sent bien qu'il ne met pas l'héroïne dans de bonnes dispositions, on est entré dans le coeur de ce que Blue a à dire : ce qui est son cliffhanger de fin d'épisode est aussi l'évènement qui va tout lancer : Cooper a interagi avec le fils de cette prostituée qui essayait de cloisonner sa vie, et pire, il est maintenant sur le point de le rencontrer ; du moins peut-on l'imaginer.
Tout cela en 8 minutes ! (et en prenant un peu de temps pour une mini-scène de coït)
Admettez quand même que c'est pas mal, non ?

Alors évidemment, Blue, j'en parlerai mieux quand j'aurai avancé dans le visionnage de la série. En tout, ce sont 12 épisodes qui ont été prévus dans un premier temps, donc l'équivalent d'environ 1h30, mais tous ne sont pas encore en ligne. On verra bien. Mais en tous cas j'admire la souplesse de l'écriture, alors que les contraintes sont multiples. Pour le reste, rendez-vous pour un "bilan de saison" dans quelques jours !

23 juin 2012

Vous avez un ancien message

La semaine dernière, je suis tombée sur un article de Cracked intitulé Why Every '80s Sitcom Decided to Kill Off the Mom sur lequel j'ai d'ailleurs tweeté ; c'est lui qui m'avait donné envie de me replonger dans Punky Brewster, d'ailleurs.

Outre l'analyse de l'article en elle-même, plutôt intéressante, cet article sur les sitcoms des années 80 et leur portée sociale m'a laissé songeuse. L'auteur prend évidemment toutes les précautions, et nous explique qu'il ne s'agit pas de prétendre que TOUTES les séries de cette époque employaient cet outil de la maman absente pour raconter leurs histoires. Mais une quantité non-négligeable d'entre elles avait de toute évidence un point commun révélateur.
Alors, que dira-t-on des séries que nous regardons actuellement ? Que disent-elles sur notre société actuelle ?

Evidemment, avec le temps et les mutations de l'industrie télévisuelle, les choses sont un peu différentes. On n'est plus dans les années 80, voyez-vous.
Il y a chaque année plus de chaînes, et il y a chaque année plus de chaînes qui se lancent dans les fictions originales ; cette semaine, c'était encore le cas de Bounce TV, par exemple. Avec l'intensification des productions du câble, le panorama s'est diversifié. Il est déjà devenu compliqué de faire des généralisations par chaîne (ou alors à la louche : genre généraliser les séries de Showtime quand on peut y trouver aussi bien The Borgias que The Big C), alors comment faire des généralisations sur le message de ce que plusieurs dizaines de chaînes nous racontent sur notre époque ?

Evidemment, on peut quand même regrouper certaines séries dans des groupes.

On pourrait par exemple discuter de ce que toutes les séries policières cérébrales de la décennie des années 2000 disent sur notre besoin d'omniprésence policière, de rationalisme, et de besoin de mettre les méchants en prison grâce à des preuves irréfutables. Avec l'annulation d'une première série de la franchise des Experts, on peut d'ailleurs imaginer que ding dong, la sorcière est morte, et que cette page est en train de commencer à se tourner.

A part ce cas particulier qui concerne un genre à part entière, un "message" donné peut concerner quatre, cinq, parfois une demi-douzaine de séries, mais rarement plus. Par exemple je me souviens avoir trouvé lamentable qu'en période de crise, des séries comme Breaking Bad, Weeds et Lights Out s'évertuent à nous expliquer que "la fin justifie les moyens", en particulier lorsqu'un peu d'humilité pourrait parfois tout aussi bien arranger le problème financier des personnages (si ce n'est qu'on n'aurait pas de matériel pour une série ; bon, certes). Ces séries s'obstinaient à nous dire que le confort matériel primait sur tout, y compris le confort tout court. Qu'importe que vous soyez misérable, du moment que l'argent est là !
Mais, même en ajoutant Necessary Roughness et Hung à ce petit cercle, difficile de dire qu'il s'agit là d'un véritable ras-de-marée, aux proportions réellement emblématiques.

J'en étais à ce stade-là de ma réflexion quand je me suis souvenue de mon ressenti il y a quelques mois.
Plus précisément, quand Last Man Standing, Work It, How to be a Gentleman et Man Up! se sont succédées pendant cette saison. Toutes, loin de là, n'ont pas trouvé de succès immodéré. Mais leur message était clair : l'homme doit reconquérir son statut viril et dominant, sous peine de devenir une proie pour les méchantes femmes indépendantes. Sérieusement, la plupart de ces séries l'ont dit de façon encore plus explicite que ça dans leur pilote, je ne fais que paraphraser.
Contrairement au groupe précédent, qui concerne à grand'peine une demi-douzaine de séries dont la création est répartie sur plusieurs saisons, ces séries de machos (mais machos contrariés, érigés en victimes) ont vu le jour pendant la même saison. C'est pour cette raison que le message me semble assez significatif.

Du coup, peut-être qu'on regardera les séries comme Last Man Standing, dans quelques décennies, comme des signes d'un retour en arrière conservateur sur le rôle de l'homme et de la femme dans la société. Peut-être qu'un mec qui écrira dans trente ans sur un truc qui sera l'équivalent de Cracked aujourd'hui, nous expliquera que c'était lié à la situation financière de nos pays, et que d'ailleurs la plupart du temps, une crise économique s'accompagne d'un retour des vues conservatrices, et que ça n'a rien d'étonnant. Peut-être qu'il fera le lien avec les Personhood Laws et leur importance en pleine campagne présidentielle américaine.

Ou peut-être pas, d'ailleurs.
Je veux dire : peut-être qu'il y a toujours eu une demi-douzaine de séries machos par an, et je ne m'en aperçois que maitenant ? Peut-être que c'est moi qui deviens une chienne de garde qui prend la mouche facilement. Ca me fait peur autant qu'à vous, je vous rassure. Après tout, Ma Famille d'abord ne date certainement pas de cette saison.

Et puis, évidemment, qui peut prétendre avoir, aujourd'hui, le même recul sur les séries que nous avons actuellement sur nos écrans, que l'auteur de Cracked sur ces sitcoms des années 80 ?

BabyDaddy

Et pourtant, alors que je regardais le pilote de Baby Daddy, jeudi matin, je me disais que certaines choses étaient quand même bien intégrées. Dans ce (mauvais) pilote de (mauvais) sitcom, une fois de plus, on est supposés être hilares parce que trois mecs se retrouvent dans la terrifiante position de devoir s'occuper d'un enfant. Alors que quand même, quoi, soyons sérieux : ce sont des mecs !

Certes, le gag n'est pas jeune : il est directement inspiré de Trois hommes et un coufin, après tout. Et le jeune adulte irresponsable qui découvre son reflet dans le regard pétillant d'un bébé était déjà au coeur de Raising Hope.
Sauf que la famille Chance est dysfonctionnelle dans son ensemble ; sa dynamique ne repose sur aucune forme de sexisme. Tandis que les scénaristes de Baby Daddy ne se donnent la peine à aucun moment de faire semblant de partir du principe que l'équation hommes + enfant est incongrue. A un tel point d'ailleurs que leur amie Riley, lorsqu'elle entre en scène, prend immédiatement les choses en main afin d'éviter la catastrophe : c'est normal, c'est une gonzesse. Même si elle a le même âge qu'eux, il est logique qu'elle sache s'occuper d'un enfant.

Baby Daddy est, répétons-le encore une fois pour ceux qui auraient besoin de l'avertissement, un mauvais sitcom.
Mais, vous voyez, un mauvais sitcom non-sexiste se contenterait de glisser une phrase du genre "je me suis occupée de mes 712 frères et soeurs, je sais comment faire" vite fait bien fait. Ce ne serait pas drôle, mais ça aurait un sens.
Un mauvais sitcom sexiste laisse la chose inexpliquée, parce que l'explication, c'est qu'une femme sait s'occuper d'un bébé (elle sait même faire apparaitre un biberon comme par magie alors que deux des garçons sont partis en course pour en chercher). C'est intégré, comme je le disais, que la femme de l'équipe sache prendre les choses en main. Voyez, ce n'est pas drôle.. et ça a aussi un sens.

Alors, peut-être que je suis peut-être devenue une chienne de garde, ça se trouve. Ou alors de plus en plus de séries puent vraiment le sexisme à plein nez.
Remarquez que l'un n'exclut pas totalement l'autre, d'ailleurs...

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18 juin 2012

This one's for the girls

Et donc, Girls.
Ca fait 10 semaines que je reporte, mais faudra bien en parler un jour. Du coup : Girls.

Girls

Pourquoi avoir tant repoussé la rédaction de ce post ? Tout simplement parce que je suis toujours incapable de dire ce que j'en pense. Ou plutôt parce que j'en pense une chose différente à chaque épisode. A chaque scène. A chaque minute.
Je ne sais pas si c'est supposé souligner combien la série est futée, drôle ou perspicace, ou autre chose. A dire vrai, toutes ces qualités que de nombreuses reviews et d'encore plus nombreux tweets ont semblé encenser, j'ai souvent du mal à les trouver dans un épisode. Pendant le pilote (qui est certainement l'épisode de la série sur lequel mon point de vue est le plus tranché : je suis certaine d'y avoir été totalement insensible, au sens le plus froid possible du terme), je me souviens avoir entamé le visionnage avec un esprit aussi vierge que Shoshanna, mais ça n'a pas duré ensuite, le déluge de compliments s'est abattu sur Girls et j'ai eu l'impression de passer le plus clair de mon temps à essayer de voir où se logeaient ces qualités.

Parfois ça me manque, l'époque où en l'absence d'un accès à internet, notre rapport à une série était pur et dénué de toute idée préconçue ; aujourd'hui, dés qu'une série fait du buzz, l'effet social TV balaie tout.
Peut-être que si je n'avais pas lu autant de réactions extatiques, je ne me serais pas lancée dans cette quête frénétique de la qualité rédemptrice de Girls et y aurais pris un plaisir plus simple. Peut-être aussi que sans ces retours positifs, je n'aurais pas poursuivi la saison dans l'espoir de trouver la clé de son succès critique. C'est à double-tranchant et je ne saurais jamais quelle aurait été ma réaction à Girls dans un contexte "sain" et sans interférence extérieure. Pas sûr que ce soit une expérience qu'on puisse encore connaître de nos jours...

En tous cas, je serais bien en peine de dire si Lena Dunham est la voix de sa génération (ni même une voix d'une génération). Ce qui est certain c'est que si c'est le cas, nous n'appartenons clairement pas à la même génération. Je n'ai a priori que quelques années d'écart avec les héroïnes, mais il était clair dés le pilote pour moi qu'on ne parlait pas du même monde. Probablement que c'était en partie dû à mes problèmes d'identification en général, mais même en faisant de gros efforts de mémoire, voire même de documentation (vieux journaux intimes, blog, etc...), impossible de trouver où Hannah et moi pouvions être liées de quelque façon que ce soit ; c'est d'autant plus perturbant que j'ai eu la sensation que c'était l'une des choses qui fonctionnait le mieux pour Girls : l'impression donnée d'avoir saisi quelque chose de vrai sur ses contemporains. Il faut dire qu'elle se donne un mal de chien pour paraitre la plus authentique possible. L'ironie de la chose n'a pas su m'échapper, et cela a régulièrement gâché mon plaisir.

Là où, sans conteste, Girls réussit, c'est en posant de personnages plutôt réalistes, avec énormément de défauts, Hannah en tête. C'est clairement un travail d'autocritique puissant qui a été accompli ici, et réalisé avec très peu de complaisance. Les portraits sont cinglants d'héroïnes insupportables, mais convaincues d'être dans leur bon droit, et ostensiblement pointées du doigt pour cela, à la différence de beaucoup de séries où les scénaristes semblaient faire preuve parfois d'une inouïe indulgence, au nom du sacro-saint dogme selon lequel un personnage devrait attirer la sympathie, être likeable d'une façon ou d'une autre, pour que nous nous intéressions à son sort sur le long terme. Sex & the City, avec laquelle tant de comparaisons ont été tracées (parfois à raison), faisait partie de ces fictions où quoi que faisaient les héroïnes, elles semblaient voir leurs décisions, même les plus contestables, complètement validées par les scénaristes. Lena Dunham juge ses personnages autant que Hannah juge les gens, et c'est une qualité assez courageuse pour une série s'adressant à une tranche d'âge si particulière.
Girls n'est pas la première série à offrir des personnages centraux ouvertement exécrables, mais elle est certainement celle qui en met le plus sur le devant de la scène d'un coup ; la plupart du temps, il n'y en a, comme on dit, pas un pour rattraper l'autre.

Il y a cependant beaucoup de narcissisme dans Girls ; c'était à prévoir vu l'omniprésence de Lena Dunham (écriture, production, interprétation, et plusieurs fois, réalisation), et dans les phases où la série me tapait vraiment sur les nerfs, elle ne le faisait pas à moitié. Car après tout, ce que Girls dépeint est une maladie dont Dunham est évidemment frappée : son univers est extrêmement restreint.
Alors qu'il s'agit probablement de l'âge de la vie où les gens font le plus d'expériences qui les ouvrent sur l'extérieur, lâchés qu'ils sont dans le monde après avoir connu des enclos rassurants bien que progressivement plus larges (d'abord la maison, puis la petite ville de province, puis l'université...), Girls fonctionne en circuit fermé. Ses héroïnes passent 90% de leur temps à se mater le nombril.
C'est assez tragique que les personnages aillent si peu de l'avant alors qu'ils vivent certainement dans les circonstances les plus favorables pour cela : outre le contexte éminemment cosmopolite de New York (et c'est dit sans réitérer le procès d'intention d'ordre racial, mais tout simplement parce que statistiquement, une métropole offre plus de possibilités de rencontres), le fait que Hannah se retrouve plongée au tout début de la série dans le grand bain par ses parents qui lui coupent les vivres, devrait induire des changements plus profonds dans son comportement. Peut-être que la première saison n'était qu'une façon de progressivement préparer ces changements et qu'ils interviendront plus tard, mais j'ai trouvé que cela manquait cruellement. Ce qui devrait être une expérience poussant Hannah, sinon dans l'âge adulte, au moins hors de l'adolescence, ne porte pas totalement ses fruits. Or en de nombreuses occasion, elle comme ses amies se comportent exactement comme si elles avaient encore quinze ans. Leur immaturité personnelle et amoureuse s'accompagne aussi d'une grande immaturité sur tout le reste, et notamment sur un plan professionnel, et c'est un aveuglement insupportable quand on voit ce sur quoi repose le pilote. J'espérais vraiment que la série nous offrirait un accompagnement plus intéressant que cela sur l'obligation de grandir imposée à Hannah, et ça n'est jamais venu.

Girls-Jessa

Toutefois, je n'ai pas que des reproches à adresser à Girls. Non, ce serait trop facile. Comme je le disais, il y a des moments où j'en ai pensé du bien, et pas qu'un peu.

En particulier, mais pas seulement, deux passages (logés dans le même épisode, qui m'a alors semblé touché par la grâce) ont réussi à m'émouvoir sincèrement. Vu mon visionnage en montagnes russes de la série, on peut parler d'exploit, car ce sont deux moments pendant lesquels il y avait suffisamment de puissance tant dans l'écriture que l'interprétation, que c'est le coeur qui a eu son content et non plus la tête. Dans une série aussi cérébrale que Girls, où tout est over-analysé en permanence (parfois aux confins du ridicule, de par l'égocentrisme de ses personnages) et où Hannah, en particulier, semble toujours vouloir tout verbaliser même quand elle semble inventer des sentiments et des excuses pour se justifier de telle chose ou telle autre (comme on l'a dit, heureusement, le spectateur n'est jamais vraiment laissé dupe), céder la place à une émotion vraie tenait de la gageure.

Le premier de ces passages, qui sur le coup semblait d'ailleurs totalement anecdotique, se déroule avec Jessa, lorsque son ancienne patronne décide de venir la voir dans son appartement et lui parler d'elle, de son comportement, de son avenir. C'était une séquence tellement jolie que c'était à se demander ce qu'elle faisait là. Ce n'était presque pas du Girls (ce qui dans mon esprit joue comme un compliment pour la série, mais après vous en faites ce que vous voulez) tant la conversation était dénuée de tout blabla inutile et pontifiant, qui lui est si caractéristique chaque fois que ses héroïnes ouvrent la bouche.
Jessa, soudain redevenue une petite fille plutôt que l'arrogante hipster qu'elle se donne tant de mal à paraître, a réussi pendant ce moment à donner l'accès à un autre personnage, venu la toucher et lui parler à la fois comme à une enfant et comme à une adulte, et le résultat donnait quelque chose de sincèrement magnifique, notamment avec ce plan soutenu sur les yeux de Jessa qui pour la première fois, semblait écouter avec l'esprit ouvert, et pas juste en faire à sa tête. Les conséquences de cette discussion ne sont sans doute pas celles qu'on pouvait imaginer, mais il était agréable de découvrir dans le series finale que cette conversation avait eu autant d'impact sur Jessa que sur la spectatrice que j'étais. C'était probablement ce que j'attendais le plus de Girls en matière d'évolution d'un personnage immature. Et c'était d'autant plus surprenant que ça arrivait à Jessa, qui n'avait jamais semblé être celle qui avait le plus besoin d'un tel moment de vérité.

Girls-Fight

L'autre, bien-sûr, est celui dont à peu près tout le monde a parlé, cette longue et pénible confrontation entre Hannah et Marnie. C'est sans doute la scène qui d'ailleurs encapsule le mieux les défauts comme les qualités de la série, mais parvient à les dépasser et même les sublimer, pour offrir un grand moment de vérité (même si aucune des deux protagonistes ne saisit tout-à-fait cette dernière). D'une part, la longueur de cette scène joue énormément en sa faveur (c'est d'ailleurs assez rare qu'une scène s'étire autant dans ce format d'une demi-heure, mais comme le dit Dunham elle-même, ce n'est pas le genre de considération qu'elle prend en compte et apparemment il y a plus long, même !). Mais surtout, ses dialogues font certainement partie de ce que les héroïnes auront dit de plus vrai et de plus authentique de toute la série. Aussi empêtrées soient-elles dans des troubles qui ressemblent étrangement à une noyade dans un verre d'eau, leur façon de se confronter l'une au nombrilisme de l'autre, et de constater qu'elles ont besoin d'autre chose que ce que leur colocataire et amie peut (et veut) apporter actuellement a eu une vraie résonance. Ca ressemblait à une VRAIE dispute ; en dépit du nombre de confrontations télévisuelles qu'on voit chaque année sur les petits écrans, c'est pourtant une qualité rare.
Ce qui est sans doute le mieux vu dans cette dispute est la façon dont chacune énonce des vérités précises et cinglantes, que l'autre n'est pas prête à entendre. Cela se sent dans l'épisode suivant, alors qu'aucune n'a vraiment pris en compte ce qui s'est dit dans sa façon d'être. En cela, la dispute est d'autant plus réaliste, autant que faire se peut.

Ces deux qualités, en plus d'être rassemblées à quelques minutes d'intervalle dans le même épisode, ne sont pourtant pas très représentatives de Girls sur la longueur de sa première saison. Sans doute que si j'y avais trouvé plus de scènes de ce genre, sincères et brutes, mon avis sur la série serait sans doute plus positif dans l'ensemble.

Girls-Adam

Le plus surprenant, sur l'évolution à long terme de cette première saison, reste que le personnage le plus intéressant d'une série appelée Girls s'appelle Adam. De l'éternel connard auquel toutes les filles ou presque ont l'impression de se retrouver confrontées un jour ou l'autre, au mec incroyablement sympa et même plus impliqué dans sa relation que Hannah.

Cela en dit long sur celle-ci, d'ailleurs, de voir la façon dont cette relation se transforme avec le temps ; de l'adolescente convaincue qu'elle a affaire à un type qui ne la traite qu'en objet, à la réalisation cruelle que c'est elle qui ne s'impliquait pas autant qu'elle le croyait... et que d'ailleurs elle n'est pas certaine d'en avoir envie. J'ai passé les premiers épisodes à hurler devant mon écran qu'elle devait le quitter et se tirer de là ; et à partir du 6e et surtout 7e épisode, je le suppliait de planter cette gourdasse et de prendre les jambes à son cou. L'idée directrice était donc que cette relation est un supplice à regarder ; mais son évolution a su ouvrir la voie à un personnage très complexe et que j'ai pourtant trouvé très "actuel", autant que faire se peut.
Quand on connnait le nombre de personnages masculins adolescents ou jeunes adultes de la télévision, et qu'on voit combien ils sont surtout idéalisés (comme vus uniquement d'un point de vue féminin qui souhaite y trouver soit un parfait salaud ou un prince charmant ; et presque rien entre les deux), Adam se montre certainement comme l'un des héros télévisés de sa génération les plus concrets. Il a droit au même degré de complexité et d'imperfection que Hannah, sinon plus, et cela sans jamais basculer dans l'exagération, même que les situations dans lesquelles il est mis sont exagérées, mais à ce titre il est logé exactement à la même enseigne que n'importe quel autre personnage.
Si Girls n'atteint qu'une fois une forme de prétendu réalisme dans l'écriture d'un personnage (ce à quoi la série aspire visiblement sans vraiment l'accomplir tout-à-fait avec ses quatre héroïnes), c'est bien celui-là ; mais l'interprétation d'Adam Driver n'est pas en reste et j'avoue être assez curieuse de ce que cet acteur a pu faire d'autre par le passé.

Sans aller jusqu'à parler de révolution, de série de l'année (et encore moins de comédie, mais la catégorie dramédie commence à vraiment se laisser désirer dans les palmarès des différentes cérémonies de récompenses), Girls a quelques qualités qui font qu'elle mérite plusieurs des compliments qui lui ont été adressés. Mais certainement pas tous. Pour commencer, c'est assez étonnant que tant de gens, moi sans doute y compris, tentent désespérément d'y trouver une universalité qui ne fait absolument pas partie de ses intentions.
Et puis, à l'instar de ses héroïnes, Girls est encore une série assez immature, où parfois, les frivolités d'écriture font mouche, et où parfois, un peu de conformisme dans la structure permettrait d'accomplir de plus grandes choses que ce que cette première saison fournit, non seulement en termes de character development, qui fait cruellement défaut pendant une bonne partie de la saison, mais aussi tout simplement pour rendre les intrigues un peu plus épaisses (le pitch de nombreux épisodes semblant être : mettons des personnages ensemble dans une situation superficielle mais qui semble extrême, et voyons ce que ça donne).
Alors du coup, j'ai envie de dire que si une série mérite de gagner une deuxième saison pour acquérir de la maturité, c'est forcément celle-ci...

11 juin 2012

So long

Chose promise, chose due, j'ai donné une nouvelle chance à Longmire. Je passe rapidement sur la déception qui a suivi la découverte de l'absence d'un générique (sérieusement, quand sortira-t-on de cette mode ridicule ? Comment est-il possible que tant de producteurs n'aient toujours pas recouvré leurs esprits et réalisé ce que peut faire un bon générique pour une série médiocre ?), pour m'étendre sur les pistes que je surveillais en particulier à l'issue du pilote.

Longmire-Second

Déjà, l'entrée en matière digne du plus cliché des épisodes des Experts, c'était mal barré. La découverte d'un corps s'est fait avec encore moins d'élégance que dans le premier épisode. En fait on réalise vite que la quasi-totalité de l'épisode, en-dehors de 2 à 3mn maximum, est consacrée à l'enquête, ce qui a tendance à refroidir.
Ainsi non seulement l'exposition est finie et bien finie, mais les pistes montrées dans l'épisode inaugural sont copieusement ignorées.

La rivalité avec Connally, notamment, est mise à l'arrière-plan. C'est une grosse déception parce que non seulement ça permettait d'avoir une intrigue sortant du format procédural, mais en plus il était intéressant d'assister à cette campagne pseudo-politique dans un petit patelin perdu, loin des habituelles élections qu'on a déjà vues être racontées pendant de longs épisodes, voire de longues saisons. Longmire refuse nettement, dans ce nouvel épisode, d'avancer sur ce terrain, même si le trailer annonçant l'épisode suivant semble y faire légèrement plus référence. Ce qui est certain en tous cas, c'est qu'il est hors de question de traiter cet angle plus dramatique que policier de façon prioritaire. Le procedural l'emporte, et c'est un véritable inconvénient à mes yeux. On a bien trop soupé de séries de ce genre pour que j'accepte de m'en cogner une de plus, surtout si elle fait si peu d'effort.

L'amitié avec Henry est elle aussi largement mise de côté. C'était plus prévisible, par rapport. Cette amitié étant ancienne, et visiblement inébranlable, il n'y avait pas de raison pour qu'elle occupe le devant de la scène chaque semaine. Dans cet épisode, elle est majoritairement employée en tant qu'outil pour les investigations du Shériff Longmire, d'une part dans son enquête professionnelle, et d'autre part pour ses interrogations personnelles vis-à-vis des relations de sa fille. Clairement, Henry est plus un informateur qu'autre chose, un petit gadget scénaristique qui ne donne pas toujours les renseignements cherchés de façon litérale, mais qui permet à l'intrigue de progresser tout de même.
D'ailleurs on notera que les conflits avec la réserve indienne ont totalement été mis de côté cette fois-ci, au profit d'un passage par la communauté Amish (guère plus accueillante, avouons-le). Il faut croire que ce n'était qu'un prétexte et non un véritable axe de la série.

Tout n'est pas à jeter dans Longmire, cependant.
Déjà parce que la blessure de son héros se manifeste de façon plutôt intéressante, même si très rare dans ce second épisode qui n'en fera mention que sur la fin.
Et puis surtout, et d'une façon plus générale, je ne suis pas restée insensible à la façon dont le héros semble porter le deuil de ceux sur lesquels il enquête. La tristesse du personnage m'a semblé plus palpable, plus permanente que dans le pilote. Une attention soutenue est également accordée à la façon dont les différents protagonistes réagissent à l'annonce d'un décès. J'ai mentionné plus haut Les Experts, mais c'est quelque chose que ce procedural n'a à mes yeux jamais réussi à faire : maintenir une forme d'émotion au long des enquêtes. Parce que le personnage est lui-même brisé par son veuvage, il est plus attentif à ses choses-là et j'ai trouvé ces différentes scènes très réussies. La série n'a pas peur de prendre le temps de montrer cette part-là des enquêtes, et je trouve ce choix plutôt courageux. Il ne fait aucun doute que si je devais poursuivre Longmire, cet ingrédient serait l'élement majeur de ma persévérance.

Mais à l'heure actuelle, je ne suis pas trop sûre de continuer. J'ai beau être particulièrement réceptive à la façon dont Longmire s'attache à tirer une émotion véritable de ses affaires, les affaires elles-mêmes ne revêtent pas grand intérêt. Pire encore, Katee Sackhoff nous gratifie dans ce second épisode d'une très gratuite scène dans un club de strip tease (ah, tous mes lecteurs de sexe masculin viennent de lancer le cagoulage de l'épisode ; bon, ça aura au moins servi à ça...) qui n'apporte strictement rien à l'intrigue si ce n'est quelques regards lubriques de vieux spectateurs qui commençaient à roupiller devant l'enquête.

Au bout du compte, le véritable point fort de cet épisode, c'est que je regrette infiniment qu'aucun drama ne nous ait emmené en terre Amish durablement jusqu'à aujourd'hui. Je crois notamment que le rite de rumspringa (déjà mentionné ponctuellement dans plusieurs fictions, mais c'est la première fois que j'en mémorise le nom) ferait un bon sujet de mini-série. Et puis, si c'est possible pour les Mormons, ça devrait l'être aussi pour les Amish, non ? Je doute qu'il y ait grand'chose à attendre de Banshee étant donné son pitch sur le sujet, mais ce deuxième épisode de Longmire m'aura au moins permis d'attendre avec juste un degré d'impatience supplémentaire le lancement de la série d'Alan Ball... Ce qui, en soi, est déjà un exploit. On fait avec ce qu'on a.

10 juin 2012

Rien à sauver

Le défi était grand, en entendant parler pour la première fois de Saving Hope, de ne pas faire de rapprochement avec Grey's Anatomy. Personnellement je n'ai jamais réussi à m'ôter de la tête combien il ne pouvait être un hasard que des histoires de coeur se déroulent dans un hôpital ; le twist du personnage en état de locked-in syndrome étant à mes yeux plus un point de vue qu'un véritable axe narratif. Sans compter que j'ai toujours trouvé un petit air de ressemblance entre Durance et Pompeo.
C'est le problème que j'ai quand je suis un projet depuis longtemps : je forme des idées préconçues à son sujet. Vous comprenez mieux pourquoi j'essaye de me tenir à distance de ce genre de choses, à présent !

Alors du coup, le pilote de Saving Hope n'était pas franchement celui que j'attendais le plus cet été. Mais c'était un pilote, alors... ce qui devait arriver, arriva.

SavingHope

Le problème c'est que Saving Hope a l'air de vouloir faire son maximum pour me détromper, sans vraiment trop savoir comment faire.

Et ça se voit dés l'entrée en matière du pilote, qui après nous avoir montré l'accident qui va plonger l'un de ses personnages centraux dans le coma et l'autre dans la tourmente, décide de faire marche arrière pour nous ramener 12 heures plus tôt, dans une sorte de compte à rebours avant... avant ce qu'on a déjà vu, et plus encore. Si encore la scène d'ouverture de Saving Hope s'était contentée de montrer le début de l'accident de voiture, sans nous dire tout de suite qui en réchappait indemne ou pas, bon, passe encore (quoique très franchement, combien de téléspectateurs se calent les fesses devant le pilote d'une série sans en connaître au minimum le pitch ?).
Mais là où est le suspense ? En admettant que parfois, ce retour en arrière ait encore une utilité véritable au-delà de son aspect gadget (et après tout ça se produit encore), à quoi cette petite boucle narrative est-elle supposée servir à Saving Hope en particulier ? Qu'est-ce qui empêchait de raconter le déroulement des choses dans leur chronologie réelle ? Non seulement le rewind est un outil totalement suremployé dans de nombreux pilotes, mais en plus dans celui-ci, il n'apporte rien du tout, ni d'un point de vue émotionnel, ni d'un point de vue narratif.

Qui plus est, après que l'héroïne principale se trouve prise dans une telle zone de turbulences, il devient impossible de s'intéresser aux cas médicaux. D'un autre côté, vous me direz qu'ils n'ont rien de captivant ; mais de toute manière je ne suis pas sûre qu'on puisse encore beaucoup innover, après 15 années d'Urgences, dans le domaine. Le véritable problème c'est que chaque fois qu'Alex s'approche d'un patient, ou même de son ex, qui bien évidemment est réintroduit en grandes pompes dans sa vie, on a envie de lui hurler qu'elle a quand même d'autres choses dont se préoccuper.

Pendant ce temps, son cher et tendre, Charlie, arpente les couloirs de l'hôpital en nous affligeant d'une voix-off qui, là aussi, est un procédé suremployé dont on a déjà bien soupé ces dernières années. On ne peut pas dire qu'il apporte quoi que ce soit aux intrigues, que ce soit lorsqu'il rencontre un patient décédé dans un couloir ou bien lorsqu'il commente l'aspect professionnel du métier de chirurgien, exactement comme un certain docteur Grey de notre connaissance (oh, c'est donc là que se loge l'originalité, ce n'est pas la nana qui officie comme narratrice ! Brillant ! Révolutionnaire !).

Pour beaucoup de séries nord-américaines, on a tendance à aborder le pilote en ayant, plus ou moins consciemment, la curiosité de savoir comment le pitch peut être étiré sur plusieurs saisons, parce que nous avons été éduqués à penser qu'une série se doit de se prolonger sur le très long terme. Les networks ont d'ailleurs la fâcheuse manie de ne pas savoir lâcher un succès et à le faire artificiellement durer en raison des exacts même réflexes. Je trouve souvent que c'est un tort, peut-être en raison d'une déformation due à de nombreuses séries asiatiques n'ayant vécu qu'une saison et ne s'en portant pas plus mal.
Ici, la question n'est pourtant même pas de définir comment Saving Hope peut durer plusieurs saisons. Dans le cas ici présent, la problématique est pire encore : même avec l'aide de la bande-annonce de l'épisode suivant, j'ai du mal à me figurer comment tout cela peut nous tenir pendant 13 épisodes. Toute une saison comme ça ?
En faisant abstraction de l'omniprésence des filtres de couleur (que ne renieraient pas les célèbres séries produites par Bruckheimer), de l'effet de lens flare permanent (et réellement aveuglant de mon point de vue, j'en arrivais à regarder certaines scènes en plissant les yeux), et des intrigues médicales vides, que reste-t-il à Saving Hope qui justifie de tenir l'antenne pas moins de 13 semaines ? Comment jouer sur le pathos suffisamment longtemps sans perdre ses derniers lambeaux de crédibilité ?

Alors, à part le plaisir de retrouver Michael Shanks à l'écran, il n'y a pas la moindre bonne raison pour poursuivre Saving Hope au-delà du pilote... A moins de vraiment avoir très peu d'estime de soi, et d'estimer que regarder une série qui ne fonctionne que par l'utilisation de poncifs soit divertissant, auquel cas je ne peux plus rien pour vous.

8 juin 2012

Une époque formidable

On vit une époque formidable, non ? Bon alors évidemment, la musique est pourrie (du moins c'est ce que vous répètent vos parents et quelques autres aigris), la mode est moins exubérante, ce genre de choses, bon. N'y revenons pas, ça plus les histoires de crises économiques mondiales, c'est clair, il y a des inconvénients. Mais à part ça ?
A part ça c'est formidable ! On vit à une époque où téléphagiquement, les télévisions de la planète échangent comme jamais ! Outre les co-productions qui font florès, outre les séries qui se font, se défont et surtout se refont d'un pays à l'autre... on a surtout la possibilité de vivre dans un monde de perméabilité totale. Et ça c'est une chance !

Tenez, prenez un exemple. Les séries pour ados, mettons.
Totalement au hasard.

Le boom est né aux USA, où Disney lancé un modèle de produits basés sur un concept, l'ado qui chante. Résultat : Hannah Montana en 2006. Ah on en a bouffé. Mais n'empêche ! Le sitcom pour la jeunesse faisait ainsi son grand retour sur le devant de la scène, après avoir été un peu relégué au second rang par les primetime soaps hebdomadaires et assimilés qui avaient été si populaires depuis Beverly Hills.
Mais de par la perméabilité des écrans internationaux, qu'est-ce qui s'est passé ? Plein de séries vaguement musicales d'une demi-heure sont nées un peu partout ! Pourquoi ? Parce que le business c'est le business, et que la cupidité n'a pas de nationalité. Et c'est comme ça qu'en Argentine, la société de production Ideas del Sur d'est dit : ah tiens, si je lançais moi aussi une héroïne avec des penchants vaguements musicaux ? Et c'est ainsi qu'est née Patito Feo un an plus tard. Sauf qu'on était en Argentine et que du coup cette série a été diffusée au format telenovela ; en quotidienne, donc, et sur un format de 45mn. D'ailleurs la branche latino-américaine de Disney ne s'y est pas trompée, et a ensuite fait main basse sur cette série pour la diffuser sur tout le continent sud-américain. Mission accomplie.
Il y en a eu plein d'autres qui ont suivi, comme les vénézuéliennes Isa TKM ou plus récemment Grachi, chez la concurrence, Nickelodeon Latinamerica. Et ça a fait un carton. De son côté, MTV Latinamerica a flairé le truc et a lancé également des telenovelas pour ados, genre Niñas Mal.

Tout ça commençait à tellement bien marcher, en fait, qu'au lieu de garder les histoires de chansons, mettons, qui avaient permis à la recette de s'exporter et d'inspirer de nouvelles tendances, c'est le format qui a commencé à voyager, plutôt que le pitch. Et c'est comme ça qu'à peu près à l'autre bout de la planète, la série fantastique Het Huis Anubis voyait le jour sur les écrans de Nickelodeon en Belgique et aux Pays-Bas, également au format telenovela.
Et là encore ça a bien marché. Alors qu'est-ce qui s'est passé ? Pas bête, Nickelodeon a repris son format et l'a adapté pour son marché allemand, et puis pour son marché nord-américain tant qu'on y était, et ça a donné notamment House of Anubis. Et ça a plutôt bien marché.

Mais mieux encore, vous savez ce qui s'est passé ensuite ? D'autres diffuseurs américains ont commencé à être intéressés par le format telenovela pour la jeunesse. Ma foi, si ça marche pour Nickelodeon, pourquoi pas moi ?
Et puis des telenovelas pour les ados, après tout, il fallait y penser ! C'est tellement moins risqué que des telenovelas pour le public adulte, qui est moins ouvert aux changements de format et qui a ses petites habitudes... sans compter les exigences en termes de narration et de production value (tandis qu'une telenovela pour ados, ça coûte pas très cher à faire). Alors plusieurs chaînes à destination du public adolescent ont commencé à faire leur marché parmi les telenovelas de la planète : ABC Family a acheté les droits de La Pecera de Eva (bon pour l'instant on n'a pas des masses de nouvelles), Telemundo a décidé d'adapter Fisica o Quimica... et même des séries préexistantes se sont adaptées, comme Degrassi.

Alors, que ce mois-ci, nick@nite décide de lancer son propre primetime soap, intitulé Hollywood Heights (elle-même une adaptation d'une telenovela de Televisa), avec l'espoir de le diffuser en quotidienne les soirs de semaine, ce n'est pas très étonnant. Je vous le disais, on vit une époque formidable. Bah si. Vous êtes bien obligés de le reconnaitre.
Si les épidémies se transmettaient et mutaient aussi facilement que les séries, on serait dans la merde, par contre, ça je le reconnais.

HollywoodHeights

Hollywood Heights ne démarrera que dans une dizaine de jours sur la chaîne, mais nick@nite propose déjà le premier épisode via iTunes depuis lundi, et évidemment il n'a pas fallu attendre longtemps avant de pouvoir trouver ce pilote un peu partout.

Et effectivement, sans aucune équivoque, on est en présence ici d'une série tournée exactement dans les conditions d'une telenovela. La réalisation est à ce titre parlante ; la vraie chance qu'on a dans le cas de Hollywood Heights, c'est qu'il n'y a pas de doublage pourri.
Pour le reste, tout est similaire, ce qui veut dire qu'on est quand même dans quelque chose de plus haut de gamme qu'un sitcom pour ados en classique multi-camera. Ici il donc est clair que la production est dans la tranche haute de ce qu'on propose aux ados sur une chaîne comme Nickelodeon (avec laquelle teen@nite partage son antenne), avec un budget forcément serré qui ne permet pas d'atteindre le niveau de "raffinement" d'une production hebdomadaire (visible par exemple sur The CW ou ABC Family), mais sans avoir à rougir du résultat final.
Si ce n'était pour quelques acteurs franchement médiocres (essentiellement dans des rôles secondaires, genre les parents), l'épisode pourrait même faire illusion la majeure partie du temps.

Ce n'est d'ailleurs pas très étonnant. Derrière Hollywood Heights, il y a un véritable savoir-faire : la série est co-produite par Televisa (qui abritait la série d'origine), et des habitués du soaps à l'américaine sont aux commandes de la série : Jill Farren Phelps (dont la carrière recouvre près de 30 années d'expérience dans divers soaps de Santa Barbara à General Hospital, en passant par One Life to Live), titulaire de pas moins de 6 Emmy Awards, est présente en tant que productrice, et Josh Griffith comme head writer (outre la co-création de perles comme Sunset Beach, il peut justifier de 25 ans d'expérience dans diverses équipes de soaps). Plus intéressant encore, on trouve également à la co-production Hisham Abed, qui a travaillé sur de la télé réalité comme The Hills et son spin-off The City.
Ce mélange est une excellente idée, puisque cela permet de ne pas perdre de vue tant le format d'origine que le public de destination, a priori peu habitué aux telenovelas. A ce titre, la quête d'un produit plutôt actuel, sans trop vouloir faire djeunz, mais ne trahissant pas les recettes du succès qui ont présidé au choix du format telenovela, est palpable en permanence pendant l'épisode.

L'histoire est plutôt classique, et en l'occurrence la production a vraiment mis toutes les chances de son côté, sur le fond comme la forme : ici non seulement le format telenovela a été conservé, mais l'aspect musical a aussi été incorporé à l'intrigue qui, comme beaucoup avant elle (et pour cause !), semble plutôt être la réalisation d'un fantasme d'adolescente qu'un scénario à proprement parler. On me dirait que c'est adapté d'une fanfiction écrite par une ado en fleur de 14 ans que ça ne m'arracherait pas le moindre soubresaut de sourcil.
La petite adolescente qui chante timidement dans son coin et est folle amoureuse du chanteur du moment va se retrouver à son concert et le rencontrer pour de vrai, tandis que fort opportunément la petite amie dudit chanteur est écartée lentement... Il y a assez peu de suspense. On n'est pas venus pour ça, en même temps.

Car quand on lance le pilote de Hollywood Heights, on sait pour quoi on signe. Il ne s'agit pas d'innover, c'est d'ailleurs rarement le cas en matière de télévision pour adolescents de toute manière, mais bien de trouver une nouvelle façon de raconter des histoires qui sont, de toute évidence, universelles. La marge de manoeuvre est offerte par le format et non l'histoire.
Ne reste plus qu'à voir si le public ciblé accrochera à l'idée de se rendre tous les jours à 21h devant son soap qui ne dit pas son nom trop fort.

Et puis, de façon plus générale, cela rend d'autant plus amusant à observer la prochaine transformation des séries pour ados, d'ici une demi-douzaine d'années, et par où elle va passer ! On vit une époque formidable, faite de métissage télévisuel constant... on n'est juste pas obligés de tout aimer, mais ça n'en est pas moins fascinant.

6 juin 2012

Difficile à justifier

On aurait pu espérer que du Kentucky au Wyoming, il n'y aurait pas loin (au moins téléphagiquement parlant).
Eh bien non, Longmire n'est pas un nouveau Justified. Loin de là. Les comparaisons sont difficiles à éviter, et pourtant elles se font systématiquement au détriment de la nouveauté d'A&E, qui peine à s'installer dans un paysage audiovisuel auquel elle n'a rien à apporter.

Ce n'est pas que le pilote soit mauvais. C'est simplement qu'il n'est pas bon ; et on ne peut pas se permettre de ne pas être bon quand la concurrence a déjà réussi à faire cent fois mieux.

Longmire-Pilote

Le plus gros tort de la série vient de son format (forcément) policier. Or l'enquête de ce premier épisode n'est pas très originale, voire même franchement stérile, à un tel point qu'on ne voit pas trop comment cet angle de la série pourrait s'arranger avec le temps. Les éléments de l'enquête sont, à dessein, disséminés avec une lenteur insoutenable, pour éviter que la résolution ne se fasse trop vite, et ainsi légitimer la durée de l'épisode, au lieu de l'exploiter.
Alors soit, Longmire ne veut pas jouer sur une dominante policière, c'est tout-à-fait respectable et ce n'est pas moi qui la blâmerai. Mais qu'en est-il du reste ?

C'est là que se logent les bons points de ce pilote. Grâce à cette affaire dépourvue de tout intérêt précédemment évoquée, Longmire parvient tout de même à donner la substance de son contexte, et en tirer quelques qualités qui lui évitent le ravin.

Ainsi, le personnage de Walt Longmire, s'il est assez classique dans son comportement de cow boy solitaire qui estime que les actions sont plus parlantes que les mots, possède une blessure qui le rend, à défaut de sympathique, au moins intéressant, à plus forte raison lorsque cette blessure s'exprime dans des moments inappropriés.
La mort sur laquelle il travaille permet également d'apprendre à connaître les forces en puissance, avec la réserve indienne d'un côté, et l'ennemi intérieur que représente Connally, l'un des membres de sa propre équipe. De la même façon, son amitié avec l'Indien Henry Standing Bear est l'occasion de quelques interactions qui ne sont pas dénuées d'intérêt.

Le problème est tout justement là, dans le fait que rien ne vous tirera de rire narquois en vous disant que vous êtes tombés sur une grosse bouse ; mais comment prendre au sérieux Longmire quand tant de choses semblent n'être que le recyclage d'ingrédients qu'on connaît si bien ? La série n'a aucune forme d'originalité à apporter aux thèmes cent fois vus et revus, et qui justement ont trouvé une nouvelle jeunesse avec Justified.
Les dialogues pas trop mauvais, la réalisation pas trop mauvaise, le cast pas trop mauvais, tout ça ne donne pas très envie de poursuivre, et pourtant bien malin celui qui trouvera un reproche concret à formuler à la série.

Le seul espoir de Longmire est probablement d'emprunter une route aussi feuilletonnante que possible, étant donné les éléments installés dans cet épisode inaugural.
Mais à ce stade, difficile de déterminer à ce stade si la série penchera plutôt du côté procédural, ou tirera partie des pistes lancées pour en faire le coeur de son intrigue. Ou pire, si elle décidera de s'en servir comme d'un pseudo-fil rouge, comme il est si tentant de le faire pour beaucoup de séries, à plus forte raison si elles sont diffusées pendant la période estivale, réputée (à tort ou à raison) d'une exigence inférieure.

Longmire n'entrera pas dans les annales, c'est sûr, mais il ne tient qu'à elle d'éviter de faire mourir son public d'ennui en accentuant son côté dramatique. Pari lancé, je tenterai au moins le deuxième épisode avant de déterminer quel sort lui réserver. Mais au-delà, si elle poursuit sur cette lancée sans corriger le tir, continuer à regarder la série va devenir difficile à expliquer.

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