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ladytelephagy
13 juillet 2012

To be continued... For Better or Worse

Pour être totalement sincère avec vous, l'évocation du nom de Tyler Perry, en particulier quand il s'agit de sitcoms, a tendance à me donner la chair de poule. C'est que, j'ai vu les pilotes de Meet the Browns et House of Payne, et que ces blessures-là ne cicatrisent jamais totalement.

Aussi quand, en novembre dernier, notre homme a lancé un nouveau sitcom sur TBS afin de préparer le remplacement de Meet the Browns, j'ai eu quelques sueurs froides. Mais j'ai été assez surprise de trouver en For Better or Worse des ingrédients rendant la série légèrement différente de celles qui l'avaient précédée, et des canons du genre. For Better or Worse a une première originalité : pas de rires. Ni enregistrés, ni venant d'un public. Dans une série tournée comme un sitcom multicamera, cela a de quoi surprendre.
Mais plus surprenant encore, For Better or Worse est totalement feuilletonnant, finalement un peu sur le principe d'un soap ... mais d'un soap avec des gags. Parfois. Mais aussi avec une certaine violence, et ça c'était nouveau.

Cette façon d'essayer de créer quelque chose de nouveau avec le genre pourtant si classique des sitcoms "blacks" m'a intriguée, et j'ai fini par regarder les 10 épisodes constituant sa première saison ; souvenez-vous, je vous en avais fait un copieux bilan en mai dernier. Si du point de vue des dialogues ou du jeu des acteurs, je n'ai pas vraiment été foudroyée sur place, j'ai cependant apprécié cette volonté visible de ne pas juste recycler des recettes qui ont fait leurs preuves, et à un certain moment, j'ai été sincèrement impressionnée.

For Better or Worse revient ce soir aux Etats-Unis, et si vous voulez tenter le coup et rattraper ces premiers épisodes, voici, dans la pure tradition des posts To be continued..., de quoi vous mettre au fait des intrigues de la première saison.

ForBetterorWorse - 1x01
1x01 - Ce qu'on ne vous dit pas, quand vous signez pour le meilleur et pour le pire, c'est que le pire inclut les ex-femmes.

ForBetterorWorse - 1x02
1x02 - Le bon côté des choses, c'est que Marcus arrive encore à s'entendre avec son ex-femme, non ?

ForBetterorWorse - 1x03
1x03 - Ce sont toujours les derniers au courant...

ForBetterorWorse - 1x04
1x04 - Une si charmante petite fête autour de la piscine ne pouvait pas rater... ah bon, vous croyez ?

ForBetterorWorse - 1x05
1x05 - Ah oui, ça commence à être difficile à expliquer, à ce stade.

ForBetterorWorse - 1x06
1x06 - Les filles se mettent en tête de vérifier si Leslie est naïve...

ForBetterorWorse - 1x07
1x07 - Ca devient un peu La Guerre des Rose...

ForBetterorWorse - 1x08
1x08 - Contrairement à ce que l'épisode précédent vous avait fait croire, le point de non-retour, c'est maintenant.

ForBetterorWorse - 1x09
1x09 - Coup pour coup, mais (presque) avec classe.

ForBetterorWorse - 1x10
1x10 - Contrairement aux apparences, ce n'est pas du tout la déclaration que Val espérait...

Pour ma part je n'ai pas encore décidé si j'allais regarder la deuxième saison : 35 nouveaux épisodes, c'est un investissement. Mais je suis quand même convaincue par l'expérience de la première salve d'épisodes, et qui sait ? Cela vous convaincra peut-être de tenter le coup...

AVERTISSEMENT : c'était l'un de mes rares posts prêts à l'avance, et vu les conditions techniques dans lequelles je suis plongée depuis hier, je ne sais pas quand sera publié le post suivant. Priez pour moi. Et pis vous pouvez commenter les messages précédents, si vous le voulez bien ; ça me fera chaud au coeur. Pendant ce temps, j'ai toujours accès à Twitter, donc on se voit là-bas !

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12 juillet 2012

Tiédeur blanche

Si ma fringale de pilotes est insatiable, il est un fait curieux : les pilotes britanniques peuvent attendre des semaines, des mois, dans ma réserve, avant que je les touche. Même quand ils m'intéressent, rien à faire, ça prend toujours des plombes. Je ne me l'explique pas moi-même.
Récemment, le seul pilote britannique que j'ai daigné regarder est celui de Hit & Miss ; et encore, je suis le reste de la saison au ralenti. M'attendent aussi, entre autres, Dead Boss et Sinbad.

Aujourd'hui, je viens à peine de commencer White Heat (et encore, uniquement parce que mon PC semble mort et qu'en désespoir de cause, j'ai tiré au sort mon épisode de ce soir parmi ce que j'avais a portée de main) (accessoirement les posts vont être un peu aléatoires pendant quelques temps).
J'avais plutôt entendu du bien de White Heat, peut-être via Livia, et il me semble aussi par le biais de Skyefleur aussi.

WhiteHeat

Une partie de cette réputation est justifiée : la série possède une excellente réalisation (elle m'évoque par moments celle de Cloudstreet, mais par moments seulement), la photographie est infiniment soignée, le sens du détail est visible.
Le problème c'est que, sortie de là, la série ne semble pas avoir grand'chose à dire, quand bien même elle le dit avec élégance.

En choisissant de se situer en partie (en MAJEURE partie, en fait) dans les années 60, White Heat n'avait de toute façon pas fait le choix de l'originalité, c'est un contexte largement à la mode. Ici, toutefois, l'idée n'est pas de se la jouer pseudo-Mad Men puisqu'on serait plutôt dans une variation autour de l'univers de Fresh Meat, le contexte historique en prime.
Mais c'est précisément là que ça me pose problème : les étudiants qui se découvrent mutuellement en même temps qu'ils se découvrent eux-même, ce n'est pas tellement plus original. En fait, le procédé de flashback utilisé, même s'il a le mérite de ne pas être plaqué là par simple effet de style mais bien pour souligner une émotion, n'apporte rien à notre affaire si ce n'est la révélation qu'on connaît déjà tout ça par coeur. Peut-être que cela vient du fait que, en voyant le début du pilote, j'ai d'abord pensé qu'il y aurait un petit côté thriller, et qu'on se poserait plus de questions sur les circonstances du décès d'un des colocataires dans le présent. Mais en avançant dans le pilote, j'ai bien compris que ce n'était pas le propos, et on a basculé dans un drama soapesque certes bien mis en images, mais quand même assez plan-plan. Les axes plus politisés m'ont donné l'impression d'assister a une version britannique de The '60s ; comme j'ai eu l'occasion de le dire, j'aimais bien cette mini-série, mais ça n'autorise pas une autre série à donner dans la redite.

Du coup, et en dépit de ses qualités, le pilote de White Heat m'a déçue, par manque d'ambition scénaristique. C'est même encore plus grave dans son cas, par rapport à d'autres séries peu imaginatives, parce qu'elle avait un bon réalisateur et un très bon cast (tous âges confondus). Ça donne envie d'être plus sévère, et c'est normal.

Alors, quand j'aurai de nouveau un PC fonctionnel qui reconnaît au moins un port USB (et donc une souris) ET une connexion internet (les deux ont sauté le même jour, mais, fait curieux, pas du tout au même moment de la journée), je vous avoue que je ne pense pas poursuivre White Heat. D'un autre côté, c'est pas comme si je manquais de pilotes britanniques à tester...

11 juillet 2012

Paradise n'est pas un anagramme de Tardis

Bunheads-Time
En un mois de diffusion, j'ai découvert le premier truc qui me fait enrager chez Bunheads.
Contrairement à ce qu'on pourrait croire, ce qui me court sur le haricot, ce n'est pas le sort réservé à Hubbell, ce n'est pas la présence d'adolescentes, ce ne sont pas les scènes de danse (des points soulevés par plusieurs critiques à propos de la série d'ABC Family) ; il ne s'agit pas non plus des régulières séquences pendant lesquelles Fanny se livre à de grandes tirades d'aggressivité passive, parfois un peu longuettes, ni de l'énergie que la série dépense à essayer de nous montrer tous ses personnages comme un peu toqués, généralement juste pour le plaisir de dire qu'ils sont toqués. Certains de ces ingrédients peuvent taper sur les nerfs à d'autres, moi, ils m'amusent, même quand j'ai bien conscience qu'il se répètent un peu souvent.
On est quand même là pour ça !
Quant à la disparition de Talia ou la présence très, très sporadique de certains seconds rôles, je m'en accommode, même si je l'ai regrettée sur le moment.
Alors, vu que tout semble aller bien dans le meilleur des mondes, quel est le problème ?

C'est son rapport au temps.
C'est idiot, hein, mais ça m'agace.

Si vous le voulez bien, récapitulons.

Mardi

Dans le pilote, Talia s'exclame, face à Michelle qui refuse d'aller boire avec elle : "Why ? It's Tuesday, we always get drunk on Tuesday". Charmant emploi du temps au passage.
On peut donc en conclure que la série commence un mardi soir. L'audition pour Chicago est donc le mercredi matin à 10h, le dîner avec Hubbell mercredi soir, le mariage dans la foulée quelque part pendant la nuit, et l'arrivée à Paradise au cours de la journée de jeudi. Fort bien. Jusque là tout va bien. Enfin, non, étant donné le cliffhanger, mais vous me comprenez.
En complément, Fanny rappelle que les Geoffray auditions auront lieu la semaine prochaine. Notez-le, c'est important.

Vendredi

L'épisode suivant reprend alors que Michelle et Fanny rentrent le soir-même, abattues, et que Michelle passe une nuit blanche à errer l'âme en peine. On obtient la confirmation que l'enchaînement est pour le moment cohérent, quand Michelle visite le surf bar : elle dit être arrivée la veille, ce à quoi Rico répond "Moved to a new town on a Thursday... ballsy !". On est donc toujours d'accord. Le spectacle de danse impromptu pour soutenir Fanny a donc lieu le vendredi soir. C'est là que le copain Jerry fait son annonce fracassante...

Samedi

Le troisième épisode reprend donc alors que Fanny et Michelle sont assises face à Jerry, abasourdies par la nouvelle ; Jerry propose de réexpliquer le lendemain parce qu'elles sont encore sous l'effet du choc de sa révélation, ce qu'elles refusent. Ledit lendemain, Michelle rencontre d'ailleurs la mère de Ginny qui lui rappelle avoir été là, la veille, pendant la fête organisée dans la salle de danse : "We met last night, but I'm sure it's a big blur for you". Nous sommes donc bel et bien samedi.

Problème

Et là, patatras. L'épisode commence, il est vrai, et pour la première fois, sans faire de lien avec le précédent. Il n'existe aucune preuve qu'on est donc dimanche. Fanny est en train d'organiser la fameuse audition pour les stages d'été, mais ça ne veut pas dire grand'chose. A la suite de quoi Boo explique que "the Geoffrey auditions are in ONE. WEEK." ce qui, si l'épisode se déroule dimanche, est encore plausible.
Mais quand vient le moment pour Michelle de se présenter aux deux patrons du magasin de bricolage, elle déclaire : "I'm new in town, I moved here about a month ago". What the...?! D'où ça fait un mois ?

Instinctivement, j'aurais envie de mettre ça sur le compte d'une erreur de réécriture : on repasse sur le scénario pour la dixième fois, on corrige une phrase (surtout dans les copieux monologues de Michelle, débités au rythme que l'on sait), et, par réflexe, on calcule : 4 épisodes = 4 semaines, allez hop ça fait un mois. Il est de notoriété publique que plus on relit quelque chose, moins on y repère les erreurs, après tout.

Il n'empêche. Même en ayant conscience que dans tous les scénarios, les erreurs de continuité et les fautes d'inattention peuvent se produire, même en trouvant une explication rationnelle à cette déclaration, la gaffe me reste en travers de la gorge.

Tout simplement parce que nous sommes formatés, depuis des années, pour adhérer pleinement au concept 1 épisode = 1 semaine.
Dans la chronologie des évènements d'une série, c'est devenu implicite, puis simplement naturel. Parfois, un personnage l'exprime clairement (ça s'est encore produit dans Suits la semaine dernière ; d'ailleurs, petite parenthèse surprise et ulcérée : c'est moi ou c'était le pire épisode de toute la série, sur le plan du jeu des acteurs ?!), mais ça semble alors lourd et superflu tant la notion est intégrée par le spectateur.
Elle reflète, après tout, son propre rythme de vie.

Il faut donc qu'un scénario se donne énormément de mal pour instaurer une chronologie différente.
Généralement, les séries n'essayent pas de le faire sur le long terme, d'ailleurs, et réservent ça à des épisodes constituant un arc, ou à des périodes spéciales, genre les sweeps ou les épisodes doubles (voire triples ?) de fin de saison. Histoire de perturber le spectateur seulement à dessein, et ensuite on revient à un rythme plus normal.
Certaines séries décident tout simplement d'ignorer la question et ne fournissent aucun marqueur de temps : c'est plus simple à l'écriture (ça évite justement les bévues comme celles qu'on vient de relever), et ça évite d'encombrer le spectateur avec des détails inutiles qui ne jouent aucun rôle dans le développement de l'histoire ou des personnages. Et puis, à l'ère du procedural roi, vous imaginez bien que c'est contreproductif d'insister pour encadrer la chronologie des épisodes alors qu'ils fonctionnent en circuit fermé la majeure partie du temps.
Bunheads, tout justement, avait pris énormément de peine pour toujours reprendre quelques minutes, au pire quelques heures, après la fin de l'épisode précédent. L'idée était de souligner les réactions des deux héroïnes, Michelle et Fanny, aux évènements extrêmes qui leur tombaient sur le coin du nez, quelque chose qu'on ne rend pas de la même façon avec une ellipse obligatoire d'une semaine entre deux épisodes.

C'était à vrai dire perturbant, en fait, comme choix. Pas la mise en images finale, mais le choix lui-même. On n'en a pas/plus l'habitude.
Une série qui fait ça imprime un rythme anti-naturel à sa chronologie, au spectateur. Ce dernier doit faire l'effort de se dire que, si dans sa vie, il s'est déroulé une semaine, ah, oui, c'est vrai, dans ce nouvel épisode, quelques heures seulement ont passé. Pour une série fantastique ou avec une mythologie lourde, je ne doute pas que l'adaptation soit facile ; pour une série telle que Bunheads, le choix est curieux (même s'il s'explique par la volonté de dépeindre la situation avec minutie plutôt que de s'en servir comme d'un prétexte). Clairement, le public-cible de Bunheads n'est pas là pour se prendre la tête sur des questions de calendrier.
Et en ce qui me concerne, j'avoue que les débuts d'épisodes de Bunheads, s'ils étaient très clairs sur la chronologie des évènements, et mettaient les choses au point rapidement, avaient tendance à me raidir un tout petit peu, plus par réflexe conditionné qu'autre chose.

Alors voir qu'après tous ces efforts, soudain, le scénario me lâchait brutalement que, vlan, allez, mange ça, un mois s'est écoulé, sur le coup, ça m'a vraiment énervée.

Le problème est, de surcroît, que ce quatrième épisode, outre le fait qu'il n'explicite pas la transition clairement avec le précédent, marque aussi un tournant dans la série, au sens où il devient moins question de Hubbell, que de la façon dont Michelle et Fanny s'organisent à présent. L'atmosphère est bien différente, et d'ailleurs ça se sent au changement qui se déroule du côté de Truly aussi. C'est ce qui rend cette histoire de "ça fait un mois" tellement agaçante : oui, il pourrait aussi s'agir d'un mois. Un mois s'écoule quelque part entre le début du 4e épisode et le passage où Michelle se présente au magasin de bricolage.
Sans l'histoire de l'audition, ça serait tout-à-fait plausible, en fait.

Alors que Bunheads propose aussi de très bons moments de rire et/ou d'émotion, que ses dialogues me font toujours pétiller les pupilles, ou qu'elle nous révèle la très juste Julia Goldani-Telles, on pourrait se dire que ce n'est pas ça qui va me bloquer, si tant est que quelque chose doive me bloquer ; ce seraient plutôt ses quelques petites fragilités passagères qui devraient en être l'objet, et encore, vraiment dans le pire des cas. Surtout que j'étais tellement enthousiaste au sujet de la série !
Mais là vraiment, depuis hier soir que j'ai regardé l'épisode, je suis, je sais pas... je me sens comme un parent du PTC qui vient de voir un épisode de Jersey Shore, ou quelque chose dans le genre. Furibarde, vraiment.

Ca va me passer, je pense. Le contraire serait idiot. Mais que voulez-vous, c'est ça quand on tient un showrunner en très haute opinion ; du coup, plus dure est la chute, et plus sévère est le jugement à la moindre bévue.
Rapport ou coïncidence, je n'ai pas encore touché à The Newsroom. Vous aurez fait le lien...

10 juillet 2012

Little tricks

En matière de séries procédurales, on a fait à peu près le tour de toutes les spécificités et de tous les symptômes qui pourraient donner du cachet à un personnage, du trait de caractère extrême aux TOCs, en passant par les traumatismes passés, une addiction ou un handicap physique. L'idée motrice est toujours la même : montrer que ce qui fait le défaut d'une personne dans sa vie sociale et/ou affective constitue également sa plus grande qualité en milieu professionnel.
Et comme les séries, notamment américaines, ont tendance à aimer nous montrer des workaholics, tout cela compose bien évidemment la formule idéale à l'heure où la série d'enquêtes tient encore le haut du pavé. Il faut se dire que ce n'est plus qu'une question de temps maintenant que la franchise des Experts a pris un premier coup, mais en attendant, ça reste la norme. Voire la solution de facilité, selon votre point de vue sur ces séries.

Alors du coup, quand TNT, qui n'est pas vraiment connue pour son sens de l'innovation en matière de fictions, nous annonce une nouvelle série avec une mec qui est schizophrène ET professeur en neurosciences, et qui aide l'une de ses anciennes élèves, aujourd'hui agent du FBI, à résoudre des enquêtes, le plus survolté des téléphages esquisse tout juste un bâillement blasé et retourne à quelque chose de plus captivant, comme par exemple compter les masques à l'effigie de présidents des États-Unis dans des séries de HBO.

Et pourtant je suis bien obligée de reconnaître que le pilote de Perception, je ne l'ai pas laissé dormir sur mon disque dur bien longtemps. Autant je peux parfois laisser reposer un épisode pendant plusieurs semaines, lorsqu'il s'agit d'une série policière, histoire d'attendre le bon moment pour me lancer et éviter toute sensation de rejet violent, autant, Eric McCormack, c'est un véritable laissez-passer pour atterrir en haut de ma liste de priorités. A ce stade, j'en suis même au point où, ayant le choix entre finir cette fichue seconde saison de Game of Thrones (je vous ai raconté combien c'était laborieux, de visionner Game of Thrones, cette saison ? Faites-moi penser à y revenir) et entamer le pilote de Perception, tenez-vous bien, JE CHOISIS PERCEPTION. Et pendant une micro-seconde j'ai même envisagé de me remater un ou deux épisodes de Trust Me, incorrigible que je suis. On peut pas lutter contre le pouvoir d'Eric McCormack.

Perception

De toute évidence j'avais donc un biais positif envers Perception, bien que totalement déraisonné. Heureusement que je regarde tous les pilotes de la création qui me passent à portée de main, sinon on croirait que je me suis mise sur la série pour de mauvaises raisons. Mais euh, bon, on va dire que c'est l'été, je viens de commencer un boulot ultra-crevant, alors j'ai le droit, hein.

Est-ce ce biais qui a joué en faveur du pilote de Perception ? Sans doute un peu.
Mais j'avoue avoir été surprise par la façon de traiter la maladie du personnage principal. C'était touchant et intéressant.
Bien-sûr on n'échappe pas à quelques clichés, notamment dans la façon de mettre en scène la façon dont Daniel Pierce réfléchit, qu'il s'agisse d'anagrames ou simplement de la façon de voir des apparitions qui le renseignent sur des éléments de son subconscient. Le "twist" de fin d'épisode était à ce titre prévisible très tôt dans l'épisode, mais c'est sans gravité parce que ce qui charme, outre l'incroyable regard de McCormack, c'est que ces petits revirements ne constituent pas de véritables retournements de situation voués à nous impressionner et nous surprendre absolument, mais simplement à peindre un portrait plus large du personnage central ; la façon qu'a Daniel de réagir à la toute fin d'épisode, totalement dénuée de surprise ou même de tristesse, est à ce titre éloquente, et fait partie des multiples éléments qui me donnent une grande confiance dans la série pour ne pas me mener en bateau mais simplement m'offrir un personnage intéressant à suivre.
Ce qui serait intéressant également serait de creuser cette histoire de perception, et d'insister sur le point de vue parfois décalé du professeur Pierce. Le passage pendant lequel son ancienne élève, et désormais collègue, saute du deuxième étage d'un immeuble pour appréhender un suspect en fuite, aurait été un très bon exemple de tout ça, pour montrer que parfois, les manifestations de la maladie de Pierce sont un peu plus subtiles qu'une apparition à part entière.

Le plus décevant dans ce pilote relève probablement du traitement des autres personnages, justement, dont la fliquette Kate. C'est bien simple, ils sont tous totalement secondaires, et Kate, avec son visage d'adolescente, ses bonnes manières constantes, et son petit ton de première de la classe, est transparente au plus haut point, face à un homme qui représente tout ce que le cerveau peut être de brouillon, complexe et perturbé. Le contraste pourrait fonctionner mais au lieu de ça, il met en lumière l'absence totale d'aspérité du personnages, tout juste relevé par quelques anecdotes (genre justement quand elle saute du deuxième étage) qui sont supposées nous montrer qu'elle a peut-être plus d'un tour dans sa manche. Rien à faire, elle parait désespérément fade quand même. Et que faut-il dire de l'assistant de Pierce, qui n'a rien du tout d'une Sharon Fleming alors qu'il vit pourtant avec Pierce, et se trouve donc dans la position idéale pour avoir des interactions avec son mentor ! C'est vraiment désespérant, et il faut absolument que ces personnages (ainsi que le recteur de l'université, interprété par Geordi La Forge...) soient développés, sans quoi le déséquilibre pourra vite sembler gonflant (c'est d'ailleurs un problème récurrent dans pas mal de séries procédurales reposant sur cette formule).
En revanche, j'ai été intriguée par le personnage, rencontré très fugacement, de l'aphasique Jimmy, que j'ai trouvé intéressant pour la façon dont, une fois de plus, sa condition lui sert d'atout, et même touchant le temps de sa brève apparition ; il permet en plus aux scénaristes des petits tacles politiques sans lourdeur mais amusants.

D'ailleurs, le premier épisode de Perception est aussi, l'air de rien, l'occasion d'entendre plusieurs personnages évoquer des théories "conspirationnistes". Sans ni les discréditer totalement, ni vraiment leur accorder trop d'importance, la série donne ainsi la parole à une frange de la population américaine qui réagit, peut-être à l'excès, à l'intervention du gouvernement dans leurs affaires (entre autres).
Sans aller jusqu'à soupçonner l'existence de grands complots extra-terrestres (un sens qu'on attribue souvent au terme de conspiration dans les séries, héritage de quelques visionnages de X-Files en trop), il s'agit d'un état d'esprit qui n'a pas souvent droit de citer dans une fiction, et qui n'est pas pris au ridicule ici, pas totalement : il est clair que, si le personnage de Pierce adhère à ces théories, c'est en partie parce que sa schizophrénie favorise ce comportement, mais il partage ces convictions avec d'autres personnes tout-à-fait "normales". On peut donc s'attendre à l'avenir que ses vues sur le gouvernement ou les grandes corporations interviennent régulièrement dans sa façon de considérer les enquêtes, ce qui est certainement le point de vue le plus original pour une série d'enquêtes procédurale depuis un bon bout de temps, plus encore que la schizophrénie elle-même.

Pour ce qui est de l'enquête elle-même, justement, de par le fouillis qui règne dans la cervelle de notre professeur, elle est assez chaotiquement menée, ce qui permet, à défaut d'être réellement impressionné par la tournure des choses, de ne pas avoir l'impression de connaitre tout par coeur, ou au moins, pas dés les premières minutes de l'affaire. On a tant vu de procedurals que chaque minute de sursis avant que ne vienne l'impression d'avoir déjà tout vu cent fois est bonne à prendre. Il ne s'agit pas, là non plus, de hurler au génie et de trouver que Perception révolutionne la face de la télévision, mais ça reste très honnête. Ce n'est évidemment pas le plus captivant dans cet épisode, mais il faut faire avec, et on a vu pire, largement pire.

Alors dans le fond, Perception n'est pas la série qui va vous river à votre écran semaine après semaine, mais elle ne s'en tire pas si mal étant donné les circonstances.
Avec quelques petits trucs bien vus, à défaut d'être ambitieux, elle parvient à vous jouer suffisamment de tours pour que votre cerveau n'ait pas totalement l'impression d'assister encore et toujours à la même série policière, et c'est finalement tout ce qu'on lui demande après plus d'une décennie d'invasion de séries d'enquêtes. Et quand en plus, c'est McCormack le prestidigitateur, eh bien...

9 juillet 2012

Happiness & the City

Il va falloir admettre que le mois de juillet ne tourne pas du tout comme je l'avais prévu ; je voulais faire plein de choses, mais terrassée par mon nouveau boulot, mes plans n'ont cessé de tomber à l'eau. Ce soir, exténuée, et alors que je n'ai pas encore trouvé de sitcom pour prendre la relève de New Girl vu la semaine dernière, j'ai fini par tendre la main et regarder le premier DVD attrapé dans ma telephage-o-thèque.
Eh, j'aurais pu faire pire, après tout.

C'est quoi le nom du film ? Sex & the City, le film
C'est plutôt quel genre ? Seul et fabuleuse ?
Qui on connaît là-dedans ? J'ai cru repérer plusieurs actrices de la série, mais je peux m'être trompée.
Ça date de quand ? 2008
En résumé, de quoi ça parle ? De Carrie, Miranda, Charlotte et Samantha.

SexandtheCity - 1 SexandtheCity - 2 SexandtheCity - 3 SexandtheCity - 4 SexandtheCity - 5

En moins résumé, de quoi ça parle ? Après que Carrie et Big aient eu leur happy end à Paris, le spectre du mariage vient hanter leur couple. Carrie finira-t-elle oui ou non par lui passer la corde au cou, après 10 ans de chassé-croisés ?

Pourquoi c'est bien ? Parce que c'est Sex & the City ! J'avais 18 ans quand j'ai découvert la série, je venais de m'installer à Paris... Impossible d'échapper à son pouvoir d'alors. Oui, aujourd'hui Sex & the City se traine une réputation épouvantable (je vais y revenir), mais à l'époque, c'était énorme, et j'ai suivi ses quatre héroïnes pendant de longues années, vu et revu (à la faveur des multiples rediffusions de Hem6) les épisodes des dizaines de fois, autant vous dire que l'attachement est énorme, et en grande partie irréversible. Et puis, toute question affective mise à part, Sex & the City, ça a longtemps été pour moi synonyme d'une capacité incroyable à jouer avec les émotions, en dépeignant une vraie bande d'amies avec une dynamique tangible, et des histoires qui ont su dépasser le simple cadre léger de son ptich pour offrir quelques grandes scènes pleines de sincérité. Sex & the City, pour moi, ce sera toujours le pouvoir de La douleur exquise, la révélation du cancer de Samantha pendant le mariage de Miranda ou encore cette même Miranda donnant le bain à sa belle-mère, et ça, ça vous cheville le téléphage à sa série à jamais. Et à raison, d'ailleurs, car le film reprend admirablement bien cet ingrédient, à mes yeux fondamental.
Pourquoi c'est pas bien ? Chaque dollar touché en product placement par le film est une raison d'avoir envie de lui cracher au visage (si tant est qu'un film ait un visage... euh, bref). Pas de méprise : le sujet du product placement me fascine. Mais c'est un art qu'il convient de maîtriser au lieu de simplement faire défiler, LITTERALEMENT, des marques pendant une scène. Ou deux. Ou dix. Oui, la série faisait déjà cela, mais sur une demi-heure, ça se remarquait moins (les enjeux étaient peut-être aussi différents de ceux d'un film, probablement). L'absence de finesse dans la façon de déballer, montrer, mentionner les marques a de quoi ulcérer les plus patients d'entre nous, ceux qui, comme moi, sont pourtant assez peu réfractaires à la publicité (je considère que mes yeux paient quelques secondes ce qui sera épargné à mon porte-monnaie ; en général ça me permet de rester stoïque dans la plupart des circonstances publicitaires de ce genre). Mais outre ce déballage constant, indécent, et parfois totalement plaqué, de marques et de signes extérieurs de richesse, Sex & the City, le film prouve aussi qu'on peut avoir écrit pendant 6 ans une série sur les relations amoureuses et n'avoir toujours pas appris comment innover en matière de romance. Le scénario du film suit tous les clichés du genre, avec les lourdeurs insupportables que ça implique, et sans jamais se cacher de suivre une voie toute tracée par envie de se simplifier la vie. Le film se résume, en gros, à une grande partie d'exposition pleine de références pour bien montrer qu'on n'a rien oublié de l'univers de la série, et ensuite, l'habituelle histoire du couple qui se sépare mais que tout voue à revenir ensemble à la fin du film (pas avant). C'est insupportable. Les intrigues secondaires sont assez peu nombreuses (Charlotte étant la grande oubliée) ce qui rend le procédé encore plus irritant. Pour moi qui ai du mal avec les comédies romantiques, bien des passages ont été du plus haut pénible, parce que tous les ingrédients y étaient, jusqu'à l'absurde musique pleine de cordes dedans qui semble être la même de film en film pour montrer qu'il se passe un truc super romantique. C'est en général le moment où je sors mon bazooka mental..

Ah, les joies du cinéma ! Faire un film où toutes les actrices sont botoxée au dernier degré et laisser Sarah Jessica Parker parader avec ses mains de vieille femme, tout ça au nom de la mode, de la beauté et de l'élégance, ça s'appelle avoir le sens de l'ironie..
La réplique qui tue : "The good ones screw you, the bad ones screw you, and the rest don't know how to screw you". Seule Samantha Jones pouvait sortir cette perle.
La scène qui tue :
Attention, des spoilers peuvent se promener dans ce paragraphe si vous n'avez pas vu le premier film. Après avoir été plaquée devant l'autel par Big (qu'est-ce que je disais à propos des clichés), Carrie est embarquée par ses trois éternelles copines pour le Mexique, où elles profitent de la suite initialement réservée pour la lune de miel. Mais Carrie profite très modérément de l'endroit à son arrivée, et passe les premiers jours à dormir. La séquence qui en découle est tout ce que j'aime chez Sex & the City : l'une après l'autre, les filles défilent dans la chambre pour lui indiquer le temps qui passe et tenter de la faire sortir du lit, ne serait-ce que pour manger ; tendre, élégante, et dénuée de toute forme d'humour (ce qui aurait semblé superflu), cette séquence faite de lumière qui s'allume et qui s'éteint, sur le visage marqué d'une femme qui essaye de "sleep the pain away" est touchante au possible. Sa conclusion semble, contre toute attente, fonctionner, même si elle se montre un rien exagérée. Simplement parce que Sex & the City sait, a toujours su, saura toujours (je l'espère, mon équilibre psychologique en dépend) réussir ce genre de séquence.

SexandtheCity - Extrait

Une note ? CagoulesCagoulesCagoules
Quelque part dans ces trois cagoules (sur cinq, comme toujours), il y en a une qui est essentiellement sentimentale, mais ça reste entre nous.
Bilan : Quarante ans, l'âge de raison. Du moins faut-il l'espérer.
Sex & the City n'est pas forcément la série avant-gardiste qu'on voulait qu'elle soit lorsqu'elle est sortie, du moins pas tout-à-fait. Oui, personne n'avait parler de sexe et de relations de cette façon avant elle ; mais la quête du prince charmant reste au centre de sa quête comme elle l'était pour Ally McBeal, autre série féminine en apparence parfaitement antiféministe sur le fond.

Pourtant quelque chose a résolument changé. A quarante ans, les questionnements de nos héroïnes préférées ont glissé : il ne s'agit plus simplement de trouver un partenaire, mais bien de savoir qu'en faire ensuite. Et c'est difficile, pour quiconque a suivi les 6 saisons avec passion et fidélité, de ne pas verser une petite larme émue quand, réunies une fois de plus pour discuter et partager leur ressenti, les filles commencent à parler non plus d'orgasme, mais de bonheur. Au lieu de comparer les relations sexuelles, elle comparent le degré de bonheur, la durée, l'intensité, la fréquence... et je crois que c'est ce qui m'a conquise une fois de plus (même si j'ai toujours eu confiance en la série pour me procurer ce genre de surprises), c'est de découvrir que même si la mode prend une place démesurée, les robes sont insupportablement nombreuses et chères (et moches), les clichés ont la vie dure, mais malgré tout, Sex & the City saisit quelque chose de très humain, et sait pertinemment où elle emmène ses personnages. Même les situations ridicules portent en leur sein le potentiel pour une émotion vraie.
Pendant longtemps, j'avais évité de voir ce film. Je n'étais pas sûre de vouloir m'y frotter après avoir aimé la série pendant les années cruciales de mon entrée dans l'âge adulte, et je n'étais pas certaine non plus qu'après avoir si parfaitement bouclé la boucle en fin de saison 6, nos quatre new-yorkaises préférées pouvaient m'émouvoir.
Mais l'émotion était là. Peut-être pas dans les histoires avec Big, qui m'ont toujours indifférée, et certainement pas avec l'organisation d'un mariage dont, résolument, je n'arriverai jamais à comprendre l'importance pour en arriver à louer une bibliothèque. Mais Sex & the City est un film avec de nombreuses scènes très mélancoliques, proches de la dépression, qui paraissent inattendues, je suppose, si on se repose sur la seule réputation de la série à montrer trois actrices sur quatre avec les tétons à l'air.
Et pour cette raison, maintenant, je suis contente d'avoir vu ce film.

Mais je n'ai pas encore tranché pour le suivant. Rendez-vous dans deux ans, si je garde le rythme.

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8 juillet 2012

Déviation obligatoire

La tentation à laquelle il est impossible de résister : la perspective de découvrir un pilote sur grand écran. Peut-être est-ce une séquelle du complexe des téléphages par rapport aux cinéphiles, mais rien à faire, regarder une série projetée à une salle entière, ça a toujours un charme supplémentaire. Alors, projetée dans le cadre tout en dorures et velours rouge d'un théâtre, vous imaginez bien que ça fait son petit effet.
C'est la raison pour laquelle, en dépit d'un agenda insupportable ces derniers temps, j'ai décidé de me fendre d'un aller-retour express à Fontainebleau histoire d'attraper au vol la projection de Bron/Broen, sachant qu'il m'était proprement impossible de faire mieux cette année. Série Series, rendez-vous est pris pour l'an prochain. Normalement, sans élections présidentielles, je devrais pouvoir m'organiser plus facilement, d'ailleurs.

Avec sous le bras un apprenti téléphage de mes connaissances, sur lequel je reviendrai d'ailleurs dans un post ultérieur car mes opérations de contagion ont repris, je me suis donc aventurée en pleine cambrousse, puisque Fontainebleau est à peu de choses près l'autre bout du monde pour moi qui n'avais encore jamais pris un TER de ma vie, et je suis donc allée voir la coproduction suédoise/danoise ce samedi.

BronBroen-Lights

Je dois dire que ce n'était d'ailleurs pas sans appréhension. Je savais que Livia avait énormément aimé Bron/Broen (qu'au nom de l'exactitude, je me refuse à appeler The Bridge vu que d'une part, ce n'est pas son titre, et qu'on est tous capables d'apprendre un titre original avec un tant soit peu de bonne volonté ; d'autre part, il y a déjà une série canadienne qui s'appelle réellement The Bridge, c'est pas la peine d'entretenir la confusion sans raison valable ; et pour finir, quand les remakes anglophones vont pleuvoir, on sera bien contents d'avoir appris à faire la distinction, comme on la fait pour Forbrydelsen et The Killing), mais étant par réflexe un peu réfractaire aux séries policières et polars de tous poils, je m'étais dit qu'il serait toujours temps d'y revenir plus tard, un jour où je serais bien disposée.
Et une projection dans un théâtre, c'est franchement la meilleure disposition qu'on puisse imaginer.

En tous cas, c'est le genre de cas qui vous fait réaliser à quel point suivre l'actualité d'une série sans la regarder pour autant vous permet tout de même d'en savoir long sur son univers, et je dois dire que j'étais finalement très à l'aise en démarrant ce pilote, où j'avais déjà quelques repères. Quand on est allergique au genre policier, c'est une situation qu'on est bien content de trouver.

Mais en commençant le pilote de Bron/Broen pourtant, des termes tels que "à l'aise" ou "content" sont assez déplacés. Impossible de ne pas immédiatement plonger dans l'ambiance diffusement dérangeante de la découverte de corps au beau milieu (l'exact milieu, en fait) du pont reliant la Suède au Danemark.
Les premières minutes s'égrènent en nous dévoilant progressivement des détails plus sordides et triviaux, tant à propos du crime qu'à propos de l'un de ses enquêteurs, Saga Norén. C'est résolument elle qui a les faveurs du scénariste (Björn Stein, jusque là plutôt réalisateur qu'auteur), puisqu'on nous familiarise très tôt avec sa personnalité, un élément très important de ce pilote mais qui lui permet de prendre le dessus sur son collègue danois Martin Rohde, lequel va se dévoiler plus progressivement et donc nous rester opaque pendant une bonne partie de ce pilote, se montrant uniquement sous le jour du "gentil flic" un peu unidimensionnel.

BronBroen-Saga

Saga Norén est en effet autiste. Je ne l'avais jamais lu en ces termes, mais c'était évident d'emblée. Pas autiste comme un grand nombre de flics qu'on a pu voir à la télévision ces dernières années, d'ailleurs, qui sont en réalité plutôt des caractériels asociaux qu'autre chose, mais une personne donnant tous les signes de l'absence totale de réponse émotionnel à des stimulus pourtant forts, comme peut l'être une intervention urgente au beau milieu de la nuit, la découverte du corps d'une femme politique en vue, le sentiment d'urgence d'une situation de vie ou de mort ou encore les détails ignobles révélés pendant ladite intervention. Il est clair et net que cette femme est inanimée à l'intérieur, qu'elle n'est qu'un cerveau, une tête qui a emmagasiné les règles selon lesquelles travailler, mais pas le fait qu'elle travaille avec des humains. Son absence de réponse la rend très froide d'une part, et pourtant, d'une certaine façon, presque attendrissante, comme si le spectateur se dépêchait de ressentir pour deux ce qui lui échappe à elle.
Par la suite, l'épisode va nous donner une vision plus large du "handicap" de Saga (très franchement, d'un point de vue professionnel, ça semble être plutôt un avantage tant elle se montre efficace et dédiée à son job), nous donnant également des occasions de considérer l'autre personnage, Martin, un homme tout ce qu'il y a de plus normal, doté d'empathie et humain, et ainsi trouver un meilleur équilibre entre ces deux personnages. Mais au départ, c'est réellement Saga qui impressionne.
C'est un choix d'autant plus intéressant que, malgré la fascination certaine de cet épisode inaugural pour la jeune femme, le pilote tranche ici avec une convention communément répandue qui veut qu'en général, on invite le spectateur à entrer dans l'univers de la série aux côtés d'un personnage attirant un minimum la sympathie, parfois même la pitié, et ici on n'a rien de tout cela.

L'univers de Bron/Broen est d'autant plus difficile à intégrer de gaîté de coeur qu'il est également très sombre. Pas simplement parce qu'on commence par la découverte d'un corps, mais bien parce qu'il s'agit là d'une monde qui suinte la désolation.

Le rendu de l'image, qui, comme le montrent les diverses captures de ce post, est baigné dans les ténèbres, participe énormément à cela. Il existe une multitude de séries différentes en Scandinavie, et au moins autant de façons de montrer ces pays nordiques, mais celle-ci se fait forte de matérialiser absolument tous les clichés en matière d'absence de lumière, de nuits qui semblent durer une éternité, et de villes figées dans le froid.

Le crime, découvert en pleine nuit, est en partie le fautif, je suppose : l'enquête commence à l'heure où le reste de la population dort, les rues sont inanimées, même le poste de police est désert. Mais d'une façon générale, tout est pesant dans l'atmosphère de Bron-Broen, dont même les scènes en intérieur, qui pourrait être baignées par la lueur des néons, semblent étouffantes, accentuant l'ambiance claustro de bien des plans.
La conversation entre Saga et Martin, lorsqu'il la visite dans son bureau au commissariat a beau être hilarante, il reste toujours un arrière-goût de malaise parce que tout est plongé dans cette lumière verdâtre qui en réalité n'éclaire pas grand'chose.

BronBroen-Chaise

Le plus surprenant dans le premier épisode de Bron/Broen, c'est probablement la façon dont la série ne s'enquiert pas beaucoup de vous laisser totalement dans le flou.
Ainsi, il sera révélé assez tard dans le pilote que Martin vient de subir une vasectomie : le problème c'est qu'il y a eu plein de scènes au préalable pendant lesquelles cette explication aurait été salvatrice, notamment quand il rentre chez lui auprès de sa femme. Mon petit camarade comme moi-même avions au départ mal interprété sa façon de se frotter l'entrejambe en poussant de gros soupirs, je suis obligée de l'admettre... Ce n'est qu'une information parmi beaucoup d'autres qui ne nous est pas dévoilée, vraisemblablement à dessein, pour nous désorienter autant que nous intriguer, mais qui participe à l'univers dense de la série.

Les intrigues secondaires sont tout-à-fait dans cet esprit.
Sur le pont, alors que la police découvrait le corps, une femme a demandé à Saga de laisser passer l'ambulance de son mari, en attente d'une greffe. Dans la plupart des séries, cette séquence serait juste là de façon anecdotique : soit afin de mettre en évidence la personnalité de Saga (et lancer une mini-intrigue sur la façon dont Saga va déposer une plainte contre Martin pour avoir laissé passer l'ambulance tout de même), soit tout simplement pour accentuer l'impression de chaos en pleine nuit sur le pont. Mais pas du tout. Quelques minutes après que l'ambulance soit passée, nous allons retrouver cette femme, à l'hôpital, faisant tout son possible pour que son mari bénéficie des meilleurs soins possibles. De tout le pilote, il ne sera pas fait allusion à une seule connexion entre cette question très médicale (choix du chirurgien, conditions du patient, etc...) et le corps retrouvé sur le pont, ce qui forcément ne manque pas de laisser le spectateur un peu désemparé, puisqu'il n'est même pas possible de formuler la moindre hypothèse sur les raisons pour lesquelles cette intrigue est présente tout au long du pilote.
C'est d'ailleurs ce qui fait tout le charme des fictions non-américaines, après des années de formatage US : l'effet de surprise ; ça m'a un peu rappelé la bonne surprise que j'avais eue devant le pilote polonais de Naznaczony qui, tout en reprenant des codes bien connus, parvenait à désarçonner le spectateur.
Plus intrigant encore, l'autre axe secondaire de l'épisode s'intéresse à une femme qui est dans une situation critique : sur le point d'être virée de son appartement avec ses deux enfants, et alors que son mari dépense leur argent en boisson et en drogues (il sera également mentionné qu'il bat son épouse comme ses deux enfants), elle fait appel à un étrange homme plein de mystère (Magnus Krepper, toujours aussi magnétique que dans Kommissarie Winter, même avec une moustache de l'impossible toute droit issue des années 70). Il m'a fallu aller sur la fiche Wikipedia pour découvrir que, contrairement à ce que je croyais, cet étrange bonhomme n'est pas du tout l'homme de main d'un réseau de prostitution (ma première hypothèse) ou l'adjoint du propriétaire de l'appartement de cette famille (ma seconde hyposthèse), mais un assistant social. Inutile de dire que la déroute est totale, puisque non seulement on ne voit pas le lien avec l'enquête principale, mais en plus, on ne comprend pas vraiment qui sont les personnages.

BronBroen-Magnus

Pendant tout l'épisode, le cerveau va donc s'efforcer de rattacher artificiellement tout cela, ces quelques éléments qui ne font pas sens (pas encore, faut-il supposer) à la découverte du corps. C'est très perturbant... sans être tout-à-fait désagréable.

Ces seuls éléments, sans même parler de l'enquête elle-même (comparativement, cette dernière serait presque moins intéressante, passé le détail sordide de la mise en scène du corps dont je ne vous révèle pas tout), suffisent à donner envie de revenir.
Bron/Broen n'a pas encore de date de diffusion sur arte, mais il faudra surveiller ça pour n'en pas louper une miette, à n'en pas douter. A choisir, je suis plus intéressée par ce pilote que par celui de Forbrydelsen, pour lequel l'enthousiasme était rapidement tombé et que je n'avais jamais poursuivi. Ici, le personnage de Saga Norén, l'ambiance incroyable de la série, sa réalisation soignée, son excellent cast et sa structure surprenante (ainsi qu'un grand talent pour les scènes d'adrénaline, comme le montre la scène finale du pilote dans la voiture, pendant laquelle j'ai dû me retenir pour hurler) réunissent tous les ingrédients pour scotcher le spectateur à son siège sans jamais lui rendre les choses faciles ; c'est à peu de choses près ce que j'attends d'un polar intéressant, par opposition à toutes les séries policières interchangeables qu'on a l'impression de voir sur les écrans.

D'après la masterclass qui a suivi à Série Series, la seconde saison de Bron/Broen serait actuellement en cours d'écriture (avec une nouvelle affaire), et le début du tournage est prévu pour octobre, tandis qu'un remake serait en projet entre la Grande-Bretagne et la France (bon, ça on le savait), ainsi qu'aux USA. A ce rythme, Bron/Broen va vite faire partie des séries scandinaves incontournables...

7 juillet 2012

Why not regarder Happy Endings

Whynotregarder-HappyEndings

Voici les 10 raisons de ne pas regarder Happy Endings :

1 - Parce qu'une comédie est supposée faire rire (normalement)
2 - Parce que c'est vrai : je suis toujours heureuse quand ça finit
3 - Parce que le générique est moins atroce que celui de New Girl, mais ça ne fait pas tout
4 - Parce que ce n'est pas en décrétant que des personnages sont amis qu'ils le deviennent comme par magie
5 - Parce que rien que le nom de Wayans devrait vous alerter immédiatement sur la gravité de la chose
6 - Parce que je veux que Casey Wilson retourne dans Saturday Night Live, nom d'un chien !
7 - Parce que j'ai besoin de la confirmation qu'Adam Pally est acteur à temps complet, et qu'on le paie pour ça
8 - Parce que quand je vois Eliza Coupe, j'ai l'impression de voir une version "jeune" de Sarah Rafferty dans Suits, et du coup je vais plutôt regarder Suits
9 - Parce que le pilote m'avait tellement laissée indifférente lorsque je l'ai découvert au moment de sa diffusion, que la première fois que j'en ai parlé, c'était hier
10 - Parce que le suicide n'est pas une solution
Libre à vous d'en ajouter, étant bien entendu qu'il n'y en a aucune à retirer.

6 juillet 2012

Hey girl, whatcha doing ?

Alors, expliquez-moi : ça marche comment, l'exorcisme ? Est-ce que je peux faire quelque chose pour ne plus être possédée par ce satané générique ? Par exemple, si je dédie un post entier à sa première saison, New Girl arrêtera-t-elle de me poursuivre, du lever au coucher ?
En tous cas, ça vaut le coup d'essayer.

Voici donc mon bilan de la première saison de New Girl, profitez-en, je ne suis pas certaine de faire des bilans pour beaucoup de comédies cette saison. Sauf si vous m'en demandez d'autres en commentaires, car je suis très sensible aux requêtes dans ce domaine ; à vous de voir.

WhosThatGirl

On aura rarement vu une héroïne principale aussi insupportable que celle que l'on voit en Zooey Deschanel (et pourtant on a quelques échantillons déjà pas piqués des hannetons dans le panorama télévisuel américain ; mais attendez, Next Caller arrive à la rentrée, là, en matière de comédien pas drôle, on devrait avoir de la compétition, de la vraie !), regroupant à la fois les pires clichés, souvent sexistes qui plus est, et les gesticulations les plus improbables pour faire croire qu'on a affaire à une originale, quand il semble assez évident qu'on est en réalité en présence avec une créature à la limite du handicap mental. On dit qu'il vaut mieux faire envie que pitié, eh bien je préférerais presque envier Jess que de la voir faire systématiquement pitié comme ici.
Dans New Girl, en dépit du titre de la série, de son héroïne omniprésente (y compris auditivement), et des frivolités de son insssuportable générique, les véritables héros sont les garçons, dont je pourrais prétendre avoir retenu les noms, mais je n'en ai en réalité mémorisé que deux et que donc, dans un souci d'équité, à partir de maintenant, je vais appeler Riri, Fifi et Loulou. Débrouillez-vous pour suivre.

Riri, Fifi et Loulou vivent donc dans un immense loft plus improbable qu'un appartement de Friends, avec quelque chose comme 712m² au sol et une salle de bains probablement héritée d'un quelconque club de sport qui devait loger dans le bâtiment précédemment.
En fait, bon, déjà les ennuis commencent puisqu'à ce moment-là, c'est un cousin de Loulou qui habite avec Riri et Fifi dans le pilote, à la suite de quoi il est débarqué sous un prétexte presque plausible, afin que Loulou puisse prendre sa place tandis que le cousin réintègre Happy Endings. Ça y est, c'est déjà compliqué ! C'était pourtant pas le but.
Enfin bon, donc là-dessus débarque Jess, seule fille dans un univers viril où on se gratte les couilles de concert devant des matches, et quelle fille en effet !

Jess est une espèce de femme-enfant (mais avec des besoins d'adulte) totalement inadaptée à la société ; au moment du pilote, je pensais qu'elle était supposée être un peu geek et pas très féminine, le prétexte initialement invoqué étant qu'elle sort d'une longue relation de 6 ans (SIX ANS !) et qu'elle ne sait plus draguer. Mais entendons-nous bien, ce n'est pas du tout ça : elle est féminine ; aussi féminine que peut l'être, mettons, Charlotte aux Fraises. C'est-à-dire qu'elle est girly, mais que personne de sain d'esprit n'aurait envie de l'accueillir dans son lit.
Comme je le disais plus haut, son personnage de manic pixie dream girl croisée hipster (un tourne-disques, vraiment ?!) est totalement inopérant dés qu'il s'agit d'être drôle, ce qui est un comble. Qu'il s'agisse de l'attitude, des obsessions musicales ou autres, ou de ses accessoires de l'impossible (crochet, bâton de parole, etc.), tout tombe à plat ; le pire est probablement cette façon de parler qui s'apparente au niveau de langage d'une enfant de 5 ans et qui ne m'a pas arraché le moindre rictus, pas même mâtiné de haine. Il n'y a pas eu la moindre ligne de dialogue en sa faveur, non plus.

Dans tout ça c'est donc aux garçons de nous sauver la mise. Et en l'occurrence, la mission est remplie avec brio.
Un brin trop stéréotypés au départ, ils vont bien vite s'enrichir tant sur le plan des gags (avec quelques running gags savoureux pour Fifi, notamment) que sur celui de l'émotion. En fait de voir leur vie éclairé par ce petit bout de femme-enfant, Riri, Fifi et Loulou ont hérité d'une colocataire irritante, et se mettent à régulièrement organiser la résistance, lui faisant front autant que possible, sans pour autant la brusquer parce qu'on n'est pas des bêtes.
Le revirement est très agréable. Là où chaque fois, Zooey Deschanel se ramène dans une scène, la frimousse enfarinée, dans l'espoir d'avoir l'air pétillante, elle se fait péter les genoux (ou l'équivalent sitcom, la salve de vannes désabusée). A défaut d'être drôle dans le sens espéré, la scène devient donc jubilatoire. Ça m'a d'ailleurs rappelé la dynamique autour de Whitney, où chaque fois que l'héroïne du même déboule avec ses névroses à deux dollars, elle se fait durement rabrouer par son compagnon, qui l'aime malgré ce qu'elle est. C'est exactement le cas ici, puisque Riri, Fifi et Loulou se sont attachés à Jess, mais la préfèrent muette et immobile. Cela nous fait donc un point commun.

NewGirl-Loft

Même si la raison pour laquelle il se sont liés à leur nouvelle colocataire nous échappe totalement, difficile pourtant de nier que Riri, Fifi et Loulou l'ont totalement intégrée dans leur bande, ainsi que la belle Cece dont je pensais au départ qu'elle aurait un rôle bien plus anecdotique, et qui promet quelques unes des plus belles surprises en matière de character development.
Et c'est ainsi que New Girl accomplit en réalité sa plus grande réussite. Il y a les gags qui marchent (merci Fifi, donc), les gags qui ne marchent pas (tout ce qui touche directement à Jess), mais surtout, il y a l'impression de faire rapidement partie d'un petit clan, d'un véritable groupe, vivant, mouvant, dont les limites se redéfinissent régulièrement mais donc l'attachement reste immuable et tangible quoi qu'il arrive. Dans une comédie avec une bande de "copains", il est rare que cet ingrédient soit si bien retranscrit, et vous êtes probablement en train de penser à 712 exemples, là, tout de suite, de sitcoms qui vous affirmaient avec culot que leurs personnages étaient amis et où c'était tellement tenu pour acquis que ça ne se ressentait en réalité jamais. Eh bien, je vais oser la comparaison suprême : depuis Friends, je n'avais pas ressenti cette impression de voir une véritable petite bande de véritables amis, comme j'ai pu la sentir dans New Girl. Les relations entre les cinq personnages sont parfaitement écrites, leurs liens sont palpables, et cela sans jamais verser dans le sirupeux ou dans le graveleux. Ce sont des copains tout-à-fait authentiques, qui se vannent, qui s'engueulent (j'ai absolument adoré le choc de cultures entre Riri et Fifi, illustré dans une escalade épique), qui s'amusent ensemble, qui ne passent pas forcément leur temps à se raconter leurs vies mais qui font mieux : ils la partagent au quotidien. Le plus appréciable, c'est que les garçons se connaissent sur le bout des doigts, et ça, c'est la force vive de la série.
Alors au final, le registre dans lequel New Girl brille le plus, c'est celui de l'émotion. L'épisode de Noël, ou celui pendant lequel, sur la fin de la saison, Riri se découvre une grosseur suspecte, comptent parmi quelques unes des plus belles séquences de la saison.
Pas de la saison de New Girl. De la saison 2011-2012.
Hasard ou coïncidence, ce sont souvent des scènes qui mettent le moins Zooey Deschanel en avant qui réussissent le mieux à nous toucher ; je dis ça comme ça. Ce qui aurait dû être un bête vehicle devient un ensemble show où, moins on la voit, et moins on l'entend, plus la scène est réussie.

Ce n'était peut-être pas l'intention de départ, mais ce qui compte, c'est le résultat !

NewGirl-IllbehomeforXMas

Ne vous enthousiasmez pas trop vite. Je n'ai hélas pas complètement fini ma liste des défauts de la première saison, même si vous savez à présent que ce bilan aura été plus positif qu'espéré.

Il est entendu que, quasiment dés le départ, le but des scénaristes était de dangereusement shipper le couple Jess/Riri, sachant que Loulou était disqualifié d'avance parce que black, et Fifi était un métrosexuel totalement impensable pour elle, mais qu'évidemment, il fallait à tout prix inclure une histoire de ce type, car aucune série avec une héroïne célibataire dans un milieu masculin ne peut s'en priver.
C'est la loi.

New Girl
avait donc intuitivement semé les ingrédients nécessaires très tôt dans la saison, si ce n'est dés le pilote. Cela étant fait, il s'est agi ensuite de jouer à vont-ils-ne-vont-ils-pas régulièrement, notamment en incorporant des éléments perturbateurs, incarnés dans le cas présent par des histoires amoureuses de passage, vouées dés le départ à échouer. Pour Riri, ce sera notamment une avocate, ainsi que son ex avec laquelle il a une longue tradition de relation on/off, tandis que Jess va aller se perdre dans les bras d'un collègue enseignant, puis d'un riche quinquagénaire.
La principale caractéristique de ces personnages est qu'ils forment systématiquement avec nos protagonistes l'exact opposé de ce que serait un couple Jess/Riri : par exemple, l'avocate est un peu rigide, et quand elle laisse tomber le masque, s'avère être un petit peu violente et obsédée par le boulot ; ou le prof est un pleurnicheur pas sexy du tout qui est un peu trop semblable à Jess pour que ça ne fonctionne.

Il y a des passages pendant lesquels on se dit "tiens, Riri est encore en train de se taper des étudiantes de fac, il ne devrait pas utiliser toute cette belle énergie à se rapprocher de Jess, plutôt ?", à un point tel qu'on se demande presque si on n'est pas devenu plus royaliste que le roi (pourtant, Dieu sait que moi, shipper, c'est vraiment pas dans mon ADN). Quand ça devient du sérieux avec l'avocate, on se cale les fesses au fond de son fauteuil en attendant que ça foire, parce que ça ne peut que foirer, c'est l'évidence-même ; tout va bien, la relation est plutôt saine et bien écrite, mais de quoi se moque-t-on, ça ne durera pas. Et puis la rupture intervient et, ah, je me disais bien aussi : nous y revoilà. On va faire ça plusieurs fois pendant la saison, prétexte pour nos deux tourtereaux qui s'ignorent de voir que non seulement ça ne colle pas pour eux, mais qu'en plus ça aurait tendance à rendre l'autre jaloux.
Les jeux vont donc durer assez longtemps à ce rythme d'un pas en avant, deux voire trois pas en arrière. Mais chaque pas en avant confirme qu'on ne s'était pas fait d'idée, et que les scénaristes ont bel et bien l'intention de mettre ces deux-là à la colle.

NewGirl_JessNick

Alors, forcément, quand arrive le moment du final de la saison, on a un peu l'impression qu'on se moque de nous.
Le final avait absolument mis tout en place pour que les choses avancent, ne serait-ce qu'un peu. Qu'au moins une prise de conscience vague se fasse d'un côté ou de l'autre. Quitte à ne pas concrétiser avant une autre saison, les temps sont durs, il faut se garder une poire pour la soif pour négocier le prochain renouvellement. Juste une petite miette. Histoire de nous accrocher un peu.
Mais rien du tout.
D'ailleurs, pire encore, sans même parler du cache-cache amoureux, tout est fait pour que la saison se finisse de façon à ce qu'il n'y ait absolument aucun progrès entre le début de la saison 1 et le début de la saison 2. En gros, en-dehors du pilote, et encore (histoire de savoir pourquoi Jess emménage avec Riri, Fifi et Loulou, et qui est Cece), les spectateurs de la prochaine saison n'auront besoin d'avoir vu aucun épisode de la première, et surtout pas le final qui s'apparente à une ode au statu quo. Ce qui est de mon point de vue d'autant plus désagréable qu'avec l'ambiance d'amitié sincère si soigneusement mise en place, on aurait pu s'attendre à ce qu'on nous titille un peu la fibre émotionnelle pour nous faire revenir.

Donc, pour moi qui déteste autant les histoires de romances, les vont-ils-ne-vont-ils-pas, et toute cette sorte de choses, c'est très agaçant.
Bien-sûr, bien-sûr, je le comprends bien : faire intervenir un couple au sein du loft fragiliserait l'équilibre au sein de la colocation (Cece, parce qu'elle vit à l'extérieur, a droit à un laisser-passer, mais ça ne fonctionne que par son statut d'électron libre), et ferait courir un risque à la série, celui de faire passer Fifi et Loulou au second plan, alors que Fifi est vital du point de vue de l'humour et Loulou est la nécessaire voix de la raison.
Mais en même temps j'ai envie de dire que quand on lance un axe pour sa série, surtout si tôt, on est supposé être préparé à assumer derrière ; j'espère que les têtes pensantes derrière New Girl ont un plan pour l'après, mais surtout, j'espère que l'après, c'est pas dans trois ou quatre saison saisons.

...Ah oui, parce que je vous ai pas dit.
En fait, du coup, je vais sans doute probablement peut-être si ça tombe regarder la saison 2. Vu que j'ai regardé le début de 2 Broke Girls cette année, et que j'ai en général un sitcom par an que je regarde distraitement, je me dis que finalement, je pourrais faire pire que New Girl dans mon planning comédie...

5 juillet 2012

On n'a pas tous les jours 13 ans (heureusement)

La dernière fois que j'avais lu un roman en préambule de son adaptation en série, c'était pour The Slap. L'expérience était intéressante parce que la structure du roman était originale ; en le lisant j'ai aussi découvert combien son ton unique rendant l'adaptation compliquée (notamment de par le parti pris totalement subjectif) et passionnante. Découvrir la série à l'issue de cette (copieuse) lecture était très intéressant, et apportait une dimension supplémentaire au visionnage.
En apprenant l'adaptation prochaine de Puberty Blues, j'ai donc décidé, forte de ce bon souvenir littéraire, de me procurer à nouveau l'original, et de voir ensuite ce que la version télévisée donnera. A ce stade je me tâte également pour savoir si je regarde le film en amont de la diffusion de la série Puberty Blues, également.
Pour quelqu'un qui ne lis presque plus de fiction, ce genre de démarche est plutôt significative, et tout élan de ce type est à encourager ; d'autant que cela permet d'aborder la question de l'adaptation avec un regard relativement neutre, puisque l'attachement avec l'oeuvre originale n'est pas antérieur à l'annonce de l'adaptation, et que la lecture du roman se pratique justement dans le but de voir l'adaptation.
Curieusement, pour une raison que j'ignore, j'ai tendance à faire ce genre de choses uniquement avec des romans/séries australiens pour le moment.

Pourtant, il est une série pour laquelle je résisterai toujours à la tentation de lire l'ouvrage d'origine : Cloudstreet. D'abord parce que voir la série d'abord et lire le roman ensuite me semble plus préjudiciable que dans l'autre sens, et puis, surtout, parce que la mini-série est si parfaite que je veux m'en tenir à ce qu'elle m'a délivré.

PubertyBlues_SneakPeek

Si je vous parle de tout ça, ce n'est pas juste pour vous raconter ma vie, car votre oeil de lynx vous l'aura peut-être indiqué, mais la rubrique du jour est Love Actuality. Je sais, ça fait des lustres, pardon, pardon. Avec un twist, comme vous allez le voir.

Voici en effet, en avant-première, la première bande-annonce de la mini-série Puberty Blues, que Ten diffuse apparemment depuis environ 24 heures. Comme vous le voyez, pour l'instant aucune date de diffusion n'est annoncée, mais étant donné qu'en Australie, on peut découvrir la diffusion d'une série deux ou trois semaines avant son lancement, et rarement avant, et vu le degré de finition qui émane de ce trailer, j'aurais tendance à me tenir prête à dégainer mon disque dur dans les prochaines semaines. Peut-être éventuellement pendant, ou juste après les Jeux Olympiques ? Je dis ça pifométriquement, mais je le sens bien comme ça ; surtout que ce sont Nine et Foxtel qui ont les droits pour les JO, donc il faudra bien des munitions aux autres chaînes pendant ce temps ; enfin on verra.
Bon allez, j'arrête de bavarder, vous avez très envie de cliquer sur le bouton lecture... et je ne vous en blâme pas !

Via if.com.au

Contrairement, toutefois, à mon expérience avec The Slap, au cours de laquelle j'avais évoqué le roman principalement au moment de discuter du pilote, je vais profiter de ce trailer pour vous parler du roman de Puberty Blues.
...Qu'entre parenthèses j'ai eu pour moins de 10€ via Amazon, je dis ça juste comme ça en passant. Si vous avez besoin de lecture cet été, Puberty Blues n'est pas très épais, il est relativement accessible (en-dehors de quelques expressions argotiques australiennes, et de parfois quelques dialogues ponctuels s'approchant plus de la phonétique que d'autre chose, afin de retranscrire les accents de certains surfers), et puis, très franchement, lire des histoires sur le surf pendant l'été, c'est de circonstance. En prime, mon édition avait une préface de Kylie Minogue, faites de cette information ce que vous voulez.

Puberty Blues est un roman écrit à quatre mains par deux adolescentes, Gabrielle Carey et Kathy Lette. L'histoire est écrite à la première personne, et l'héroïne synthétise des anecdotes réelles en un seul personnage, bien qu'à l'occasion sa meilleure amie permette de délivrer des anecdotes complémentaires ou simplement un point de vue différent.
En somme, il ne s'agit pas d'une autobiographie à proprement parler, mais les histoires ont une valeur autobiographique tout de même. Cela se sent d'ailleurs au ton du roman qui lui donne un côté très authentique (mais d'un autre côté on s'était laissés berner par Des cornichons au chocolat), qui retranscrit bien l'état d'esprit des deux héroïnes (et donc des deux auteurs), âgées de 13 ans au moment des faits, c'est-à-dire à la fin des années70.
Ca, c'est le côté théorique.

Dans la pratique, Puberty Blues est un roman assez court, voire même expéditif. Est-ce parce que ses deux héroïnes sont trop jeunes pour prendre du recul ? Est-ce parce qu'elles sont emportées dans le tourbillon de leur nouvelle vie sociale et qu'elles n'ont pas le temps de penser à ce qui leur arrive ? Probablement un peu des deux. Le livre développe en tous cas très peu leur ressenti, faisant apparaitre les évènements comme quelque chose de factuel. Les filles ne portent finalement pas ou peu de jugement sur ce qui leur arrive, leurs émotions, ou même les émotions de leur petit ami. Cela traduit finalement avec beaucoup de finesse, en filigrane, l'impression d'embrigadement qui ressort de leur incorporation dans un gang de surfers.
De petites collégiennes parmi tant d'autres, elles vont en effet se retrouver dans le groupe dominant de leur établissement, et la spirale va les embarquer non seulement dans la consommation d'alcool et de drogues, mais également de sexe pas tout-à-fait consenti.

C'était d'ailleurs ce dernier point qui avait ma plus grande attention : le viol quasiment institutionnalisé des adolescentes fréquentant les groupes de surfers, et celui-là en particulier puisqu'il s'agit du plus important dans le coin, et que les choses y sont forcément plus dures qu'ailleurs (lors de leur escalade de l'échelle sociale, les filles vont d'ailleurs être mises face à des "responsabilités" sexuelles croissantes vis-à-vis des surfers qui les accueillent dans leur groupe). Le système est bien rodé lorsqu'elles arrivent dans le clan, d'ailleurs : chaque surfer a une "petite-amie" attitrée qui lui est recommandée par les autres filles de la bande. La petite-amie reçoit des petits cadeaux, et en échange elle garde les serviettes pendant que les garçons surfent, pourvoit son homme en rafraichissements, et naturellement se tient disponible pour le sexe.
L'idée de "petite-amie" est donc largement pervertie, et c'est d'ailleurs la mise en lumière de cette organisation sexiste qui vaut à Puberty Blues sa classification de roman proto-féministe, puisque la façon dont les héroïnes vont se soumettre, puis quand même, sur la fin, un peu, questionner ce système oppressif, montre bien l'état d'esprit de jeunes filles à qui on n'a pas parlé de féminisme (et certainement pas les parents, présences fantomatiques n'ayant aucune sorte d'importance dans la vie des adolescents qui se comportent comme s'ils étaient de jeunes adultes indépendants), mais qui vont quand même découvrir l'importance de prendre de la distance.
C'est d'ailleurs d'autant plus angoissant que ces gamines (osons le dire) n'ont pas la moindre éducation sexuelle, elle savent tout juste où se trouve leur vagin, et ne parlons même pas de contraception. Les questions de grossesse, d'avortement et de fausse-couche vont donc être traitées en solitaire, avec pour seule aide celle des copines passées par la même chose. Des aveugles guidant des aveugles...

Alors du coup, ce trailer me rappelle mes craintes au sujet de l'adaptation.
C'est la présence de Claudia Karvan (Spirited) qui m'avait fait tiquer, lors de l'annonce du cast de la série. Comment, dans un univers aussi fermé où les adolescents vivent entre eux, et dans un système s'apparentant, à peu de choses près, à des dérives sectaires (le terme de "gang" n'est de ce point de vue-là pas usurpé, même si clairement il n'est pas à entendre de la même façon qu'un gang de motards dans Bikie Wars) sauf que l'océan remplace la religion mais où les rôles de dominants/dominés sont interprétés de façon similaire, peut-on ajouter le point de vue des adultes (pléthoriques, vu la liste des acteurs) ? Au vu de cette bande-annonce, on a l'impression que cela nuit un peu à l'ambiance, que cela lui apporte un côté "gentillet".
Et cela nuit aussi à la conclusion, mais ne comptez pas sur moi pour vous la donner, tant c'est probablement la pièce-maîtresse du roman. Dans toute sa simplicité naïve, et sans porter le moindre jugement, sa démonstration est cinglante et je crains que l'intervention parentale ne la diminue.

Pour le reste, il faut quand même bien admettre que ce premier aperçu a de quoi allécher. Le point de vue adopté ("certaines choses changent... d'autres ne changent pas") pour raconter l'histoire est assez naturel, mais permet à la fois de justifier la remise dans le contexte des années 70 (s'adressant ainsi aux parents), et d'intéresser le public adolescent d'aujourd'hui. La présence des parents dans la série peut d'ailleurs se voir comme un mode d'emploi pour ces mêmes parents, je suppose.
On peut également se réjouir, si ce n'était encore fait, de la présence d'Ashleigh Cummings, ravissante petite Dot dans Miss Fisher's Murder Mysteries (et également à l'affiche de Tomorrow when the war began, dans des rôles assez similaires d'ingénue), dont vous aurez reconnu, à n'en pas douter, le minois pendant cette bande-annonce qui lui fait la part belle.

Il est à espérer que la série n'atténuera pas le propos du livre comme avait pu, apparemment, le faire le film. Puberty Blues avait réussi à dépeindre de véritables horreurs sans en rajouter dans le sensationnel (c'est tout à son honneur) et sans porter de jugement, laissant le spectateur se faire sa propre opinion voire même en adoptant un point de vue dénué du moindre point de vue moral, simplement en écoutant ces anecdotes qui, répétons-le encore une fois pour la route, sont avérées, et traduisent ce que des centaines ou peut-être des milliers de jeunes filles ont connu, à une époque similaire, au sein de gangs de surfers.
Mes espoirs pour Puberty Blues, la mini-série, sont donc réels, il y a du potentiel pour raconter quelque chose d'intéressant en se débarrassant des tics, généralement américains (et parfois japonais, quand un dorama se risque par là) qui consistent à apporter immédiatement une sanction morale aux évènements. J'espère que la production n'a pas foiré son coup. On le saura bien vite.

Bon, je papote, je papote, mais vous, il vous inspire quoi ce trailer ?

PS : incidemment, Kathy Lette a plus tard écrit Mad Cows, dans l'adaptation ciné duquel Anna Friel a joué. Le monde est petit. On en revient toujours aux mêmes...

4 juillet 2012

Not a joke

Il est peu de circonstances dans lesquelles j'apprécie de partager un visionnage d'inédit avec de la compagnie (par contre, revoir quelque chose que j'ai déjà vu, pas de problème). Votre voisin de canapé a toujours tendance, quel qu'il soit, à faire toute sortes de choses horripilantes, comme grignoter, parler, voire même, dans les moments les plus critiques, respirer, ce qui convenons-en est du plus haut agaçant, et anti-immersif au possible.
Mais en compagnie d'amis téléphages, sur Twitter, l'expérience s'avère au contraire délicieuse : les réactions, envoyées par écrit, sont parfaitement silencieuses, et si une scène devient particulièrement captivante et requiert votre indivisible attention, il suffit de mettre la video en plein écran pour être totalement à l'aise, et le tour est joué.
C'est ce système qui, précisément, a fait du visionnage de la première saison de Smash à la fois un moment de communion collective vécue dans la bonne humeur, et en même temps, une expérience propice à une découverte au calme, comme je les aime.
Bonus non-négligeable, tweeter en temps réel et réagir aux tweets des autres permet aussi bien de prendre un recul salvateur en cours de route que d'entretenir l'enthousiasme à l'issue d'un épisode.
Aurais-je aimé Smash sans l'effet de groupe ? Il est permis de se poser la question, et la réponse est : oui. Mais probablement pas au même degré, tant l'excitation renvoyée par notre petit groupe a permis à plusieurs reprises d'entretenir la motivation même pendant les quelques faiblesses de cette première saison, afin de pleinement profiter de ses qualités.

Pour toutes ces raisons, je tiens à remercier le #SmashEnsemble pour les soirées passées devant Smash. Ex aequo avec l'équipe du Ozmarathon, ces initiatives donnent tout leur sens aux possibilités de la social TV (et ce, sans s'encombrer d'impératifs horaires imposés par une chaîne, ce qui à mes yeux est un immense plus).

Alors que ce soir, les spectateurs de TFHein peuvent découvrir les débuts de la série, permettez-moi donc de chaleureusement remercier ceux avec lequels j'ai découvert la première saison de Smash, et avec lesquels j'ai hâte de découvrir la deuxième, et qui ont permis de faire de ces quelques mois une expérience téléphagiques à part, et inoubliables.
And now, on with the show.
Par contre évidemment, attention, quelques spoilers se baladent après l'image ; en matière de bilan de saison c'est un peu inévitable.

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La première saison de Smash nous permet donc d'assister à la façon dont une comédie musicale retraçant la vie de Marilyn Monroe voit le jour. Le sujet est, d'emblée, traité avec sérieux : il ne s'agit pas pour les créateurs de la comédie musicale de se ruer sur cette idée parce qu'elle semble juteuse, mais avant tout parce que le personnage les fascine.
Ces créateurs sont Julia et Tom, deux amis qui ont une longue histoire de collaboration derrière eux, et qui à la base, sont supposés faire une pause dans leur travail commun, le temps que Julia et son mari adoptent un enfant. Mais quand le nouvel assistant de Tom, Ellis, leur soumet l'idée, tout de suite, le cortège de mythes et de fantasmes autour de la blonde créature pique leur créativité, et les voilà lancés dans le projet.

Les premiers épisodes, s'ils mettent en place la quasi-totalité des personnages de la saison, vont ainsi faire la part belle au duo. Tom, le compositeur, et Julia, l'auteur, forment en effet un duo qui connait le métier, et qui donc sait très bien quel est le processus qui les attend avant que le spectacle n'aboutisse, et qui en même temps, de part cette histoire commune, permet de conserver énormément de fraîcheur. Ainsi en position de force pendant une bonne partie du processus de décision autour de la comédie musicale, Tom et Julia vont s'imposer comme des personnages fondamentaux de Smash, alors que bien souvent les scénaristes de la série font de leur mieux pour attirer notre attention ailleurs...

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Et notamment sur les deux chanteuses en lice pour le rôle principal de la comédie musicale, Karen et Ivy. Au lieu, comme pour le tandem précédent, de nous offrir une dynamique basée sur l'entente entre les personnages (et où l'on finit par les préférer ensemble que séparément), ici l'idée est de les mettre en concurrence au maximum, et se diviser les spectateurs en team Karen ou team Ivy, ce qui pendant la majeure partie de la saison va être totalement justifié (et donne d'ailleurs du piment aux échanges de tweets ; d'après mon expérience, les deux "teams" ont d'ailleurs pris la concurrence avec plus de bonne humeur que de véritable mauvais esprit, échappant au clivage trop profond qu'on peut avoir dans certaines fictions opposant deux personnages et donc deux catégories de spectateurs, et ici, Smash a toujours su fédérer ceux-ci autour de la série même quand ils n'étaient pas d'accord sur la chanteuse à retenir, ce qui me semble être un témoignage de son sens de l'équilibre).
Karen et Ivy sont naturellement le jour et la nuit. Ca a tendance à jouer à l'extrême en défaveur de l'une ou de l'autre, selon vos préférences. Ainsi, Karen est la provinciale typique, fraîchement débarquée à NYC et qui n'a jamais vraiment eu de travail à Broadway ; naïve, innocente, et limite parfois sainte-nitouche, elle a un gentil petit-ami avec qui elle vit dans un coquet appartement où tout va bien dans le meilleur des mondes. A l'inverse, Ivy est une chanteuse et danseuse qui depuis 10 ans use son fond de culotte sur les chaises des salles d'attente de casting, et qui n'a jamais eu son moment de gloire (si tant est qu'une telle chose soit amenée à se produire, ce qui n'est évidemment pas garanti) ; seule dans la grande ville, elle vit dans un petit studio d'où elle appelle sa mère qui a un don bien à elle pour la rabaisser sans s'en apercevoir. Pas étonnant que dans cette compétition où elle a probablement le plus à gagner, Ivy passe parfois pour une arriviste ; mais dans toute industrie du spectacle, cela semblerait plutôt être une qualité, si le spectateur n'était pas conditionné depuis toujours pour préférer les jeunes premières virginales.

La saison va énormément jouer sur cette opposition. A la clé, il y a le personnage de Marilyn, un rôle qui à n'en pas douter façonnera leur carrière, et l'enjeu est forcément immense.
Le premier problème de la série est peut-être justement de se focaliser autant sur cette compétition, toute significative qu'elle puisse être. Intéressante dans les premiers temps, elle prend une tournure un poil répétitive ; il y a des moments pendant lesquels on a envie de trancher et d'en finir, même si les façons de trancher sont potentiellement multiples (soit Karen a le rôle, soit Ivy a le rôle, soit elles ont toutes les deux le rôle et incarnent chacune une période de la vie de Marilyn différente...). Pire encore, une autre concurrente est introduite ensuite : la production décide de plutôt engager une star, Rebecca, pour ce rôle. Est-elle à la hauteur ? On se pose les mêmes questions, à nouveau, qu'au début de la compétition entre Karen et Ivy. L'une d'entre elles va d'ailleurs lui servir de doublure, dans ce cas laquelle ? On ne s'en sort pas. Et tout ça pour en arriver au stade où finalement, attention ultime spoiler, Rebecca va quitter la production, et le rôle de Monroe va revenir à l'une de nos deux chanteuses, et il faut à nouveau décider laquelle. Mais argh, quoi !
Cette façon de systématiquement tout ramener à la lutte pour l'obtention du rôle de Marilyn a tendance à court-circuiter la majeure partie du processus créatif autour de la comédie musicale. J'ai pris un pied insensé à voir comment Julia et Tom concevaient leur spectacle (de façon non-linéaire, ils conçoivent d'abord les numéros et décident ensuite de l'histoire ; parfois des numéros se rajoutent et semblent composer un patchwork de chansons étrange sans fil rouge, c'est impressionnant parce qu'on se doute qu'au final, puisqu'il s'agit d'un biopic, tout prendra du sens), j'ai aimé certains détails, sur les répétitions, la conception de la mise en scène ou des décors. Mais au final, on a l'impression que ces parties-là sont plus faciles que d'embaucher le personnage central. Difficile de nier l'importance de cette décision de casting, naturellement, mais peut-être que cela simplifie à l'excès les problématiques d'une production aussi complexe et colossale quand même.

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Il faut pourtant admettre que, même quand cette tendance à se focaliser sur l'opposition Karen/Ivy a tendance à se faire longuette, elle n'est jamais mauvaise. C'est presque un miracle, et d'autres séries s'y seraient cassé les dents à n'en pas douter.
Le mérite en revient principalement à l'excellente écriture des personnages de la série, et leur toute aussi formidable interprétation. Smash bénéficie d'un cast pléthorique, et pourtant chaque personnage se montre sympathique et agréable (à deux exceptions près, Ellis et le fils de Julia, mais sur la quantité de personnages, c'est presque négligeable). Tom, Julia, Karen, Ivy, mais aussi Eileen leur productrice, Derek le metteur en scène, les stars potentielles du show, les danseurs du chorus (dont j'aurais bien aimé voir le recrutement, mais c'est une déformation), les amis des uns, les conjoints des autres, les guests de passage et le cousin de la boulangère, on aime tout le monde. Impossible de faire autrement. C'en est même fascinant parce que les personnages intégrés à la série pour jouer les "méchants", les insupportables, dans le genre de Derek par exemple, finissent toujours par se montrer profondément attachant.
C'est un luxe incroyable de voir tous ces personnages s'attirer votre affection. Certains parce qu'ils sont profondément humains, à l'instar de Julia qu'il est impossible de détester (même quand elle trompe son mari), et d'autres parce qu'ils sont incroyablement complexes, telle Eileen qui, derrière sa poigne de fer, cache une femme qui ne se cherche pas d'excuse mais qui ne cache pas non plus systématiquement ses fragilités. Et le plus appréciables est probablement que les personnages féminins autant que les personnages masculins sont tous denses de la même façon, tous très riches.

A certains moments, c'est ce qui fait la différence entre une série bêtement soapesque, et parfois Smash court un peu ce risque en se focalisant, outre la compétition entre ses deux héroïnes, sur les histoires personnelles des uns et des autres à l'excès, se mettant parfois en terrain gleessant, et une excellente série dramatique pleine de coeur, un peu comme ce que peut offrir une série comme Parenthood, mettons ; l'ornière est savamment évitée, bien que frôlée de justesse à plusieurs reprise, parce que Smash possède parfaitement ses personnages et refuse d'en faire des prétextes ou des caricatures.
Et c'est sans doute le deuxième problème de Smash. Alors que les textes des chansons de la comédie musicale sont un trésor de finesse et de références intelligentes et bien tournées, parfois, les intrigues sont un peu simplistes. On se prend à rêver que les scénaristes de Smash aient la plume de Julia, le talent pour capturer de nombreuses informations enrichissantes sur les personnages sans pour autant y passer des heures, le sens de la formule qui permette d'éviter des situations un peu cliché, et le coeur nécessaire pour ne pas les juger quand il est parfois un peu trop évident qu'on veut nous faire penser quelque chose de négatif d'un personnage qui s'est "mal comporté". Que le livret de la comédie musicale (qui n'est pas encore Bombshell) soit infiniment plus abouti que le scénario de la série me laisse penser que ce n'est pas la même personne qui s'en est chargé, ou bien que c'est le plus incroyable travail de character development que j'ai jamais vu (en l'occurrence en faveur uniquement de Julia).

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Alors évidemment, difficile de parler de Smash sans parler de ses numéros musicaux, qu'ils soient liés à la création de Bombshell ou non.

Ce sera d'ailleurs mon troisième et dernier reproche : un peu trop souvent, Smash décrète que, pour remplir ses obligations de série musicale, elle va sortir du contexte de la comédie musicale dont elle est supposée suivre la formation, et nous sort de son chapeau des chansons non-inédites (bon, encore...) dans un contexte n'ayant rien à voir. En dépit de l'excellence de ces numéros, et certains sont absolument inoubliables à l'instar de Cheers (Drink to that) par exemple, leur arrivée totalement impromptue dans les épisodes leur donne plus les apparences d'un prétexte, quand il faudrait leur conférer une aura bien différente pour leur rendre la gloire qu'ils méritent.
Le cas le plus WTF de la saison sera probablement le numéro bollywoodien, parfaitement mené, doté d'une ambiance généreuse, mettant en scène des personnages de la série peu habitués à être dans une séquence chantée à l'ordinaire, mais dans une séquence sans queue ni tête, n'apportant rien ni à la scène qui la précède, ni à aucune de celles qui suit. C'est vraiment dommage car le numéro est réussi, mais impossible de s'ôter de la tête l'impression très désagréable que les scénaristes l'ont un peu balancée là sans trop se creuser. Encore une fois, la writers' room de Smash aurait bien besoin d'une Julia.

Reste qu'au fur et à mesure de la saison, Smash révèle des chansons inédites de toute beauté.
Bombshell s'annonce, c'est certain, comme un immense spectacle, au point de faire regretter au spectateur de ne pas pouvoir y assister, la série nous présentant les numéros dans le désordre, parfois dans le cadre de répétitions, parfois avec une mise en scène aboutie, et mon plus grand souhait à ce jour concernant la production de Smash est qu'on nous fournisse, à un moment, une version intégrale de Bombshell, tant tout y est alléchant. Un DVD complémentaire ne serait pas du luxe et j'espère vraiment que les têtes pensantes chez NBC ne laisseront pas passer cette extraordinaire opportunité (la captation est malheureusement loin d'être systématique à Broadway...).
Quel que soit leur degré de raffinement au moment de nous les dévoiler, ces numéros sont toujours géniaux, donc. Qu'il s'agisse de la tendresse du duo entre Marilyn et Joe DiMaggio ("Mr. & Mrs Smith"), de la charismatique transformation de Norma Jean en Marilyn ("20th Century Fox Mambo"), de l'hilarant moment de légèreté ("Don't say yes until I'm finished"), de la puissance d'un solo de DiMaggio ("On Lexington and 52nd Street"), de l'emblématique thème d'ouverture de Bombshell ("Let me be your star") ou du grandiose final ("Don't forget me"), Smash réussit son coup à chaque fois.

Capable de mettre en scène de façon sublime comme drôle l'histoire de son héroïne, la comédie musicale sur Marilyn Monroe regorge de détails passionnants. Quiconque lit ne serait-ce que la biographie de la belle blonde sur Wikipedia découvrira dans les paroles de la plupart de ces numéros une foule de références, montrant bien que chez Smash, on n'a pas pris l'histoire de Marilyn comme un simple prétexte, mais bien qu'on possède le sujet jusqu'au bout des ongles.

Mais outre les lyrics des chansons, et leur effet imparable pour retourner dans les années 50, au coeur de l'existence de Monroe, les numéros de Smash ont aussi énormément de mérite parce qu'ils tirent parfaitement partie des talents en présence, et en premier lieu Megan Hilty, impressionnante à chaque seconde, et Katharine McPhee, qui prouve qu'on peut venir de la télé réalité et avoir de l'avenir. Ensemble ou séparément, elles sont impeccables, et trouvent le moyen d'apporter un angle différent sur l'histoire racontée, mais jamais moindre que la voisine. Si version DVD il y a, idéalement, elle propose une version Karen et une version Ivy pour la version intégrale de Bombshell... musicalement, il est trop difficile de choisir entre les deux. Je crois d'ailleurs que les spectateurs divisés entre la team Karen et la team Ivy tomberont d'accord sur le fait que toutes les deux ont un grand talent, et que ce n'est pas à ce niveau que se passe la compétition.

Smash-AngeDechu

Au terme de ses 15 premiers épisodes, Smash a, c'est certain, quelques défauts (trois d'après mon compteur) mais une foule de qualités, allant de la sincérité de ses personnages à son talent pour capturer les réalités de l'univers de Broadway (rendant incroyablement bien l'univers si particulier de la fameuse avenue), en passant par un don incroyable pour créer une oeuvre musicale dans l'oeuvre musicale dont les qualités n'ont rien d'imaginaire.
Dotée, qui plus est, d'un cast irréprochable (personne n'a ici volé sa place, et il n'y a pas le moindre flagrant délit de belle gueule incapable), avec des interprétations parfaites comme celles d'Anjelica Huston, Debra Messing ou encore Megan Hilty, la série a peut-être une marge de progression devant elle, mais elle a tous les éléments pour offrir un résultat déjà bien solide en cette première saison.

Corriger les quelques errances de cette première quinzaine d'épisodes peut la conduire à rien moins que l'excellence, j'en suis convaincue.
Alors, je serai au rendez-vous l'an prochain pour la deuxième saison avec le plus grand des plaisirs. #SmashEnsemble, j'espère.

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